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Ève, la dernière
Chevalier d'Oniris
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04/12/2007 00:29
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Merci à ceux qui ont pris du temps pour commenter ce texte.

J'avais déjà pensé à traiter ce thème : Quelqu'un a une EMI, comme tous ceux qui ont déjà racontée la leur, mais avec quelque chose en plus. Quoi ?
Et je me suis trouvé accidentellement à devoir participer à un concours de nouvelles dont le thème était : « Eh bien, tu en as mis du temps ! » (Ne faisant pas partie des gagnants, j'ai pu vous soumettre ma participation.)
Le thème de l'EMI plus celui du concours me faisaient une situation. J'en ai fait la chute. Comme l'a dit Incognito, « l'ensemble est construit uniquement pour préparer la chute ». Dans une nouvelle à chute, ça me semble la moindre des choses, et même une règle du genre. Cela étant réalisé, il n'y a pas lieu de chercher trop d'autres intentions à l'auteur. C'est une amusette. Une amusette est parfois tout ce qu'on retient de son auteur (Le Hareng saur de Charles Cros, le Boléro de Ravel). Mais rien ne nous empêche, à l'instar d'aldenor, de nous abîmer dans les réflexions que notre lecture peut induire. C'est aussi pour ça qu'on lit.

Comme l'a dit Melilot, je ne pouvais pas faire un chœur de trépassés sans en faire passer un certain nombre, donc autant en profiter pour recenser diverses manières de mourir pressé (à défaut de portée morale, il y a l'intérêt documentaire et historique sur notre époque).
Certains ont trouvé que ce n'était pas drôle. C'est vrai que ça ne l'est pas. D'ailleurs rien dans le texte ne dit que ça l'est. La narratrice s'est tue pendant près d'un siècle car ça ressemble à une histoire drôle… Parce qu'elle sait que les gens ont mauvais esprit. Certains commentateurs en ont malheureusement donné des exemples (c'est de l'ironie… sans cynisme).

Au sujet du cynisme, il a plusieurs sens (en laissant Diogène de côté) : Quand on dit : « Ce type est d'un cynisme… »
1) on peut parler, en accord avec le dictionnaire, d'une brute indifférente.
2) Mais on peut aussi parler de quelqu'un qui voit la réalité dans ce qu'elle a de plus brutal.
3) En dehors des criminels et des désespérés, le cynisme s'applique aussi au littérateur qui, par le procédé de l'ironie, feint de défendre l'indéfendable. La démonstration par l'absurde est plus convaincante et éthique que le commandement moral. Aujourd'hui, Montesquieu écrirait « Mes Nike seraient trop chères s'il fallait donner une ration de riz d'adulte à ceux qui les fabriquent. »
Peuvent donc être dits cyniques les esclavagistes comme ceux qui les dénoncent. Ceux qui regardent ailleurs en se parfumant à l'eau de rose sont plutôt dits "fleur bleue".
4) Dans les Mémoires d'un tricheur citées par brabant, onze membres d'une famille meurent, le héros en réchappe parce qu'il a été puni ! L'immoralité est un moyen de tourner les moralistes en dérision (c'est ce qui rendait aussi sympathiques les Pieds-Nickelés, par exemple).

Cela dit, dans la Dernière Ève, le cynisme n'est pas prouvé. Si on avait su d'emblée que les faits étaient antérieurs d'un siècle à la narration, on aurait trouvé Ève moins cynique. Son détachement aurait paru normal et on aurait eu plus d'empathie pour cette doyenne de l'humanité. Mais la première impression est indélébile (c'est aussi comme ça qu'on manipule le lecteur).
Très à propos (du texte), brabant a parlé de distanciation. Elle est, chez la narratrice, d'abord temporelle (un siècle a passé), puis psychique (le fait de voir sa dépouille mortelle hors du moi).
Mais c'est du côté du public (lecteur) que la distanciation est essentielle, c'est ce qu'apprennent les enfants à Guignol : « C'est une fiction, inutile de crier pour prévenir le héros du danger. » Elle est un des pôles de la lecture, l'autre étant l'identification. Quand la distanciation va plus loin, il y a rejet par indifférence ou déni ; quand l'identification va plus loin, il y a projection et/ou transfert. C'est un jeu complexe et varié. Par exemple, le lecteur peut rejeter la mort du personnage auquel il s'est identifié.
L'histoire (pas) drôle suivante est un exemple de lecteur à qui l'on souhaite de faire preuve de distanciation :
Un homme qui a voulu se pendre a été sauvé in extremis. À sa sortie de l'hôpital, il va trouver le curé de sa paroisse :
- Que puis-je faire, Monsieur le curé ? Je suis toujours aussi désespéré !
- Lis la Bible, mon ami, et tu retrouveras le goût de vivre.
Rentré chez lui, l'homme ouvre la Bible et lit : « Va et repens-toi ! »

Je ne vais pas m'étendre sur le sujet de la morale, ne pouvant empêcher quiconque d'apporter la sienne dans sa lecture. Par exemple l'argument du « bien fait pour eux » ressenti par socque : Ève prend pourtant plusieurs lignes pour le prévenir (seconde justification de son silence séculaire) : je n’ai jamais voulu tirer une morale de cette histoire ni en instruire les gens pressés, ajoutant que cet argument lui aurait servi de panégyrique si c'est elle qui était partie la première (ça n'aurait été que justice, selon un commentaire… brrr…)
Digression importante mais qui a peut-être suscité l'ennui ressenti par plusieurs lecteurs.

Les vertus de la lenteur peuvent alimenter la réflexion, mais ce n'est pas forcément le trait de caractère principal de la narratrice ; elle déteste seulement que les autres lui imposent leur rythme (elle en a souffert dès la naissance). D'ailleurs les sprinteurs sont des gens très nonchalants, et les gens pressés courent rarement.
Quelqu'un a conclu qu'elle ne faisait rien du tout. Elle a travaillé, élevé ses enfants, rien ne permet de penser qu'elle ne soit pas en plus prix Nobel de médecine. Elle raconte son EMI, pas sa vie.


@ incognito
Je pourrais en donner, des leçons de morale !
« la mère est plutôt maltraitée par la narratrice » : Quand elle lui retirait le sein de la bouche, c'est ça qui est de la maltraitance (en France, appelez le 119). Pourtant, Ève n'exprime aucune rancune (Ma mère était comme ça). Mais aucun commentateur ne l'a mis à son crédit !

je crois que c'est ma seconde sœur qui l'a dit : Pourquoi elle n'en est pas sûre, on l'apprendra effectivement plus tard (parce que les années ont passé).
Et pourquoi elle affirme que Tout le monde le pensait, c'est parce qu'elle a fait l'expérience toute sa jeunesse des réflexions continuelles de sa famille, sans compter les regards. Tout le monde le pensait est une façon pudique de dire qu'ils étaient toujours tous après elle à ce sujet. Comme quoi, quand on ne se plaint pas assez de ce qu'on a enduré, on finit par paraître coupable.

« lequel et comment ? Ce n'est pas indiqué. Ce n'est pas essentiel, j'en conviens, mais cela crée une petite frustration de lecteur. »
– Cela aurait ajouté au reproche de cynisme. Dont elle se défend : s'il avait fallu que j'entre dans les détails, il y en aurait eu pour pleurer.
– Frustrer le lecteur quand c'est possible le maintient éveillé. Surtout quand un sur deux déclare avoir failli s'ennuyer.
– S'il faut satisfaire ta curiosité, souviens-toi par exemple du buzz médiatique de l'été 2009 sur les explosions de téléphones portables.

L'été qui a suivi le décès de notre père, sa veuve avait encore…
Oui, le mot veuve est parfois ressenti de façon négative. Il sert ici à marquer qu'elle n'est pas plus "la mère des enfants" que "la femme du père". C'est également une façon de la représenter en noir. Et de ne pas réemployer mère ou Maman.

Cette hécatombe a sans doute travaillé notre mère, … « Elle l'aurait été à moins, me semble-t-il ! »
Cela n'est pas contesté (sans doute n'exprime pas ici la concession), mais tempéré par la suite de la phrase, qui évoque la personnalité de la mère restée hermétique : … mais comment savoir ? elle a toujours vu les choses d'un point de vue très personnel (elle a pris une majuscule en centrale de correction, ce qui fait deux phrases, mais je n'en avais fait qu'une).

Ce tout juste trentenaire… : Il n'est pourtant question que du frère dans les cinq propositions précédentes. Mais l'esprit du lecteur a pu glisser de ministre à préfet (même si en France les préfets deviennent rarement – sinon jamais – ministres).

À propos du résumé : Il est parfois difficile de rédiger un résumé qui n'oriente pas la lecture. Il y a un risque de déséquilibrer le travail d'écriture. Quelque chose de sybillin et de léger faisait bien l'affaire, le lien avec l'Everest étant bien sûr le sommet de la pyramide des âges (et les jeux d'empilement).
Mais ce jeu de mots aurait pu être le point de départ du texte. J'aurais aimé l'écrire avec une contrainte à la Raymond Roussel (cf. Comment j'ai écrit certains de mes livres). Lui aurait commencé par : « NN escalada l'Everest », et terminé par : « Est-ce qu'à la dalle [funèbre] Ève reste ? »
Les jeux de mots ne sont pas forcément du poil à gratter, ils font naître des correspondances. Alors, paraître potache ne me fait pas peur. Et Alphonse Allais a toujours été un maître.

L'acronyme EVE est aussi un jeu de mots (facile ou joli, comme on voudra) qui relie éternité et éternel féminin, complétant heureusement la chute.
Accessoirement, la dernière Ève renvoie aussi à la première. C'est-à-dire qu'il y a une femme avant Ève, du nom de Lilith. Et la Vierge Marie est nommée la Nouvelle Ève (tout comme un cabaret de Pigalle).

Longue vie à tous !

Contribution du : 09/09/2011 17:10
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Re : Ève, la dernière
Visiteur 
Bonjour i-zimbra,

Merci pour les précisions sur la genèse (sans mauvais jeu de mots, rapport aux références bibliques) de ce texte. C'est toujours intéressant et agréable à connaître.

Il y a un certain nombre de points sur lesquels je ne suis pas d'accord, ou pas complètement. Il ne s'agit pas de contester tes positions, mais simplement de les confronter aux miennes, qui sont forcément de nature très différentes, puisque nous avons par rapport à ce texte des positions également très différentes (toi auteur et moi lecteur).

Citation :

Comme l'a dit Incognito, « l'ensemble est construit uniquement pour préparer la chute ». Dans une nouvelle à chute, ça me semble la moindre des choses, et même une règle du genre. Cela étant réalisé, il n'y a pas lieu de chercher trop d'autres intentions à l'auteur.


Que ce soit en tant que lecteur ou en tant qu'auteur, je ne cherche pas forcément de chute. Ce n'est pas pour autant que je ne peux pas apprécier le genre. Lorsque je dis que « l'ensemble est construit uniquement pour préparer la chute », ça n'est pas un reproche. Ce que je n'aime pas, c'est de lire un texte creux avec juste une chute au bout. C'est peut-être une condition nécessaire (je cite: "et même une règle du genre"), mais pas suffisante pour moi. Ce n'est pas le cas de ton texte. Je veux dire qu'il n'est pas creux, du tout. Cependant, j'aurais aimé qu'il s'y trouve davantage de choses pour me maintenir en éveil total. Mais je te rassure, je ne me suis pas endormi. D'ailleurs, j'ai bien noté ton texte, preuve que je l'ai apprécié.

Citation :

Cela dit, dans la Dernière Ève, le cynisme n'est pas prouvé.


Ca n'est pas le problème, je crois. Il s'agit de savoir si je l'ai ressenti ou pas. Je l'ai ressenti, très fort par moments. C'est tout !

Citation :

Si on avait su d'emblée que les faits étaient antérieurs d'un siècle à la narration, on aurait trouvé Ève moins cynique. Son détachement aurait paru normal et on aurait eu plus d'empathie pour cette doyenne de l'humanité.


Je ne suis pas du tout d'accord. Pour moi, c'est même tout le contraire. Le cynisme me parait plus compréhensible pour des faits récents ou relativement récents, qui n'ont pas encore été digérés. D'ailleurs, vers la fin du texte, j'ai ressenti le cynisme d'autant plus fort que j'ai appris que le recul temporel de la narratrice par rapport aux faits est très important.
Je précise qu'il ne s'agit en aucun cas d'un jugement à l'égard de la narratrice (et pas davantage à l'égard de l'auteur, ça va de soi). J'ai par contre trouvé un événement récent qui a pu me faire comprendre ce cynisme : jusqu'à l'instant ultime, quand je les ai entendus, tous, reprendre en chœur : « Eh bien, tu en as mis du temps ! ».

Et je ne trouve pas qu'il y a détachement, mais alors pas du tout !
Certes, on ne trouve pas énormément d'implication de la narratrice dans les faits relatés, comme si elle relatait l'histoire d'une autre, c'est vrai, mais il y a par contre implication très forte dans la manière de relater.
Je reviens notamment sur ce "sa veuve", que j'ai ressenti de manière très violente...

Citation :

L'été qui a suivi le décès de notre père, sa veuve avait encore…
Oui, le mot veuve est parfois ressenti de façon négative. Il sert ici à marquer qu'elle n'est pas plus "la mère des enfants" que "la femme du père". C'est également une façon de la représenter en noir. Et de ne pas réemployer mère ou Maman.


Dans "sa veuve", le terme le plus violent n'est pas le substantif, mais l'adjectif possessif ! Ça va beaucoup plus loin que ce que tu dis : ça ne montre pas qu'elle n'est pas plus "la mère des enfants" que "la femme du père", ça montre qu'elle est exclusivement "la femme du père". C'est du moins comme ça que je l'ai ressenti, et je ne suis pas certain qu'il soit possible de le ressentir autrement (mais je peux me tromper).

Citation :

@ incognito
Je pourrais en donner, des leçons de morale !
« la mère est plutôt maltraitée par la narratrice » : Quand elle lui retirait le sein de la bouche, c'est ça qui est de la maltraitance (en France, appelez le 119). Pourtant, Ève n'exprime aucune rancune (Ma mère était comme ça). Mais aucun commentateur ne l'a mis à son crédit !


Désolé si je t'ai donné l'impression de vouloir donner des leçons de morale par mon com. Ça n'est pas, mais alors pas du tout le cas. D'ailleurs, ça fait partie des choses que j'apprécie dans ce texte. Je n'aime pas les textes moralisateurs (bien qu'en fait, le texte soit tout de même moralisateur, à l'égard de ceux qui sont toujours trop pressés).
Ça ne m'étonne pas qu'aucun commentateur n'ait mis au crédit de la narratrice l'absence de rancœur dans le passage que tu cites, parce qu'on en perçoit à bien d'autres endroits (du moins, moi, j'en perçois). D'ailleurs, la narratrice ne dit pas que sa mère lui retirait le sein de la bouche, elle dit que la montée de lait était stoppée et ça n'est pas tout à fait la même chose. Enfin, lorsque je dis que la mère est maltraitée par la narratrice, je ne fais qu'un constat et absolument aucun reproche, ni à la narratrice, ni à l'auteur. On s'est sans doute mal compris sur ce point.

Citation :

je crois que c'est ma seconde sœur qui l'a dit : Pourquoi elle n'en est pas sûre, on l'apprendra effectivement plus tard (parce que les années ont passé).


Je l'ai bien compris et l'ai d'ailleurs dit dans mon com. Et pour aller plus loin (je l'avais dit dans mon com, mais pas développé), la phrase précédente se termine par "un cadeau si je me rappelle bien." Le doute exprimé ici est exactement de même nature que celui sur l'identité de la sœur (le grand recul temporel). Et c'est bien parce que les expressions de ces deux doutes encadrent de manière extrêmement rapprochée l'absence de doute sur les pensées des autres personnages que celle-ci s'en trouve démultipliée !

Citation :

Et pourquoi elle affirme que Tout le monde le pensait, c'est parce qu'elle a fait l'expérience toute sa jeunesse des réflexions continuelles de sa famille, sans compter les regards. Tout le monde le pensait est une façon pudique de dire qu'ils étaient toujours tous après elle à ce sujet.


J'en ai parfaitement bien compris la raison, mais ça m'a fait tiquer pour les raisons exposées ci-dessus. Je ne dis pas que cette absence de doute n'est pas compréhensible ni même justifiée, je dis simplement que ça m'apparait comme une erreur de point de vue dans le récit (dans un dialogue, il en aurait été tout autrement).
Je ne suis pas à me demander si la narratrice avait le droit ou pas de poser cette affirmation, ça n'est pas mon problème et je lui en délivre très volontiers le droit. Mon souci est que je n'ai pas l'impression de recueillir la parole de la narratrice, dans ce cas précis.
Vois-tu, s'il y avait eu une petite formule, pas grand chose, pour accompagner cette affirmation, je n'aurais pas tiqué. Pour donner encore un autre exemple que ceux de mon com, si tu avais écrit "Tout le monde le pensait, c'est évident", j'aurais vraiment eu l'impression que c'était la narratrice qui prenait sur elle l'expression de cette évidence, mais tel que c'est écrit, ben je sais pas, mais j'ai l'impression d'être face à un narrateur omniscient.

Peut-être que je me trompe, hein, mais je serais très intéressé de connaître le point de vue d'autres lecteurs parce que, mine de rien, ça me parait quelque chose de très important dans la manière d'écrire (et si ça se trouve, je fais la même chose que toi dans mes écrits).

Citation :

« lequel et comment ? Ce n'est pas indiqué. Ce n'est pas essentiel, j'en conviens, mais cela crée une petite frustration de lecteur. »
– Cela aurait ajouté au reproche de cynisme. Dont elle se défend : s'il avait fallu que j'entre dans les détails, il y en aurait eu pour pleurer.
– Frustrer le lecteur quand c'est possible le maintient éveillé. Surtout quand un sur deux déclare avoir failli s'ennuyer.
– S'il faut satisfaire ta curiosité, souviens-toi par exemple du buzz médiatique de l'été 2009 sur les explosions de téléphones portables.


Moi en tous cas, je ne te fais aucun reproche sur ce cynisme. Je le ressens, en fait le constat et m'en réjouis même, puisque j'aime ça.

Je te promets de réfléchir à ce moyen de maintenir le lecteur éveillé, car ça fait partie de mes interrogations majeures lorsque j'écris.

Merci pour la satisfaction de ma curiosité.
Juste pour te charrier, j'aurais écrit :
"Elle s'était encore payé un machin à peine homologué, dernier cri. Elle n'en poussa qu'un… « Boum » a fait le bidule !... ce n'est pas comme si elle avait souffert longtemps à cause des émanations toxiques ou des radiations, comme cela arrive."


Pfiou, je suis crevé moi, je m'arrête là.


Au plaisir de te lire encore.

Contribution du : 09/09/2011 19:44
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Re : Ève, la dernière
Chevalier d'Oniris
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Citation :
Au plaisir de te lire encore.
Et paf !

Citation :
Le cynisme me paraît plus compréhensible pour des faits récents ou relativement récents, qui n'ont pas encore été digérés. (…)

Citation :
j'ai ressenti le cynisme d'autant plus fort que j'ai appris que le recul temporel (…)
Peut-être prends-tu cynisme une fois dans un sens (parler de quelque chose d'une façon qui choque), une fois dans l'autre (en parler froidement).
(Et j'ai omis de citer le cynisme enthousiaste et "innocent", comme celui du présentateur vedette de notre télé publique qui s'écria : « Génial ! » en découvrant les images du 9/11. Si cela avait paru compréhensible à moins de gens, il ne serait plus à la télé dix ans après).

Quand j'enchaîne, après les sept morts, avec « Je me souviens encore assez bien de cette famille », "cette", au lieu de "ma", peut choquer (les associations familiales, ou le lecteur qui dans sa propre vie voit Papa et Maman régulièrement) ; mais la famille d'Ève depuis quatre-vingt-dix ans, c'est sa propre lignée. Parler de façon factuelle de collatéraux disparus depuis si longtemps devrait pouvoir être compréhensible.

On notera en passant cet exemple célèbre d'ambiguïté : « Aujourd’hui, Maman est morte. » (Albert Camus). La mère du narrateur est décédée le jour même. « Ou peut-être hier, je ne sais pas. » Sans la deuxième phrase du livre, on pouvait comprendre « Aujourd’hui, Maman n'est plus (ça fait un bout de temps). »

Citation :
je ne suis pas certain qu'il soit possible de le ressentir autrement
Veuve a peut-être pour toi une connotation qui m'échappe. J'ai écrit la phrase avec la veuve exactement comme j'aurais écrit : « Quand mon grand-père a été mobilisé en 14, sa femme a dû nourrir ses enfants seule », où l'accent est mis sur les difficultés du couple. Si Grand-Père ne revient pas, je mets "veuve" (je mettrais peut-être "Mémé" si je veux faire sortir les mouchoirs). Les faits sont cyniques, être factuel ne l'est pas toujours.
Quoi que tu écrives, tu affronteras les préjugés d'un lecteur. Devant « Quand Papa est parti en Algérie, Maman a eu du mal à nous nourrir », un lecteur pensera : « Ce bon fils appelle toujours ses parents "Papa" et "Maman" », mais un autre : « Cet égoïste ne pensait qu'à son ventre quand son père était à la guerre. »

Citation :
« Tout le monde le pensait, c'est évident »
revient au même puisqu'elle ne le démontre pas davantage. L'important est que c'est évident pour elle, qu'on la croie ou non. Ce n'est pas une plaidoirie. Et elle n'est pas dans une situation où elle a à justifier son témoignage ; elle est sur un lit d'hôpital en attendant le dîner, dans l'urgence d'écrire son incursion dans l'au-delà, et c'est sa vérité. Et si elle a des doutes sur des détails, elle est certaine (qu'elle se trompe ou non) de ce qui l'a marquée à vie.

Citation :
« Boum » a fait le bidule !...
C'est ignoble.
(« Le bidule a fait boum » ne serait que déplacé.)

Et pardon pour la faute : sibyllin.

Contribution du : 11/09/2011 11:44
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Re : Ève, la dernière
Visiteur 
Moi, en tous cas, j'ai renoncé.

J'ai l'impression que tu prends mes remarques pour des jugements. Ce ne sont que des constatations. Si jugement il devait y avoir, il serait positif. J'aime cette façon d'envisager de façon lucide (cynique peut-être, voire nihiliste) ce qui a pourtant constitué notre environnement familier. Et "cynique" n'est pas une insulte. D'aucuns lui donne untne connotation péjorative. Ce n'est pas mon cas. Tu as évoqué la signification antique, d'ailleurs.

Comme je te l'ai expliqué, ce n'est pas le mot "veuve" que j'ai noté, c'est l'adjectif possessif qui le précède.
Lorsque tu écris la phrase « Quand mon grand-père a été mobilisé en 14, sa femme a dû nourrir ses enfants seule », il me semble qu'il ne s'agit pas excatement de la même chose. Premièrement, j'ai l'impression que le focus est mis d'avantage sur le grand-père et définir alors la grand-mère par rapport à son mari ne me fait pas le même effet. Surtout, il s'agit de la grand-mère et non de la mère, d'un lien qui peu être fort avec le narrateur, certes, mais moins direct et l'effet n'est pas tout à fait le même.
Aussi, dans la variante suivante : « Quand Grand-Père a été mobilisé en 14, sa femme a dû nourrir ses enfants seule », on retrouve l'effet dont je parlais, car le fait de nommer le grand-père "Grand-père" crée un lien fort entre celui-ci et le narrateur et, partant, induit une distance d'autant plus grande avec la grand-mère.
Comprends-moi bien ! Je ne fais aucun reproche. Je sais ce que j'ai ressenti en lisant cette phrase. Tu ne peux pas nier ce que j'ai ressenti et je ne dis rien quant à l'intention que tu aurais eu de me faire ressentir cela ou autre chose, je ne fais que chercher à comprendre, à trouver les raisons pour lesquelles j'ai ressenti ça. Et ce qui vaut pour moi ne vaut pas forcément pour un autre, c'est évident.
Je continue donc à chercher...
La phrase complète est : "L'été qui a suivi le décès de notre père, sa veuve avait pu réunir encore une fois tous ses enfants".
Lorsque la narratrice dit "L'été qui a suivi le décès de notre père", elle s'inscrit totalement dans la famille, la fraterie (à cause du "notre"). En revanche, lorsqu'elle écrit "sa veuve avait pu réunir encore une fois tous ses enfants", elle s'exlut de la famille (à cause du "sa") et de la fraterie (à cause du "ses").
Bref, je le répète, il ne s'agit que de MA lecture. Au delà de toi, auteur, j'aimerais pouvoir confronter ma lecture à celles d'autres lecteurs.

« Tout le monde le pensait, c'est évident » -> revient au même puisqu'elle ne le démontre pas davantage. L'important est que c'est évident pour elle, qu'on la croie ou non. Ce n'est pas une plaidoirie.
Je suis complètement d'accord avec toi : elle n'a pas besoin de le démontrer, elle ne me doit aucune plaidoirie. C'est pas mon problème. Mon problème, tel que tu l'as écrit, c'est que j'ai l'impression de receuillir une vérité universelle désincarnée et pas la parole de la narratrice. Je ne saurais l'expliquer en terme gramatical ou de technique littéraire, mais je n'ai pas la même impression dans l'exemple que je fournis. Dans ton texte, j'ai une impression de récit. Dans mon exemple, j'ai une impression de monologue. Je le répète : je me trompe peut-être complètement.

« Boum » a fait le bidule !... » -> C'est ignoble.
Ok, ok

Contribution du : 11/09/2011 14:01
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Re : Ève, la dernière
Visiteur 
Et zut ! Le début de mon post manque.
C'est vraiment désagréable, ce bug qui fait défiler automatiquement la fenêtre d'édition et qui aboutit à ce genre de désagrément.

Je réécris donc le début de mon post.


Ben dis-donc, tu m'as l'air au moins autant susceptible que moi !

"Au plaisir de te lire encore." - > Et paf !
Pourquoi "Et paf !" ?
Ce n'était pas de l'ironie de ma part, je le pense réellement. Si tu veux vraiment savoir : tu es un auteur, de part sa culture et la grande précision de ce qu'il écrit, qui m'impressionne.

Je retiens une phrase importante dans ce que tu as écrit :

Citation :

Quoi que tu écrives, tu affronteras les préjugés d'un lecteur.


Comment veux-tu qu'il en soit autrement ?
Ne me dis quand même pas que tu es encore à espérer autre chose ?
Moi en tous cas, j'ai renoncé.

Contribution du : 11/09/2011 14:09
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Re : Ève, la dernière
Chevalier d'Oniris
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Post(s): 2873
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Citation :
"Au plaisir de te lire encore." - > Et paf !
Pourquoi "Et paf !" ? Ce n'était pas de l'ironie de ma part

Ni de la mienne.
Nous donnons là une réponse illustrée à la suite de ton post, à savoir l'importance de la précision dans l'écriture pour limiter ou contrôler tout ce que les préjugés, la susceptibilité, ou la différence culturelle du lecteur lambda l'empêchent de comprendre à demi-mot (je reconnais que ce n'est pas toujours plus évident à mot entier).

« Et paf ! » signifiait « voilà, tu es encore en train de me lire », que j'aurais dû ajouter. Moins on laisse de sous-entendu, moins on risque le malentendu, mais c'est moins drôle.

Contribution du : 11/09/2011 16:40
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Re : Ève, la dernière
Visiteur 
Citation :

Moins on laisse de sous-entendu, moins on risque le malentendu, mais c'est moins drôle.


Voilà une bien belle conclusion à laquelle je souscris sans réserve.
Quand on est vicieux, on ne se refait pas, mais le vice peut avoir du bon.

Contribution du : 11/09/2011 17:41
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