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Poésie libre
LeopoldPartisan : J'ai triste
 Publié le 12/03/22  -  10 commentaires  -  6168 caractères  -  99 lectures    Autres textes du même auteur

Titre sublime du groupe les Valentins sur un texte de Jacno. Amateur de court, ceci n'est pas pour vous.


J'ai triste



Me revoilà
en ces jours sombres
à galvauder mon talent
en une fatigue persistante
et quotidienne
J’hésite entre empathie
et vengeance
loin de tous ceux que j’aime
la dépression est tapie
aux aguets
la ville attend la neige
qui ne viendra pas
Namur est maintenant
une petite capitale endormie
qui de ma fenêtre
ne me renvoie
que des murs décrépis
Oui je me sens mal
mais rien ne sert de se plaindre
il me fallait faire les bons choix
Aimer c’est aussi s’aimer
et devant ma triste figure
je passe mon chemin
laissant me mettre aux fers
avec ce double boulet
qui ralentira
toujours ma course

François Villon banni
une ultime fois
dut choisir l’exil
et nul ne le revit jamais
écrivit-il encore
ce mal de vivre qui est toujours
le nôtre depuis tant et tant
de siècles
Ce qu’il dut ressentir alors
il m’arrive de plus en plus souvent
aussi de le ressentir
Le grand vide, la peste, la famine
bandit de grand chemin
rançonnant autant les nantis
que les misérables
je l’ai très souvent souhaité parfois en
ne sachant me serrer la ceinture
Malheureux et éconduit
j’aspire parfois par désespoir
à ce que notre race s’éteigne
comme on souffle une bougie
dans une ferme isolée
sentant autant le moisi
que la charogne

L’homme que je suis n’est rien
conduit qu’il est par les masses
crétines et imbéciles
Franchement à quoi sert
de disserter encore sur l’avenir
dont je sais qu’il me conduira
à la belle et noble démence
des rêves en exil

Comme ils durent être terribles
les derniers jours d’Antonin Artaud
dans son asile psychiatrique
où ses bourreaux
au nom de la médecine
et du serment d’Hippocrate
le muselèrent
et en cas de rébellion
dernier effort d’une conscience altérée, lui passaient la camisole
de force et le plongeaient
dans des bains d’eau glacée
pour que son pauvre corps
et son esprit meurtri
entrent enfin en léthargie

Et toi pour qui j’aurais
donné ma vie
et tranché bien des bourses
pour te garder dans mes bras
dans la chaleur de ton lit
finiras-tu démente
Je ne te le souhaite pas
même si parfois mon esprit
crie vengeance
Qu’ai-je donc fait pour mériter
pareil sort
Rien justement,
et c’est cela qui a terni
mon emblème de chevalier servant
maintenant maudit et puni

Carnage
ainsi s’appelle le dernier album
en date de Nick Cave
poète profondément imprégné
de Dieu et de ses démons
Comme le fut l’autre
homme en noir, Johnny Cash

Carnages et ravages
de la chute des anges déchus
aux esprits néfastes
qui tentent d’annihiler
nos entités sublimes
qui ignorent ce mal
que l’on a enfoui
dans notre inconscient collectif
si judicieusement peint
par Bruegel l’Ancien
et Jérôme Bosch

Carnage érigé
en raison de vivre
par des passeurs peu scrupuleux
de migrants
eux-mêmes fuyant
l’effroyable réalité
de leur vie sacrifiée
sur l’autel de nos vanités
expansionnistes
et des matières premières
dont nous abreuvons
nos masses déjà gavées
de nouvelles technologies
que jamais nous ne daignons
partager avec ces peuples
en totale déshérence.

Que n’ai-je entendu
ces horribles sentences de mes contemporains
qui pour se dédouaner
affirment
qu’il y a assez de misères
chez nous
pour en plus supporter
celles de ces sous-hommes
incapables de s’être dotés en moins d’un siècle d’une démocratie
qu’il nous a fallu deux millénaires
pour l’ériger.

J’ai triste
Je suis peur
Je suis mal au cœur
et bientôt ce sera demain
dont j’ignore encore
si j’essaierai de te voir
sachant maintenant
que ta porte m’est close
et que tu te caches
me hurlant que non décidément tu n’as pas à te justifier
de ne plus m’aimer

Février 2022
je dors pour ainsi dire toute la journée
Bourrasques et dépressions sur l’Atlantique se succèdent
moi j’ai triste
j’ai triste
à en mourir
la flamme s’est éteinte
et je me sens vieillir
loin des rires
et des petites choses
qui parfois me donnaient tant de plaisirs

Pourquoi d’ailleurs essayer de les décrire.
Il m’arrive encore
de penser à toi
avec nostalgie
pour quand même te sortir
de l’oubli de mes rages
de mes désirs de vengeance
Dieu qu’ils sont déjà lointains
ces petits matins
autour d’un café
à regarder ton jardin
se laisser envahir par l’automne
et les premiers frimas.
J’embrassais alors ta bouche
tes seins, ton pubis
Mais tout cela appartient au passé
à ma déroute
où à bout de souffle
j’ai sombré
n’ayant une fois encore
rien vu venir
J’ai triste
J'ai TRISTE !


 
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   Pouet   
28/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Salut,

un poème certes un peu long mais qu'importe. Il transpire la sincérité et me touche beaucoup, résonne en moi irrémédiablement.

Que dire face à l'expression de cette difficulté à être, à cette impossibilité d'espérance, à cette odieuse lucidité, à cette futilité enveloppante ?... Rien, probablement.

Sentiment brut, sans métaphores, et pourtant.

En tout cas, j'ai reçu votre texte.

Pouet

   Mintaka   
5/3/2022
 a aimé ce texte 
Pas ↑
C'est un récit apocalyptique où les émotions et les ressentis sont d'une grande dureté, d'un grand pessimisme. Un cri d'horreur je dirais. Des choix de personnages ayant connu des destins de souffrance comme l'exil permanent de François Villon (je pense et non Vion) ou encore la folie syphillitique d'Antonin Artaud.
Des mots ou expressions terrifiants parcourent le récit comme par exemple: vengeance, dépression, grand vide, démence, maudit, démons, carnage, à en mourir, etc...
Sans juger aucunément les ressentis de l'auteur qui lui appartiennent et non pas à être remise en cause, je trouve la lecture de ce récit trop rugueuse et ne laissant que peu de place à la poésie ni à l'espoir finalement. C'est en tous cas de cette façon que je le perçois.

   Vincent   
12/3/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Bonjour Léopold

J'ai hésité avant de commenter votre texte car il je ne suis pas objectif à ce sujet

J'adhère tant à vos mots je suis passé par cet enfer plus de vingt an de dépression

les images de votre poésie me parlent énormément

Je suis toujours intimement persuadé que le grands poétes sont passés par la souffrance ce qui ne veut pas pas dire que la souffrance crée de la poésie mais qu'elle en est le terro

Merci pour ce grand texte

   Anonyme   
12/3/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour LeopoldPartisan (étonnant pseudonyme)

Votre cadence dépressive m'a interpellé de bon matin, à l'heure où j'ai moi-même tendance à broyer du sombre. Mais je ne sais pourquoi, il y a quelque chose d'assez addictif dans vos mots, peut-être être parce qu'ils fleurent la véracité et la douleur du vécu. Il se lisent comme une déferlante de désespoir et d'un renoncement déjà entériné (cette fatigue persistante et quotidienne) d'un homme qui ne supporte plus ce que lui renvoie le miroir (aimer c'est aussi s'aimer). Vous tombez très peu dans l'auto-apitoiement (le piège des odes à l'ego triste) et vous citez Villon (très bon choix) pour évoquer l'idée de la fuite en filigrane, mais vous savez comme moi, qu'on ne peut se fuir soi-même, en dehors du suicide bien entendu.

Que reste-t-il des amours perdus ? Tout dépend de la force intérieure du chacun. Sombrer dans la démence (comme Artaud) est peut-être la solution la plus pérenne. La dernière partie de votre descente est un peu trop décentrée du sujet (peut-être trop de name dropping) et se perd légèrement dans le personnel larmoyant, à peine. Personnellement, j'aurais supprimé "J’embrassais alors ta bouche
tes seins, ton pubis." Ce qui va sans le dire ne va pas mieux en le disant.

Quoiqu'il en soit, j'ai pas triste mais j'ai kiffé. C'est un texte puissant, peut-être le plus prenant que j'ai lu ici pour le moment.

Merci et prenez soin de vous

Anna

   Eskisse   
12/3/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Leopoldpartisan,

Une sobriété dans le style qui fait mouche, de la justesse dans les comparaisons. Vous convoquez des littérateurs et des peintres comme pour rendre le côté universel d'un mal si courant et pour peut-être approcher une forme de consolation.

J'ai aimé ces passages :
"comme on souffle une bougie
dans une ferme isolée
sentant autant le moisi
que la charogne"
et
"dont je sais qu’il me conduira
à la belle et noble démence
des rêves en exil"

Merci du partage

   Raoul   
12/3/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour,
Voilà un texte fleuve qui embarque dans la noirceur du "récitant" et sa difficulté à trouver/de ne plus trouver, quelque-chose, ci quelqu'une partie, pour continuer de vivre.
Un flot de "pensées" qui s'enchaînent ayant pour guides quelques ref. littéraires et rock'n'roll plus ou moins maudites, noires, pas épargnées par la vie en tous cas.
Bonne idée de ne pas choisir Rimbaud le petit punk, comme accompagnateur.
Personnellement, je suis sensible à ce que certains diront divagations, et que je comprends par votre phrasé, essoufflé, rendu ample par l'absence de ponctuation, qui dit, induit et suggère - du dit et du non dit -, en un mot exprime.
Influence Beat, sans doute...
J'aime l'ensemble. Seul le mot "talent" en début de texte m'a fait tiquer ; je trouve qu'il est un peu trop surplombant, et marque une distance prise, alors que tout le reste indique le contraire et frappe à l'estomac... ou au foie.
Merci pour ce texte habité.

   Corto   
12/3/2022
 a aimé ce texte 
Un peu
Ce texte a les défauts de son genre. non pas sa longueur (Bof...) mais son parti pris. On peut décrire ses malheurs, sa tristesse, ses connexions avec quelques grands personnages, mais s'y enfermer est vraiment discutable.
Cela fait un beau titre mais en le lisant j'ai ressenti une certaine complaisance autocentrée qui ne me convainc pas. Je sais que "Namur" n'est pas un cadre enchanteur, mais si on allait voir plus loin ?
Quand on se réfère par exemple à "si judicieusement peint par Bruegel l’Ancien", pourquoi ne pas remarquer que ce grand peintre a su oser peindre (prudemment) autre chose que des Vierges à l'enfant ou des Jésus sur le croix, autrement dit représenter le monde s'extirpant de la représentation moyen âgeuse écrasée par la religion.
Je ressens un trop plein de pessimisme dépressif, abattu qui ne cherche guère d'issue avec ce "Mais tout cela appartient au passé à ma déroute".

Bien sûr l'auteur "a toujours raison". Ici pourtant la volonté de balayer de multiples pistes pour en faire une démonstration ne me convainc pas.
Mais qui oserait contester un auteur s'écriant "J'ai TRISTE ! "

   Malitorne   
12/3/2022
Modéré : Mise en cause du comité éditorial ; et puis assimilation du narrateur à l'auteur.

   Lariviere   
12/3/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Salut Léopold,

Un texte où la dépression est exprimée sans concession... la forme colle bien au propos et le tout est bourré de références littéraires bien choisis... Les images font mouche. Le format long ne lasse pas, le rythme lancinant comme une douleur de dent est là... pour moi ce texte est riche en impressions et émotions...

Merci pour la lecture et bonne continuation

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12/3/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Un poème qui me rappelle un peu la poésie américaine et plus particulièrement celle d'auteurs comme Bukowski ou Raymond Carver. De la prose versifiée où le mal être ici est plutôt bien retranscrit.
Quelques digressions qui me semblent inutiles toutefois; je pense au passage qui évoque les migrants. Je trouve assez étrange que le narrateur dont le récit est quand même largement autocentré, se sente concerné par leur sort.
Je ne comprends par ailleurs pas cette ponctuation hasardeuse avec une ou deux virgules de ci de là et quelques points finals. Bon ceci dit c'est juste pour chipoter.


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