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Aventure/Epopée
LEVENARD : Le dernier match international
 Publié le 13/07/10  -  16 commentaires  -  2999 caractères  -  156 lectures    Autres textes du même auteur

Joseph Prud'homme et nec plus ultra.


Le dernier match international


Je m’en souviens parfaitement. Autant vous dire que pour moi, ce fut un grand moment.

La France se présentait en formation d’alexandrins.

Rimbaud était aux arguments. Et c’est exact qu’il sortit à plusieurs reprises – était-ce abus de stupéfiants ? – quelques-unes de ses Illuminations, dont le jeu trop individuel nuisait bien évidemment à la cohésion de l’équipe.

Hugo, coupeur de vers en quatre, placé en hémistiche, balançait des rafales de virgules, créant des chicanes où venait s’empêtrer aussi notre furia littéraire, si elles pouvaient parfois également dérouter l’adversaire.

Mallarmé tenait la ligne des rimes féminines, Verlaine celle des rimes masculines, bien que parfois, ce dernier ne savait plus trop bien où se placer – ou délibérément changeait de genre, on ne le saura jamais vraiment ? – et, avouons-le – semait le trouble et commettait force impairs.

Hérédia était aux mots rares. Une certaine confusion malheureusement perturbait nos évolutions. Hérédia en effet, tenait absolument à placer lui-même ses trouvailles à la rime, et Mallarmé, à la rime, sournoisement, l’évinçait pour caser les siennes. C’était double énergie dépensée en vain.

On s’aperçut que Gautier, dont nul ne contestait la technique, n’y voyait plus très clair sur le but à atteindre, et s’enlisait, bloquant la progression dialectique de nos offensives, en jeux de pieds savants mais stériles.

Aragon jouait merveilleusement de son mentir-vrai pour mystifier les adversaires, mais ses feintes que tous avaient du mal à suivre, jouaient absurdement une fois sur deux contre nous, et il n’y avait aucun moyen de le raisonner.

Sully Prud’homme, que la partie adverse avait naguère encensé – et l’on pouvait y déceler au moins l’ombre d’une manœuvre indélicate – montrait des prudences de douairière à distribuer le jeu, rompant bien souvent notre élan. Il semblait se complaire dans une sorte de neutralité bienveillante qui lui faisait tour à tour servir chaque camp, même si, d’un geste élégant, il nous signifiait que ce n’était là, de sa part, qu’impuissance.

Ronsard avait été maintenu malgré son âge. C’était le gage pour bénéficier à plein des faveurs du public féminin. Mais l’enthousiasme déployé dans les tribunes ne compensait pas sa pâle prestation sur le terrain. Il attendait, rayonnant et béat, après la moindre de ses interventions la salve de vivats régénératrice sans laquelle on sentait bien qu’il ne ferait plus un pas supplémentaire.

Enfin, Villon trichait comme un soudard. Mais c’était de sa part une stratégie pour se faire sortir régulièrement du terrain. Il en profitait tantôt pour gagner la buvette, tantôt – on s’en aperçut plus tard – pour se rendre aux vestiaires où il dévalisa tous ses petits copains.


Je n’étais que remplaçant. J’attendais, prose sur le banc de touche.

Cette fois-là, qui fut la dernière, car la poésie fut ensuite retirée de la liste des sports collectifs, les Allemands nous battirent par une marche militaire réalisée en pas de l’oie...


 
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   Maëlle   
3/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Savoureux. Je suppose que toute ressemblance avec une actualité sportive est forfuite, non?

Mais déplacer les rivalité de terrain sur un autre (j'aurais sans doute gouté au moins autant un match de cuisine) me plais bien.

   jaimme   
4/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien
L'auteur n'est pas tombé dans le travers de la nouvelle portée par l'actualité: pas de coupe du monde, même si l'idée a pu émerger de notre "glorieuse" épopée sud-africaine. La nouvelle aurait bien trop vite perdu de son intérêt.
La dernière phrase ne me convainc qu'à moitié: est-ce à dire que la poésie française ne compte plus rien d'intéressant depuis cette époque?
le texte lui-même offre quelques regards sur ces grands hommes. J'eus aimé (goût personnel) les voir tous en action, ensemble.
Agréable lecture, merci.

   Myriam   
8/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Enfin un match intéressant!

Quelques répétitions m'ont parfois un peu gênées, dans le passage sur Hérédia (répété 2 fois), "à la rime", 2 fois aussi, dans la même phrase.
Celui sur Hugo se termine de façon un peu confuse ("créant des chicanes où venait s’empêtrer aussi notre furia littéraire, si elles pouvaient parfois également dérouter l’adversaire.")

Mais j'aime beaucoup les autres!

Amusant, rafraîchissant et littéraire!

   Mistinguette   
9/7/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J’ai beaucoup aimé ce délire littéraire mis en parallèle avec le sport. L’écriture est très agréable, c’est truffé de trouvailles et ça se lit le sourire aux lèvres. Que demander de plus ?
Pour couronner le tout, la chute est épatante.

Merci beaucoup à l’auteur pour ce petit bijou.
Bonne continuation à lui (à elle ?).

Mistinguette

   Anonyme   
13/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Texte amusant, élégant, sympathique, qui a le bon goût de s'arrêter avant que le procédé ne devienne par trop répétitif.
Je suis un peu réservée concernant la fin. J'ai tiqué sur l'expression "marche militaire" qui, pour moi, évoque davantage la musique que la poésie.
Qu'en pensez-vous cher auteur car, après tout, c'est vous le maître ?

   Dunkelheit   
13/7/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un texte rafraîchissant que j'ai adoré lire. Le procédé est amusant, la chute on ne peut mieux !

Aucune remarque de ma part, j'ai savouré du début à la fin, le sourire aux lèvres.

Bonne continuation,

D.

   Anonyme   
13/7/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très bien vu, LEVENARD ! Une bien belle équipe, de formation classique certes, mais où chacun est dans son rôle, y compris le remplaçant qui nous gratifie de ce texte ô combien sympathique !
Voilà quelques années, dans le même ordre d'idée, j'avais fait jouer ensemble une autre équipe ; je te transmets par MP le résultat de leur coopération ! Amicalement. Alex

   doianM   
13/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Une équipe multi-centenaire qui a apporté beaucoup de victoires à la France, dans la passé.
Bonne synthèse. Pas tellement d'accord avec la fin, on sort du cadre de la poésie.
Et ce n'est pas le pas d'oie qui a éliminé cette équipe.
D"ailleurs ni les allemands ne sont pas les gagnants de cette compétition.
Et, vu le spectacle actuell, nul n'est gagnant dans le monde..

Je souhaite à l'auteur qu'il quitte son banc de remplaçant et entre vaillament sur le terrain.

   florilange   
13/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'ai trouvé le procédé intéressant et assez amusant. Il suppose de tout de même connaître assez bien les auteurs en question.
Ce texte a la chance d'être publié au bon moment.
Il est aussi très consolant. On ne peut pas non plus être les meilleurs partout en même temps.
Bel exercice de style.
florilange.

   silene   
14/7/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Plaisant et se lisant vite, ce qui ne gâte rien. Mais personne sur le banc de touche ? Pas de Ducasse, pas de Valéry, quid de Char, de Breton, de Cros ? Et, malgré l'âge, de Malherbe et du Bellay ?

   Anonyme   
14/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bel exercice, oui. Très bien réussi. J’ai souri très souvent.
Mais pourquoi cette fin ? D’abord l’Allemagne a de magnifiques poètes qui auraient pu affronter à armes égales cette équipe extraordinaire et dissipée. Et je ne crois pas que la guerre n’ait pas mis un terme à l’existence d’hommes comme ceux-là.
Et puis, avaient-ils vraiment besoin d’adversaires au fond ? Le pire et le meilleur ennemis du poète n’est-il pas lui-même ? C’est d’ailleurs, par certaines aspects, très bien montré ici. Avec légèreté.

Je me suis bien amusée. Merci.

Electre

   alifanfaron   
15/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Je ne peux que déplorer mon manque de connaissance de certains des auteurs-titulaires. Mais cela ne nuit pas à l'appréciation de ce texte original. Le style est élégant et efficace, le tout homogène et concis: belle perf'

   Anonyme   
15/7/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Si je fais abstraction de la dernière phrase, c'est une bonne nouvelle je trouve. Le style est agréable et fluide, j'aime cette idée des joueurs poètes, la façon dont l'auteur les dépeints et leur attribut une place dans l'équipe. J'ai aimé Villon très crédible d'ailleurs.

Mais cette fin! Pourquoi nous balancer ce cliché? Parce qu'on parle de poète c'est pour ça? Franchement je ne pige pas. Ou alors l'auteur nous renvoi vers les deux demis finales perdues contre l'Allemagne?
Si tu pouvais m'éclairer levenard?

   Marite   
18/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Lecture amusante et intéressante. Les particularités et travers de chacun des "joueurs" de cette équipe sont bien trouvés. L'on ne peut que sourire. Ce que je n'ai pas compris c'est la chute. Que viennent faire les Allemands dans cette histoire? Personnellement je ne connais pas la poésie et les poètes de ce pays voisin mais j'ai du mal à croire qu'ils ne soient capables que de produire des marches militaires? Cela dit j'ai apprécié la forme et le fond.

   Anonyme   
24/7/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Je reconnais à l'auteur beaucoup de malice, d'humour et d'inventivité, ce qui est bien, et surtout, beaucoup de légereté, ce qui est mieux.
Même si j'ai pas mal lu tous les poètes cités, je ne comprends pas quelquefois les références qui leur sont attachées.
Exemple : dans le passage évoquant Sully Prudhomme, dont je me souviens qu'après avoir été poète parnassien, il s'est vite écarté des préoccupations esthétiques de cette Ecole pour trouver une nouvelle inspiration dans la célébration de la science et de la modernité, je ne retrouve pas ce que je viens de rappeler.
J'aimerais aussi quelques explications sur la rivalité supposée Mallarmé/Hérédia.

En revanche, les paragraphes sur Hugo (génie dont le souffle puissant a brisé "ce grand niais d'alexandrin"), Gautier (théoricien de l'Art pour l'Art, qui privilégiait la forme au fond) et Ronsard (redécouvert et imité par les Romantiques, et dont le lyrisme influença toute la poésie du XIXè s.) sont très bien vus.

J'aime aussi la symbolique du banc de touche et du joueur (le poète amateur) qu'on n'appelle pas ;-)

Un bon moment en tout cas.

   Maherpa   
12/10/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai apprécié l'originalité de cette nouvelle, toutefois, il manquait un poète de talent, un certain Aimé Césaire spécialisé dans l'improvisation.
Cela n'a pas gâché mon plaisir, bravo !!!

   Pablo59   
25/9/2011
Commentaire modéré


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