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Fantastique/Merveilleux
Boutet : Gérard et moi
 Publié le 17/04/25  -  4 commentaires  -  6582 caractères  -  32 lectures    Autres textes du même auteur

Ai-je rêvé ou suis-je devenu fou ?


Gérard et moi


– T'es là Momo ?

– Oui mon Gégé, je suis là.

– Cette fois-ci, c'est la fin. Ne lâche pas ma main.

– Ne t'en fais pas, je resterai auprès de toi jusqu'au bout, je n'ai qu'une parole ! Te souviens-tu de notre serment ?

– Et comment que je m'en souviens ! On s'est même promis, si la vie après la mort existe, de se faire signe !

– Tu me feras un signe hein, mon ami ?

– Oui.


Il est 16 h 59. Gérard n'est plus. Je suis à la fois effondré de perdre mon seul ami d'enfance et soulagé de le savoir délivré de ses souffrances. Qui aurait pu imaginer que ce grand gaillard, qu'une cirrhose a terrassé, finirait sur un lit d'hôpital ? Lui, l'épicurien (un peu trop) toujours partant pour faire la bringue ! Sacré Gégé, je ne t'oublierai pas !


Trois mois plus tard : 2 novembre 2020.


C'est le jour des défunts. Hier, pour la Toussaint, je suis allé me recueillir sur la tombe de mes parents. Aujourd'hui, je vais me rendre à Rennes, au columbarium où repose Gégé. Me voici devant sa « case ». Il cohabite avec plusieurs autres défunts et il n'y a guère de place pour y déposer une gerbe. Une rose blanche, en souvenir de ses rosiers qu'il aimait tant, suffira. Puis je lui glisse quelques mots :


– Salut mon pote ! Si tu savais comme tu me manques ! Mais dis-moi, et ta promesse ? Aurais-tu oublié de me faire un signe ou serait-ce qu'il n'y a rien après la mort ? Le vide ? Ah non ! Ne déconne pas Gégé !


Tandis que je pleure toutes les larmes de mon corps, j'aperçois un oiseau volant puis se posant pile-poil sur la case de Gégé. Il ne bouge pas et me fixe un bon moment. J'essaie de le faire fuir mais ce pot de colle revient toujours au même endroit. On dirait une perruche ondulée… Elle est bien jolie ! Après un modeste au revoir à mon ami, je quitte le cimetière. Arrivé à ma voiture, je sens quelque chose se poser sur mon épaule gauche :


– Non mais je rêve ! T'es encore là toi ? Allez va-t'en ! Je n'ai pas besoin d'une perruche pour me tenir compagnie, et puis tu vas saloper ma voiture !


L'oiseau s'éloigne. Je démarre et file chez moi, à Nantes. Arrivé à destination, j'ouvre la portière et mon regard se pose sur le siège arrière : la perruche ! Je n'avais même pas remarqué qu'elle était entrée dans l'habitacle ! Apparemment, c'est un mâle ; la cire en haut de son bec est bleue :


– Allez, suis-moi pot de colle !


J'allume l'ordinateur. En fond d'écran, une photo de Gégé pour l'avoir toujours auprès de moi. Mon nouveau compagnon, posé sur mon épaule, se dirige vers l'écran et tapote au niveau du visage de Gérard puis me fixe un long moment :


– Eh oui mon vieux, c'était mon meilleur ami tu sais.


L'oiseau ne détache pas son regard du mien. Il se dirige maintenant vers le cadre au-dessus de la cheminée puis, comme tout à l'heure, tapote sur le bouquet de roses représenté :


– Arrête tes bêtises, tu vas m'abîmer le tableau qu'avait peint… Oh merde ! Gégé ? C'est toi ? Mais oui, ça ne peut qu'être toi mon poto ! Attends, je vais chercher plusieurs CD et les déposer sur la table. Si tu te poses sur celui de ton chanteur préféré, je saurai que c'est toi. Les Stones ? Mon Dieu ! Et tu n'as pas hésité ! Si tu savais à quel point je suis heureux de te retrouver vieux frère mais quand même, tu aurais pu te réincarner en perroquet, je t'aurais appris à causer ! Allez, il se fait tard, je vais me coucher. Ah non Gégé, pas sur mon lit, tu exagères ! Et mon intimité, tu y penses à mon intimité ? Bon, demain j'irai t'acheter des graines ; ben oui, c'est fini la charcuterie !


Deux ans plus tard : août 2022.


Je n'ai pas vu le temps passer avec mon compagnon à plumes. Deux ans déjà qu'il me suit partout comme un petit chien. L'été dernier, nous sommes allés à la découverte de Paris ; en août il n'y a pas foule, vacances au bord de la mer oblige. C'était son rêve à mon Gégé de visiter la capitale, surtout le Moulin Rouge… J'ai d'ailleurs une anecdote à ce propos : alors que nous sortions enchantés du cabaret, Gérard s'est mis à voler comme un fou et s'est posé sur un appui de fenêtre. Intrigué, je suis allé voir ce qui pouvait bien s'y cacher pour qu'il se mette dans un état pareil :


– Ah non Gégé, pas ça ! T'es fou ou quoi ? On a passé l'âge d'aller passer une soirée en boîte de nuit… coquine ! J'aurais l'air malin d'entrer avec une perruche sur l'épaule ! On va me prendre pour un fou !


D'ailleurs, en parlant de fou, en lui faisant la morale, deux gars qui passaient par là ont tout entendu ; ils ont ri et l'un d'eux a dit :


– Encore un fou dans la nature !


15 août 2023.


J'ai passé une nuit épouvantable ; J'ai dû ouvrir toutes les fenêtres tant la chaleur est étouffante ! Une chose me tracasse : Gégé n'est pas venu dans la chambre me réveiller comme à ses habitudes. J'ai beau l'appeler, il ne vient pas. J'ai beau le chercher dans tous les recoins de la maison, rien. Il a disparu. Les fenêtres ! Il a dû s'échapper ce coquin ! Je vais voir dans le jardin, peut-être s'y est-il réfugié pour chercher un peu de fraîcheur… Non. Rien. Ce n'est qu'en fin de matinée que j'ai retrouvé Gérard gisant au pied du bouleau, son arbre préféré avant qu'il ne devienne perruche. Après avoir pleuré comme une madeleine, il m'a fallu enterrer mon compagnon : je l'ai installé dans une boite à chaussures dont j'ai soigneusement garni l'intérieur de coton, puis je l'ai installé dans sa nouvelle demeure, au pied du bouleau. J'avoue que j'aurais préféré qu'il repose auprès de son double humain mais je me voyais mal demander à ce qu'on ouvre la case de Gégé et qu'on y installe l'autre Gégé à plumes. On m'aurait encore pris pour un fou !


2 novembre 2023.


C'est le jour des défunts. Comme chaque année à la même période, je pars au columbarium de Rennes afin de déposer une rose blanche, toujours faute de place, sur la case de mon ami et de m'y recueillir. Je n'ai pas oublié, avant de partir, de déposer une rose blanche sur la tombe improvisée de mon Gégé à plumes. Très ému, je lui ai soufflé ces quelques mots :


– Ah mon Gégé, tu m'as bien eu avec la perruche, dommage qu'elle ne parlait pas ! Tu sais, j'étais triste quand elle s'est éteinte. Tu te rends compte, je n'ai pas voulu savoir ce qui a causé sa mort. Bon, c'est sûr, ce n'était pas une cirrhose ; Gégé plumé ne buvait que de l'eau, enfin, je crois. Allez, vieux frère, je dois partir ! À bientôt !


À peine le temps de dire ouf qu'un oiseau multicolore se pose pile-poil sur la case de Gérard. Il ne bouge pas et me fixe un bon moment. C'est bizarre, on dirait un perroquet. Il est bien joli ce…


– Oh merde ! Gégé !


 
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   Anonyme   
3/4/2025
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
Le personnage n'a pas l'air si surpris que cela face aux prouesses de "Gégé plumé". Peut-être a-t-il un grain de folie en lui. Un grain de folie pour adoucir la perte de son meilleur ami.

Une histoire tendre et amusante. Le ton est léger. On se laisse aller à rêver. Pourquoi pas ?
Peut-être l'ensemble est-il un peu trop "facile". Tout va si vite. Sans nuances.

Merci pour ce moment de lecture.

   Corto   
19/4/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
J'ai lu ce texte comme j'aurais raconté cette histoire à un enfant triste d'avoir perdu son ami à plumes.
Pas de chichis, une échappée onirique peu encline à la rationalité. Une consolation, de celles qu'on cherche quand le chagrin ou la nostalgie s'impose trop pesamment.
Rien de compliqué, écriture coulante.

Un bon moment.

   Sidoine   
6/5/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
Le texte se lit très bien, l'écriture est fluide, légère, agréable.
Il manque cependant, à mon sens, de finesse psychologique.
Le personnage principal semble un peu lisse face au décès de son ami d'enfance. On ne ressent ses émotions qu'en surface, comme si la légèreté de l'ensemble occultait ses sentiments plus sombres, sans parvenir à les transmettre de manière sensible.
L'histoire est amusante, mais la narration paraît un peu trop rapide. On passe très vite d'une période à l'autre (entre 2020 et 2023), sans avoir le temps de s'imprégner de chaque moment. Cela dit, on ne s'ennuie pas, et la chute fonctionne bien.
J'ai relevé deux expressions assez proches qui m'ont paru redondantes : « Tandis que je pleure toutes les larmes de mon corps » et « Après avoir pleuré comme une madeleine » (peut-être en supprimer une ?).

   embellie   
6/6/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Cette nouvelle me fait penser à l’écriture de Marcel Aymé qui m’a bien amusé en s’appropriant le domaine de l’absurde (Les oiseaux de lune, Le passe-muraille, La jument verte ...). C’est irréel, bien sûr, mais raconté d’une façon si naturelle, toute en logique, qu’on se prend à y croire, comme les enfants croient aux contes de fées. Avec Gérard et moi, j’ai adhéré tout de suite à la fantaisie de l’auteur, mon esprit, peut-être un peu farfelu, a trouvé naturelle la mutation de Gégé en oiseau, c’est dire la puissance du mode de narration ! C'est très bien écrit, avec une bonne chute.
Aux adultes, ce genre de lecture fait du bien. La part d’onirisme qui s’en dégage est comme un baume pour nos esprits trop souvent rationalistes. Je dis Bravo et Merci pour ce très bon plaisir de lecture.


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