Dupark: Que c'est bon, on s'y croirait.

Commérage.

Rhôôô là là, ils se sont connus sur Oniris, tu te rends compte, un site où y a même pas d'images. Pourtant Roméo, avec sa belle gueule, il aurait cartonné. Au lieu de ça, il se ramasse une Juliette, je te dis pas, trois fois son âge et son bagou. Et paf, rencard ! Juliette hésite, elle sent que le minot est jeune. Mais bien salope, tu vas pas me croire, elle arrive en jupe fendue jusque là. Si, j'te dis. Rhôôô là là, t'aurais dû voir les gens comment ils étaient scotchés ! Roméo, tu le connais, sensible et tout, il en est tout émotionné ; C'est juste quand elle lui tend la main qu'elle le reconnaît. Son Roméo chéri à elle ! Devenu acteur porno. Ah, t'aurais vu, elle crie à la foule « Bon sang ne saurait mentir ! »

Bon, je les trouve tous bien, mais le commentaire en EL...

Vous êtes trop forts !!! Quelles inspirations !

Alors là, le "commenté en EL"

Blasé

Juliette a tellement hésité devant son dressing. Finalement c’est dans son jean porte-bonheur retroussé sur ses baskets préférés qu’elle ira au rendez-vous. Un rien l’habille. Elle a conscience de son élégance innée.

Il l’amuse le petit. Il se dit poète parce qu’il balance de la prose en rime sur le site et croit lui apprendre le néo classique. Elle le laisse dire et espère passer un bon moment. Il a les mots faciles et agréables. Et puis c'est lui qui invite.

Elle est habituée aux silences et aux regards qu’elle provoque dès qu’elle entre quelque part. Sourire aux lèvres, allure féline elle se dirige vers cette belle silhouette hésitante qui s’approche d’elle main tendue, et manque s’étrangler en le reconnaissant.

Son Roméo ! Celui qu’elle a nourri au sein, veillé les nuits de fièvres. Celui qui a claqué la porte de la maison familiale sous des prétextes à la con un soir d’automne pour aller faire du Rocco Siffredi de banlieue.

Psychodramatique

Roméo est arrivé en avance, il est anxieux et le décor de cette brasserie huppée ne le rassure pas, il est mal à l’aise. Pourquoi a-t-il fallu qu’il accepte ce rendez-vous, il pressent que cela va être compliqué. Il s’en veut, voudrait partir, se lever simplement et quitter cet endroit, mais une force inconnue le maintient sur son siège. Il se promet de ne plus jamais chater, elle va certainement le reconnaître car même s’il n’a pas tourné beaucoup il est connu, quel galère poète et acteur porno… La voilà qui s’avance vers lui, belle, sûre d’elle, et c’est lui qui la reconnaît. Il se jette dans ses bras : « Maman », elle le repousse, le regarde effarée, décidément il lui pourrira toujours la vie : gâcher son premier rendez-vous onirien !

- La seule chose sur laquelle elle a sauté ces dix dernières années c’est sur son joystick alors quand ce mec rencontré sur un site d’écriture lui a MP qu’il se pâmait devant ses textes et qu’il voulait la rencontrer, elle a fait ni une ni deux.
- Et alors… ?
- L’a mis sa robe rouge fendue jusqu’au nombril.
- Et aloors…?
- Avec pour seuls accessoires ses escarpins Gucchi. « Seuls accessoires » tu piges ? Tu le vois le tableau ?
- Et aloors... ?
- Restaurant chic, serveurs à l’équerre, la classe quoi…
- Et alooors ?
- Roméo s’est levé dès qu’elle a franchi le seuil.
- Et aloooors ?
- D’abord elle a reconnu l’acteur du porno qu’elle mate tous les soirs avant de s’endormir histoire de se faire du bien, tu vois…
-Et alôôôôôôrs ?
- Elle a mis ses lunettes et elle a reconnu Fabien. Son fils. Celui qu’était parti aux USA pour devenir une star.

#85

Idée de Raymond Queneau

Précis

Roméo, 1m80, 77 kg, sans travail depuis 3 ans et 8 mois, bavarde avec Juliette, 60 ans, 60-90-60, sur www.oniris.be. Quand Roméo fait 10 phrases, elle en écrit 50. Ils se donnent rendez-vous à la Coupole, à 1km et 400m de chez elle, à 18:57. Elle choisit, pour s'y rendre, des Louboutin taille 38, talons de 100 mm et une jupe en 46, fendue sur 50 cm, côté gauche. Là, 54 clients se retournent sur elle. Roméo tremble à 55 Hz, et atteint sa température de fusion de 40 °C quand elle s'avance, 20 cm par 20 cm. Il soulève son bras de 35° pour lui serrer la main. Juliette reconnait celui qu'elle a porté pendant 9 mois. Pour devenir acteur porno, il a quitté la maison depuis 4 mois 8 jours 6 heures et 24 s. 25. 26. 27. 28…

Va ... ... ...chez les grecs.

L'aède, du doux nom de Roméo, envoyait par les ondes des missives. Le miracle était qu'elle les recevait. Qui pouvait croire un tel prodige ? Ils choisirent de fuir l'agora, trop politisée, pour se retrouver dans le quartier de la Plaka. La toge bien mise (quoique malicieusement décentrée…) ils se retrouvèrent autour d'un verre d'ouzo. Les Héllènes ne regardaient plus qu'elle, les dieux ce soir se taisaient. Sauf Oniris, veillant. La déesse internetesse peut-être avait une vengeance en cours...car lorsque Julietta apparut, la foule cria d'horreur ! C'est elle ! C'est elle ! la mère qui voulait un fils de son propre fils. La volonté des dieux se réalisait.

Brève de comptoir

« Ouais le jeune, un poète, Roméo, avait mis le grappin, par internet, sur une femme. Et quelle femme! De l’expérience comme on dit, le gars donc, il lui donne rendez-vous dans un troquet mais genre standing. La femme, son pseudo c’est Juliette, s’habille genre « je chope ce soir », talons hauts, robe fendue, bref tout le tralala, le gars il en mène pas large il lui a raconté qu’i serait une sorte d’artiste, en fait i fait queutard pour la télé, genre. Le gars est impatient, i sait pas sur quoi i va tomber : i s’attend au pire. Bin l’est pas déçu, j’te l’donne en mille : c’est sa mère qui s’pointe ! La gueule qui tiraient tous les deux… »