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Sentimental/Romanesque
matcauth : Wander Landes
 Publié le 07/10/12  -  8 commentaires  -  15002 caractères  -  58 lectures    Autres textes du même auteur

Deux marginaux ont abusé du vin des sables. Pour le pire ou le meilleur.


Wander Landes


Ils portent le nom d’une bataille ou d’un grand homme. Boulevard Labre, les trottoirs sont en sable et la route n’est qu’un chemin ; il serpente entre les pins des Landes avant de s’échouer, à deux pas de l’océan Atlantique.


Vagabonds ou routards, oubliés, remisés, ils viennent ici planter leur tente ou garer leur caravane, mettre le plus de temps possible entre le passé et eux. Ils habitent boulevard Labre, le nom d’un grand homme.


Et la misère est leur passe-temps.


Beggar ne sait plus très bien quand il a posé sa valise dans cette communauté de marginaux du bord de l’océan. D’ailleurs, il est trop vieux pour s’en soucier. Il a garé sa caravane pour de bon, ici, au cœur de la plus grande forêt d’Europe. Son coin de vie n’a rien d’une villa et il s’en accommode. Parce qu’il ne sait rien du confort des gens. Parce qu’il n’a jamais su.


C’était même le dernier de ses soucis ce soir-là, tandis qu’il tentait de survivre à la noyade, s’agitant dans l’eau froide où il avait sauté sans raison. L’abus du vin des sables provoque d’étranges effets, il peut tout effacer et vous faire oublier que vous ne savez pas nager.


Vous faire passer l’envie de vivre.


Une ombre apparut sur le rivage et Beggar redoubla d’efforts pour se faire entendre, l’esprit remis en place par quinze degrés d’eau salée. Au sommet d’une immense digue de sable retenant l’océan, il reconnut la silhouette de Voilo, lui aussi naufragé des villes.


Voilo a le visage clair, de longs cheveux blonds, et il s’habille mal pour faire honneur à sa vie de bohème. Il habite dans le vieux phare de Contis, où le dernier gardien a éteint la lumière avant de partir, en 1970. Plus personne ne connaît le bâtiment, et il n’y a guère que l’Histoire pour lui trouver du charme.


Voilo, ne lui parlez pas de son passé, disent les habitants du quartier. Ne lui demandez pas pourquoi il se tient face à l’océan, les pieds campés dans le sable, de la nuit tombante à la nuit étoilée.


Quand Beggar vient le chercher.


Quand ils regagnent leur « salon », deux sièges de 2 CV posés autour d’un feu de veillée.


Beggar sort alors son Amati et Voilo chante à ses côtés des chansons d’autrefois, des proses improvisées, des airs voyageurs et des refrains charmants. Pour un moment, Voilo oublie son passé, celui d’un homme qui a tout quitté pour rejoindre le boulevard Labre, un soir de novembre. Juste après l’enterrement de son fils, victime d’un accident de bateau. La faute à un phare tombé en panne. La faute à personne.



Beggar, lui, se débattait toujours, de l’eau jusqu’au menton.


– Voilo ! Au secours !


L’intéressé s’approcha à quelques centimètres des premières vagues et s’arrêta net.


– Viens m’aider, bon sang !


Voilo ne pouvait pas. Une sirène, comme la voix de son fils, résonnait dans sa tête et lui interdisait de faire un pas de plus. Il fixait l’horizon, paralysé, et Beggar hurla. Enfin, Voilo entra dans l’eau. La sirène se remit à vibrer, dans chaque coin de sa tête. Pris dans la tourmente d’une cacophonie terrible, il ferma les yeux et prit une longue inspiration. Sa peur reflua, mais pas assez vite pour voir la vague qui s’abattait sur lui et le projetait contre un écueil luisant.



***



– Vous m’entendez ?


C’était la voix d’une sirène, une voix comme il n’en avait jamais entendu. L’infirmière plongea son regard bleu tout au fond de lui. Elle s’appelait Carmen. Elle portait une chevelure flamme qui trahissait son côté passionné et une paire de lunettes qui racontait son côté timide. Voilo fronça les sourcils.


– Je ne suis pas mort ?

– Non. Votre heure n’est pas encore arrivée. Vous pouvez remercier votre ami de vous avoir sauvé.

– Il ne sait pas nager !

– Il faut croire que la peur fait pousser des nageoires car il vous a sorti de l’eau et vous a amené jusqu’ici.


Elle posa ses mains sur lui. Elles étaient légères et semblaient attirer la douleur. Voilo ferma les yeux pour oublier leur contact.


– C’est une vilaine blessure, reprit l’infirmière. Plus question d’utiliser un tire-bouchon pendant les jours à venir.


Putain, de quoi elle se mêle ?


Carmen nettoya les plaies de son patient et entreprit de lui bander la main.


– Désolée de ne pas aller plus vite, je ne suis pas dans ce service, d’habitude.

– Vous ne vous occupez pas des gens qui se coupent la main ?

– Non, je m’occupe des petits vieux qui ne demandent plus rien !


Carmen termina son travail et se détendit un peu.


– Comment vous vous êtes fait ça ?


C’est très simple, on est deux épaves alcooliques et on passe le temps à essayer d’en finir.


– Eh bien… sur le chantier. On voulait retaper un vieux mur. Il s’est effondré et je suis tombé à l’eau.


On n’avoue pas facilement sa vie de marginal, on préfère emprunter les chemins de traverse. Carmen allait demander quelle était cette plage étrange où des ouvriers s’affairent à retaper des murs au milieu de la nuit. Elle s’en garda.


– Vous devez vous reposer. Je reviendrai demain changer votre bandage, ok ?

– C’est encore vous, demain ?

– C’est encore moi, demain. Après c’est fini, je retrouve mes petits papys.



***



Les personnes âgées, c’est pas seulement un travail, c’est une vocation. Elles ne demandent rien, ou alors elles demandent l’impossible. Et puis il y a pépé Raymond. Il se moque de tout. Et de lui, surtout. Car, dit-il, ce qu’on hait chez les autres, c’est ce qu’on hait chez soi. Il dit : « Je me paie ma propre tronche, ça m’économise. »

Au moins, il ne me met pas la main aux fesses. Il est gêné quand je l’accompagne pour faire sa toilette.


– Ma femme ne m’a jamais aidé à me laver, Carmen. Même quand je me suis cassé la gueule du toit, un lendemain de tempête, c’était en cinquante-quatre, qu’il a fait si froid, enfin bref, même là, j’ai continué tout seul.

– Elle aurait aimé vous aider ?

– Ah, peut-être ! Elle n’a jamais su comment je m’y prenais pour me raser, avec mes deux bras dans le plâtre. Voyez-vous, j’entretenais cette part de mystère. Et je crois qu’elle aimait ça !

– Et vous ? Qu’est-ce que vous aimiez, chez elle ?

– Tout, je crois. Et puis, elle avait une poitrine magnifique. Regarder les seins d’une femme, ça fait ralentir le cœur. Ma femme, je l’ai toujours aimée mais grâce à ses seins, Dieu me pardonne, je suis encore en vie.



***



Après quelques jours, sa main arborait une cicatrice qu’il contemplait sans arrêt. Voilo réservait toutes ses pensées à la belle infirmière.


– J’oserai pas lui dire que je vis ici.

– Il le faut, pourtant. Tu veux tout de même pas finir comme moi !

– Arrête, Beggar. Tout le monde t’apprécie, ici.

– Et personne ne m’envie.


Il était tard et le feu laissait les deux compères s’en remettre à la nuit. Une bouteille de vin des sables gisait sur le sol.


– J’ai rien à lui donner. Les belles épousent pas les clochards.

– Va t’acheter des fringues et trouve du boulot !

– Y a pas que ça.

– Fais-le j’te dis.

– Fiche-moi la paix. Joue du violon.

– C’est pas un violon ! C’est un Amati. Tu entends ? Un A-ma-ti !



***



Carmen en pinçait pour lui. Elle l’avait réalisé quand les couleurs de sa vie étaient devenues plus brillantes. Elle riait, non plus pour se cacher, mais parce qu’elle vivait.


Elle avait fini par aimer ses papys, sa petite famille provisoire.


Elle avait fini par penser que sa poitrine aussi prolongerait la vie.


– Vous avez l’air heureuse, Carmen.

– Je le suis.

– Le p’tit gars de l’autre jour ?

– Oui.

– Il est beau ?

– Oui.

– Il ne vous fait plus peur ?

– J’profite. J’veux pas de regrets. Vous avez des regrets vous, Raymond ?


Celui-ci avait déjà réfléchi à la question.


– J’aurais aimé voir le monde. Pour m’assurer que c’est ici qu’on est le mieux.

– C’est tout ?

– Non. J’aurais aussi voulu m’extirper un peu plus de mon fauteuil. Pour profiter des gens que j’aimais.


Je le sais bien, où il habite, j’ai vu son dossier. Dans une caravane, une tente ou une cabane, boulevard Labre. À la boulangerie, les conversations, c’est tout le temps pareil : la pluie, le chômage et les clochards du boulevard Labre. Et qu’ils nous dégueulassent toute la plage ! Et qu’on ose plus aller se baigner !

J’exagère.

Mais si ça continue, je finirai par manger du pain de mie.

Qu’est-ce qu’ils connaissent, les gens, de la vie des marginaux ? Les écorchés, les brûlés vifs, les exaltés. On n’est pas à l’abri.


Je ne sais pas pourquoi c’est lui. Mais c’est lui. Il m’empêchera d’avoir peur quand la nuit est trop longue, quand il y a trop de silence. Quand j’ai peur. Je voudrais juste l’entendre dire : je vis là-bas. Je veux être sûre qu’il ne sait rien cacher. Je veux qu’il se montre à moi, sans fard.


Le téléphone retentit, Carmen posa son stylo à plume.


Elle hésita.


Deuxième sonnerie.


J’aurais aussi voulu m’extirper un peu plus de mon fauteuil.


Troisième… Quatrième…


Profiter des gens que j’aimais.


Carmen se leva enfin et courut vers le combiné. C’était bien lui. Il avait quelque chose à lui avouer.



***



On voit arriver les voitures de loin, avec toute cette poussière qui danse dans le ciel. Il n’y en a pas beaucoup, des voitures. Le vendeur de gazole colporte quelques nouvelles ; l’assistante sociale vient baisser son quota de culpabilité avant les vacances ; des bénévoles s’inventent un destin saisonnier : sauveurs de l’humanité.


Ce soir, on vit arriver la voiture de Carmen.


Voilo avait mis une chemise et peigné ses cheveux. Il vint accueillir l’infirmière de Contis. Leur cœur battait vite.


Elle descendit de l’habitacle et salua Beggar qui, un peu plus loin, se prélassait sur son hamac en écoutant Georges Lang.


Carmen regarda autour d’elle. Elle voyait des caravanes garées pour l’éternité dans la cité des pins, des tonneaux allongés où la braise fumait, des tas de planches, des yeux tapis.


La demoiselle voudrait s’enterrer dans le quartier des indigents ?


– Je vais te faire visiter mon chez moi, proposa Voilo.


Le vieux phare de Contis trône, un peu retiré dans les terres, au milieu des plus hauts pins qu’il dépasse de quelques mètres seulement. Il a été construit peu de temps après que la forêt a couvert la terre des Landes. C’était il y a plus de deux cents ans et le sol alors était riche de bruyère et d’ajoncs.


Ils entreprirent de monter la première volée d’escaliers, vers l’ancienne salle de garde où se trouvent une cuisine sommaire, un lit, presque une paillasse, et une grande bibliothèque. Des dizaines de livres attendent en silence d’être à nouveau utiles. Carmen jeta un rapide coup d’œil et reconnut ses plus beaux voyages littéraires. Elle se souvint des cris du silence dans La promenade au phare, de la Sibérie si chère à Michel Strogoff, de la belle Islande des Gens indépendants, de l’Afrique blessée du Monde s’effondre. D’autres grands auteurs : Dostoïevski, Hoffman, Sand. Elle se demanda qui avait amené ces carnets de voyages. Lui ? Ou les gardiens de phare ? La seconde volée d’escaliers les conduisit à la salle de la lanterne.


– C’est ici que je viens le soir, dit Voilo. Je regarde les feux des phares de jalonnement, des bouées et des bateaux. J’ai l’impression de voir les lumières dialoguer entre elles.


Carmen parlait peu. Elle s’approcha de la lampe halogène, intriguée.


– Tu l’as rénovée ?

– J’essaye. Je dois encore redresser les lentilles et remplir la cuve de mercure pour les faire tourner. Et régler la fréquence des éclats. Et avant tout ça, je dois trouver du fric.

– Pourtant, ce phare ne t’appartient pas.

– Je pense pas à ça.


Carmen se tut. Après quelques minutes d’un silence d’ange, elle s’approcha des marches et dit :


– Il est tard, Voilo. Je vais devoir rentrer.


Elle bredouilla quelques excuses et disparut, le laissant seul, interdit et muet. Quelques minutes plus tard, en bas, Beggar regardait la voiture de Carmen s’éloigner vers la ville. Il éteignit sa radio et s’extirpa de sa Beggar’s banquette. En dessous, il dissimulait son étui à violon. Il ouvrit la boîte en merisier et contempla l’instrument pendant de longues minutes.



***



– Vous devez me haïr, Raymond !

– Vous l’avez laissé, comme on jette une vieille chaussette ?


Carmen hocha la tête. Raymond haussa les épaules et reprit :


– Aujourd’hui, les gens s’aiment, se quittent et se rabibochent. C’est comme ça.

– Chez Voilo, c’était sale. Je peux pas vivre là-bas.

– Vous disiez combien ça vous était égal de vivre avec un clochard.

– Je disais. Je dirai plus.


Je veux profiter des gens que j’aime… mais pas s’ils vivent dans un coupe-gorge. Et pas s’ils n’ont aucun avenir.



***



Deux jours passèrent avant que Beggar n’entende croustiller le sol jonché d’épines de pin. Voilo avait besoin de parler. Besoin de boire. Il s’approcha du feu, s’assit sur sa bûche et regarda longuement les flammes, avant de briser le silence :


– Les belles épousent pas les bêtes.

– Les belles n’épousent pas les fous qui veulent faire briller une ruine de phare sans autorisation.


Dans la région, seuls quelques habitants s’étonnaient de l’absence de lumière pour guider les bateaux. Trop peu.


– Un jour, ils viendront, reprit Beggar. Les gendarmes, les conseillers, les têtes pensantes. Ils te diront que ce phare n’est pas le tien. Qu’il est dangereux, comme toi.

– Sans ce phare, d’autres marins mourront.

– Sans lui, tu pourras enfin laisser tomber le passé. Et penser à demain.

– Je n’ai pas de demain. Je n’ai rien à donner à Carmen.


Beggar glissa sa main sous son fauteuil. Il prit l’étui à violon sur son giron et l’ouvrit. Dedans, il n’y avait qu’une petite enveloppe.


– Comment tu as fait pour me sauver l’autre jour ? demanda Voilo.

– Tu allais te noyer.

– Et tu ne sais pas nager !

– Non. Mais tu m’as offert une bonne raison de m’en tirer.


Il prit l’enveloppe et la tendit à Voilo.


– Tiens. Va en ville, achète quelque chose pour mettre sur ton dos et loue une petite chambre. Et appelle-la.



*




Il chante et il joue avec des instruments fabriqués par ses soins. Il a fait un gazou avec une carotte et du papier à cigarettes, un marimba avec des branches de sureau et un güiro avec des pommes de pin.


Quand il ne joue pas, il amuse la galerie en faisant le clown. Il se rase avec les pieds ou jongle avec des pommes. Les gens applaudissent, il amasse quelques pièces de plus.


Il a gardé son nom de scène, pardon, son nom de rue, afin d’attirer la clientèle américaine. « Le mendiant », ça sonne faux. Il préfère « Beggar ».


Le soir, il se sent un peu seul sur cette grande plage des Landes. Et plus question de mettre un seul orteil dans l’eau. Alors il s’assoit et contemple les lumières qui étincellent et se parlent, l’océan qui brille comme cent phares.


 
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   Anonyme   
21/9/2012
 a aimé ce texte 
Un peu
C'est beau, oui, c'est émouvant... mais j'y crois pas. La "suspension d'incrédulité" ne fonctionne pas avec moi.
1) Qu'est-ce qui empêche Carmen de fréquenter Voilo, de mieux le connaître peu à peu, de l'aider à s'en sortir, enfin de l'héberger ? C'est tout de suite "je vais vivre avec lui pour toujours" ou rien ?
2) Je m'étonne beaucoup qu'un phare au milieu d'un quartier de mendiants n'ait pas été investi, ne soit pas habité par plusieurs personnes ; c'est tout de même un abri plus sympa qu'une caravane !
3) La réserve de numéraire de Beggar ; non pas qu'il en dispose, mais qu'il la cède à Voilo comme ça. Il ne lui doit rien puisqu'il l'a déjà sauvé de la noyade... La figure de Beggar n'est pas assez approfondie selon moi pour expliquer sa magnanimité.

D'une manière générale, je trouve que le texte embellit par trop l'univers des clochards. Ceux que l'on découvre sont sublimes, les autres n'existent pas ; cela me gêne.

J'ai trouvé Raymond très touchant, et le mouvement du texte bon. Dommage qu'il ne m'ait pas convaincue, le texte, d'entrer dans sa logique...

   Anonyme   
25/9/2012
 a aimé ce texte 
Un peu
Un très beau texte qui malheureusement souffre d'une fin bien trop rapide, c'est ce qui me vient après ma lecture.

J'ai vraiment aimé la façon dont les personnages sont installés, dont ils prennent vie de façon claire, dans un contexte très limpide.

L'arrivée de Carmen est bien amené, même si le sauvetage de la noyade n'est pas très clair.

J'ai aimé le passage avec les personnes âgées et la volte-face de l'infirmière pendant le rendez-vous.

Et à partir de là, alors que rien ne le laisse présager, tout s'accélère et va trop vite ! J'avais à faire à un récit où tout était posé, où les choses prenaient le temps de s'installer, et d'un coup il y a un fin presque "balancée" au lecteur.

C'est vraiment dommage, parce que je le répète il y a une très belle plume derrière tout ça.

   alvinabec   
1/10/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour,
Ça n'est pas mal du tout, ça a de la gueule, pourtant il ne se passe pas grand-chose.
Les personnages sont là, évidents, naturels, alors même que l'auteur en a à peine dressé un portrait physique au début du texte.
L'intrigue, en demi-teinte, s'avère pudiquement traitée. La rédemption des deux acolytes s'annonce en douceur.
Qques remarques stylistiques: 15° d'eau salée, pas très heureux; Voilo, ne lui parlez pas de son passé, même remarque. Quant à la phrase 'on n'avoue pas facilement sa vie de marginal...traverse', non, ça casse l'ambiance, inutile de souligner lourdement pour votre lecteur...Faites-le savoir par un dialogue ou une action, l'impact sera meilleur et ressenti plus finement.

   Palimpseste   
4/10/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
au début, j'ai cru que je n'aimerai pas... et puis au bout de quelques phrases, je n'ai pas lâché.

J'aime beaucoup le ton du récit et ses personnages. Ce vieux phare qu'un vieux fou essaye de remettre en marche à cause de son fils mort en mer... Cette infirmière qui confesse qu'elle ne suivra pas l'homme qu'elle aime parce que c'est sale...

C'est très poétique... Du coup, j'aurais bien aimé deux choses contradictoires: avoir des prénoms moins "oniriques" pour mieux ancrer l'histoire dans un réel identifiable, d'autre part et, d'autre part, gommer les références aux Landes pour un faire un endroit qui pourrait être n'importe où.

Merci de ce beau texte, puissant et émouvant. Que demande-t-on de plus à un instant de lecture ?

   Anonyme   
7/10/2012
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Le texte est plutôt bien écrit, le style riche et vivant.
C’est la narration qui me pose problème. Il y a une diversité de narrateurs, qui à mon avis ne sont pas tous bienvenus.

Il y a d’abord le « narrateur omniscient » qui a une vision « par derrière », qui connaît tout de l’histoire des lieux, et de la psychologie des personnages. C’est une sorte de journaliste reporter qui nous livre les résultats de son enquête. C’est lui qui se manifeste dans les phrases :
- « Vagabonds ou routards, oubliés, remisés, ils viennent ici planter leur tente ou garer leur caravane » - « Et la misère est leur passe-temps. » Style journalistique/reportage.
Ce narrateur me paraît inutile dans un contexte littéraire. Le romancier doit montrer plus qu’il ne doit expliquer. Le contexte et l’action sont suffisants pour remplacer ces phrases. On retrouve ailleurs ce défaut explicatif :
- « On n’avoue pas facilement sa vie de marginal, on préfère emprunter les chemins de traverse ». Précision inutile, le lecteur a compris tout seul.

Et puis, changement brusque de narrateur :
« Et la misère est leur passe-temps. » Le narrateur est le journaliste reporter.
Phrase suivante : « Beggar ne sait plus très bien quand il a posé sa valise dans cette communauté de marginaux du bord de l’océan. » Le narrateur devient Beggar sous le contrôle du narrateur/reporter, puisque c’est toujours celui-ci qui raconte.
Autant la focalisation interne avec « la vision limitée » des différents personnages me paraît intéressante et suscite l’intérêt du lecteur, autant la focalisation du « narrateur omniscient » me semble ici maladroite et contre-productive puisqu’elle ne nous livre que des poncifs.

A part ça, je ne suis pas sûr d’avoir bien compris la psychologie de Carmen l’infirmière, ni la fin qui résout un peu vite le problème :
- « Tiens. Va en ville, achète quelque chose pour mettre sur ton dos et loue une petite chambre. Et appelle-la. »
Mais là c’est peut-être mon intelligence ou ma sensibilité qui est en cause.

   caillouq   
21/10/2012
 a aimé ce texte 
Bien
J'ai aimé l'écriture, simple et équilibrée, les rapports entre Voilo et Beggar, la description de cet espèce de No man's land au bord de l'Océan et l'évocation de ses rapports avec la population locale. Pépé Raymond, aussi, qu'on abandonne trop vite. L'histoire d'amour, trop rose et lisse, m'a moins convaincu (l'ellipse gomme trop les barrières mentales par-dessus lesquelles Carmen a forcément eu à passer).
Je resterai sur l'idée du phare et les images qu'elle a suscitées.

   MariCe   
25/10/2012
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Les mots parlent ; ils délivrent des vérités, des cris, de la révolte ou traduisent un passé.
Mais quand ils délivrent l'émotion pure, comme ici, authentique et viscérale, ils marquent des points.
L'amour peut tout, il sait vaincre tous les préjugés et réduit en cendres les barrières érigées par une société bien pensante.
Un grand moment d'émotion.

   hersen   
26/11/2016
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
je viens de vivre, le temps d'une lecture, le quotidien de deux cabossés. Et j'ai vraiment aimé parce que en fait, je n'y crois pas, et qu'on ne me dit pas comment ça se finit entre Carmen et Voilo et alors j'y crois.

J'ai aimé beaucoup la narration. C'est étonnant car il n'y a rien de particulier et pourtant, je suis là-bas, Bd de labre, donc c'est que la narration est très bonne; parce qu'elle est simple, je pense, on ne se perd pas dans des emberlificotements (tiens, le correcteur autom. me dit que ça n'existe pas. pourtant c'est un bon mot...).

Une fois n'est pas coutume :) la fin est vraiment à la hauteur du texte. je pense que ce suspense laissé à la bonne volonté du lecteur vient du fait que de Carmen, on ne sait pas tant de choses. l'auteur n'en a pas dressé un portait psychologique qui en aurait trop dit.

c'est juste que chez lui, c'est trop sale, elle ne peut pas.
Et Beggar dit à son pote, tiens, voilà des sous, habille-toi correctement et prend une chambre en ville.

C'est du très beau au milieu de la saleté.

Une très belle lecture.


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