Tout est bien alléchant, mais si je ne m'abuse
De découvrir cela je n'aurai pas loisir,
Cuisiner, bétonner, il me faudra choisir :
Les vacances auront ainsi filé trop vite !
Dans l'attente que vienne une prochaine invite,
Il passera de l'eau sous le pont du canal...

Le cul dans la bruyère, humant l’air estival,
Loin de l’agitation du rush dominical,
Je songe à Robinson

Qui lui, le malheureux, au contraire de moi,
Aurait, privé de foule, osé n’importe quoi
Pour quitter sa prison.

Comme quoi, bien souvent, circonstances font lois,
Prenant alors le pas sur liberté de choix,
Pour moi bien plus aisé

Que pour ce Crusoé qui n’eût que Vendredi,
Alors que pour ma part j’ai chaque jour en i
Loisir de converser !

Ah ! Cette île déserte où mieux se prélasser :
Un rêve que parfois je caresse en silence,
Abandonner ma ville avec sa turbulence
Et partir au lointain sans bagage ni peur ;
Même si ce désir a son côté trompeur,
Je courtise ses charmes
Et ris de mes alarmes.
On embellit toujours ce qu'on ne connaît pas...

Tout ceci est bien beau, mais je prends mes repas

( légers mais mitonnés) toujours à heure fixe
Et sur ces rêves fous, ne serais pas prolixe.

Sur une île déserte il n'est point d'épicier.

Sur le rêve, parfois, il faut que vous hissiez
L'imagination où son flot nous entraîne.
Pour nous suivre écoutez le chant de la sirène
Adieu le quotidien, le sommeil, les repas...
Nous voguons vers des cieux où ça n'existe pas !
Je vis de bonne soupe aurait dit... La Bruyère,
Je m'égare... en ce cas c'est sans doute Molière
Et je veux, comme lui, vivre de beau langage

Vivre de beau langage arrosé d'un cépage
Dont je tairai le nom, à chacun son dopage,
Vaut bien mieux sur le tard que de courir la thune
Car jamais nul n'emporte au tombeau sa fortune...
Aux vers, levons le verre, In vino véritas !

Je ne vous suivrai pas sur ce terrain, hélas !
La Faculté m'ayant indiqué de ne boire
Autre chose que l'eau ! J'ai, dans ce purgatoire,
De lever quelque verre oublié le désir...
Mais s'il faut quelquefois se faire encor plaisir,
Un gâteau bien crémeux je déguste sans honte

Je suis au sec aussi, en vertueux géronte

Soucieux d'être toujours au meilleur de sa forme
Pour pouvoir se livrer à ses sports favoris.
Le bon pinard m'endort comme du chloroforme
Et le petit matin me retrouve marri.

D’un bon crû, sans excès, nul n’a jamais péri !
Mais pourquoi pas aussi quelque Château Lapompe
Quand bien même au palais, à moins que je me trompe,
Il n’a point la saveur d’un bon petit Bordeaux
Ou bien de ce Bourgogne, issu de vieux coteaux,
Dont César, m’a-t-on dit, faisait son ordinaire
Quand, traversant la Gaule, au nom de ce critère,
Il s’occupa de Beaune avant même Alésia…

J'accepte le Bordeaux, mais alors un chouïa

Juste un peu de Médoc pour se flatter la glotte
Et pour accompagner un steak à l'échalote.

Il est préconisé, dit-on, par les Crétois