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CC#3 - 24/06/2012 - Faites la queue !
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Énoncé


Produire une histoire de 2.000 caractères mini (et 2.500 maxi) où les mots "queue(s)" ou "queux" se retrouvent au moins trois fois. Par contre, on ne doit y retrouver aucune proposition relative avec des QUE, LEQUEL, LESQUELS(LES), QUEL(LE) ou toute relative avec QUE que ce soit au singulier ou au

pluriel.

Dixit MonsieurF : et moi, Grand Seigneur, j'autorise aussi les poèmes de minimum 500 et maximum 2500, n'est-ce pas que je suis gentil !





Liste des participants


1. Socque
2. Pepito
3. Arielle
4. MonsieurF
5. Kerosene
6. Palimpseste
7. Misumena











1 - Socque



Les queues de casserole encombrent ce fier maître-
Queux. Il aimerait tant avoir les deux mains libres !
Car dans son cœur broyé un grand, fol désir vibre,
De se vouer à l’art et tout envoyer paître.

En lieu d’assiettes où se donnent au paraître
Trois grains de riz pompeux, deux radis pour les fibres,
Il rêve d’un mur nu où il peindrait le Tibre
– Pas moins –, depuis sa source où on l’admire naître…

Bordel à queue ! (Notre homme exprime volontiers
Des vigueurs mal perçues de nobles sur grand pied.)
J’ai besoin de grandeur, d’étreindre l’univers !

Soit, mais il doit d’abord maîtriser la technique.
Apprenti de nouveau (sans le travail, bernique !),
Il devra se soumettre au joug lourd et sévère.


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2 - Pepito



- Personnellement, ces contraintes et ces contrastes m’ennuient au plus haut point, lors de ces diners mondains. Nous, papotant oppressées et corsetées, les hommes, se dandinant ridicules dans leurs fracs....
- Mais ce soir, au moins, les demi langoustes étaient délicieuses, servies avec classe par un maître-cuisinier directement à la poêle. Un bel objet, d’ailleurs, au long manche assemblé par un tenon en trapèze.
- En fait, ma chère, j’observai plutôt l’homme, sa prestance, son catogan mutin. Plutôt impressionnée par la longueur d’un autre manche apparent sous la ceinture. On devinait un couteau amoureusement passé à la pierre à aiguiser.
- Le dessert, aussi, simple mais bon, des cerises cueillies entièrement à la main, même si c’est difficile. Franchement une belle réception, jusqu’à ces roses aux tiges sans épines, devant couter bon nombre de pétioles de cerises.
- Passons au salon, voulez-vous, suivons l’affluence. L’un après l’autre, enfin ! Regardez ce goujat me double et se colle juste devant moi, j’aimerai pouvoir l’envoyer à la fin de la file tant il y a foule.
- Il s’en va maintenant penaud, l’égo en berne. Nous avons le temps, écoutez plutôt le piano d’eau jouer. Au fait, ou est donc passé notre bel homme ?
- Justement, à parler du loup, j’en vois apparaitre un bout.
- C’est lui, avec une canne de billard frétillante à la main ? Je n’aimerai pas en prendre un coup !
- Allons ma chère, en êtes-vous si sure. Personnellement, j’adore tirer le diable par là ou je peux. Pour avoir testé un fouet à neuf lanières, j’avoue y avoir pris gout. Malheureusement, par ailleurs, son propriétaire était un peu justement équipé, un tire-bouchon, une petite lime ronde, notre relation tournait en rond.
- C’est une impression, ma chère, ou nos propos n’ont ni queue ni tête ?
- Si fait, mon amie, je vous accorde le manque de tête. Pour le reste…


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3 - Arielle



Dimanche aux puces


Devait avoir de la bouteille,
culottée comme un vieux prophète,
elle n'avait ni queue ni tête
et dormait sur ses deux oreilles

parmi d'antiques appareils
ayant depuis bien des lurettes
servi de cirque aux galipettes
des araignées qui nous effrayent.

Elle échoua sur un trottoir,
savoura la fin de l'histoire
entre les bras d'un maître-queux

tirant le diable par la queue
en quête de marmite pour
mitonner ses topinambours.


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4 - MonsieurF



Salut, moi c’est Kévin Martin, je suis doublure de films pornographiques et je vais me foutre en l’air.

Je suis aussi eunuque- impuissant.
Une perle rare donc pour les studios de doublage ! Pensez donc, un mec qui peut mater des heures de brouettes togolaises, de zizi panpan, de la main de ma sœur dans la culotte du zouave, sans éprouver l’envie d’aller jouer à 5 contre 1 au bout de dix minutes.

J’ai juste soif, très soif, au bout de deux heures de « Oh oui tu la sens ma grosse queue, hein tu la sens ?! ».
Pensez donc comme je me sens idiot à déclamer ce genre de fadaises avec au fond de la gorge un chatouillis.

La perte de mes testicules je la dois à Marie Sabrot. On avait dix ans tous les deux, et on jouait dans le fenil du père Marion. Elle m’a poussé pour jouer, manque de bol y’avait une fourche. Et re-manque de bol mes joyeuses y ont laissé leur peau. Comme disait mon abruti de père à la suite de l’accident :
« Ca lui a couté la peau des couilles, c’t’affaire ! » Et il partait de son gros rire gras de paysan berrichon. Bon lui ça lui a couté la vie à vrai dire ce genre d’humour. Pensez donc, les hivers sont froids par chez nous et glisser sur du verglas quand on a bu un canon de trop c’est pas rare.
A la suite du décès du paternel, ma mère étant en hôpital psychiatrique, j’ai été faire la queue à Pôle Emploi. Mais comme qualification, j’avais : fils maudit et eunuque -impuissant.

Pas de quoi réclamer un poste de Maître Queux ! ou même un poste tout court.

Pourtant la dame du Pôle m’a trouvé ce boulot de doubleur.
Par un concours de circonstances où le hasard n’a surement aucune part, je me suis retrouvé au resto avec elle.

Oui. Je suis châtré, mais beau garçon.
La vie est une pute je vous dis.

Me voilà en charmante compagnie à réfléchir à comment m’esquiver sans faire trop de dégâts à mon dossier. Et soudain, entre le fromage et le bavarois, Carole m’explique le topo : ils ont un job de doubleur de films pornographiques à pourvoir, personne n’en veut rapport à l’intitulé, mais moi avec mon CV vierge comme le Christ dix minutes après sa naissance, peut- être faudrait y penser non ?
Je saute (sans jeu de mot) sur l’occasion et lui promet d’être le Clint Eastwood de la doublure : teigneux, têtu, opiniâtre. Une sorte de Mélliés des temps modernes.

Malheureusement j’avais un peu surestimé le contenu des films. Pensez donc, un gars comme moi, ça n’a pas trop regardé du DVD porno pirate pendant son adolescence ! Ca aurait été un peu comme donner des gants à un double amputé des mains : du gâchis.

A la rigueur j’avais plus d’extase à contempler Farinelli.

Bref, je me retrouve dans ce job idiot, sans avenir. Avec l’impossibilité d’espérer passer de l’autre côté de la caméra en plus !

La vie est une chienne je vous dis.

Reste la mort.


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5 - Kerosene



Des heures à faire la queue, mais pourquoi ? C'est vrai ça, il nous veulent quoi au fond ? Pas un seul d'entre nous ne sait, ni ne comprend, ma tête à couper. Oh, les plus futés d'entre nous ont bien des idées, des suppositions, j'en suis sûr, mais la vraie raison, on ne la connaît pas. J'ai beau me creuser la cervelle, des bonnes raisons, je n'en vois pas la queue d'une.

Au commencement, on menait une petite vie bien tranquille, sans histoire et sans jamais se poser de questions. On avait, avouons-le, le goût du confort et de la facilité. Puis des inconnus avec des badines et des mines à faire peur ont débarqué. Ils nous ont braillé dessus et distribué des coups pour nous faire bouger et prendre un couloir, étroit, bordé de barrières menant à un wagon où nous attendaient un peu de paille au sol et pas assez d'espace pour tous.

Ensuite, il y a eu le voyage : des heures debout, pressés les uns contre les autres dans une demi-obscurité, sans boire ni manger, avec juste un peu d'air frais à renifler par les claires-voies. Longtemps. Loin. Certains, plus fragiles ou fatigués, se sont trouvés mal, mais on n'y pouvait rien, à part attendre.

Enfin, le train s'est arrêté et la porte à glissière a coulissé bruyamment. Dehors, il faisait nuit et l'air était frais, mais il y planait une odeur déplaisante, une odeur de malheur et de mort. On nous a poussés sans ménagements dans une cour bourbeuse où l'attente a recommencé. Au moins, nous étions à l'air libre.

J'ai compté une journée et une nuit encore après notre descente du train. A quelques centaines de mètres de nous, se dresse un grand bâtiment gris d'où s'élèvent des bruit étranges, des chocs assourdis, des claquements métalliques, et parfois des cris à vous glacer le sang.

Enfin on bouge ! Toujours les brutes, les cris et les coups, mais on avance. On se rapproche du bâtiment gris. Nous voilà dans un autre enclos, où un type armé d'une lance à eau nous asperge copieusement. Après ces heures d'attente et d'inquiétude, le ruissellement de l'eau tiède sur moi m'apporte un bien-être inattendu. Certes, il y a toujours cette peur sourde lovée au fond de mes tripes, mais je me sens détendu, presque serein. Une porte s'est ouverte devant nous. Je prends la file et j'avance lentement, le long du couloir, comme dans un rêve.

La queue du bœuf de devant me cingle le museau et je me réveille enfin. Maintenant, les yeux grands ouverts, je sais. Mais c'est trop tard : son étourdisseur électrique à la main, le tueur est devant moi !


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6 - Palimpseste



Les jeunes de ma cité ont souvent des fins de vie en queue de poisson. Pour me l'éviter, je suis devenu porte-flingue dans une bande.

Au début, William, l'auto-proclamé chef, avait appelé la troupe "les Shakespeare", rapport à un journaliste de sa connaissance. William nous a raconté quelques uns de ses documentaires, notamment celui où les gars du quartier du Mont Tagut se fritent avec les K-poulets. Y'a eu des morts. Fasciné par ces protagonistes, je buvais les paroles de William. Je me suis fait une promesse: quand je serai grand, j'aurai un cœur dur comme le gars Tybald. J'ai débuté ainsi, avec William et ses anecdotes.

J'ai gravi les échelons de la bande. Dans le même temps, nos ambitions ont grandi aussi. On a finit par contrôler la moitié de la ville. Prostitution, drogue, jeux, protections... on est des multi-spécialistes, allant même jusqu'à proposer aux cinémas d'empêcher les resquilleurs dans les queues.

Un jour, William m'a nommé "chef des prêts usuraires".

Il a de la suite dans les idées: William a monté notre business plan en s'inspirant d'un autre journaleux, Dante. Il m'adjoint également une encaisseuse pleine d’acné, Ludivine Comédon. William est clair: à chaque manquement sur l'échéancier de règlement, il faut rappeler le gars à notre bon souvenir par là où il a pêché. Il appelle ça un contrapasso, un retournement de la fortune. Des exemples ? Si un type est acteur porno et ne vide plus ses bourses pour la nôtre, on le pend une heure ou deux par la queue. Et si quelqu'un veut nous poursuivre et faire des histoires, on lui donne des coups de martin-net. Au moins, ça calme pour les règlements suivants!

Mon premier client était coiffeur et promettait de rembourser en rasages gratis. Après avoir tondu des tas de clients et rasé tous les gars de la bande, il a estimé la coupe pleine. Au lieu de nous le dire gentiment, il a refusé de peigner pour rien la queue de cheval de William. Alors on lui a enlevé sa couronne dentaire à coup de burin.

Aujourd'hui, on s'occupe d'un caviste endetté pour monter sa boutique de ventes de bouteilles d'eaux minérales. Il devait nous refiler son grisbi mais a "oublié". Pire: il est complètement ratissé et parle de se rebiffer. Selon lui, sa faillite est due à l'ouverture d'une grande surface "Âme-less", sponsorisée par William au bout de la rue.

Argument irrecevable: il va donc mourir par là où il a pêché. Ayant refusé de nous donner ses espèces pour ses bouteilles, on va l'asperger d'acide jusqu'à le liquéfier.

Comme a dit Williams en apprenant le contrapasso prévu, "il va faire l'aqueux"...


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7 - Misumena



J'ai entendu le bruit des freins, et par réflexe, j'ai appuyé sur les miens. Le gars venait de me doubler : il a fait un tête à queue sous mes yeux avant de s'arrêter net, le capot encastré dans le talus. Les phares de sa voiture avaient balayé le bas-côté gauche, puis m'avaient ébloui et avaient fini leur danse en éclairant les fourrés, à ma droite.
J'ai alors vu briller dans les buissons, d'un éclat flamboyant, une paire d'yeux rouges.
Tu es assis à ton volant, sanglé par ta ceinture bloquée à crevée. Devant toi, une voiture fume, tu devines les mouvements de son conducteur, le geste familier du téléphone porté à l'oreille. Tu aimerais sortir, lui parler, lui demander s'il va bien. Mais comme la mise en abyme d'un cauchemar ophtalmologique, tu gardes sur la rétine l'image d'un regard en colère, empreint d'une folie nocturne. Alors, tu verrouilles les portières et tu restes assis, à écouter le souffle de ton pouls battre à tes oreilles, à attendre l'extinction progressive de la peur.
Car j'ai eu peur.
Petit à petit, je me calme. Devant, le gars ne bouge plus. Je me risque à klaxonner et à lui faire des appels de phare. Il se retourne, me fait signe. Il mime « viens », je mime « non », vigoureusement. Il brandit son portable, puis lève les mains et étend les doigts : 0 - 6 - 2 - 0... son numéro. OK de ma part. Je l'appelle.
Sa diction est pâteuse, il hoquète, on peut calculer à l'oreille son taux d'alcoolémie, considérable. Lui, il a vu un loup-garou, le genre garanti sur facture, 100% pur monstre, de la tête à la queue. Il refuse de sortir de sa voiture. Tous les voyants sont au rouge, pas question de démarrer non plus. Je lui propose d'appeler un dépanneur. Il refuse : le gars se ferait bouffer. Moi, les minutes passant, je suis persuadé d'avoir vu un chien. Je salue le type insensible aux arguments raisonnables, mets le contact et rentre chez moi.

Ça fait les gros titres le lendemain : massacre sur la Nationale. Après mon départ, des gens se sont arrêtés pour aider le poivrot : l'enquête dira combien ils étaient, pour le moment, on n'a pas reconstitué les corps, déchiquetés et disséminés le long d'un parcours sans queue ni tête dans les fourrés.
J'ai appelé la police. Je suis convié au poste le soir même pour un entretien. J'enfile mon manteau, ouvre la porte d'entrée de mon pavillon. Un homme me sourit.
« Salut. Vous me reconnaissez ?, dit-il »
Une lame brille dans sa main. J'avais raison. C'était un chien.


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Contribution du : 17/09/2012 22:36
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