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Policier/Noir/Thriller
Bidis : Disparition inquiétante [concours]
 Publié le 02/06/08  -  14 commentaires  -  21770 caractères  -  51 lectures    Autres textes du même auteur

Le veuvage difficile d'une femme qui se voit soudainement plus riche qu'elle ne se l'imaginait.


Disparition inquiétante [concours]


Ce texte est une participation au concours nº 5 : La Trame Imposée (informations sur ce concours).



Mars 2008

- Allo… Suis-je bien chez le docteur Danièle Delaroche ?

- Mais oui, Madame. Bonjour

- Ici Claudine Charad. Bon… bonjour, Mad… Docteur. Me serait-il possible d’avoir un rendez-vous pour le mois d’avril prochain, s’il vous plaît…

- Tout à fait possible. Je vais vous passer ma secrétaire pour fixer une date. Mais auparavant, j’aimerais savoir, c’est la première fois que vous consultez un psychologue ou un psychiatre ?

- Oui, Mad… Oui Doc… Docteur.

- Bien, bien, je vois… Eh bien, je vous remercie de votre confiance. Pour fixer le rendez-vous, je vous passe ma secrétaire… À bientôt, donc, Madame Charad.

- Au… au rev… à bientôt, Docteur.


***


Quatre ans auparavant…


EXTRAITS DU JOURNAL DE CLAUDINE CHARAD


Samedi 8 mai 2004

Rachid est mort. On l’a enterré hier.

Je me suis installée, devant un verre de porto, à la terrasse du café les « Deux pigeons ». Nous y venions ensemble, mon mari et moi, presque tous les jours en fin d’après-midi, prendre l’apéritif… Puis nous rentrions chez nous, en flânant le long du fleuve, et nous dînions, dans le jardin souvent quand il faisait beau, avant de regarder un film à la télévision. Mon Dieu, c’est fini, fini… Il me faut me raccrocher à quelque chose.

Ce journal…

Je vais reprendre nos habitudes et, puisque je ne peux plus lui parler, lui sourire, glisser mon bras sous le sien, je vais venir le soir écrire mes états d’âme, ici dans ce café.

Cahier, Cahier, aide-moi. Je vais mal. Je vais si mal…


20 mai 2004

J’ai fait faire un agrandissement de la plus belle photo que j’ai de Rachid et l’ai placée sur ma table de nuit.

Je lui parle le soir, je lui raconte ma journée et lui demande conseil. J’ai l’impression qu’il me répond et c’est un réconfort…


12 juin 2004

Il paraît que je suis très riche. Les trois maisons qui me viennent de Papa ont pris une plus-value énorme et j’avais aussi des actions qui ont énormément grimpé. C’était Rachid qui s’occupait de tout, et nous vivions plutôt chichement, je ne me doutais absolument pas… Papa avait voulu que l’on se marie sous le régime de la séparation, de sorte que tout est à moi mais j’ai tout de même réalisé la moitié des actions et donné 25.000 euros à chacun des enfants. Ils veulent que je vende aussi une des maisons, mais je ne sais pas…

Si je pouvais demander conseil à quelqu’un…


13 juillet 2004

Rachid, dis-moi… Aide-moi… Je leur ai demandé de me laisser en paix, mais ils insistent. Que dois-je faire ?

Que j’attende de voir ce qu’ils font avec leurs sous… ? Oui, je vais faire cela. Moi j’ai bien assez avec ce qui me revient de ta pension, les revenus des actions et les loyers des maisons… Je ne veux pas toucher au capital.


20 novembre 2004

Rachid, je vais t’avouer, j’ai envie de me faire faire un lifting… Je sais que tu n’aurais pas approuvé. Mais je n’ai que 52 ans et j’ai toujours fait tant d’efforts pour garder une silhouette parfaite… J’ai bien le droit de me vouloir le visage le plus jeune possible… J’aimais tellement quand on me faisait des compliments, quand les hommes se retournaient sur mon passage… C’est drôle, je te dis des choses que je ne t’aurais jamais confessées, de ton vivant… Tu ne peux plus me gronder maintenant…


3 février 2005

Comme je te disais hier, je ne sais plus que faire avec Yolande. Elle devient infernale.

Tu trouvais qu’elle était trop jolie et déplorais ce pouvoir que donne la beauté… Mais, tu sais, maintenant c’est comme si elle trouvait un malin plaisir à s’enlaidir. Sais-tu qu’elle a inventé de se teindre les cheveux en bleu ! Ses beaux cheveux pareils aux tiens, elle va les abîmer… Elle est devenue « gothique » paraît-il, quelle horreur ! Elle se met du vernis noir sur les ongles, des lentilles vert pâle dans les yeux et arbore un petit diamant sur l’aile du nez… Et ce qu’elle s’habille mal… !

Je crois qu’elle dépense tout son argent. Voilà qu’elle parle de s’acheter une Mercedes, une occasion dit-elle, mais c’est tout de même de la folie pure. Encore heureux qu’elle n’ait pas gardé le projet d’envoyer des dons pour la catastrophe du tsunami… D’études, plus question bien entendu, elle vient de s’inscrire au chômage… Après la période d’attente, et tant qu’elle vivra sous mon toit, elle ne touchera que 350 euros par mois. Quand elle aura dépensé tous ses sous, que va-t-elle faire avec une somme aussi dérisoire ? Mais qu’y puis-je ? À 19 ans, on est majeur de nos jours…

Je ne vois presque plus Xavier. Ses affaires l’occupent terriblement… Il s’est associé avec deux autres avocats et leur cabinet fonctionne très bien. Tout semble donc aller au mieux pour lui. Il ne me conseille plus du tout de vendre une maison… En fait, il s’inquiétait seulement pour moi, il voulait que je mène la vie la plus confortable possible. Mais il voit que je me débrouille très bien et cela l’a rassuré. C’est un garçon tellement gentil…


2 août 2006

Je reviens d’Ibiza. Je suis toute bronzée.

Il y a longtemps que je n’ai plus écrit dans ce journal.

Yolande et moi, nous n’arrêtons pas de nous disputer. Bien entendu, elle a dilapidé à peu près tout son capital et ne cesse de me demander de l’argent. C’est un harcèlement de tous les jours pour que je vende encore des actions et une maison, mais je reste sur mes positions. Elle parle de s’en aller quelquefois ou alors, menace de se suicider…

Heureusement que Xavier est là, mon Dieu !

Il a encore un peu grossi. Mais quand je lui parle régime, il se fâche… C’est un beau garçon, mais il n’est pas assez grand de taille, ce surpoids ne lui va pas du tout…


15 novembre 2006

Yolande est partie…

Elle m’avait dit qu’elle disparaîtrait un jour, qu’elle irait s’enfoncer dans la forêt et mourir là, au pied d’un arbre, en s’ouvrant les veines du poignet.

Xavier me dit que c’est de la comédie et qu’on va la voir revenir d’un jour à l’autre.

J’ai l’impression que Rachid, sur la photographie, me regarde avec reproche… Je n’ose même plus lui parler comme avant. Lui qui était si fier de sa fille, qui l’aimait tellement… ! Mais c’est pourtant lui qui m’avait conseillé… Qu’est-ce que je raconte ? Il était déjà mort, il ne pouvait donc pas… Je mélange tout…

Mon Dieu, mon Dieu, qu’ai-je fait ? Tout cela pour de l’argent.


30 novembre 2006

Je suis allée déposer une demande de recherche dans l’intérêt des familles auprès du commissariat. Xavier m’a dit de ne pas spécifier que Yolande a menacé de se suicider. Cela engendrerait une autre procédure et ma fille pourrait avoir de gros problèmes dans ce cas.

J’ai peur…


23 décembre 2006

Déjà deux ans et demi que Rachid nous a quittés. Comme le temps file… !

Xavier a sa propre existence – il est charmant, m’invite souvent au restaurant mais, en fait, il me tient éloignée de sa vie.

Yolande n’a toujours pas donné signe de vie.


Depuis quelques temps, aux « Deux pigeons », je voyais toujours le même homme, assez jeune, blond, extrêmement beau. Hier, la serveuse est venue m’offrir un verre de champagne de sa part. Alors, je l’ai invité à ma table…

Je suis folle…

Mais cette période de fêtes me déprime tellement…

Rachid, tu n’es pas fâché, dis ? Je sais que tu n’aurais pas voulu que je sois malheureuse, comme cela, tout le temps…


28 décembre 2006

Il s’appelle Bertrand. Bertrand Bataille.

Il est magnifique. Ses cheveux sont peut-être un rien trop longs, mais cela lui va très bien. Il a des yeux d’un bleu intense, pétillants, gais…

Il m’observe depuis longtemps : je lui rappelle sa sœur, laquelle est morte dans un accident de voiture.

Sa voix est chantante, douce, agréable…

Et il m’amuse : il ne tient pas en place, on dirait un jeune chien. Trop jeune… 33 ans, cela fait 21 ans d’écart entre nous… Je me demande s’il sait que je suis riche. Comment le saurait-il ? Tout de même, je me méfie…


3 janvier 2007

Je n’ai pas pu m’empêcher d’accepter l’invitation de Bertrand pour le réveillon. Il m’a emmenée chez des amis, des gens extrêmement élégants qui habitent une magnifique propriété avenue Franklin Roosevelt.

Nous avons parlé et dansé toute la nuit. Il m’a désirée…

Je rougis en écrivant ça… Mais j’ai besoin de le dire, j’ai besoin de me confier…

Xavier n’arrête pas de me mettre en garde, il prétend que ce garçon n’en veut qu’à mon argent. Mais enfin, comment Bertrand saurait-il si je suis riche ou non…

Et s’il connaissait Yolande… ? Et si c’était une machination… ?

Tant pis. Il est trop beau… Et il est infirmier. C’est un métier magnifique, un métier où l’on se dévoue. Je ne veux plus écouter Xavier…

Je ne puis plus résister…


25 mars 2007

Bertrand m’a offert un adorable séjour à la Côte d’Azur. Il semble tout à fait amoureux. Je suis indéniablement particulièrement en beauté… Grâce à ce lifting, je ne parais même pas quarante ans… L’ovale du visage est impeccable. Cette intervention aux seins que j’ai fait faire après la naissance de Yolande n’a laissé que de fines cicatrices qui ne se voient pas du tout et la gymnastique matinale que je pratique depuis toujours porte ses fruits : mon corps est parfait, absolument parfait. J’ai dit à Bertrand que j’avais trente-huit ans et il m’a crue. Il prétend que c’est la période de la vie où les femmes ont le plus de charme, quand elles irradient « l’éphémère splendeur de la beauté féminine dans son épanouissement » – ce sont ses mots.

Aucune nouvelle de Yolande.

Bah… pas de nouvelles, bonnes nouvelles…


5 juin 2007

La procédure de recherche dans l’intérêt des familles n’a donné aucun résultat. Xavier paraît nerveux quand on aborde ce sujet. Il ne sait pas non plus s’il y a lieu de faire une déclaration de disparition inquiétante. Il semble se sentir un peu coupable. Parfois, il dit que l’on aurait dû se montrer plus explicites au moment même auprès des autorités compétentes et que maintenant, c’est trop tard, qu’on pourrait avoir des ennuis. D’autres fois, il me presse de faire les démarches auprès de la police… En fait, il ne sait pas plus que moi comment agir au mieux…

Quand j’ai parlé de Yolande à Bertrand, il a eu un mouvement de recul. Je crois qu’il trouve que je n’ai pas montré beaucoup d’inquiétude à ce sujet et que ce n’est pas très normal.

Cette gamine est infernale, tout de même !... Présente, elle me pourrit la vie. Absente, c’est encore pire…

Rachid, dis-moi…

Bon, d’accord, tu as raison : je n’aurais pas du tout envie que Yolande et Bertrand se connaissent. Elle serait capable d’essayer de le séduire rien que pour me faire du mal.

Mais qu’est-ce que tu me fais dire là ?

Mon Dieu, mon Dieu, que faire ?


8 août 2007

Bertrand me semble beaucoup moins attentionné, il a espacé nos rencontres. Je crois que mon attitude envers ma fille l’a vraiment choqué.

Il a peut-être raison. S’il était arrivé quelque chose… Elle est peut-être morte et je ne le sais pas. Je suis un monstre…

J’ai commencé à avoir des insomnies.

Rachid aide-moi ! Je suis toute seule, toute seule…


9 septembre 2007

J’ai demandé des cachets pour dormir à Bertrand, puisqu’il est dans la partie. Il m’a donné un truc pour calmer mes angoisses à prendre trois fois par jour. Et un somnifère pour le cas où je ne parviens pas à m’endormir la nuit.

Dès la première prise, je me suis sentie beaucoup mieux…

Je me faisais des soucis pour rien. Yolande est une sale gamine et elle se porte sans doute très bien…


12 novembre 2007

J’ai les idées un peu embrouillées ces jours-ci. J’ai augmenté la dose de médicaments, parce que c’est tellement agréable…

Je vois bien que Bertrand a changé depuis que je lui ai parlé de Yolande. Ce n’est tout de même pas de ma faute…

Peut-être aurais-je dû vendre cette maison…

Et puis surtout : faire une déclaration de disparition inquiétante…

Rachid, viens à mon aide, je t’en prie.

Ça ne va pas. Ça ne va pas du tout…


26 décembre 2007

Bertrand m’a emmenée chez des amis, passer le réveillon de Noël.

C’était très gai, très charmant... Je me suis un peu endormie dans le canapé je crois. Je me souviens d’une jeune femme, pas très jolie – elle a le nez busqué, ça n’arrange jamais un visage… Et elle est mal coiffée, c’est dommage, elle a de beaux cheveux dorés mais ne sait vraiment pas faire son chignon, les mèches fuient de partout… En me la présentant, Bertrand a dit : Claudine, voici une de mes amies très chères, Adrienne Amercœur… Un joli nom, tout doux, comme elle-même… Une de ces personnes qui sont comme habituées à ce que l’on profite de leur générosité… D’ailleurs, plus tard, j’ai fini par pleurer dans ses bras… Et je lui ai tout déballé. Elle m’a conseillé d’aller voir le médecin dont elle est la secrétaire, une femme psychiatre, très compétente. Bertrand nous regardait de loin et il souriait. Ah, comme je l’aime… ! Je me suis sentie bien, entourée d’amitié, de tendresse…

Je ne raconterai rien à Xavier. Pour lui tout ce qui est psychologie, c’est de la vaste blague, une façon de pomper l’argent des gens… D’après lui, les gens pauvres, les travailleurs, sont rarement atteints de dépression. Il me conseillerait encore de m’occuper, de trouver quelque chose à quoi m’intéresser, ou bien de voyager, puisque j’aime ça. Il a raison sans doute mais il est fort, lui, et moi je suis si nulle…

Heureusement que j’ai les cachets de Bertrand.

J’en ai déjà pris un ou deux… ? Pas plus de trois par jour, a-t-il dit. L’ennui, c’est que je ne me souviens plus… Il me semble que j’ai souvent des trous de mémoire, ces temps-ci…


10 mars 2008

J’ai laissé passer du temps parce que j’ai peur de ce docteur… Delaroche… elle va me dire que ces médicaments ne sont pas indiqués dans mon cas, et elle risque d’empêcher Bertrand de m’en procurer…

Mais, lui insiste pour que j’aille consulter. Il prétend que je deviens un peu folle, qu’il va arrêter de me fournir les cachets, qu’il a eu tort à ce sujet et ne sait plus que faire…

Il ne dit pas qu’une mère normale se soucierait beaucoup plus de sa fille, mais je sens qu’il le pense.

Un jour, il m’a demandé pourquoi je n’ai jamais versé de l’argent sur le compte de Yolande, pour voir si cela ne la ferait pas revenir. Je crois que la façon dont je l’ai regardé l’a effrayé. Il ne m’en a plus jamais parlé. Je le soupçonne de nouveau de connaître Yolande et de monter une machination, c’est plus fort que moi…

Hier, à la poste, j’ai agressé une personne qui a voulu se faufiler sans attendre son tour. Bien sûr, j’avais raison d’être irritée par une telle attitude, mais quelque chose a été plus fort que moi : je me suis mise à hurler sans pouvoir m’arrêter, tout le monde me regardait, c’était horriblement gênant. Je dois prendre un rendez-vous chez ce docteur… Je vais lui téléphoner… Je vais téléphoner… Téléphoner.


***


15 avril 2008

Une jeune femme se trouvait déjà, assise dans un coin de la salle d’attente ; elle lisait, la tête penchée vers un livre ouvert sur ses genoux et ses très longs cheveux d’un noir bleuté lui cachaient le visage. Ainsi, elle offrait une ressemblance frappante avec Yolande. Claudine s’immobilisa sur le seuil.


- Entre, Chérie, entre, disait Bertrand en la poussant gentiment.

- C’est… c’est… bredouillait Claudine.


La jeune femme leva la tête. Évidemment, ce n’était pas Yolande.


- Je te laisse un moment, dit Bertrand. Il me faut aller déplacer la voiture, car je suis mal garé. À tout de suite…


Le regard de la jeune femme se dirigea vers Claudine et la traversa comme si cette dernière était transparente, invisible.


Qu’avait-elle fait, grands Dieux ! Sa fille avait disparu, était morte peut-être ou bien dans le besoin et elle, elle avait pris un jeune amant, elle avait voyagé, dépensé de l’argent pour son plaisir… Cette jeune femme, peut-être était-elle là tout exprès pour lui rappeler ses turpitudes… Si Bertrand pouvait revenir… Elle se sentait perdue sans lui, coupable, oh tellement coupable… !


Un homme de haute prestance entra sur ces entrefaites, regarda tout le monde, salua et s’installa confortablement dans un des fauteuils restés libres. Un silence lourd régnait, oppressant…


Au bout d’un moment, Adrienne Amercœur pénétra dans la pièce, un carnet à la main. Elle fit mine de se diriger d’abord vers Claudine puis se ravisa en voyant le nouveau venu.


- Juge Evrard ! dit-elle. Comment allez-vous ? Je ne savais pas que vous aviez rendez-vous…

- Vous ici, Adrienne ! Vous travaillez donc pour le docteur Travis ?

- Le docteur Travis ?... Ah, vous voulez parler du dentiste qui habite au quatrième. Vous vous êtes trompé, je crois bien, mon cher Juge, ici vous êtes dans le cabinet du docteur Delaroche…

- Mon Dieu, suis-je distrait ! La porte n’étant pas fermée, je l’ai poussée machinalement sans faire attention à ce qui était marqué sur la plaque en cuivre. Avec cette histoire de disparition qui me trotte dans la tête…

- Bonjour Claudine, dit Adrienne tandis qu’Émile Evrard, s’arrêtait dans son mouvement pour se diriger vers la porte et, contemplant son reflet dans un grand miroir accroché au mur, rectifiait son nœud de cravate.

- Vous allez bien ? continuait Adrienne s’adressant à Claudine. Le docteur a un petit retard et m’a demandé de vous en prévenir.

- Je… je ne vais pas bien, dit Claudine, qui se sentait près des larmes.


Qu’était venu faire ici un JUGE ? La jeune fille avait un regard étrange à la fois fixe et vide.


- Je n’ai rien fait, dit Claudine.

- Pardon ?


Adrienne paraissait interloquée.


- Je n’ai rien fait, cria Claudine. Ce n’est pas ma faute !


La jeune fille au regard fixe se leva brusquement.


- C’est elle, dit-elle en pointant le doigt.

- Non ! hurla Claudine. Non !


Le juge Evrard se tenait immobile, ne sachant quelle contenance adopter. À ce moment, Bertrand entra, suivi presque immédiatement par le docteur Delaroche.


- Mais que se passe-t-il ?

- Je n’ai rien fait ! Rien fait ! hurlait Claudine.


Un peu de bave lui coulait sur le menton.


Soudain, elle balança son poing dans le miroir.


- C’est une glace sans tain, hurlait-elle. On m’observe de l’autre côté… Vous êtes tous ligués contre moi… N’approchez pas !!! N’approchez pas…


Elle s’était fait mal au poignet. Soudain, elle s’empara d’une chaise et la balança vers le miroir resté intact…


- Mon Dieu ! Adrienne, appelez les urgences, dit le médecin.

- Tout va bien, disait Bertrand. Tout va bien, Chérie, calme-toi.

- Je veux mon fils, pleura Claudine. Je veux mon fils…

- Les urgences sont en route, dit Adrienne. Quelqu’un a le numéro du fils ?


Un quart d’heure plus tard, Claudine partait vers une clinique spécialisée, calmée par une piqûre de sédatif puissant et l’assurance que Xavier avait été prévenu.


***


Comme elle mettait la salle d’attente en ordre, Adrienne y trouva un grand sac oublié. La jeune femme l’ouvrit pour savoir à qui il appartenait et trouva un cahier sur la couverture duquel elle lut « Ceci est mon journal ».

Au moment où elle le feuilleta, une photographie en tomba.


- Mon Dieu, mais c’est Raphaëlle, la sœur de Bertrand !


Elle s’assit sur une chaise et se mit à lire…


Ainsi, rien de ce que Bertrand lui avait raconté n’était vrai. Claudine n’était absolument pas la femme abusive qui empêchait ses enfants de s’épanouir et dont la méchanceté avait poussé sa fille au suicide. Yolande, la prétendue disparue, vivait en fait avec Bertrand et se faisait passer pour la sœur de ce dernier sous le prénom de Raphaëlle… Adrienne sentait son cœur se serrer : elle s’était bêtement laissée séduire par un manipulateur et avait pris pour une sorte de gémellité un peu magique ce qui n’était en fait qu’une banale intimité d’amants… Les pleurs de Claudine avaient sonné faux à ses oreilles alors qu’ils étaient sincères, les confidences de Bertrand n’étaient qu’un tissu de mensonges et elle y avait cru !


Et qu’avait-elle fait, grand Dieu ! Quelle faute énorme que de se prêter à la comédie du faux juge ! Et d’avoir arrangé les rendez-vous de manière à ce que la petite folle paranoïaque aux allures gothiques soit ce jour-là dans la salle d’attente en même temps que Claudine…


Mais quel avait été le but des amants démoniaques ? Peut-être avaient-ils compté sur la culpabilité de Claudine pour lui faire faire des opérations financières en faveur de Yolande. Mais alors, il semblait que les choses aient dépassé le but visé… Ou bien s’agissait-il d’une simple vengeance. Raphaëlle-Yolande était tout à fait susceptible d’éprouver des sentiments violents et extrêmes : Adrienne avait un jour vu la jeune femme entrer dans une colère noire pour une vétille…


Quoi qu’il en soit, il n’y avait plus rien à faire maintenant. Seulement, elle allait garder le cahier et le mettre à l’abri avant de le rendre à Claudine. Le docteur Delaroche ne devait à aucun prix le trouver, le lire et se rendre compte du vilain rôle qu’elle, Adrienne, avait tenu, par amour pour une crapule… On verrait bien ce qui allait se passer. Il serait toujours temps d’agir au cas où les choses se passeraient mal…

Mais Adrienne se connaissait : elle était lâche, c’était un fait.


***


- Allo, Xavier ? C’est moi, Danièle… Ça y est, tout s’est passé beaucoup plus vite et facilement que prévu… Je crois pouvoir prédire que, dans quelque temps, elle préférera te faire une procuration plutôt que d’être mise sous tutelle, on y veillera… Tu peux en tout cas dire à Bertrand et à Yolande qu’elle ne sortira pas de sitôt… Adrienne ? Non, non, Adrienne ne se doute de rien.


 
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   Anonyme   
2/6/2008
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Que l'intrigue est compliquée, ténue !

Je me suis perdu x fois.
D'où la relecture obligatoire. Et comme ce n'est pas du super style, je me lasse vite.

Du 'factuel' d'un bout à l'autre.
Je sais bien que 'les faits sont têtus'
Mais ils s'obstinent plus encore...
C'est pas un bonne idée de fatiguer le lecteur comme ça.
Enfin je dis ça pour moi.

Non vraiment désolé Bidis, ce n'est pas pour moi.

   widjet   
3/6/2008
 a aimé ce texte 
Pas
Septième lecture du concours

Probablement est-ce très limpide dans l'esprit de Bidis mais pour nous, pauvres lecteurs, c'est une géhenne à suivre !
Par moment, on pourrait presque croire que prit dans son intrigue, l'auteur en a oublié ses lecteurs ! Jusqu'au milieu du récit, ça va encore (même si c'est un brin répétitif) mais alors après, lors des révélations...Arghh...le flou total ! Au delà de ce manque évident de fluidité, le mystère ne nous enveloppe pas et cette disparition, bah, je ne m'en suis pas vraiment concerné.

Déception donc en dépit d'un titre alléchant et vendeur.

Mille excuses, chère Bidis, mais merci quand même ! :-))

Widjet

   Ninjavert   
3/6/2008
 a aimé ce texte 
Un peu
Personnellement je n'ai pas eu de problèmes de compréhension ni de décrochage en cours de route...

L'histoire m'a parue claire, le découpage sous forme de journal ne m'a pas dérangé.

Bon j'avoue que ça ne m'a pas passionné non plus en fait. J'attendais que l'histoire décolle, qu'il se passe quelque chose, mais en fait non, ça reste assez linéaire. Plat.

Et au final notre imagination est très peu sollicitée dans la mesure où Claudine émet elle-même les différentes suppositions : Est-ce une fugue ? Un suicide ? Un complot ?
C'est dommage car au final ça fait un peu "rayer la mention inutile", on n'a aucunement besoin de réfléchir à ce qui peut bien se passer. Et comme ça manque un peu de rebondissements, je comprends qu'on puisse décrocher en cours de route.

En fait, je m'attendais à plus de surprise venant de ton esprit torturé Bidis... Un truc plus vil, plus machiavélique.

Au final non, ça reste une intrigue assez basique et linéaire.

Par contre, je salue l'exercice consistant à relater l'intrigue sous l'angle du trhiller psychologique, avec la contrainte supplémentaire de la forme du journal... Avec en plus le respect des contraintes pas évidentes du concours ! Bravo pour l'effort, c'était vraiment pas évident.

Le style est un peu simple, ça manque de relief, de descriptions, mais c'est la forme journal qui veut ça. En faire plus aurait nui au naturel et à la crédibilité du truc.

Bref ça manque un peu d'impact et de magie pour que j'accroche vraiment, mais c'est plutôt bien géré et imaginatif. Une chose est sûre, tu arrives toujours à me surprendre Bidis :)

Ninj'

   guanaco   
3/6/2008
J'avoue que j'ai vite décroché.
L'intrigue reste très confuse et j'ai dû faire quelques retours en arrière pour eclaircir certains points obscurs.
Lecture difficile pour moi en tout cas.

Merci et bonne chance.
Guanaco

   David   
4/6/2008
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Bidis,

C'est le guet apen de la salle d'attente que je trouve un peu trop alambiqué, même si elle a été amené dans le récit, la folie de Claudine ne m'a pas convaincu. Mais bon le complot tient le coup, et il y a neuf personnages qui interviennent à différents degrés (j'ai compté le défunt), la contrainte des lettre n'a pas du faciliter la tâche, j'ai bien aimé l'idée et je salue l'effort particulier.

   Maëlle   
7/6/2008
 a aimé ce texte 
Un peu
J'aime beaucoup la fin. Le reste est inégal, j'ai notamment eu un peu de mal dans les passage du journal au récit, pas vraiment matérialisés. Par moment j'ai été complètement prises par l'histoire (la montée dans la folie de Claudine), à d'autre, beaucoup moins intéressées. C'est peut-être dû à l'intrigue.

   Ariumette   
11/6/2008
Aucun problème de compréhension de ma part... Je pense peut-être comme un criminel (je vais relire le forum sur l'énigme !). L'histoire m'a tenue de bout en bout même si parfois le style laisse un peu à désirer, je trouve. Mais peu-être est-ce voulu, après tout ce n'est pas l'auteur qui écrit la plupart du temps mais Claudine... La fin est un peu capillotractée... surtout l'intervention de la psy ! En fait cela appelle une suite ou des explications... Merci pour cet écrit un brin pervers et agréable...
Je ne note pas cause -concours-. Mais j'ai bien apprécié et ne me suis pas du tout ennuyée.

   aldenor   
17/6/2008
 a aimé ce texte 
Bien
Le style journal sonne faux et n’est pas très crédible, mais j’ai apprécié l’analyse psychologique ; on voit bien l’héroïne dérapant progressivement, grâce a quelques phrases habilement distillées.

   Togna   
26/7/2008
 a aimé ce texte 
Bien
La machination est bien pensée et j’ai lu en ayant envie de connaître le dénouement, l’incise laisse prévoir la folie de la dame, mais pas son exploitation par les vilains enfants.
J’ai été un peu dérouté par le changement de narrateur, probablement parce que la date (15 avril 2008) laisse penser à une continuité du journal intime (Je n’avais pas vu les trois étoiles de séparation en première lecture).
Bidis la machiavélique ? À quand l’écriture d’un polar ?

   Doumia   
25/8/2008
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Quelle histoire prenante ! Je l'ai lue d'un trait avec un grand plaisir. Elle est tellement bien amenée j'ai beaucoup aimé l'idée du journal et le petit plus à la fin auquel on ne s'attend pas : la complicité du fils, bravo c'est bien trouvé et en plus tout à fait plausible.
Merci Bidis pour cette belle lecture.

   Flupke   
6/10/2008
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
LES MANIPULATEURS SONT PARMI NOUS. J'ai lu il y a quelques années plusieurs ouvrages passionants sur la manipulation, ses techniques, comment identifier un manipulateur, etc...
Cette nouvelle m'a beaucoup plu, vu le thème, et je l'ai trouvée très claire, très limpide. J'ai facilement repéré les stuctures comportementales étudiées, ainsi que la relation manipulateur/victime. J'ai recontré un cas très similaire (partenaire + complicité d'un psy, débouchant sur un internement) dans mes lectures. Dans son ensemble, cette nouvelle est très réaliste. Le doute savament entretenu. Richesse de la femme, différence d'âge avec l'ami requin, bar « les deux pigeons », CHARAD(e), possibilité qu'elle s'imagine un complot etc... J'ai bien aimé aussi la chute (complicité avec Xavier). Une petite surprise au déssert.

remarques/suggestions (subjectives je le précise) en vrac:
pour le mois d'avril prochain j'aurais préféré soit pour le mois d'avril, soit pour le mois prochain, mais pas les deux
en s'ouvrant les veines (du poignet) Cette précision est-elle nécessaire ? Y a-t-il confusion possible avec d'autres endroits ? Je pense qu'une pléthore de précisions peut parfois alourdir ou du moins friser le pléonasme.
Indéniablement particulièrement en beauté. Soit l'un soit l'autre, mais pas les deux, ou alors les séparer peut-être par une virgule.
Ceci est mon journal. Je pense que le mot « journal » sur la couverture suffirait. Plus sobre. Plus réaliste. De toutes manières si elle ouvre le sac, elle ouvrira le carnet et vu les dates devinera qu'il sagit d'un journal. (Ceci est mon sac, ouvrez-le, ceci est mon journal, lisez-le, ou alors pourquoi pas une couverture à la Magritte, ceci n'est pas mon journal, etc..., non mais je plaisante).

J'ai bien aimé aussi la lâcheté d' Adrienne.
Merci Bidis, pour ce chouette moment de lecture, qui m'a ramené quelques années en arrière, vers un thème que je juge utile de bien connaître.

   Menvussa   
19/12/2008
 a aimé ce texte 
Bien
Bon, je m'y suis un peu perdu. Faudrait que je relise à tête reposée.
Évidemment, c'est très bien écrit.

   Anonyme   
17/2/2009
L'écriture, plaisante donne envie de lire cette nouvelle jusqu'au bout (envie de savoir comment ça va se terminer) j'ai imaginé plusieurs possibilités, aucune n'a été retenue par l'auteur et c'est très bien comme ça.
J'ai bien aimé lire ce journal parce qu'on y voit l'emprise de Rachid sur Claudine se déliter au fur et à mesure. Ca ajoute une touche de vérité au contexte "journal".
C'est curieux d'ailleurs, je déteste lire les morceaux des vrais journaux intimes et j'adore les vrais-faux journaux.
Aimant beaucoup les histoires de manipulations, j'ai été servie.
j'ai passé un bon moment de lecture, merci Bidis.
Juste une question : Qu'est devenue Yolande ?

   brabant   
21/4/2013
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour Bidis,


Auprès de cette intrigue le noeud gordien est un banal noeud flamand :)))

J'ai eu du mal à suivre la continuité du "dialogue"/journal entre Claudine et le défunt Rachid à partir du "15 avril 2008" où on n'est plus dans le cahier mais dans une narration extérieure au projet initial du personnage principal, alors qu'auparavant j'avais pu facilement passer du monologue intérieur de celui-ci à des scènes qui n'en faisaient pas forcément partie.

Pour avoir voulu trop ménager ce coup de théâtre final (double coup de théâtre en fait) le tout s'est un peu embrouillé (quoique logique quand on y revient). La cause en est je pense à ce que c'est un texte à contrainte ; dans ce genre de textes on devient forcément "contraint" (lol). Je crois aussi qu'une seule fin, une seule issue habilement menée/s suffi/sen/t et que le rebond final, pour spectaculaire qu'il soit complexifie encore la chose, il aurait fallu le mêler, à mon avis, à la conclusion générale.

La première partie du récit m'a paru supérieure à l'imbroglio (pas péjoratif) final. Vous vous y lâchez et l'analyse des sentiments et l'évolution du personnage de Claudine sont à la fois libres et bien maîtrisées.


p s : Vous n'auriez pas dû me dire que vous n'aimiez plus trop les nouvelles que je n'ai pas encore lues, je me demande dans quelle mesure cela n'a pas influencé ma lecture :) En tous cas je n'étais pas d'accord avec ce propos... jusqu'au "15 avril 2008". Lol


Donc, j'aime bien que vos récits soient carrés/cadrés, et que ainsi que vous le faites dans celui-ci, vos personnages se lâchent dans leur psychologie. Le lecteur aime les failles qui ne sont pas les siennes (ou qu'il ne laisse pas arriver à sa conscience claire/ qu'il ne veut pas/qu'il se refuse à s'avouer, il peut, comme c'est le cas en ce qui concerne cette nouvelle, se faire protecteur, rôle éminemment confortable et éminemment gratifiant.


Merci Bidis :)))


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