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À propos de "Générations"
Organiris
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Je remercie tous ceux qui ont laissé un commentaire sur ce poème, ainsi que tous ceux qui, par leur vote, lui ont permis de figurer aussi bien au palmarès du concours "le travail".

Le dernier commentaire déposé par mimich m'amène à préciser quelques points et donner quelques clés de lecture. Mimich a raison dans son propos, la condition ouvrière n'était pas meilleure "avant" que maintenant, de très loin s'en faut. Peut-être pourrait-on même estimer par ailleurs que cette condition, en progès constant depuis le 19e siècle, a fini de s'améliorer dans le milieu des années 1990 et recommence de nos jours à se dégrader, mais c'est un débat qui dépasse très largement notre cadre et qui n'est pas celui que je souhaitais.

Le propos de "Générations" n'est pas celui des conditions de travail mais celui du sens qu'a le travail pour l'humanité. Mimich dit que le vocabulaire utilisé est un "dictionnaire analogique subversif". Il n'a pas tort dès lors que, encore une fois, il se place du point de vue, disons "social" : tous les termes tournent autour de l'homme, de ses relations avec son entourage, son environnement, la société dans laquelle il évolue et dans laquelle, pendant les deux premières générations, il trouve incontestablement une place qu'il semble perdre dans la troisième. Tout le vocabulaire utilisé parle en fait de métier, de valeurs et de place dans la société, et c'est bien entendu totalement délibéré.

Et c'est exactement ce que cherche à dire le poème. Le travail n'est pas un simple moyen de subsistance. Il l'est bien entendu, c'est une telle évidence que dire le contraire serait une absurdité. Mais il est aussi le moyen qu'a l'homme de s'insérer dans la société, d'y trouver une place et un rôle. La fonction du travail n'est pas seulement économique, elle est aussi sociétale et socialisante (au sens "intégration dans la société").

J'ai toujours été frappé par ces gens qu'on interroge à l'occasion d'une fermeture d'usine, d'une faillite ou d'une délocalisation, qui sont souvent des ouvriers de base, occupant des tâches taylorisées, et qui sont pourtant fiers de ce qu'ils font et perdus à l'idée de ne pas pouvoir continuer à le faire. La phrase qui revient souvent est "c'était pas facile, mais c'est notre métier, c'est notre vie.".

C'est cette notion de "métier" qui est une des clés de "Générations", car la maîtrise d'un métier, d'un savoir-faire, est le Graal de l'ouvrier. N'oublions pas que les Compagnons du Tour de France n'acquièrent ce titre qu'après avoir réalisé un "chef d'œuvre". Ne trouvez-vous pas étrange – et merveilleux – que ce terme issu de l'art soit appliqué au fruit du travail ? Moi, si, mais je trouve aussi cela absolument juste.

J'ai vu, dans des usines que j'ai fréquenté, des pères expliquer à leur fils qui allait les remplacer sur la chaîne l'importance des gestes justes, du respect des cadences. Je me souviens de cet homme, un Espagnol, qui expliquait qu'il ne fallait pas bloquer la chaîne non pas parce que ça ralentissait la production, mais parce que ça obligeait les autres à attendre et ça les empêchait de faire correctement leur travail. Et il avait terminé en disant à son fils, avec son accent inimitable "tou dois lé respecter, pacé qué ils font leur trabail, eux tambien !". Sur une chaîne complètement définie par l'OST, c'est ce jour-là que j'ai compris que le travail, même en miettes selon l'expression de Friedman, pour ces gens, n'était pas un simple paramètre économique.

Cet héritage inter-générations est symbolisée par la présentation des strophes en cascade : chacune transmet à l'autre quelque chose, un savoir-faire, un vrai trésor synonyme d'avenir (et le terme est volontairement manipulé, déformé, mis dans une perspective qui s'inverse avant de devenir un véritable problème). Elle ne transmet pas que cela, elle passe aussi des valeurs, de travail, de respect, de famille. Ringardes ? Peut-être. Mais ce sont les leurs, et cela a été celles de la classe ouvrière pendant très, très longtemps et, à bien y regarder, elles sont simples et ancrées dans le bon sens, elles ne sont pas si stupides et subversives que cela. Toutes les générations ont toujours eu un futur. Sauf la dernière.

Contrairement à la lecture que fait mimich, il est question de "variable d'ajustement". Mais le terme n'est pas dit, parce que le travail est vu ici du point de vue des travailleurs, pour qui il est une réalité, pas une variable économique ou productive. Le "facteur travail" est un concept d'économiste, qui sépare l'entreprise en trois grands facteurs (travail, capital et facteurs de production). A partir de là, on peut reprendre toutes les discussions sur la répartition de la valeur ajoutée, sur la prédominance du facteur capital voulue par le reagan-thatcherisme des années 95, etc. etc. etc.

Ce n'était justement pas ce que je voulais exprimer. Je voulais me limiter à la perception du travail par les travailleurs eux-mêmes, par rapport à la vie sociale, à la société : celui qui travaille, qui a une activité productive quelle qu'elle soit, y trouve une place. Celui qui est privé de travail n'a plus de place dans cette société.

N'avez-vous jamais vu un père de famille ayant perdu son travail pour d'excellentes raisons (économiques, évidemment) quitter tous les matins son appartement avec une serviette pleine de papiers quelconques, juste pour que les voisins ne se rendent pas compte qu'il était au chômage ? Pour ne pas perdre sa place aux yeux des autres, c'est-à-dire sa place dans la société ? Moi, si.

C'est à ces travailleurs-là, à leur conception du travail, que j'ai pensé, et à qui j'ai voulu rendre hommage.


Donc, mimich, en réalité ce texte, qui semble "angélique" et présenter une vision mimi tout plein du travail, est bien plus subversif qu'il n'y parait. Il pose un problème qui dépasse très largement le cadre du travail : devant la disparition progressive des "petits métiers" artisanaux, de proximité, qui étaient la règle dans les siècles précédents, et leur remplacement par l'entreprise tout azimuths, quelle est la place de celle-ci ? Son rôle est-il d'être une machine à profits, ou a-t-elle une responsabilité sociétale majeure, celle d'être le lieu de socialisation des hommes par le travail ?

Bien évidemment, la réponse est différente selon celui qui la donne... Et bien évidemment se pose après – mais après seulement – la question des conditions de travail.


Voilà les quelques clés que je voulais vous donner, et quelques éléments du débat très intéressant que mimich me permet d'ouvrir et que je me ferai un plaisir de poursuivre.

Contribution du : 30/11/2008 18:22
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Re : À propos de "Générations"
Maître des vers sereins
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Pour lire Générations, cliquez sur le mot.

C'est intéressant ce que tu dis sur le travail comme métier, avec cette image du "chef d'oeuvre" des compagnons dans l'artisanat.

Mais personne n'a dit que le poème donnait une image angélique du travail parmi les commentateurs, être privé de travail, vivre sa destructuration comme semble l'imager "Générations", rassemble un peu ceux qui entrent et ceux qui sortent de son marché. C'est un thème très contemporain, il y a près de chez moi des affichettes vantant l'adhésion à la CFDT avec comme slogan "pour plus de respect au travail" (ce n'est pas une citation mot pour mot) c'est une période d'élection de délégués en ce moment...

ça rejoint il me semble ce que tu dis à propos du métier, avec le salaire mensuel, il existe une notion de respect qui renvoit à ces chef d'oeuvre que tu cites en exemple, je n'en vois pas de plus récent pour illustrer la question, c'est pas ringard.

Ce n'est pas la retraite qui devait répondre au thème de ton poème, un revenu pour pallier aux entraves du passage d'un savoir faire d'une génération à l'autre. L'exemple que tu donnes : un père et son fils dans la même entreprise avec l'un qui explique le travail à la chaine à l'autre, c'est presque surréaliste.

Contribution du : 01/12/2008 21:43
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Un Fleuve
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Re : À propos de "Générations"
Chevalier d'Oniris
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J'ai relevé deux mots dans ce poème qui à mon sens illustrent bien le rapport au travail "dignité" "fierté". Je sors d'un milieu ouvrier et qui plus est syndicaliste. Un ouvrier sans travail est un ouvrier désespéré. J'ai rencontré des mineurs de fond, des ouvriers du bâtiment fiers de leur travail au combien pénible (on ne parle pas de chef d'oeuvre).
On pourrait multiplier les exemples à l'infini... j'ai quarante trois ans d'industrie derrière moi et quant on m'a renvoyé chez moi à 57 ans, j'étais un peu déboussolé... mon savoir faire ne servait plus à rien.

Contribution du : 02/12/2008 07:28
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"Tout le monde tombe, et nous atterrissons tous quelque part"
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Re : À propos de "Générations"
Organiris
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Merci, David, d'avoir rajouté le lien vers le texte, je l'avais oublié. C'est dire peut-être que la discussion qui s'ouvre me semble plus importante que le texte en lui-même.

En effet, le terme d'"angélique" que j'ai utilisé est inapproprié, tu as raison de me le faire remarquer. En fait, mimich a lu le poème comme traitant de la "condition ouvrière", et me reproche d'en donner cette image de "c'était mieux avant". C'est cette approche que je souhaitais préciser et rectifier. Le poème ne traite pas du problème de la condition ouvrière et/ou des conditions de travail, mais du rapport entre l'homme et le travail.

Pounon a mis le doigt sur les deux mots essentiels de tout le texte : dignité et fierté, mots que j'ai soigneusement caché au milieu des autres, pour qu'ils paraissent au mieux anodins et au plus mieux... incongrus, alors que justement, ils ne le sont pas.

Mais peut-être, pour "sentir" ces deux mots, fallait-il quelqu'un qui a connu cette impression. Et j'exprime un immense merci envers pounon d'apporter ainsi son témoignage personnel, qui rejoint complètement mon propos.

Merci en tout cas à tous les deux d'alimenter cette discussion, qui porte sur un sujet que je pense personnellement être au centre d'un débat de société essentiel.

Contribution du : 02/12/2008 09:23
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Re : À propos de "Générations"
Maître Pattie l'Orthophage
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Je relève ce que dit un commentaire (Notrac) : que le texte n'est pas ponctué.
Je n'y connais pas grand-chose en poésie ni en ponctuation de la poésie, mais sur Oniris, j'ai appris quelques petits trucs (mais c'est pas du sûr, ce n'est que mon hypothèse).

Pour moi, le poème est ponctué par sa mise en espace, et ce que Notrac appelle le point d'interrogation n'est pas une ponctuation symbolique (la ponctuation symbolique, c'est celle avec les petits signes :,;?.!), c'est juste un point avec une forme bizarre pour finir le point d'interrogation dessiné par les mots.

Bref : ce poème est ponctué, à mon avis.

Contribution du : 17/04/2010 11:08
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Re : À propos de "Générations"
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Oui Pattie, je suis le premier à dire qu'un texte n'a pas besoin de ponctuation pour être rythmé... Donc vous prêchez sur les terres d'un convaincu.
Il se trouve que je ne considère pas vraiment l'écrit "Générations" comme un poème mais plutôt comme une réflexion, cela n'engage que moi.
De plus, il aurait été ridicule, j'en conviens, de ponctuer une litanie des substantifs qui ne forment aucune phrase.

Cordialement.

Contribution du : 17/04/2010 12:45
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Re : À propos de "Générations"
Maître Pattie l'Orthophage
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Je ne mets pas en cause votre opinion sur le texte ni sur la poésie en général. J'explique juste ce que j'ai compris de la ponctuation d'un poème. Elle peut être constituée des signes traditionnels identifiées comme "la ponctuation", ou bien être, comme ici et comme dans vos textes, une mise en espace des mots. Dans vos textes, vous revenez à la ligne aux bons endroits, ce qui rend l'idée claire même sans signes de ponctuation. Ici, c'est un peu plus farfelu, comme mise en espace, mais ça relève de la même option : prendre l'espace pour ponctuation.
Donc je ne dis pas qu'il n'est pas ponctué. Je dis qu'il EST ponctué, tout comme vos textes SONT ponctués. Mais pas par des signes.

Contribution du : 17/04/2010 12:51
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Re : À propos de "Générations"
Visiteur 
Très bien Pattie, je comprends.
Bon, parfois je ponctue mes textes "visiblement" aussi, ça m'arrive.
Mon commentaire, ma réflexion sur la non-ponctuation était un peu espiègle, c'est vrai. Car après avoir lu les forums de l'auteur à ce sujet, et même si Léo reconnait la "ponctuation par l'espace", il me semblait que ce dernier n'en était pas pour autant un fervent défenseur. C'est tout.
J'ai eu comme l'impression d'un "faites ce que je dis mais pas ce que je fais".

Voilou, sur ce je me tais.

Contribution du : 17/04/2010 13:03
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Re : À propos de "Générations"
Organiris
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notrac a écrit :
Très bien Pattie, je comprends.
Bon, parfois je ponctue mes textes "visiblement" aussi, ça m'arrive.
Mon commentaire, ma réflexion sur la non-ponctuation était un peu espiègle, c'est vrai. Car après avoir lu les forums de l'auteur à ce sujet, et même si Léo reconnait la "ponctuation par l'espace", il me semblait que ce dernier n'en était pas pour autant un fervent défenseur.

J'ai dû vraiment mal m'exprimer...

Ceci dit, vous pouvez très bien ne pas apprécier ce poème, ce n'est pas interdit, bien au contraire ! Enfin, si ça peut servir à relancer le débat sur la ponctuation, ça me va très bien, comme remarque.

Contribution du : 17/04/2010 13:07
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Re : À propos de "Générations"
Maître Pattie l'Orthophage
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notrac a écrit :
Voilou, sur ce je me tais.


N'en faites pas une habitude, hein. C'est en soulevant le sujet plusieurs fois par des voies différentes qu'on finit par se comprendre, sur un forum, je crois. Sans cette partie du commentaire, Léo aurait continué à croire qu'il s'exprimait clairement, et non pas en klingon (private joke : quand je parcours la Centrale et que je lis les avis du comité sur les poèmes, il me semble lire du klingon, parfois).

Contribution du : 17/04/2010 13:39
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