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Poésie classique
Miguel : Le deuil du bonheur
 Publié le 01/06/20  -  21 commentaires  -  1316 caractères  -  503 lectures    Autres textes du même auteur

Élégie pour un amour déçu.


Le deuil du bonheur



Un autre dans votre âme est aujourd’hui vainqueur.
Vous n’avez plus pour moi ni regard, ni sourire,
Mais le mal qui me tue est vierge de rancœur,
Et ne s’exalte point dans l’ardeur de maudire
Ce rival orgueilleux qu’encense votre cœur.

J’ai connu comme lui cette joie ineffable,
Ce bonheur absolu d’être unique à vos yeux,
Et, mortel ébloui d’une grâce improbable,
L’ivresse d’être assis à la table des dieux,
Dont s’augmente à présent la douleur qui m’accable.

C’est vous qui m’imposez la plus dure des lois :
Effaçant de vos jours les jours de nos folies,
Et, dans l’oubli cruel de nos anciens émois,
Parque du doux lien des trames de nos vies,
Persiflant mon regret des plaisirs d’autrefois.

Se peut-il que pour rien dans votre âme oublieuse
Comptent ces jours bénis, témoins de nos amours,
Et ces nuits de tendresse à l’ombre radieuse,
Chassés de votre cœur et bannis sans recours ?
Je fus heureux par toi, par moi tu fus heureuse,

Et rien de cet hier ne te parle aujourd’hui ?
Ah ! loin de jalouser son triomphe illusoire,
Je plains, pour avoir pris cette route avant lui,
L’ingénu qui demain, payant cher sa victoire,
Gémira sous le deuil de son bonheur enfui.


 
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   Anje   
6/5/2020
 a aimé ce texte 
Bien
Classique
C'est sans doute une question de goût mais je préfère à ces quintils à rimes croisées en ABABA les strophes en ABBAB qui me semblent plus mélodieuses. Les premiers très symétriques ne surprennent pas tant l'oreille et sont donc peut-être plus monotones.
Un peu monotone aussi, comme une litanie, ce poème gagnerait peut-être à être retaillé. Je me suis amusé à ne lire que les strophes 1, 4 et 5 pour m'apercevoir qu'elles suffisent à la compréhension du sujet. Elégir donc pour donner moins l'impression d'une lamentation.
La prosodie, sauf erreur,me semble bien respectée. Il n'est que l'enjambement de la quatrième à la cinquième strophe et quelques assonances aux hémistiches...
Un amoureux arrive, l'autre cède sa place... sans heurt. Pas de compétition, pas de jalousie. Ca ne se passe pas touours comme çà car souvent, l'évincé se vexe à moins qu'il ait aussi trouvé son bonheur ailleurs. Mais n'inventons pas, le perdant ici souhaite une bonne route au vainqueur, sachant qu'il perdra à son tour. L'amour est-il un jeu ?
Anje en EL

   Annick   
12/5/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Si votre poème était une danse, il serait une pavane se déployant lente et mélancolique. S'il était une musique, il serait une brise frissonnante à travers les feuillages. S'il était une oeuvre, il serait une architecture d'essence divine...

Ce magnifique écrit est d'une belle richesse littéraire et d'une poésie rare. Mais je ne ferai pas de commentaire de texte, de peur de le dénaturer.

Un grand bravo pour ce petit bijou :

"Et rien de cet hier ne te parle aujourd’hui ?
Ah ! loin de jalouser son triomphe illusoire,
Je plains, pour avoir pris cette route avant lui,
L’ingénu qui demain, payant cher sa victoire,
Gémira sous le deuil de son bonheur enfui."

   Lebarde   
12/5/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Ainsi va la vie!
Les amours de l'un ( ici le narrateur) chassées par celles du suivant qui se verra un jour à son tour évincé!
Pourtant les souvenirs sont joyeux et tellement agréables, si les regrets restent bien présents et douloureux.

Tout cela est bien rendu et décrit dans une écriture subtile et délicate, peut être un peu empruntée et alambiquée dans la deuxième strophe que j'ai pourtant pris plaisir à lire.

Je ne regarde pas la forme que je pense correcte. Les virgules après les "et" sont elles indispensables?
Par ailleurs je regrette le vocabulaire sans originalité , assez pauvre avec quelques répétitions qui auraient pu être évitées (âmes, jours, coeur..), mais là je chipote sans doute.

Beau travail sur un beau sujet bien traité.
Bravo, j'ai globalement bien aimé.

En EL

Lebarde

   papipoete   
13/5/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
classique
Que reste-t-il de nos amours ?... je ne peux croire que de tout ce qui fut " nous ", celui qui a pris ma place dans votre coeur, a tout effacé comme si jamais je ne fus votre aimé. Je ne parviens pas à vous en vouloir, vous aimant toujours si fort ; et celui qui de vous est épris, goûte tout ce que je connus, comme " assis à la table des dieux ", quand il prendra le même chemin de sortie que moi, je le plains d'avance, il " gémira sous le deuil de son bonheur enfui " !
NB que belle façon de pleurer son amour perdu, l'auteur emploie sa plume pour s'épancher, supplier celle qui ne le regarde plus, n'a plus une once de sentiment pour lui ; comment peut-elle faire comme si rien entre eux n'avait jamais existé ?
Je rejoint son sentiment de ne pas haïr, ni celle qui torture, ni l'autre qui prend sa place ( il l'aime encore et toujours ! le nouvel amant soit abandonnera la partie, soit verra que sa conquête n'a rien de l'autre oublié )
et ce sentiment perdurera chez celui qui pleure, tant qu'il aimera cette femme...
l'avant-dernière strophe a ma préférence, et quand le vouvoiement fait place au tutoiement, on sent la douleur intense " dis, ne le sais-tu ? dis, ne te rappelles-tu ? "
ce vers " parque du doux lien des trames de notre vie "...m'épate !
techniquement, je vois des alexandrins parfaits, bien césurés et diérésés ! ( encore une fois, à lire cette façon, le " classique " semble couler de source ! )
papipoète

   Gabrielle   
14/5/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un regard porté sur l'intimité d'un coeur blessé.

Le ressenti du coeur chagriné devient le ressenti du lecteur.


Merci pour cette oeuvre de création qui met à l'honneur le talent du poète dont la fibre poétique témoigne des sa capacité à exprimer et faire ressentir les émotions


Belle continuation.

   Corto   
1/6/2020
C'est beau comme du classique, avec la dose d'emphase qui convient pour décrire l'abandon par l'aimée au profit d'un rival.

Comme exercice 'à la manière de' ce poème a sûrement ses qualités.

Je reste à distance car peu réceptif à ce style.

Bonne continuation.

   Queribus   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

Une perfection d'écriture rarement rencontrée avec son côté un peu rétro et passéiste pour parler d'un problème vieux comme le monde mais qui donne une vision un peu pessimiste de l'amour. J'ai beaucoup apprécié le passage du vouvoiement au tutoiement à la fin qui me semble un procédé très habile.

L'ensemble témoigne sans doute d'un gros travail sur la langue, ce qui explique sa perfection. En conclusion, de la très belle ouvrage.

Bien à vous.

   Anonyme   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour

C'est un bon et beau texte indubitablement. Peut-être un peu long
mais l'agencement des rimes oblige un peu cette longueur car
la dernière strophe étant, pour moi, de loin la meilleure, il en faut bien une devant pour respecter l'alternance.
La fin est un peu vacharde et laisse percer un peu de jalousie
mais j'adore : tous les ressentiments jaillissent dans cette strophe
terminale.
Comme vous l'avez dit en forum pas besoin de consonnes d'appui
pour une rime monosyllabique : vies de la 3ème strophes.

Un bon texte classique.

   Robot   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Une impression de déclamation pour tragédie à l'antique donne à ce texte un côté un peu suranné. Mais pas désagréable.
Ce qui est sûr c'est que j'ai eu un certain plaisir à le dire et ainsi il paraît paradoxalement moins long qu'à la lecture.

Le passage du vouvoiement au tutoiement en strophe finale m'apparaît comme un élan pour rappeler une intimité passée. Ou bien est-ce que c'est le vouvoiement du début qui recherche un détachement que le narrateur par le tutoiement final n'assume pas tout à fait ?

   Alcirion   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Miguel,

Je ne commente vraiment pas souvent du classique. Le premier alexandrin m'a scotché. L'idée est bonne mais l'euphonie surtout est parfaite.

J'aime bien le champ lexical lugubre/douleur qui donne de l'emphase au poème. L’exploitation d'un vocabulaire à connotation négative donne une cohérence à l'ensemble sur forme et fond.

   Hiraeth   
3/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
(EDIT 15:03)

Voici une belle élégie qui exprime la douleur et la médiocrité de l'homme face à l'amour déçu, malgré une apparente grandeur au début.

Le classicisme de la forme, la recherche d'un langage simple et épuré et le vouvoiement semblent d'abord tracer un espace de méditation sereine propice à la prise de distance et l'élévation spirituelle au-dessus de toute jalousie et toute rancœur (strophes 1 et 2), où notre malheureux paraît malgré tout et sublimement capable de se réjouir de la joie de son rival, une joie qu'il a lui-même connue.

Mais un sentiment plus bas n'affleure-t-il pas dès la première strophe, avec ce rival décrit comme "orgueilleux" ? Et notre locuteur peut-il vraiment avoir les idées claires quand de son propre aveu il souffre encore de la gueule de bois (vers 10) ?

On observe dès la troisième strophe un renversement : l'ex-amante est accusée (vers 11) et la métaphore se fait l'instrument de vengeance de l'amant répudié en transformant soudain la femme en une vieille Parque aussi laide qu'implacable (car c'est ainsi que la tradition les a souvent représentées, une image qui doit sauter aux yeux de la plupart des lecteurs). La répétition du mot "jours", en plus d'exprimer une forme d'obsession et de muscler le rythme du texte, accentue cette idée d'implacabilité : les "jours de nos folies" n'étaient que de simples jours, indifférents aux désirs humains et remplaçables par d'autres. À noter également le mot "cruel" au vers 13, très chargé dans l'Histoire de la littérature amoureuse française, l'équivalent du "unkind" anglais : c'est le reproche à la fois le plus stéréotypé et le plus extrême que l'on puisse retrouver dans la bouche des amants littéraires.

Le locuteur est donc encore très investi émotionnellement dans l'histoire d'amour qu'il ne peut vivre maintenant qu'au passé, source désormais d'une forme d'aigreur (strophe 4) : la réciprocité des sentiments n'existe plus que dans l'artifice d'un chiasme ("Je fus heureux par toi, par moi tu fus heureuse") dans un vers qui tend d'ailleurs à montrer la vacuité de l'amour humain puisque l'être aimé n'est jamais qu'un moyen pour atteindre le bonheur personnel (compléments circonstanciels de moyen "par toi, par moi").

Le passage au tutoiement témoigne d'un dernier sursaut d'intimité, d'un ultime jaillissement d'émotion (interjection "Ah!" au vers 22) où le locuteur s'accroche désespérément au présent (vers 21), prédit tout le malheur du monde à son rival (seule raison pour laquelle il est "loin de jalouser son triomphe"), et sabote ainsi son propre projet initial de réconciliation. Comme si les ailes de cire de son esprit, déployées dans les deux premières strophes, avaient fini par fondre sous le soleil noir de sa mélancolie, pour le laisser choir dans la mer morte et visqueuse de sa rancœur (dont sa douleur n'était finalement pas vierge).

Gardons-nous cependant de jeter la pierre à ce locuteur : rien de ce qui est humain ne nous est étranger, et à l'impossible nul n'est tenu, car il est sans doute impossible de rester sage face à l'amour. "Non bene conveniunt nec in una sede morantur majestas et amor", écrivait Ovide (grosso modo, "l'amour et la dignité ne font pas bon ménage").

Un poème réussi, donc, bravo à l'auteur, même si j'ai quand même deux petites remarques négatives à apporter : je ne trouve pas très euphonique la triple accumulation de compléments du nom au vers 14 ("Parque DU doux lien DES trames DE nos vies"), et le vers 15 ("Persiflant mon regret des plaisirs d'autrefois") ne veut strictement rien dire à mon sens. Persifler, c'est tourner en dérision, je ne vois pas du tout ce que le mot vient faire là. Vouliez vous dire quelque chose comme "Colorant mon regret des plaisirs d'autrefois", avec une pointe d'ironie ? Mais n'est-ce pas de toute façon comme ça que le regret fonctionne ? Dommage, ce petit dérapage...

Dans une moindre mesure, je ferai remarquer qu'il manque un "ne" explétif au vers 17 ("ces jours bénis NE comptent pour rien") pour coller avec le registre soutenu.

Malgré cela, j'aime beaucoup ; au plaisir de vous relire.

   Anonyme   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Miguel,

Quel poème ! Quelle beauté! Quelle magnifique plume !

J'aime, j'adore même cette douleur retenue d'une séparation cruelle pour le narrateur.
L'autre a pris sa place, il imagine et plaint sa douleur quand un "autre" peut-être , lui soufflera la sienne.
Je ne comprends pas bien le passage subit du vouvoiement au tutoiement ( qui me fait penser au "message personnel" de Françoise Hardy).
L'auteur en dira plus.
Mais qu'importe, c'est beau, si magnifiquement exprimé .

   pieralun   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Un poème très bien écrit, un rythme parfait.
Après, le style un peu ampoulé me ramène aux poètes anciens et nuit un peu à l’émotion que je pourrais ressentir.
Au final, la qualité de l’écriture l’emporte.
Du bon Miguel...

   Myo   
1/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Juste un détail, je ne suis pas très fan de ce 5e vers par verset qui à mon sens, alourdi souvent la phrase ... Mais j'admire le technique et le travail abouti.

Quelques répétitions de mots, sans doute voulues, mais qui me semblent un peu " facile"
"Effaçant de vos jours les jours de nos folies,"
"Je fus heureux par toi, par moi tu fus heureuse"

J'aime beaucoup la dernière strophe.

Bravo et merci du partage.

   PlumeD   
2/6/2020
Le poème est magnifique, il n'a pour seul défaut que d'être d'une autre époque... Beaux sentiments, lyrisme, très peu pour moi, j'aime bien davantage l'innovation et la spontanéité.
De ce fait, je m'abstiens de porter une appréciation.

   emilia   
2/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une élégie construite dans les règles de l’art pour exposer un amour déçu dans une scène digne d’une tragédie signant la perte du « bonheur absolu », source de sa douleur. À l’instar d’une déesse de la mythologie grecque, l’aimée se montre « cruelle » et persifleuse / « oublieuse des jours bénis » réduits à néant et dont l’infidélité semble inscrite dans sa conduite, au point que l’ex-amant plaigne à l’avance le nouveau de ce qui ne pourra que se reproduire, en souffrant à son tour du « bonheur enfui… »
Le narrateur devra-t-il faire pour autant « le deuil du bonheur », restera-t-il inconsolable ou découvrira-t-il à son tour une nouvelle opportunité comme le chantait dernièrement un auteur se félicitant de l’abandon de son « ex », ce qui lui a permis de rencontrer une meilleure relation… ?

   Cristale   
2/6/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
On est bien loin ici des textos et autres tweets, des échanges virtuels éphémères. Non, ici c'est du langage soutenu, du verbe, du sentiment, de la souffrance, de la sueur et des larmes, l’écriture vient de l’intérieur. Lit-on encore Victor Hugo au collège et au lycée ?

L'émotion traduit tour à tour la douleur "le mal qui me tue", et sa contradiction "est vierge de rancœur," la nostalgie "Ce bonheur absolu d’être unique à vos yeux", l'amertume "C’est vous qui m’imposez la plus dure des lois", et ici dans le paralogisme :
"Se peut-il que pour rien dans votre âme oublieuse
Comptent ces jours bénis, témoins de nos amours,
Et ces nuits de tendresse à l’ombre radieuse,
Chassés de votre cœur et bannis sans recours ?"

Le quatrain final a quand-même un petit quelque chose de "revanchard" :
"Je plains, pour avoir pris cette route avant lui,
L’ingénu qui demain, payant cher sa victoire,
Gémira sous le deuil de son bonheur enfui."

Je ne puis ajouter un émoticône sinon j'aurai choisi le diablotin ^^

Oups ! j'essaie habituellement de ne pas trop "m'étaler" sur le fond mais voilà qui est fait. Les poèmes d'amour, de ruptures sentimentales et autres opus romantiques sont un peu mes friandises alors point trop ne faut m'en présenter.

J'ai suivi les échanges sur le monosyllabe"vies", personnellement j'aurais utilisé une rime en "vies", comme "envies", à la place de "folies", quitte à contrarier Mr Sorgel.

D’autres ont déjà tout dit alors je n’ai plus qu’à remercier l’auteur de cet excellent poème.
Cinq quintils pour un résultat louable en poésie classique, ce n’est pas chose aisée.

Cristale

   Castelmore   
3/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Message à l’aimée

Ni regard ni sourire...
le bonheur absolu, l’ivresse ne sont plus ... ne reste que la douleur.
Telle Atropos vous avez mis fin aux jours heureux ... mais je n’en tiens pas rancoeur à mon rival.

Il connaîtra aussi le deuil du bonheur enfui ...

Cela débute comme du Corneille et se finit en du Racine !

Un texte « grand siècle », où le travail énorme trouve sa récompense dans un équilibre et une mélodie parfaits.

Grand bravo et merci.

   Mokhtar   
4/6/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Beaucoup de tenue et de maitrise dans ce vrai classique, vrai par sa technique et son esprit. Je remarque un excellent rythme dans ces quintils, dont le cinquième vers est parfaitement intégré, loin de l’impression de quatrain prolongé que l’on déplore parfois dans cette forme de versification.

La première strophe, très « carrée » et les deux dernières ont ma préférence, car elles dégagent une impression de facilité dans une écriture fort bien « huilée » et bien équilibrée. (Alors que, sans doute, elles sont le fruit d’un travail pointilleux).

Les grands chagrins d’amour sont une épreuve. Jeter sur le papier, analyser et formaliser, n’est-ce pas une forme de thérapie ? Une façon de contenir la détresse ?

Quelques remarques :
J’aurais bien vu un « du » à la place du « ce » dans le vers 6 et, dans le dernier vers de la même strophe, le « dont s’augmente » gagnerait à être amélioré : on est obligé de relire pour comprendre que le relatif concerne l’ivresse et non la table. Et l’on devrait pouvoir parfaire le sens en trouvant alternative au trop prosaïque « augmente », de même que plus bas au « persiflant » déjà remarqué par d’autres commentateurs. Enfin, je pense qu’Hiraeth a raison pour la négation du vers 17, mais j’avoue ne pas l’avoir remarquée en première lecture.

Quoi qu’il en soit, lire et relire ce poème très impressionnant a été pour moi un plaisir rare. Bravo et merci, Miguel

   poldutor   
4/6/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Miguel
Quelle magnifique poésie empreinte d'une pudeur, d'une décence
poignantes. C'est un cri de désespoir poussé par l'amant délaissé on sent toute la peine éprouvée, et malgré cela, pas une seule parole de haine, que des regrets...
Il est dur en effet de ne plus être aimé quand on aime encore.

Une petite pique cependant pour le successeur

"...Je plains, pour avoir pris cette route avant lui,
L’ingénu qui demain, payant cher sa victoire,
Gémira sous le deuil de son bonheur enfui"


Magnifique strophe :

"Se peut-il que pour rien dans votre âme oublieuse
Comptent ces jours bénis, témoins de nos amours,
Et ces nuits de tendresse à l’ombre radieuse,
Chassés de votre cœur et bannis sans recours ?
Je fus heureux par toi, par moi tu fus heureuse,"
Cordialement
poldutor

   jfmoods   
5/6/2020
Ce poème est composé de 5 quintils en alexandrins à rimes croisées, riches, suffisantes et pauvres, majoritairement masculines et consonantiques.

Les deux premières strophes dressent un constat : la consécration amoureuse (adjectifs qualificatifs : "cette joie ineffable, / Ce bonheur absolu d'être unique à vos yeux", "mortel ébloui d'une grâce improbable", métaphore élective : "L'ivresse d'être assis à la table des dieux") a laissé place à la défaveur (négations : "Vous n'avez plus pour moi ni regard, ni sourire") et au lourd chagrin qui l'accompagne (allégories : "le mal qui me tue", "la douleur qui m'accable"). Évincé du coeur de l'Aimée ("Un autre dans votre âme est aujourd'hui vainqueur"), le locuteur se veut inaccessible à la jalousie (groupe adjectival : "vierge de rancoeur", négation : "ne s'exalte point dans l'ardeur de maudire / Ce rival orgueilleux qu'encense votre coeur" ).

Les trois dernières strophes, offensives, sont à charge contre l'Ingrate (mise en relief et verbe matérialisant la violence exercée : "C'est vous qui m'imposez", superlatif : "la plus dure des lois", participes présents : "Effaçant", "Persiflant", adjectif qualificatif : "l'oubli cruel de nos anciens émois", métaphore mettant en exergue une puissance mortifère : "Parque du doux lien des trames de nos vies"). Les deux questions fermées (vers 16 à 19 et vers 21) et le chiasme du vers 20 lui rappellent, avec le passage du "vous" au "tu", le doux souvenir du bonheur. Dépité par l'inconstance de la femme, le locuteur prédit alors la répudiation inéluctable du nouvel élu (construction oppositive : "loin de jalouser [...] / Je plains", oxymore : "triomphe illusoire", complément circonstanciel de cause : "pour avoir pris cette route avant lui", périphrase dépréciative : "L’ingénu", participiale : "payant cher sa victoire", futur : "demain [...] / Gémira sous le deuil de son bonheur enfui").

Merci pour ce partage !


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