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Sentimental/Romanesque
Mistinguette : Noces de chêne
 Publié le 20/05/10  -  14 commentaires  -  27921 caractères  -  129 lectures    Autres textes du même auteur

Flash-back sur une très très longue vie de couple...


Noces de chêne


« Happy birthday to you, happy birthday to you… »

Ça les ennuierait de chanter en français ces crétins, on est en France bordel !


Aujourd’hui, c’est nos noces de chêne à la Marie et à moi. Ça vous épate ?

Notre descendance, au grand complet, a rappliqué à Saint-Gaspard-les-Oubliettes, et, tout l’gratin des environs l’a rejointe pour glorifier l’événement. Y a même une équipe de télévision qu’est venue exprès d'la capitale. Pensez donc ! Quatre-vingts années d’mariage, même les parigots y voient pas ça tous les jours. Un exploit à c’qu’y paraît. J’veux bien les croire… C’est qu’elle a pas été marrante tous les jours la p’tite Marie, pas comme dans la chanson. J’mentirais en vous disant qu’le temps a passé vite ; seulement, au début du siècle dernier, quand on prêtait serment devant un cureton on prenait perpète.

Et nous voilà, huit décennies plus tard, moi, bientôt cent deux piges au compteur, et la Marie, une jeunette de quatre-vingt-dix-sept printemps.


On a engendré cinq rejetons nous deux : quatre galopins et une pisseuse ; de mon côté la liste est un peu plus longue…

Mais ça, chuuut… c’est un secret…


Hé oui ! Mon ami popaul il en a culbuté d’la poulette dans son jeune temps. Faut dire qu’à cette époque, l’éventail des distractions était restreint dans nos campagnes ; on disposait pas de l’Internet comme vous autres. Le turbin liquidé, on tuait l’temps comme on pouvait nous les gaziers.

Pour nos bourgeoises, la palette des divertissements était plus large. Ces dames avaient toujours un mioche à torcher ou un légume à éplucher ; sans compter les multiples fois dans la semaine où elles filaient entre commères se détendre au lavoir. Tout en se délectant du plaisir de rincer leurs cotillons à l’eau claire, elles passaient en revue les ragots du canton que, tel PPDA, elles nous condensaient le soir à la veillée en confectionnant les tricots dont on s’nipperait aux frimas.

Leur vie s’écoulait paisible et bien rythmée ; pas le temps pour nos épousées de frétiller avec le galant.


De toute façon, la Marie, ça la captivait pas trop ces affaires-là.

Oh c’était une bonne compagne, je vous l’concède, elle ne rechignait pas au devoir conjugal. Seulement, si t’escomptais un peu d’rabiot, tu pouvais te la mettre sur l’oreille pour la fumer plus tard. Et côté inventivité… j’en parle même pas !

Par contre, la Mathilde… oh là là, la Mathilde ! Une sacrée polissonne que cette bougresse-là. Elle et mon copain paul, ils s’en sont offert des flopées d’réjouissances dans les meules de foin… Après toutes ces années, j’en rêve encore… Paix à ton âme ma divine Mathilde ; et qui sait ? Peut-être que sous peu, quand je t’aurai rejointe dans l’au-delà, on remettra ça…

Parce qu’au paradis, si y a pas d'parties d'jambes en l’air, j'vous l’dis tout net : moi, j’veux pas y aller.


Y avait aussi Fernande (ha ! quand je pense à Fernande…) ou encore Félicie (quand j’pense à Félicie… aussi) et puis la très joviale Thérèse...


Mon Dieu mes p’tites poules, si vous saviez à quel point vous m’manquez.

C’est vrai que j’étais un incorrigible chaud lapin ‒ un lapin qui culbute les poulettes, avouez qu'c’est cocasse ‒, néanmoins, nous les mâles, en ce qui concerne le batifolage nos besoins sont considérables, c’est la nature on n’y peut rien. D’après vous, pourquoi y a qu’un seul coq dans la basse-cour ? Hein ?! Pourquoi ?!

Eh bien, les humains ne sont pas si différents des bestioles en fin de compte. Il en va ainsi depuis qu’le monde est monde...

J’ai pas raison messieurs ?


Pour en revenir à Marie, son truc à elle c’était l’hygiène. Rien ne la rendait plus heureuse que la propreté irréprochable de sa maisonnée. Un jour sur deux, nos couchages s’agrémentaient de draps fraîchement lavés ; la moindre petite tache sur une guenille, et vas-y que j’te savonne et que j’fonce au lavoir pour rincer tout ça. Je suis certain que si les journées avaient été plus longues, elle aurait pris en charge le linge du voisinage. À l’heure où ses copines se prélassaient depuis des lustres dans leur foyer, elle, elle s’activait encore à brosser, tordre, frictionner cotons et dentelles, parfois même, à la lueur d’une chandelle.

C’était pas une souillon la Marie, ha ça non !

Plutôt une mère Denis baisable ; la lavandière en chef de Saint-Gaspard-les-Oubliettes.


Jusqu’à ce funeste jour d’hiver, où, ayant inoculé à Mathilde le germe d’une mauvaise grippe, le Tout-Puissant jugea bon de l’expédier six pieds sous terre. Bien sûr le chagrin m’a cueilli, mais la vie coûte que coûte se poursuit, et d’autres gourgandines s’employèrent à éponger mes pleurs.

« Que le spectacle continue » comme il est coutume de dire quand un artiste a quitté la scène, et Dieu sait que la Mathilde était une artiste en son domaine…


Marie, pour sa part, sombra subitement dans un abîme de tristesse. Son visage se voila d’une rébarbative pâleur et ses rondeurs se liquéfièrent comme la glace à proximité d’un poêle. Elle, d’ordinaire si enjouée quand elle s’acheminait à la fontaine sa panière de linge sous le bras, se mit à déserter l’endroit ; déléguant notre fille à la tâche autrefois si prisée d’elle-même.


Soucieux de l’incompréhensible dépérissement de ma moitié, je décidai de négliger, pour un temps, mes accouplements clandestins, songeant que résidait peut-être là la raison de son tourment. Mathilde, en restituant son dernier soupir, aurait-elle fait des aveux pour soulager sa conscience avant de retrouver son créateur ? Ou bien était-ce le fait d’avoir perdu son amie qui plongeait mon épouse dans une telle détresse. Elles s’aimaient comme des frangines ces deux-là, pourtant, ça n’avait pas empêché Mathilde de trahir sa presque sœur.

Et si cette traîtrise se trouvait être le fin mot de l’histoire ?

Maintes fois j’eus le désir d’interroger Marie sur le sujet ; mais, très vite, je me ravisai de peur de m’égarer, et en fin de compte, amplifier sa prostration par les révélations que j’aurais inévitablement dû faire.


Durant cette période, deux de nos fils quittèrent le domicile pour partir au service militaire. Ce fait aggrava l’accablement de leur mère. Les médecins se succédèrent alors à notre porte, prescrivant pléthore de remèdes qui n’améliorèrent en rien la santé de Marie. J’ai bien cru la perdre à l’époque, et il s’en fallut de peu que je ne me retrouve veuf, ce qui, malgré mes incartades, était loin d’être mon souhait. J’y tenais moi à ma légitime.


Une fin d’après-midi de juillet où je rentrais des champs plus tôt qu’à mon accoutumée, personne dans la maison. J’allai voir au jardin, le lieu était désert. Escorté d’un sinistre pressentiment, je me rendis à la grange pour y jeter un œil. Encore aujourd’hui, je visualise cette scène comme si c’était hier. Ma moitié gisait là, recroquevillée dans le fourrage, les cheveux défaits, les yeux clos, étreignant dans sa menotte une fiole.

Complètement paniqué, je m’accroupis près d’elle et lui palpai la poitrine. Son cœur tambourinait toujours, mais pour combien de temps ?

Je détalai comme un azimuté pour quérir un docteur… Dans ma course enragée je percutai Jacques, un des vétérinaires du canton ; je lui exposai mon infortune. Mon ami m’entraîna aussitôt en direction du hangar où la vie s’éloignait de ma compagne. Je tentai de résister, Marie n’était ni une truie ni une vache tout de même. Mais, je pris soudain conscience que, le temps de dénicher l’homme ou la femme de la situation, il serait peut-être trop tard pour maintenir ma douce agnelle dans le monde des vivants. Je collai donc le train à Jacques.


Sur sa couche de graminées, le flacon libéré de sa main délicate, mon petit animal semblait heureux. L’énergie, en désertant ses veines, avait ressuscité ses traits juvéniles et un rictus quasi imperceptible éclairait son harmonieuse frimousse.

À ce spectacle, un déluge de pleurs m’assaillit les mirettes ; je suppliai l’Éternel d’attendre encore un peu avant de réquisitionner ma Marie pour entretenir son jardin céleste. Il avait, somme toute, assez de subalternes à sa botte. Et puis, il disposait déjà de la sienne de Marie, une vierge qui plus est, pourquoi me chaparder la mienne ? Dans la foulée, je l’implorai d’absoudre mes frasques passées, et jurai au divin maître de m’astreindre dorénavant à un quotidien monastique.


Jacques m’intima d’aller chercher quelques chiffons propres et de l’eau fraîche, puis de patienter dehors…

Je vous laisse imaginer la suite… la perception de chaque râle, de chaque crachement, de chaque suffocation me déchiqueta les entrailles et décupla mes larmes, me délivrant la sensation d’avoir perdu à tout jamais la vue. Cette belle soirée d’été se transposait en un lugubre crépuscule hivernal, à n’en pas douter, le plus haïssable de ma fabuleusement longue existence.


Oh je sais c’que vous pensez allez. Que ce cataclysme qui m’engloutissait, c’est tout c’que j’méritais, et que le châtiment, pour ma dépravation, fut encore bien trop infime. Car au bout du compte, ma dulcinée vécut bien sûr ; sinon, serions-nous là, par cette splendide journée, célébrant côte à côte nos noces de chêne devant une assemblée en délire.


Mais poursuivons… Le lendemain de cette sombre mésaventure, Jacques vint s’enquérir de la vitalité de son inhabituelle patiente. Je lui fis savoir qu’elle dormait, mais que tout allait pour le mieux ; elle avait même englouti un solide petit déjeuner. Au lieu de s’en retourner, il s’installa à la table et me quémanda une petite prune. J’extirpai du buffet deux godets et la flasque remplie du précieux nectar, puis, nous prîmes le verre de l’amitié que nous avions négligé d’ingurgiter la veille, anéantis par les fâcheuses circonstances.


- Il faut que j’te parle Émile ! lâcha-t-il.


Ha oui, au fait ! Avec toutes ces péripéties, je m’aperçois que je n’me suis pas présenté. Pourtant, malgré l’ampleur de mon âge, je peux vous assurer que je n’compte pas ce salopard d’Alzheimer parmi mes intimes. Alors voilà, moi, c’est Émile. Ravi de faire votre connaissance.

Mais revenons à nos brebis :


- Vas-y, je t’écoute Jacques.

- Émile, j’ai plusieurs choses à te dire. D’abord, comment tu fais pour te débarrasser des rongeurs ?

- T’en as des questions bizarres. Ben, on avait Félix, not’chat, souviens-toi, c’était un cadeau d’ta part, pour nos noces à la Marie et à moi. D’ailleurs, il va falloir que je songe à lui trouver un remplaçant, il a trépassé cet hiver, à peu près en même temps qu’la Mathilde. Note bien qu’il était plus tout jeune. Vingt-cinq ans, j’crois qu’c’est le maximum pour un greffier ; pourtant y paraissait en forme.

- Je t’en trouverai un autre Émile, inquiète-toi pas pour ça. C’que j’voudrais savoir, c’est si tu utilises quelquefois du poison ?

- Du poison ? Ha ça jamais d’la vie ! J’suis contre toute cette chimie. Crois-moi, dans cinquante ans, pour sûr que j’me bidonnerai dans ma tombe en lorgnant de l’au-delà la terre se venger de toute cette saloperie qu’on lui aura fait bouffer. Mais pourquoi tu m’demandes ça ?

- Ben, justement, je pensais à un produit naturel.

- De quoi tu m’causes ?

- Le laurier, t’as déjà entendu parler ?

- Bien sûr que j’ai entendu parler du laurier, tu m’prends pour un benêt ou quoi ? La Marie elle en met toujours dans ses ragoûts.

- Non, pas celui-là, l’autre !

- Quel autre ?

- Le nerium oleander… le laurier-rose si tu préfères… c’est un arbuste en provenance du midi.

- Ha ! Et y pousse par chez nous c’machin ?

- Par ici on n’en trouve pas à l’état naturel, mais rien ne t’empêche d’en acheter un pour le planter chez toi.

- Admettons ! Et alors ?

- Et alors… Figure-toi que c’est un végétal des plus toxiques, on s’en sert pour fabriquer la mort-aux-rats. Sachant ça, y a des p’tits malins qu’extraient eux-mêmes la sève pour fabriquer leur poison maison ; sans passer par un boutiquier.

- J’suis pas au courant de c’que tu m’jaspines, j’te l’ai dit, moi c’était Félix ma mort-aux-rats.

- Si j’te raconte tout ça, c’est parce qu’hier, c’est à cause d’une décoction de laurier-rose que ta Marie elle était à deux doigts d’expirer. Alors, je voulais savoir si tu savais d’où elle la sortait sa potion ?

- ???…

- Émile ! Ça va mon vieux ?

- T’es sûr de c’que tu dis ?

- Hélas oui. J’ai un ami chimiste qu’a analysé le restant du flacon…

- Merde alors ! Faut que j’me r’serve un p’tit gorgeon… J’t’en remets un ?

- Si tu veux.

- J’ai pas de réponse à ta question Jacques, mais crois-moi j’vais mener mon enquête… et quand j’tiendrai le fils de pute qu’a failli tuer Marie, ça va chauffer pour son matricule !... Et t’en as d’autres des révélations du même acabit ?

- C’que j’avais encore à dire, c’est que j’crois bien que j’ai la solution pour guérir ta femme.

- Ha bon ! Raconte-moi ça !

- Eh bien voilà… Il se trouve que j’ai, en quelque sorte, un collègue qui me file un coup de main en cas de maladie récalcitrante du bétail…

- Holà, Holà ! Je t’ai déjà dit que la Marie c’était pas une vache.

- Je sais Émile, je sais, mais il soigne aussi les humains. Et puis qu’est-c’que t’as à perdre, hein !? Hier on l’a sauvée d’justesse ; la prochaine fois, la chance sera peut-être pas au rendez-vous.

- D’accord… d’accord… et c’est qui ton zigue ? Où on peut l’trouver ?

- En fait c’est un magnétiseur, et il habite à Brive-la-Gringalette.

- Quoi ! Un r’bouteux ! Tu sais c’que j’pense de ces charlatans.

- Je sais, oui ; mais encore une fois, t’as rien à perdre. Ça fait plus d’six mois qu’c’est un vrai zombi ta Marie, elle a plus qu’la peau sur le squelette. Y a pas grand risque à tenter l’coup, crois-moi.

- Soit ; mais Brive-la-Gringalette c’est à Pétaouchnoc. Comment j’fais pour y aller moi ? Tu sais bien que j’ai pas d’auto. Et le train, j’crois pas qu’il desserve ce trou… Y a un autocar au moins qui va par là-bas ?

- C’est vrai, y a pas de train. Mais y a possibilité de s’y rendre en car. Le problème, c’est qu’avec les arrêts, il met une demi-journée pour faire le trajet.

- Ça, c’est sûr que c’est un embêtement. On est en plein dans les moissons moi et les garçons. On a du boulot par-dessus l’bourrichon. Qui c’est qui va accompagner Marie ? Je doute qu’elle ait la force d’y aller seule… Et notre fille est plus là. Mademoiselle se prend pour une savante. Tu sais qu’elle est partie chez les rosbifs pour apprendre leur jargon ; j’te d’mande un peu à quoi ça va bien pouvoir lui servir ?

- Bon, dans c’cas-là, j’ai une autre idée.

- Je t’écoute Jacques.

- Alors voilà ; je t’explique… Il se trouve que Pierre et moi, on soigne les chevaux d’un haras à Brive-la-Gringalette. Étant donné que le cheptel est important, on est obligés de s’y rendre plusieurs fois par semaine. J’avais pensé, qu’éventuellement, on pourrait convoyer Marie dans un sens ou dans l’autre. Vu que le tenancier gère aussi une auberge dans l’enceinte du haras, en cas de besoin, elle aurait l’opportunité de dormir sur place. Qu’est-c’que t’en dis?

- On ?

- Enfin… Pierre.


Bon, là, faut que j’vous explique :

Jacques avait un frère cadet : Pierre. À cette époque, tous les deux dirigeaient le cabinet vétérinaire du village. Jacques s’occupait des clients sur place, Pierre, quant à lui, sillonnait la campagne avec sa vieille traction pour dispenser ses soins au bétail des fermes environnantes. Jacques, père de famille affable et enjoué, se tenait toujours prêt à rendre service. Pierre, lui, se faisait plus discret ; c’était un grand gaillard au physique avenant, mais taciturne et d’humeur souvent maussade ; sans doute à cause du célibat consenti, par devoir plus que par conviction, pour prendre en charge sa mère ‒ femme à la santé précaire ‒ devenue veuve après la mort du paternel à la guerre. Le problème résidait que si Marie tolérait Jacques, en ce qui concernait Pierre, la chose différait totalement. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces deux-là ne disposaient pas d’atomes crochus. Pourquoi ? En fait je n’ai jamais su ; les rares fois où je questionnai Marie, elle se ferma comme une huître. Un différend qu’ils auraient eu dans leur jeunesse, sans doute une broutille ; mais les paysans par ici ont la rancune tenace. Je connais deux familles du canton se dédiant une haine farouche, parce qu’en mille huit cent cinquante-sept, l’ascendant de l’une avait ratiboisé les branches d’un érable appartenant à l’aïeul de l’autre. Le malheureux arbre procurait, soit-disant, une ombre excessive à un prunier ; ce qui, cette année-là, réduisit paraît-il de moitié la récolte destinée à l’alambic. On ne badine pas avec l’eau-de-vie locale.


- Alors, Émile, t’en penses quoi d’mon idée ?

- Je songe que c’est pas gagné. Et ton frère il est d’accord ?

- Mon frère ; je l’ai imploré de te rendre ce service. Je lui ai dit qu’avec Martha on s’occuperait de la mère plus souvent. Et puis je lui ai raconté pour hier, c’est vrai qu’il a une bobèche de goret, mais au fond, c’est un bon bougre.

- T’es vraiment brave Jacques. Y a plus qu’à persuader ma bourrique d’épouse ; et ça, c’est pas dans la poche !… À c’propos, tu l’connais toi, le motif de leur fâcherie ?

- Non.

- T’es sûr, j’crois plutôt qu’tu veux rien m’dire.

- J’te jure Émile, j’en sais rien.

- Tiens ! J’entends du bruit. Ça c’est Marie qui s’lève.

- Tu veux que j’lui en parle du guérisseur ? J’crois qu’j’arriverai à la convaincre plus facilement qu’toi.

- J’osais pas te l’demander.


Et Jacques, arguant je n’sais quels boniments, extorqua à ma moitié la promesse de se faire soigner par l’anticonstitutionnel médecin. Il fut aussi convenu, que pour se rendre à Brive-la- Gringalette, Pierre véhiculerait Marie dans son antique traction.

Vous vous demandez sans doute, comment mon ami a réussi à faire entendre raison à une créature aussi cabocharde ? Sachez qu’aujourd’hui encore, je m’interroge avec vous.


Dans la soirée, Jacques revint nous déposer le matou promis, une attendrissante boule de poils qui fut baptisée Félix deux. Les jours qui suivirent, Marie le cajola comme si elle l’avait enfanté ; en vérité, je trouvais ça plutôt ridicule, mais, fait curieux, au contact de l’animal, ses angoisses semblèrent en partie se dissiper. La semaine d’après, elle entama sa thérapie. Au début, sa santé s’améliora peu, puis au fil des mois, comme par magie, son corsage se gonfla de nouveau ; même, à mon infinie satisfaction, encore plus généreusement que par le passé. Le rose se réinstalla sur ses pommettes, et cerise sur le gâteau, un malicieux sourire se fraya un chemin jusqu’à sa bouche de poupée. Si elle ne s’était pas déjà trouvée être mon épouse, je me serais sur-le-champ agrippé à ses jupons pour la conjurer de m’accorder sa main. À l’âge où tant de femmes, en ces temps reculés, contraintes de faire le deuil de leurs appâts se laissaient happer par la vieillesse, son impudente beauté faisait un pied de nez aux années écoulées, s’affichant plus torride que la joliesse stérile de toutes les jouvencelles de Saint-Gaspard-les-Oubliettes réunies. Je dois reconnaître que depuis cette époque, mon opinion sur les magnétiseurs et autres marabouts a changé du tout au tout.


Hélas, le saugrenu toubib nichait à perpette, je ne voyais plus guère ma dulcinée, qui, son baluchon et Félix deux sous le bras, se coltinait maintes fois dans la semaine le trajet jusqu’à Brive-la-Gringalette ; y passant de plus très souvent la nuit. Précisons que ses relations avec Pierre, sans pour autant être mirobolantes, se bonifièrent quelque peu.

Quand enfin Marie fut guérie, le patron de l’établissement, où elle logeait lors de son traitement, lui proposa, en échange d’un conséquent salaire, de s’occuper du linge de l’auberge et du haras. Ce qu’après avoir sollicité mon avis, elle accepta. La voyant si enthousiaste et épanouie, je n’eus pas le cœur de lui refuser cette opportunité.


Nous prîmes donc une bonne, plus exactement une technicienne de surface, comme il est de bon ton de nommer de nos jours les larbins. Un tendron aux miches dodues, à la cuisse ferme et aux mamelles haut perchées. Un peu godiche certes, mais ne ménageant pas sa peine pour s’acquitter de toutes les tâches du foyer (j’ai bien dit toutes les tâches…).

J’entends d’ici marmonner les dames : « Que fait-il de l’engagement pris un soir de désespoir auprès de notre Père éternel ? Ah ces hommes ! On ne peut pas leur faire confiance !… et blablabla et blablabla… ». Permettez-moi de m’insurger ; d’une part parce que j’avais enduré l’abstinence pendant de longs mois, et d’autre part parce que je ne sais pas où vous avez été pêcher que mon vœu de chasteté s’avérait être éternel. Saperlipopette ! Je n’étais pas un ecclésiastique tout de même !

Enfin bref. La vie reprit donc un cours normal : moi à Saint-Gaspard-les-Oubliettes n’opposant plus de résistance aux sommations de mes hormones, et la sage Marie désencrassant ses chiffons au lavoir de Brive-la-Gringalette.


Bon ! À présent, je me vois dans l’obligation de vous abandonner. Ma bourgeoise et moi-même devons faire le tour du village dans l’ancestral tacot de mon très british arrière-petit-fils, grand amateur de bagnoles d’antan…


- Allez ma chérie, grimpe là-d’dans que j’te fasse ta fête !


Quel fanfaron ! Et avec quoi tu vas m’la faire ma fête mon vieil Émile ?

Sûrement pas avec ton pote paul qui roupille depuis belle lurette.

Je vous jure, ces bonshommes…

Et dire que moi, Marie, ça fait quatre-vingts ans que je suis mariée à cet olibrius. Pour sûr que si j’avais su, j’aurais pris la poudre d’escampette le jour de mes noces.


- Fais donc attention Émile ! Tu vas écraser Félix cinq. Viens sur maman mon bébé.


Mon Dieu, quelle étrange sensation de rouler dans cette vieille guimbarde ; tous ces souvenirs enfouis qui émergent soudain…

Tiens ! La place du village…

Je me rappelle mon dix-septième anniversaire, ce jour-là, mon amoureux m’avait promis d’affronter sa génitrice ‒ qui me vouait une animosité vivace ‒ et de s’exhiber cramponné à mon bras le soir à la fête du village. Depuis deux années qu’il était mon galant, par la faute de cette harpie, nous ne nous retrouvions qu’en catimini. Seules ma mère et mon amie Mathilde partageaient ce secret. J’avais passé cet après-midi-là, une fois n’est pas coutume, à dorloter ma p’tite personne. Maman me shampouina la chevelure avec une mixture parfumée de sa composition ; Mathilde, elle, me tressa artistiquement les cheveux en y entrelaçant des rubans de soie ornés de miniroses odorantes. Et, en touche finale, je pigmentai mes lèvres avec le jus d’une cerise (parce que je l'valais bien !). Puis, enfin, clou du cérémonial, j’enfilai la fabuleuse robe en taffetas pourpre que ma mère chérie avait, depuis des semaines, occupé ses veillées à confectionner pour moi.

Grâce à mes deux complices, j’allais être, à coup sûr, la plus jolie du bal.

Or, je ne savais pas, que ces parfaits instants de bonheur se faufilaient dans l’ultime journée d’insouciance de ma très longue vie.


En début de soirée, je filai en douce rejoindre mon bien-aimé à notre habituel lieu de rendez-vous : un cabanon accolé à l’église et soustrait aux regards par la végétation dense d’un chèvrefeuille enchevêtré à un lierre.

Hélas, rien ne se passa comme prévu. Mon homme ayant averti sa marâtre de son projet d’officialiser notre amour, la vieille bique lui fit le coup du palpitant qui flanche. Comble de l’ironie, ce grand dadais goba la pantalonnade, ce qui l’accula à reconsidérer sa promesse. Furieuse, je quittai sur-le-champ la cabane, fonçant vers la place du village où la fête battait son plein et où la piquette locale coulait à flots. J’éclusai alors quelques goulées en me précipitant, au hasard, sur le premier beau garçon venu pour qu’il me fasse gambiller. En l’occurrence, ce fut Émile le lauréat de cette singulière loterie. Ravi de me voir dans d’aussi plaisantes dispositions à son égard, il m’entraîna dans une cohue de cabrioles, et nous guinchâmes jusque tard dans la nuit ; non sans omettre de nous désaltérer au tonneau du buffet.


Soudain la musique cessa… Aimablement, Émile se proposa de me reconduire au bercail ; il mit son paletot sur mes épaules, prit ma main, puis m’attira vers un sentier de traverse…

Je l’aimais bien Émile, il était gentil, drôle, intelligent, courageux, toutes les qualités dont une femme rêve pour son homme. Le seul problème, mais pas des moindres, c’est qu’il se trouvait être un incurable trousseur de cotillons. Je me souviens, naguère, je plaignais la pauvre fille qu’il prendrait pour épouse.

Ça vous fait sourire ?... Oui ; aujourd’hui moi aussi.


Donc, Émile me raccompagna. Chemin faisant, il se figea et fit pivoter son visage vers le mien ; son regard s’ancra dans mes prunelles, puis, un peu maladroit, il se pencha pour m’embrasser. Surprise, j’esquissai un bref mouvement de recul ; mais, troublée par sa délicatesse, je m’abandonnai sans retenue à la tendre étreinte. Il faut dire que l’énergie dépensée en dansant, autant que le vin absorbé, avaient converti ma rage en quiétude ; et en toute honnêteté, ce baiser fut très agréable. De plus, je ressentais un gratifiant sentiment de vengeance à l’égard de mon dégonflé d’ex-futur fiancé.

Émile, les yeux pleins de malice, me tira alors dans le champ de blé qui n’attendait que nous… S’ensuivit, bien évidemment, ce à quoi vous pensez...


Trois mois plus tard, enceinte de mon premier fils, je prêtais serment devant Dieu et les hommes. Il y a de cela, jour pour jour, quatre-vingts années… une éternité…


Oh ! On arrive devant l’église. Ce petit arbre méditerranéen, que j’avais planté près du cabanon, il est devenu énorme ; on le voyait à peine jadis. C’est quoi son nom déjà ?

Et le cimetière à côté… tant d’êtres chers s’y reposent…

Mathilde, ma douce amie, ma sœur, m’as-tu pardonnée d’où tu es ?

J’en ai versé des larmes de sang quand, par ma faute, tu as tiré ta révérence.

Sais-tu que, comme toi, j’ai voulu mourir ?

Aussi, qu’est-ce qui t’a pris ?… Émile t’avait donc à ce point envoûtée ?…

Tiens, j’aperçois le lavoir. Je me demande par quel miracle les pipelettes de l’époque ne se sont jamais rendu compte de ton manège…

Mais pourquoi, pourquoi as-tu rejoint Émile ce soir-là ?

Tu étais censée être clouée au lit à soigner ta grippe. Et ce couillon qui t’a fait goûter le ragoût mitonné pour l’assommer juste quelques heures. Sur sa corpulente carcasse, ma tambouille est restée sans effet… Malheureusement, elle a été fatale à ton organisme déjà fragilisé par la maladie.

Mon pauvre Félix non plus n’a pas supporté les restes du fricot que lui refila Émile.


Ma chère Mathilde, ma très chère complice, encore merci pour ces monticules de frusques que tu t’es exténuée à décrasser à ma place… pendant que je folâtrais dans les bras de mon amoureux…

Certes, étant célibataire, tu disposais de plus de temps que moi, et en plus de la menue monnaie, tu avais carte blanche avec Émile ; mais le jeu en valait-il la chandelle ?

Tu n’es plus là pour le dire…


Me vois-tu de là-haut ? Dans cette vieille traction que Pierre a offerte à « notre » arrière-petit-fils.

Ironie du destin, c’est dans cette auto que sa grand-mère a été conçue…


Pierre, mon bien-aimé, mon tendre amour, toutes ces années à s’ignorer en public et à s’aimer clandestinement…

À cause d’un moment d’égarement de ma part ?… En raison de ta couardise ?...

Au fond, quelle importance ?...

Ce que j'espère, c'est que ta mère rôtit en enfer…


Maigre compensation, à travers tes matous j’ai toujours eu un peu de toi à mes côtés…


Tiens ! On approche de : « L’Avant-Dernière Demeure » (joli nom pour une maison de retraite).

Hello mon amour ! Félix, mon minet, fais coucou à papa.


Tu sais Mathilde, j’ai pas mal cogité ces derniers temps.

Je crois que j’vais aller du côté de l’église glaner quelques boutures...

Ça te dirait de revoir ce bon vieux Émile ?

Il me semble qu’à quatre-vingt-dix-sept printemps, il est temps que je vive mon amour au grand jour… NON ?!


 
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   florilange   
13/4/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Ben, il s'en passait des choses, dans les campagnes... à notre nez et à notre barbe! Elle est bien amusante, cette histoire, je l'ai lue en souriant de plaisir.
Je m'attendais un peu à la fin - une partie en tout cas - mais j'aime cette présentation, en deux parties.
Ce n'est pas mal écrit, malgré quelques broutilles qui n'ont pas vraiment gêné la lecture.

   Anonyme   
14/4/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour

Un très agréable moment de lecture. Des petits bémols ici ou là cependant.
Le premier : il a l'air sûr de lui quand aux enfants qu'il aurait fait ici ou là, j'aurais préféré qu'il doute ou suppose, plutôt qu'il affirme, parce que bon, dans un village à cette époque, ça aurait dû finir par se savoir.
J'ai trouvé le début excellent. Le ton très bon avec les mots mangés et les expressions cocasses. J'ai regretté que par la suite le langage soit plus écrit, surtout dans la seconde partie. Vers la fin, le langage revient comme au début, et c'est très bien. D'un autre côté, si toute la nouvelle avait été écrite avec des apostrophes partout ça m'aurait semblé fastidieux. Mais il y a quand même entre les deux écritures, une différence marquée qui pourrait être réduite, enfin je pense. Maintenant c'est affaire de goût.

Il y a un moment où la femme prend le relais et raconte tout ce qu'Emile ne pouvait évidemment pas savoir. C'est très bon mais visuellement parlant, dans le texte, il manque un changement de chapitre.

J'aime beaucoup le fait qu'il sache sans savoir, qu'il ait des doutes, sans avoir la moindre envie d'y voir plus clair. Il pourrait paraître idiot, mais ce n'est pas l'impression que j'ai. Il n'est pas idiot du tout ni complètement naïf, c'est très bien écrit.

Je n'ai pas du tout aimé les quatre lignes qui précisent qu'Emile s'appelle Emile. Point n'était besoin, il me semble en tout cas, moi, ça m'a fait sortir de la lecture. Mais j'y suis retournée ensuite avec plaisir.

Le passage concernant la découverte de Marie la fiole à la main n'est pas évident. J'ai pensé qu'elle avait bu et qu'elle s'était endormie. Bien sûr, il y a les allusions à sa perte de poids qui suggèrent soit la maladie, soit la dépression mais de là à penser qu'elle avait tenté de se suicider...

La conversation avec Jacques lève le voile mais même là je trouve qu'il manque quelque chose, des interrogations de la part d'Emile. Pourquoi ce geste ? Il ne semble par surpris du tout le : "rien ne dit qu'elle ne recommencera pas " de Jacques est déterminant mais Emile semble assez froid. Ne réagit pas, avant, ou après. Rien ne m'a préparée ou alertée, quant au geste de Marie.

Une nouvelle bien construite, des personnage vraiment très bien dépeints, et toutes mes questions en cours de lecture qui trouvent des réponses... du bon travail et un très bon moment de lecture.

   Anonyme   
14/4/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
« Par contre, la Mathilde… ho là là, la Mathilde ! Une sacrée polissonne que cette bougresse là. » :
Henri IV, un fin bretteur et un polisson s'il en fut, un jour de faiblesse, eut cette réflexion devant ses maîtresses : et moi qui croyait qu'elle était en bois ?
« J’suis pas au courant de c’que tu m’jaspines » : j'aspiner est plutôt de l'argot parigot.
« Brive La Gringalette » : chez nous on dit la Gaillarde.
« (j’ai bien dit toutes les tâches…) » : inutile, on avait compris.
« Je n’étais pas un ecclésiastique tout de même ! » pour en avoir cotoyé un certain nombre dans ma jeunesse, du temps où ils portaient soutane, je peux vous dire qu'il l'avaient souvent entre les dents (la soutane bien sur).
« Ce que j'espère, c'est que ta mère rôtit en enfer… » : rotisse...
Ils ont l'humour rugueux vos personnages.
Bonne nouvelle : bonne nouvelle. J'ai souvent souri.

   Anonyme   
29/4/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Un texte pas désagréable du tout, une narration sympathique et une chute bien plaisante.

Mais, j'ai été rebuté par le passage incessant de l'argot au langage soutenu. Non que je craigne les deux, mais l'argot du narrateur sonne très titi parisien, alors que lui est un vrai rural. Et ça ça me gêne vraiment. Parce que ce n'est pas logique du tout justement. Son langage ne refléte rien de ce qu'il est vraiment et ça casse le texte.

Je le répéte, j'ai aimé l'histoire, mais cette langue ne colle pas.

   Perle-Hingaud   
10/5/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
C’est une nouvelle dans laquelle on sent la présence de l’auteur. On veut nous la rendre sympathique, cette histoire, et j’ai bien envie de me laisser embarquer. Mais plusieurs éléments freinent mon enthousiasme :
- j’ai déjà un problème avec le vocabulaire utilisé par Emile, le narrateur. On navigue entre argot et langage soutenu qui décrédibilise le personnage : ex : «Soucieux de l’incompréhensible dépérissement de ma moitié, je décidai de négliger, pour un temps, mes accouplements clandestins, songeant que résidait peut être là la raison de son tourment. » tranche malheureusement avec, un peu plus haut : « Parce qu’au paradis, si y’a pas d'parties d'jambes en l’air, j'vous l’dis tout net : moi, j’veux pas y’aller. », ou « J’osais pas te l’demander. »
Pour moi, c’est un pb majeur, tout du long de la nouvelle : ces deux extrêmes pour le même personnage.
- quelques difficultés, parfois, avec les tournures de phrases : ex : « mais, très vite, je me ravisai de peur de m’égarer, et en fin de compte, amplifier sa prostration » d’amplifier ? ou de ponctuation « J’y tenais moi à ma légitime » : manque de virgules ?
- sur le fond, bon, c’est une bonne farce, pourquoi pas. La mort de Mathilde me semble tout de même improbable, ainsi que la tentative de suicide de Marie ensuite, mais ce n’est que mon avis.
Une lecture plaisante, mais des maladresses à mon sens.

   NeX   
21/5/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Malgré la longueur du texte, j'ai lu d'une traite et jusqu'au bout ce qui en soi est déjà un très bon point.
Le premier problème c'est la chute. Désolé mais j'avais déjà compris le dénouement au milieu de l'histoire (peut être parce que ça reste classique ?).
On reste dans l'histoire, on attend une fin sans être surpris. Ça m'a un peu frustré. Etre toujours dans l'interrogation pour au final s'entendre dire ce à quoi on s'attendait.
Je n'attache pas réellement d'attention pour ce texte à la forme car rien ne m'a vraiment frappé (les problèmes de vocabulaire étant pour moi vraiment pas gênant du tout car je n'étais pas renseigné). Je trouve que le texte est bien mené même si le "switch" entre les deux narrateurs aurais pu être mieux amené.
Dans l'ensemble, j'ai eu le sourire donc je pense que la nouvelle à atteint son objectif.
Les deux personnages sont bien vivant, bien créés sans surplus juste ce qu'il faut. Ce que je veux dire c'est qu'on a matière à imaginer sans pour autant être trop guidé.
J'étais plutôt content à se niveau là.
Sans être donc un texte parfait, j'ai vraiment pris un certain plaisir à la lire mais je n'en prendrais pas à la relire. Dommage car vous nous emmeniez, un retournement de situation, un inattendu et c'était vraiment un texte qui serait à marquer dans le "chêne".

Amicalement

Nex

   Flupke   
21/5/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Minstinguette,

Une nouvelle intéressante, agréable à lire. Le style mixte, langage châtié /argotique, me rappelle les San Antonio de ma jeunesse.
De l’humour, un portrait bien tracé pour Émile et des trouvailles agréables

Bien aimé :

Mon ami popaul il en a culbuté d’la poulette dans son jeune temps.

je suppliai l’Éternel d’attendre encore un peu avant de réquisitionner ma Marie pour entretenir son jardin céleste.

Quelques remarques :
ragots du canton QUE, tel PPDA, elles nous condensaient Ce QUE semble alourdir la phrase. Peut-être serait-il intéressant de la reformuler avec davantage de fluidité.
par l’anticonstitutionnel médecin => hors la loi oui, mais anticonstitutionnel, je ne pense pas qu’il mette en danger les instituions de la république. Illégal ou douteux ?

Le changement de voix narratrice gagnerait à être plus clair, distinct. Style *** centré entre deux paragraphes.
Globalement, un texte suggestif d’une volonté d’améliorer la forme. La perspective de progrès prometteurs.
Bravo.
Amicalement,

Flupke

   bluejam   
23/5/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Pour moi, le style volontairement argotique désert le texte, car argot mal maîtrisé. J'ai eu l'impression d'un enfilage de clichés.
Même avec l'argot, il faut que le lecteur soit surpris, soit emmené ailleurs. Bref il faut aussi des trouvailles. Ce n'est pas le cas ici.
Je suis donc passé totalement à côté de ce texte. Dommage !

   alpy   
24/5/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Je trouve que l'argot continu d’Émile devient un peu lourd à fur et à mesure que son monologue avance. De plus, des phrases soutenues tels que "Soucieux de l’incompréhensible dépérissement de ma moitié, je décidai de négliger, pour un temps, mes accouplements clandestins, songeant que résidait peut-être là la raison de son tourment." sont incompatibles avec son argot.

Concernant l'histoire, avant qu’Émile finisse sa part j'avais déjà tout compris du dénouement ce qui a fait que la part de Marie (à mon avis beaucoup plus fluide en terme de rédaction) ne m'apporte rien.

Je pense qu'il faudrait raccourcir un peu le monologue d’Émile (à la fois pour laisser plus de surprise au dénouement et pour alléger le texte).

   Chiffon   
25/5/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Tout cela est très inégal. Je remarque comme tout le monde des incohérences dans la narration : l'auteur remplace régulièrement ses personnages, qui perdent en crédibilité. Le style soutenu est généralement bon, l'argot aussi, mais passer de l'un à l'autre dans une même bouche perturbe vraiment.
Il y a aussi des petits traits d'humour qui sont souvent drôles mais contribuent au manque de crédibilité.
L'ensemble est un peu long à mon goût, et la "chute" ne procure pas d'émotion particulière.
Bref un talent d'écriture indéniable, et qui plus est pluriel. Mais moins de maîtrise des personnages, de l'environnement et du discours.
Cependant, c'est tout à fait courageux de s'attaquer à du vieillard et à la campagne. je préfère ça que des histoires niaises où on choisit un enfant comme narrateur pour ne prendre aucun risque.
Il faut persister en jaugeant mieux la cohérence, et quelques textes géniaux émergerons.

   Anonyme   
25/5/2010
 a aimé ce texte 
Pas
Je n’ai pas accroché à ce texte. Beaucoup de passion pour construire sur autant de clichés ruraux. Alors, ma question, dans quel but ? Les clichés comme ressort humoristique dans un texte dégraissé et moins bavard ? Sortir du premier degré ? C’est dommage, l’auteur s’attache à ses personnages, à son histoire, en oubliant, peut-être, au passage, le lecteur.

   MCboulette   
28/5/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Je n'ai pas accroché moi qui me suis gavé et re-gavé avec "le nez de léonard" ,je reste sur ma "fin".Les personnages n'ont pas le caractère en rapport avec leur argot . Dommage...J'ai bien aimé l'idée ainsi que la construction...bye

   Anonyme   
7/9/2011
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
J'ai été happée par les personnages amusants et bien campés dans leur rôle en première partie de texte jusqu'à ce qu'ils perdent leur personnalité et leur crédibilité dans la suivante. Le style diffère et c'est dommage.
Et puis l'histoire m'a parue trop longue et j'ai abandonné avant la chute. A mon avis, ce texte aurait mérité un bon élagage ou quelques coups de faucilles par-ci, par-là.

   Bidis   
27/3/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Une nouvelle amusante à lire. D’autant que juste au moment où cela devient un peu longuet et lassant, survient l’histoire du poison. L’intérêt est relancé et on est pressé de connaître la suite. Personnellement, je n’avais pas vu venir la chute.
J’aime beaucoup, beaucoup les noms des villages : Saint-Gaspard-les-Oubliettes, Brive-la-Gringalette… C’est vrai qu’il existe Brives-la-Gaillarde… Vos villages de France ont des noms ravissants dans la réalité.
Le texte est très vivant. Quelquefois je comprends pourquoi, comme ici « Dans ma course enragée je percutai Jacques, … », la proximité des mots « enragé » et « percuter » crée une image animée.
Quelques remarques :
- Comme c’est un texte très « sonore », je trouve que le "-là" de « Une sacrée polissonne que cette bougresse-là » fait répétition avec le « oh là là » qui précède.
- Mon ami Popaul, mon copain paul : euh… pour le premier je n’ai rien dit mais je n’aimais déjà pas trop… Il reviendra d’ailleurs plus loin dans le texte et de trois !
- « Son visage se voila d’une rébarbative pâleur » : une couleur pâle me semble plus maladive que rébarbative et je n’aime pas l’inversion, le qualificatif avant le substantif.
- « la tâche autrefois si prisée d’elle-même. » : l’expression me semble un peu tordue. Pourquoi pas simplement : « cette tâche qu’elle appréciait tellement » ou plus simple encore « qu’elle aimait tant ».
- « que résidait peut-être là la raison » : Le « là la.. » n’est pas très heureux.
- « Escorté d’un sinistre pressentiment » : J’aurais préféré l’expression plus habituelle « Mû par un sinistre pressentiment »
- « Quel fanfaron ! » : je trouve qu’il faudrait des astérisques pour marquer le changement de narrateur.
Pour l’écriture :
A partir de « Mon Dieu mes p’tites poules, si vous saviez à quel point vous m’manquez. », le texte devient tout à coup beaucoup plus correct niveau négations. La couleur locale s’estompe. (Par exemple, « j’ai pas raison » serait plus imagé si on disait « j’ai-t-y pas raison ? »)
C’est la différence de ton qui me gêne, parce que d’autre part, je trouve un peu fatigant tout un texte où il n’y a que du parler populaire.
Puis, à partir de « Soucieux de l’incompréhensible dépérissement de ma moitié », le texte devient carrément littéraire, ce qui renforce encore l’impression de rupture avec toute la première partie.
Peut-être que, depuis le début du texte, une écriture de ce style, émaillée de parler estropié dessinerait un personnage primaire et snob tout à la fois, ce qui est toujours délectable. (J’en ai connu…). Dans le texte tel qu’il est, ces deux facettes ne se rencontrent pas, ce qui n’est pas naturel. On y arrive presque ici : « Oh je sais c’que vous pensez allez. Que ce cataclysme qui m’engloutissait, c’est tout c’que j’méritais, et que le châtiment, pour ma dépravation, fut encore bien trop infime. » bien que l’équilibre entre les deux parlers n’y soit pas encore.
Et le problème avec ce genre d’écriture, c’est que lorsqu’une phrase paraît incorrecte comme « Le problème résidait que… », le fait que le personnage parle n’importe comment, très bien un long moment, très mal à d’autres, perturbe le commentaire que l’on peut en faire.


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