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Réalisme/Historique
marogne : Le bar du Régent
 Publié le 24/02/10  -  14 commentaires  -  10717 caractères  -  79 lectures    Autres textes du même auteur

Une île comme prison, une libération qui coûte cher !


Le bar du Régent


Le pianiste vient de plaquer les premières mesures de The Entertainer de Scott Joplin dans une indifférence absolue. Le brouhaha des conversations, le tintement des verres et le bruit diffus de la mer couvrent le son du piano. La musique semble flotter au-dessus des nuages de fumée des cigares dégustés avec circonspection. Les lumières de la tour « The Center » changent de couleur au rythme des pensées de René.


Bleu.


Vert.


Rouge.


Orange.


Orange, comme la couleur du whisky dans les verres de cristal dont les reflets parent d’éclats de couleurs les parures des femmes et les costumes sombres des hommes d’affaires. Les pensées de René suivent les volutes langoureuses du tabac. Il se laisse aller, sans doute la meilleure façon de ne pas réfléchir : écouter la musique, respirer le poison, boire une gorgée du liquide chaud venu des terres froides d’Écosse jusqu’à cette possession à l’autre bout du monde, et regarder, de l’autre côté de la baie, le clignotement absurde et régulier des illuminations de la tour.


Rouge.


Bleu.


Vert, comme la couleur du ferry qu’il avait pris le matin pour rejoindre l’île. Il n’avait pas grand-chose à faire, comme d’habitude, et avait décidé d’aller se promener du côté de la rue des antiquaires. « Hollywood street », il n’avait jamais su pourquoi le gouvernement britannique avait décidé cet hommage au cinéma américain. Mais c’était comme toutes ces choses qui l’avaient étonné pendant des années et pour lesquelles il n’avait jamais pris le temps de s’arrêter.


Le temps de s’arrêter…


Il en avait eu du temps, comme le pianiste qui, à la fin de son morceau, restait là, les mains posées sur le clavier, attendant la fin de sa pause contractuelle.


Une jeune femme se lève, sa robe blanche met en valeur son teint d’albâtre et ses cheveux de jais. Il la suit des yeux, fantôme diaphane, ivoire précieuse comme ces bouddhas ce matin, dans la boutique. Sa peau doit être aussi douce que la surface polie des sculptures qu’il avait essayé de marchander pour s’amuser, pour simplement passer le temps.


Orange.


Rouge.


Bleu, comme la couleur du ciel au-dessus du minaret de la mosquée. Les fidèles, ou les gardiens, visages hâves, barbes noires, yeux enfoncés et la haine sur les lèvres ne l’avaient pas quitté une seule fois du regard pendant sa visite. Il avait plusieurs fois déjà repéré la petite porte ouvragée alors qu’il passait devant, emporté par l’escalier mécanique qui conduisait au téléphérique. Il avait décidé de passer le seuil, comme il se rappelait l’avoir fait des années auparavant à Venise, pour rentrer dans des cours mystérieuses et oubliées. C’était ici aussi une oasis de calme, perdue au milieu des tours d’habitations dont les façades étaient souillées par les effluves tropicaux de la mer en contrebas. C’était un nid de silence au-dessus du manège des tramways à double étage, des routes à plusieurs niveaux et de l’incessant babillage des acheteurs et des vendeurs. Mais il avait dû partir, sentant confusément qu’il n’était pas le bienvenu, et la magie qui faisait rêver un Corto Maltese était restée dans la lagune de son esprit.


Il avait gagné alors le temple Man Mo, dédié à la guerre et aux livres. Il détestait cet endroit, mais ne pouvait s’empêcher d’y revenir, comme pour se punir peut-être. On y venait pour interroger le destin : une feuille de papier dans un tube de bambou. Mais là aussi il pouvait arrêter de penser, il pouvait se perdre dans le nuage épais de l’encens. Des centaines et des centaines de serpentins coniques se consumaient au-dessus de la tête des visiteurs. Et cette atmosphère chargée de tous les espoirs vains diluait toute volonté, permettait de s’abrutir, comme il aurait pu le faire, dans l’alcool ou la drogue. Aucun risque de s’échapper là, il avait ri de penser à Richard III. Il n’avait jamais osé solliciter l’augure.


Dans la rue en contrebas, il était entré ensuite dans une boutique pour caresser, sous l’œil inquiet et vaguement outragé du marchand, ce couple de chevaux Tang qu’il aurait tant voulu acheter. Leur port élancé et naïf condensait toute la force de l’animal et l’art de l’artiste. Une épure, presque une copie de Giacometti, un millénaire avant qu’il ne fût né. Leurs couleurs avaient été conservées presque intactes, vert, blanc, orange.


Orange.


Bleu.


Vert.


Rouge, comme les portes du temple.


Mais il avait fini par fuir les hauteurs de l’île pour rejoindre le quai du Star Ferry. S’attardant en passant au pied de la gigantesque tour du Financial Center pour admirer le reflet du soleil sur les grandes parois vitrées, il eut un sourire ironique pour sa vie d’avant. Ces symboles de l’argent roi et de la spéculation mondiale qu’il avait tant aimés auparavant, lui apparaissaient froids, dénués d’âme, vains.


Il avait alors voulu se plonger au milieu de la foule, de la populace, comme il le faisait tous les jours maintenant depuis des mois. Il avait besoin, dans la solitude qui était devenue la sienne, de se sentir encore partie prenante de la vraie vie. Il alla dans le quartier de Mong Kok, où les panneaux publicitaires des bordels se succèdent en longues files le long des rues. Ils alternent avec des magasins d’électronique et de bijoux, et dans cette multitude, il essayait de distinguer les touristes des habitués. Il en profita pour manger quelques brochettes de tripes en guise de déjeuner, achetées à un de ces petits revendeurs qui font leur cuisine sur un mince étal à roulettes, sur la rue même. Le bruit de la circulation, le rugissement des moteurs, les coups de klaxons incessants, les cris des rabatteurs, des vendeurs de nourriture, les mille musiques crachées par des haut-parleurs placés au-dessus des portes d’entrée des magasins pour attirer le chaland, les indicateurs sonores des feux tricolores, tout cela faisait une cacophonie infâme qui l’isolait du cours de ses pensées.


Il décida en fin d’après-midi d’aller se reposer de ces bruits modernes au marché aux oiseaux. Il n’avait jamais bien réussi à comprendre l’intérêt que semblaient trouver les Chinois à aller promener dans les parcs et les jardins leurs oiseaux de compagnie. Dans leurs belles cages, recouvertes le plus souvent d’un tissu protecteur, ils semblaient être un trésor que l’on faisait admirer. Mais, même ici, dans cette ville survoltée, il ne pouvait pas ne pas ressentir un peu de la sérénité du tableau de ces personnes accroupies à proximité de leur possession, écoutant le chant de leurs volatiles, tout en regardant d’un air placide l’agitation des passants. Il était lui-même resté une fois toute une après-midi, le dos collé à une colonne, à écouter ces vocalises. Mais c’était ailleurs, au temple du Ciel à Pékin, là où vraiment l’étendue du site permettait de s’extraire de la folie de la ville, là où on pouvait vraiment jouir du calme et de la sérénité du lieu et du moment. À une époque où il était libre.


Tout à coup le bruit lui devint insupportable, et, comme tous les jours depuis des mois, il se mit en route vers le bar du Régent.


Ces promenades, tous les jours répétées, étaient devenues un rituel immuable. Il trouvait dans cette obstination la liberté qui lui manquait tellement, comme si le fait de s’astreindre lui-même, était une preuve de son libre arbitre.


Vert.


Rouge.


Orange.


Bleu, comme son âme aujourd’hui à l’écoute de ces mélopées du sud des États-Unis qui avaient été créées pour chanter la liberté rêvée.


C’était ici, dans ce bar, que tout avait été conclu. Il avait rencontré Sun pour la première fois il y avait plus de trois ans maintenant. Ce devait être en fin d’après-midi. Sun était venu le chercher à l’aéroport, et ils avaient ensuite dîné dans le restaurant de son hôtel qui proposait des salles à manger privatives. La discussion s’était bien passée. Ils s’étaient mis d’accord sur presque tous les points, et les derniers détails devaient se régler devant un verre dans le bar du Régent. Ils s’étaient assis à la table même où, sans doute pour la dernière fois, il s’était installé ce soir. Il l’avait rencontré plusieurs fois ensuite, en Chine, en France, et une sorte d’amitié s’était développée entre eux. Il avait fait l’erreur de le noter comme ami dans son carnet d’adresses.


Il avait posé devant lui les deux enveloppes qu’il avait reçues le matin même. La première, la plus lourde, contenait son passeport et une courte note administrative venant des autorités chinoises : « Suite aux vérifications effectuées, nous vous prions de bien vouloir trouver ci-joint votre passeport ». Quel humour ! Il avait immédiatement réservé une place sur le premier vol pour Paris qui devait partir le jour même à minuit. Il avait encore cinq heures à passer sur le territoire chinois.


Orange.


Bleu.


Vert.


Rouge.


La deuxième était plus longue, plus élaborée. Elle venait de l’ambassade de France à Pékin. Le fonctionnaire, avec toute la retenue qui lui était imposée, l’informait du dénouement positif de la situation, et lui enjoignait de partir au plus vite.


Bleu.


Vert.


Rouge.


Il lui donnait aussi des nouvelles du procès de Sun qui s’était tenu à huis clos, deux semaines auparavant. Il avait été reconnu coupable.


Vert.


Rouge.


Le gouvernement était dans une période de chasse à la corruption, et il avait la main lourde. Il fallait montrer au monde entier qu’il était possible de faire des affaires de manière honnête en Chine. Sun avait été condamné à mort.


Rouge.


Les tours du Financial Center resplendissaient sur le fond noir de l’île de Hong Kong, les lumières des gratte-ciels faisaient comme autant d’étoiles, scintillant légèrement de l’autre côté du bras de mer. Le Palais des Conventions semblait surgir de l’eau comme un monstre marin, créature d’un autre monde, curieusement vivante devant les cages d’acier et de verre. Un magnifique paquebot, tout illuminé, passa majestueusement, occultant pour un bref instant le magnifique panorama. Peut-être ses passagers regardaient-ils, au même moment, les grandes baies vitrées du Régent sur Kowloon.


Rouge.


Rouge, comme le sang de Sun qui avait coulé le mardi précédent, exécuté.


René se leva, péniblement. Il devait traverser le bras de mer pour aller à la gare de Central prendre la navette qui le conduirait à l’aéroport. Il avait tant de fois rêvé ce vol Cathay qu’il avait du mal à croire qu’enfin il allait monter à bord.


Quand, trente minutes plus tard, il descendit du Star Ferry, au-dessus de lui, la tour « The Center » passa du vert au rouge. Il ne voulut pas savoir pourquoi, à cet instant-là, ces lumières lui parurent voilées comme par un brouillard improbable.


Ce fut la dernière image qu’il eut de Hong Kong.


 
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   Perle-Hingaud   
15/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Une nouvelle originale, captivante. Les descriptions, la structure des pensées éparses, les couleurs reprises en refrain lancinant, la compréhension progressive jusqu’à la chute : de nombreuses qualités.
J’ai été cependant gênée par la non concordance des temps : l’auteur débute son texte au présent mais n’y revient pas. Le changement de moment dans la narration n’est pas très clair pour moi entre « Il avait fait l’erreur de le noter comme ami dans son carnet d’adresses. » et « Il avait posé devant lui les deux enveloppes qu’il avait reçues le matin même. ». J’ai d’abord pensé, à tort, que les actions s’enchainaient. Enfin, un détail, le mot « populace » ne m’a pas paru approprié au reste du vocabulaire choisi par l’auteur.

   Anonyme   
16/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour

De très beaux décors, bien rendus, on a les bruits, les odeurs, les attitudes, les goûts (brochette de tripes).
Les sens sont sollicités et la curiosité avec.
Mon passage préféré est celui du marché aux oiseaux, très visuel pour moi et curieux aussi dans sa raison d'être.
A noter que tous sont visuels, y compris le premier, cet homme assis à attendre.
Un souci ici, c'est le seul que j'ai relevé :

"Ils s’étaient assis à la table même où, sans doute pour la dernière fois, il s’était installé ce soir." pour la dernière fois, ils s'installaient ce soir. Ceci à cause de la suite : =>
"Il l’avait rencontré plusieurs fois ensuite, en Chine, en France..."
dernière fois ce soir, il l'avait rencontré ensuite... c'est compréhensible mais ça reste un peu confus.

Un bon texte, très agréable à parcourir. Je trouve malgré tout que ça manque de dialogues, à mon sens ils aviveraient certains passages.

Bonne continuation à l'auteur.

   ANIMAL   
16/2/2010
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Une nouvelle comme on aimerait en découvrir tous les jours.

La construction est impeccable, avec ces alternances de couleurs éveillant à chaque fois un souvenir bien précis, raconté de façon brève mais intense. Une façon originale de découvrir Hong-Kong.

Le fond de l'histoire est amené de façon admirable. On sent dès le début quelque chose de grave, un drame sous-jacent. Le scénario est habile et conduit nos pas jusqu'à la révélation finale. C'est superbement géré.

Quant à la forme, le style coule tout seul, sans à-coup. Rien à dire à ce sujet.

Merci pour cette belle promenade sur fond d'amitié et de drame.

   Anonyme   
17/2/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Quelques petits détails de forme qui m'ont gênée (mais sans grande importance quand même)

- des cigares dégustés (je pense que ça se dit simplement je trouve cette formulation un peu bizarre pour un cigare)
- parent d’éclats de couleurs les parures des femmes : parent les parures répétition pas très heureuse
- gorgée du liquide chaud (euh là il parle du whisky non alors je suis ignare peut être mais je pensais que ça ne se buvait pas chaud (limite tiède à température ambiante non ?)

J'ai trouvé très bien rendue et intéressante la visite touristique de Hong Kong. J'ai apprécié aussi le détachement du "héros" son impassibilité presque asiatique.

Les couleurs sont une bonne idée. Je n'ai pas été très convaincue par l'histoire en elle même Il y a trop de détachement, je ne ressens pas assez les impressions du héros.

Merci

   Bidis   
24/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très belle écriture, beaucoup d’atmosphère et images superbes : un beau voyage.

Pourtant, dans mon ressenti, l’énumération des couleurs enlève quelque chose à la belle évocation qui chaque fois les suit. Je n’ai pas aimé ce procédé.

- « et la magie qui faisait rêver un Corto Maltese était restée dans la lagune de son esprit. » : j’aurais mis un point après lagune et enlevé « de son esprit », bien que peut-être le sens n’y soit alors plus. Pour moi, les métaphores sont à manier avec précaution, elles donnent vite un sentiment de figure de style banale, de chromo.

Et je trouve généralement à l'emploi du passé composé comme temps principal d'un récit quelque chose d'un peu lourd.

Cela reste en tout cas un moment de lecture fort plaisant.

   Marite   
24/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Marogne.
J'avais lu et pleinement apprécié la qualité de cette nouvelle mais c'est le dernier paragraphe et la dernière phrase qui m'ont littéralement paralysé l'esprit... et là aujourd'hui je ne trouve rien dans les commentaires qui m'explique ce qui s'est passé... Est-il mort? Y a-t-il eu explosion? Je reste toujours sur ces interrogations. J'espère aussi que non...? A part ça j'ai aimé cette promenade nostalgique dans les quartiers de la ville. Ecriture très agréable.

   florilange   
24/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Marogne,
Décidément, j'aime votre façon de raconter. Cette manière différente cette fois d'amener votre sujet me plaît aussi beaucoup. On sent tout de suite, au gré de sa promenade, que quelque chose ne veut pas sortir de l'esprit du personnage. Et ces couleurs qui ramènent chaque fois 1 souvenir. Quelle belle façon de les amener à la surface. Le tout est bien écrit & coule aisément.
Merci de cette lecture.
Florilange.

   xuanvincent   
24/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien
L'histoire ne fait pas partie de mes préférées de l'auteur, sans doute du fait de l'absence de tout élément fantastique ou sentimental. Sans me passionner, le texte m'a cependant intéressée et ma lecture a été agréable.

J'ai trouvé ce textes comme les précédentes nouvelles bien écrit dans l'ensemble.

Les couleurs (bleu, vert... rouge) m'ont paru bien se détacher dans le texte, et donner une touche d'originalité au texte.

Le récit (la dernière phrase) m'a paru finir de manière un peu abrupte.

Bonne continuation à l'auteur.

   Automnale   
25/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai aimé cette balade au gré des couleurs. Je ne sais si l'auteur a été lui-même à Hong Kong, mais il nous en parle comme le meilleur des guides. J'ai donc suivi, avec plaisir, René (prénom surprenant, à mon goût, pour un héros de nouvelle !). J'ai vu l'orange (la couleur) du whisky, le vert du ferry, le bleu du ciel et aussi de l'âme, le rouge de la porte du temple mais aussi du sang de Sun... J'ai senti l'encens, entendu les oiseaux dans les cages...

J'ai apprécié la répétition, comme une respiration, comme un gros titre, de : "Il n'avait jamais pris le temps de s'arrêter./Le temps de s'arrêter".

Justement, je me suis arrêtée à Venise "pour rentrer dans des cours" car je me suis demandée si "rentrer" était le bon verbe (entrer ?), mais, également, s'il était bien opportun de citer en plus, dans le contexte, Venise...

A l'image d'un commentateur précédent, j'ai considéré que le mot "populace" n'était pas au diapason de l'ensemble des mots choisis. Une autre expression m'a, aussi, interpellée lorsqu'il est question des oiseaux et "des personnes accroupies à proximité de leur possession". Leur possession...

Quant à la fin, si René ne voulait pas savoir pourquoi les lumières de la tour "The Center" lui parurent voilées comme par un brouillard, je voudrais, pour ma part, bien savoir...

Il y a peut-être quelque chose qui me plaît un peu moins. Naturellement, je suis plus que d'accord pour les couleurs lorsqu'elles sont suivies d'une idée, d'un souvenir ou d'une comparaison... Elles me gênent un peu lorsqu'il n'y a strictement rien d'indiqué après.

Tout ceci pour arriver à dire que l'écriture de Marogne est belle, presque magique.

Quel dommage (j'y reviens !) que le héros se prénomme René et qu'il mange des brochettes de tripes (j'ai horreur de cela !!).

   Selenim   
1/3/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Un texte à l'ambiance bien tissée mais qui reste trop contemplatif à mon goût.

Je me suis laissé bercer nonchalamment par cette écriture teintée. L'enchainement des saynètes est bien foutu mais cette mise en scène abrupte des couleurs m'a un rien contrarié la pupille. Un choix étrange.

Ce récit en créneaux est reposant, suffisamment court pour ne pas égarer le lecteur.

Selenim

   caillouq   
1/3/2010
 a aimé ce texte 
Bien
En vrac:
- je tique aussi au doublon parent/parures
- aime pas trop le teint d'albâtre et les cheveux de jais de la jeune femme, on doit pouvoir éviter le cliché sans dégâts pour la phrase.
- aaargh, les virgules !!!! Encore une qui traîne incongrûment entre le verbe et son sujet: « comme si le fait de s'astreindre lui-même, était une preuve de son libre arbitre ». Pas envie de resservir le couplet fait à Blacksheep, mais bon, c'est une faute de français. Qui, comme toutes les fautes grammaticales, est susceptible de mener à des contresens dès que la phrase est un peu élaborée ...

J'ai aussi un peu du mal avec la mention de « la haine sur les lèvres » des pratiquants de la mosquée, petit passage assez inutile dans cette nouvelle, et qui du coup lui apporte un relent discutable. Mais ce type de polémique n'a, évidemment, pas plus sa place dans les commentaires que dans les textes eux-mêmes – bref, ça n'empêche pas d'apprécier cette nouvelle, bien écrite, bien construite, riche en images convaincantes. On se laisse porter, on y croit, ça marche, jusqu'à la fin vers laquelle tout le texte tendait.

Si je n'ai pas envie de mettre plus, c'est que, à l'instar de Bidis, je trouve le temps du milieu (plus que parfait, d'ailleurs, et non passé composé ...) un peu pesant. Et la transition finale vers le passé simple n'allège pas vraiment la conclusion, lui donnant ce côté mythologique dénoncé par Barthes dans « Le degré zéro de l'écriture ». L'ensemble donne une petite patine au texte, comme si l'histoire datait de la fin des années cinquante (ce qui est, finalement, raccord avec l'ambiance du bar-à-pianiste-avec-pépées-en-robe-blanche, Scott Joplin (en reprise) et le prénom un peu vieillot). Mais bon, ça a aussi son charme ...

Et, ah oui, suite aux interrogations de Marite et Automnale:le fait qu'il ne veuille pas savoir, à la fin, pourquoi les lumières lui semblent voilées ... Les larmes ? Déclenchées par le rouge ?

   Anonyme   
8/3/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Le texte berce comme une musique, nous sommes à Hong Kong et on fait en même temps un petit tour autour de la planète ...J'aime beaucoup cette invitation au voyage. Le son, les couleurs sont présents. Il y a une certaine répétition des couleurs à la fois plaisante, et qui frappe comme "Rouge, comme le sang de Sun ...", mais parfois c'est trop, à chaque paragraphe.
Des parties demandent à être lus plusieurs fois pour être bien comprise :on suppose (mais c'est à peine évoqué) qu'il y a une affaire de corruption ...
Ce qui me gêne le plus c'est la difficulté de s'identifier à René...on est comme à l'extèrieur...trop je trouve ..
De jolies phrases comme " était restée dans la lagune de son esprit"...en revanche des lourdeurs comme "les reflets parent d'éclats de couleurs les parures "

   Anonyme   
16/3/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Attention à la "virgulite" :
Citation :
ivoire précieuse comme ces bouddhas ce matin, dans la boutique.
comme il aurait pu le faire, dans l’alcool ou la drogue.
comme si le fait de s'astreindre lui-même, était une preuve de son libre arbitre.


Citation :
Aucun risque de s’échapper là, il avait ri de penser à Richard III.
: phrase un peu maladroite qui sonne bizarrement.

Des phrases évocatrices pour un texte vraiment travaillé : Citation :
Les pensées de René suivent les volutes langoureuses du tabac.
des cours mystérieuses et oubliées.
restée dans la lagune de son esprit.
fantôme diaphane, ivoire précieuse comme ces bouddhas ce matin
, etc...
Certains passages m'ont gêné à cause de la concordance des temps.

Le tempo donné par les couleurs est très judicieux.
Seul le bruit de la ville ne me donne pas envie d'aller à HK.
Par contre la petite musique mélancolique du texte et l'impassibilité du personnage m'ont incité à aller au bout.

   Flupke   
18/4/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai bien aimé ces couleurs qui rythment le texte. Très bonne trouvaille

Intéressante description de l'Asie avec (délibérément) en pointillé une histoire en arrière plan.

Quelques détails infimes sur lesquels mes yeux ont trébuché:
Quelques cafouillages au niveau du shifting des tongues: "pour aller à la gare de Central" ne m'apparait pas très harmonieux. Que préconise l'académie franglaise ? :-)

"Un magnifique paquebot, tout illuminé, passa majestueusement, occultant pour un bref instant le magnifique panorama" votre majesté ne surconsomme-t-elle pas de la magnificience ? Ou bien est-elle hyper big méga fan de ce film dans lequel Belmondo devient Bébel ?

Bien aimé le patronyme sino-coréen SUN qui peut être aussi rouge ou orange comme le soleil ou la tour illuminée (si choix involontaire, il s'agit donc d'un jeu de mot inconscient).

La fin est classe et sobre.
Bravo


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