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Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
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Bonsoir et merci à tous mes lecteurs attentifs, les indulgents comme les exigeants !
J’ai présenté ce texte un peu dans l’état d’esprit de Gavroche grimpant sur la barricade, et se préparant à tomber sous la mitraille. Au lieu de quoi, beaucoup de roses — et peu de piquants…
Je prends tout, réserves et bémols avec… même si les critiques me plongent dans la mélancolie (et d’autant plus que je les trouve fondées) !
J’essaie ici de répondre, sinon à chaque remarque, du moins aux principales…
N.B. - 1) Je ne pense pas me livrer à l’exercice à chaque publication ! mais je souhaitais que mes critiques sachent que leur avis m’intéresse et que j’en prends connaissance avec attention et toute l’objectivité dont un auteur Lambda est capable, s’agissant de ses propres écrits !
2) Je ne chercherai pas nécessairement à parfaire encore ce poème, dans la mesure où je ne crois pas qu’un sonnet soit « rapiéçable » à l’infini, surtout vers par vers, comme s’il n’y avait pas de lien organique entre eux. Un sonnet ressemble un peu à un problème de sudoku : on trouve LA solution ou on passe à côté. Si trop de vers sont à reprendre, c’est qu’on l’a pris par le mauvais bout et qu’il vaut mieux en faire un autre.


- Ioledane - Ce sujet me vint d’une réponse bateau à une question bateau : « Quel est ton livre préféré ? » Or je l’avais, ce livre, rencontré au moins vingt fois dans la décennie écoulée. D’où l’idée qu’il change tout le temps : j’entends mal en quoi elle pose un problème de « crédibilité »… Je célèbre surtout par là les joies que procure une saine curiosité. J’avais d’ailleurs songé à mettre en épigraphe le « Timeo hominem unius libri » attribué à Thomas d’Aquin (Je crains l’homme d’un seul livre)… Mais j’aurais aussi pu, à propos de l’évasion, citer Banville : « Je veux lire; viens, Rabelais; / Ce temps-ci m’intéresse peu. »

- Ioledane et brabant - J’assume « doux-amer », car c’est l’exacte sensation que me procure l’odeur des vieux livres…
À ce sujet, un article amusant : http://fluctuat.premiere.fr/Livres/News/D-ou-vient-l-odeur-des-vieux-livres-3325988…
Je ne rêvais donc pas : ils sentent bien la vanille !
Du point de vue « évocation », les remontées de l’enfance sont aussi ambivalentes : cherchez bien… ce n’était pas forcément, ou pas toujours, le village des Schtroumpfs.
Techniquement, tant qu’à user de la rime-cliché mer / amer, je me suis efforcé de la renouveler quand même (ce n’est pas la « mer » comme telle, ce sont les pays lointains; ce n’est surtout pas le « flot amer ») ; et j’avoue m’être un peu fait plaisir en la renforçant (DOUtreMER / DOUzaMER — bien vu, Ludi !)…

- brabant - Je fais mien le credo verlainien en ne précisant pas quels bois exotiques… Quant au titre, ce poème n’en avait pas… j’ai donc suivi l’usage de le désigner par son incipit, mais en m’arrêtant à l’hémistiche.

- Ikran : « Mh, oui mais quand même ce mot-là me dérange un peu. » Oh, allez, quel mot, dites ! quel mot ? (J’ai bien mon idée, mais…)
En tout cas, je ne vous confierais pas ma montre à gousset. Vous y décèleriez probablement que ma tante Myrtle Jenkins a servi comme cantinière au Bengale (4e Lanciers), que j’ai une passion pour le cricket et le thé earl grey, que je sais jouer de la cornemuse mais, en vrai gentleman, m’en abstiens… et je ne mentionne là que les choses avouables.

- Sansonnet - Ce n’est pas faux ! Le vers 5 achoppe et a quelque chose d’empâté. Sans doute les deux locutions adverbiales y tiennent-elles trop de place (5 syllabes sur 12), ce qui laisse une impression de cheville.
Leur sens, quoique (trop ?) proche, demeure bien distinct : « D’emblée » se rapporte à la prise de contact physique avec le livre, « par avance », à ce que le lecteur y projette alors, par anticipation.
Quoi qu’il en soit, je retravaille sans regret un vers même des mois après sa dernière mouture : si je trouve (ou quand je trouverai) une formule plus belle, je n’hésiterai pas à le reprendre. Mais je sais d’expérience qu’il vaut parfois mieux la laisser venir.

- Renaud - Je souscris volontiers aux critiques sorties de votre chapeau… en assumant mon rapport à la création qui est plus de célébrer ou d’évoquer que d’analyser. En passant, je célèbre moins l’écrit que le livre, voire le vieux papier. Les « Cartes, gravures » renvoient évidemment à « l’enfant amoureux de cartes et d’estampes »…

- Ludi - J’aime qu’on épluche la prosodie et la versification, et j’aime peaufiner, retoucher, ciseler — puisque aussi bien c’est le but du jeu ! Ailleurs, j’aurais dû justifier le simple choix de « rimer classique »… Ici, nous pouvons causer diérèse et hiatus sans nous excuser.
Aussi ne renoncez à rien de votre sévérité, et continuez de m’en faire bénéficier ! Évidemment, je défendrai pied à pied ce à quoi je crois — tout en laissant « perfuser » remarques et critiques.
Comme indiqué un peu plus haut (cf. Sansonnet), je considère toujours mes poèmes comme des travaux en cours. Je reviens très souvent sur un vers, un mot, une formule, une virgule même, et ce, des mois après les avoir laissés décanter. D’ailleurs, plusieurs des vers ici commentés existent dans des versions différentes.

Allons-y donc point par point :

1) Vérification faite, « steamer » admet les deux prononciations dans tous mes dictionnaires de rimes où le mot figure (Louis, Martinon, Desfeuilles/Lilti, Warnant). Je choisis donc évidemment la prononciation désuète « stimair ». Elle ne remonte quand même pas au XIXe siècle — tout au plus à mon enfance qui, pour autant qu’il m’en souvienne, a bien eu lieu de mon vivant…

2) « Pourtant… je ne saurais dire ce qu’il recèle »
En fait, je prononce spontanément ce vers avec un accent d’emphase sur « saurais » et en laissant retomber la voix ensuite. J’y vois deux raisons.
- D’abord, « (ne pas) savoir » et « receler » sont les deux mots importants.
- Ensuite, cette accentuation (qui suit la pensée) est rendue possible par l’emboîtement des régimes (saurais < dire < ce qu’il recèle > >). « saurais » a bien pour régime complet « dire ce qu’il recèle », qui occupe tout le deuxième hémistiche. Cela suppose de ne pas accentuer « dire », sans quoi, en effet, on a deux accents forts de part et d’autre de la césure.
Je vous accorde volontiers qu’on s’éloigne alors de la stricte prosodie classique, et que cette diction n’est pas évidente. C’est pourquoi je vais demander la correction suivante sur les vers 11 et 12 :
Pourtant… j’ignore encor // quels secrets il recèle,

Et s’il me faut // les découvrir // en l’explorant
Du même coup, sont prises en compte les observations relatives au vers 12 (qui devient un trimètre).

3) « chercheur » : Ici, je me rebelle.
On ne refera pas toute la polémique hugolienne coursier/cheval et autres nez/narine, dans laquelle s’inscrirait, ce me semble, la classification de « chercheur » comme « trivial »… Outre qu’il n’existe à ma connaissance aucun synonyme satisfaisant à « personne qui cherche », un Larousse du XXe siècle indique : « se dit particulièrement d’une personne dont l’esprit est tendu et appliqué à des découvertes ». Ce qui me semble assez loin du trivial.

4) Vers 5 et 12 : ces remarques me semblent justes. Le vers 5 ne me satisfait pas en l’état, et attendra donc des jours meilleurs !
Je suis particulièrement d’accord sur « qu’en l’ouvrant », qui se prononce avec une série de contractions pénibles de la gorge (la voyelle sourde OU et l’R guttural n’arrangent rien). Dur à dire, dur à entendre.
Voir ci-dessus au point 2) quelle correction j’y apporte.

5) « jardins bénis par la mousson » : en dépit de ses dangers, la mousson est une condition de la fertilité des terres. Sans elle, les pêcheurs du Tonlé Sap et les paysans du bassin du Mékong n’auraient plus qu’à partir pour la ville, où les multinationales les attendent en se frottant les mains, si on veut bien me passer cette métaphore-ci (les multinationales ont des tentacules, pas des mains)…
Pour s’en tenir au vers 9, il ne se situe que du point de vue des jardins et des jardiniers. Reste que, de tous points de vue, la disparition de la mousson serait une catastrophe écologique et humaine d’une ampleur difficile à imaginer…
Je récuse donc « métaphore bancale », puisqu’il s’agit ici d’un débat « nature marâtre vs. humanité gérant mal les conditions naturelles » qui ne ressortit en rien à la technique du sonnet :).

En résumé, « intéressant mais perfectible » est en général l’appréciation la plus favorable que j’accorde à mes propres textes, et vos remarques me confortent dans ce perfectionnisme : elles seront toujours bienvenues.

- djb - J’avais en effet demandé la correction « favori » à la place de « préféré », mais elle n’était pas possible pour une raison qui reste un peu nébuleuse. En fait, cela ne me semble plus si important.
Pour le vers 12, voir plus haut…

- Gemini - Plusieurs de vos remarques (steamer, hémistiche, vers 5) sont débattues ci-dessus.
D’accord pour les rimes en -ance, dont le cas est aggravé par le fait que sont toutes des substantifs féminins…
J’use volontiers (trop, parfois, mais je me surveille) du cadratin, que je préfère aux parenthèses.
Puisqu’il s’agit a priori de livres non-encore découverts, il n’est pas utile de chercher des références bibliographiques. Il s’agit plutôt d’un rapport au livre en général, et à la mémoire, qui passe notamment par l’odorat — peut-être parce que j’ai grandi parmi des livres auxquels voyages et climats avaient donné une patine olfactive. Notez (vers 13) que l’écrit est loin de tenir toute la place dans cette « imago mundi » que proposent les livres…
De même, les souvenirs ne se veulent pas précis ou personnels.
Pour les mots vietnamiens, je les cherche sur la toile et je les copie-colle, après vérifications croisées. J’ai parlé vietnamien jusqu’à l’âge de six ans, mais n’en sais plus un mot et n’ai jamais su l’écrire !

- Buldo - Pour la rime « steamer », voir (> Ludi ci-dessus).
Attention : la prononciation « stimeur » n’est pas plus anglaise que « stimair ». Il faudrait dire « ’sti:mœ » avec accent tonique sur la première syllabe : ce ne serait même pas une rime masculine.
Le mot steamer prononcé à la française, au choix, « stimeur » ou « stimair », est bien un mot français même s’il vient de l’anglais, de même que le mot rendez-vous est anglais, même s’il vient du français.
Le mot khmer fait également partie de la langue française, fût-ce par emprunt, et se prononce « kmèr » en français. Il rime donc bien avec tout le reste.

Encore une fois, merci infiniment à tous pour l'intérêt que vous avez bien voulu porter à ce tout petit texte…
AelQ

Contribution du : 27/05/2013 23:01
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Maître Onirien
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Bonjour AelQ,

Merci pour cette réponse qui a dû vous prendre du temps, en espérant qu’il vous fut bon.
Je voulais signaler, pour avoir rencontré le cas, que « steamer » possède un équivalent en double phonétique avec « container ». J’aimerais aussi revenir sur cet hémistiche du vers 11 « Pourtant… Je ne saurais dire ce qu’il recèle »
auquel on trouve un équivalent dans un célèbre poème de Verlaine : Mon rêve familier, vers 8 : « Elle seule les sait rafraichir, en pleurant. »
Avec toutes les précautions qu’il faut pour ne pas associer classique et Verlaine. Je crois en tout cas, sur cette condition de sens, qu’il ne faut pas être plus orthodoxe que le roi.

J’ai bien aimé votre position sur l’état de vos poèmes, qui sont donc, comme les nuages, en perpétuelle formation.

Contribution du : 28/05/2013 09:40
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Visiteur 
Bonjour Abd-el-Qalam,

D'abord je regrette d'une manière générale que les commentaires de textes n'apportent pas plus d'échanges entre auteur et lecteurs. Le votre est si complet, et vous défendez vos idées avec tant de talent, que je m'en voudrais de ne pas vous répondre.

Pour moi, le classique est une écriture qui s'impose des contraintes, comme d'autres formes inventent aussi d'autres contraintes, parfois beaucoup plus difficiles à résoudre, par exemple les strophes montantes dans les "Djinns" de Victor Hugo.
Le jeu consiste donc à trouver une solution la plus acceptable possible au problème posé, sinon ça ne sert à rien de vouloir concourir en classique (je ne parle pas de vous, bien évidemment). Et donc, c'est vrai, je ne me satisfais pas comme d'autres, d'avoir juste humé un instant le parfum de vos vers, même si je les ai lus avec grand plaisir. Votre poème remporte une adhésion à laquelle je participe sans problème. Et c'est justement cette adhésion qui m'a poussé à approfondir mon commentaire.

Je reprends le commentaire que vous m'adressez :

1- La rime steamer/kmer:
J'utilise le Larousse, Le Robert ou le Littré. Les trois me donnent une phonétique en "eur" pour steamer. Mais si d'autres dictionnaires (belges ou canadiens ) et Oniris l'acceptent, alors ce n'est pas moi qui ferai obstacle, au contraire je ne peux que m'en réjouir. Amis belges ou canadiens, si vous m'entendez,...je vous ) . J'ai juste saisi l'occasion pour batailler un peu.

2- « Pourtant… je ne saurais dire ce qu’il recèle ».

La structure de ce vers 11 ne me gêne absolument pas. Je ne suis pas spécialement adepte d'un classicisme pur et dur. Moi-même je pratique assez souvent cette torsion de l'alexandrin à la césure. Votre vers 11 aurait pu être écrit par Rimbaud, mais certainement pas par Ronsard ou Hérédia. Ma remarque visait juste la référence d'Oniris au traité de Sorgel. Mais on sait que c'est un sujet sans fin...
http://jocab.over-blog.com/pages/Alexandrin_Decasyllabe_et_Octosyllabe-3241152.html
(voir "erreurs à ne pas commettre à la césure" [c] ). Cette liste manifestement tirée du traité de Sorgel, cite comme exemple à éviter à la césure : "deux verbes liés par le sens", alors que bizarrement Sorgel n'en parle pas, ce qui à mon avis est une erreur ou un oubli.

3- "Évasive promesse au chercheur de jouvence". Ce n'est pas la définition de "chercheur" que je trouve triviale, mais le mot lui-même, dans le sens où ce mot, par sa fréquence, est devenu banal, ordinaire, n'a plus aucune originalité, ce qui correspond à la définition exacte du mot "trivial" que j'ai employé.
- Un poète symboliste aurait pu dire : "sourcier de jouvence".
- Un poète contemporain aurait sans doute préféré pousser la métaphore : "coudrier de jouvence" (malheureusement avec diérèse), qui demande à revoir le début du vers.
Tout ça pour dire que chacun peut trouver la place pour exprimer son univers poétique.

4- Nous sommes d'accord. Je préfère la correction que vous avez apportée, malgré la licence (encor); je sais, je suis ch..., mais plus la solution est parfaite, plus le problème est intéressant à résoudre.

5- D'accord aussi. J'ai d'ailleurs apporté un bémol à ma critique, en acceptant l'idée que la mousson puisse être idéalisée. Je connais aussi son rôle déterminant dans l'irrigation des terres.

Voilà, Abd-el-Qalam, j'ai bien apprécié cet échange.
Cordialement
Ludi

Contribution du : 28/05/2013 14:45
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Expert Onirien
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Ioledane - Ce sujet me vint d’une réponse bateau à une question bateau : « Quel est ton livre préféré ? » Or je l’avais, ce livre, rencontré au moins vingt fois dans la décennie écoulée. D’où l’idée qu’il change tout le temps : j’entends mal en quoi elle pose un problème de « crédibilité »… Je célèbre surtout par là les joies que procure une saine curiosité. J’avais d’ailleurs songé à mettre en épigraphe le « Timeo hominem unius libri » attribué à Thomas d’Aquin (Je crains l’homme d’un seul livre)… Mais j’aurais aussi pu, à propos de l’évasion, citer Banville : « Je veux lire; viens, Rabelais; / Ce temps-ci m’intéresse peu. »

J'aime bien l'idée de départ. Ce qui me gênait en termes de crédibilité était de décréter a priori que ces livres dont vous ignoriez tout, étaient vos livres préférés. Il y a aussi des déceptions dans les lectures que l'on fait ... Voilà, mais encore une fois, si je suis la seule à m'être fait cette réflexion, c'est que je dois être trop basique ;)

Merci en tout cas de vos réponses détaillées.

Contribution du : 28/05/2013 15:18
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Maître des vers sereins
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Ma remarque visait juste la référence d'Oniris au traité de Sorgel. Mais on sait que c'est un sujet sans fin...
http://jocab.over-blog.com/pages/Alexandrin_Decasyllabe_et_Octosyllabe-3241152.html
(voir "erreurs à ne pas commettre à la césure" [c] ). Cette liste manifestement tirée du traité de Sorgel, cite comme exemple à éviter à la césure : "deux verbes liés par le sens", alors que bizarrement Sorgel n'en parle pas, ce qui à mon avis est une erreur ou un oubli.


Je pense que c'est un choix, et non une erreur ou un oubli.

Fondamentalement, toutes les sources sur la prosodie font l'impasse sur une contradiction flagrante, d'une part l'objectif formel de cette façon d'écrire, et d'autre part une part de ses règles qui ne répondent pas à cet objectif formel.

L'objectif formel, c'est la musicalité, les règles qui n'y répondent pas, c'est justement ce traitement de la césure qui l'assimile à une ponctuation plutôt qu'à une intonation, mais je peux citer plus simplement la règle d'accord des rimes en nombre, qui n'a aucune justification du point de vue de la musicalité.

Au-delà de cela, il y a une opposition entre la prosodie comme outil poétique, neutre du point de vue de l'intention de l'auteur, et une vision de la prosodie comme un "voyage dans le temps" qui devrait commander aux auteurs de ne pas dévier d'une intention d'écriture en dehors de celles qui animent les écrits plus anciens.

Sorgel place en avant la liberté d'utilisation de la prosodie, l'indépendance de vue des auteurs : accorder les rimes en nombre fait partie de l'esthétique classique, sans aucune justification "poétique", c'est à dire que ça ne donne ni musicalité, ni profondeur particulière au vers. Le traitement de la césure a par contre une incidence sur la façon de le lire, notamment quand elle désynchronise l'intonation de la ponctuation, avec pour conséquence une influence autant sur la musicalité que sur la profondeur du propos, appréciable ou pas bien entendu, mais qui n'est plus une question simplement esthétique, formelle.

C'est juste un point de vue, mais Sorgel n'a jamais été là pour se défendre, alors que son traité, qui reprend largement les connaissances les plus courantes de la prosodie, n'est pas le moins cohérent qui soit. Il est notamment très clair pour la distinction fond/forme alors que la plupart des traités anciens amalgament les opinions de leurs auteurs sur ce que doit être une "bonne" poésie avec les règles et usages, interdictions et tolérances.

Encore plus avant sur le sujet, je pense que la majeure partie de la poésie amateure est sous influence classique, et que le problème est bien moins de préserver les acquis historiques de la poésie que de permettre son renouvellement, et la diffusion de ce renouvellement, en toute connaissance de cause. La liberté n'est pas dans les prosodies marginales issues des différences entre l'orthographe, envisagée comme esthétique, et la prononciation contemporaine.

Il n'y a pas de "vrai" classique, il y a adhésion à des courants, sur la base des critères de mètre et de rimes envisagés comme des outils permettant de produire une musicalité concrète, réellement audible pour tout locuteur du français. Ces critères sont les seuls à pouvoir être une base commune, réellement neutre du point de vue de l'intention d'écriture, et préservant la liberté de création dans le cadre d'une poésie "classique".

Un sonnet avec assonance, sans accords en genre des rimes, avec des enjambements à la rime ou à la césure est encore un sonnet classique, il n'est pas une poésie libre.

En m'excusant pour la digression, mais Sorgel et son traité est l'un des rares à promouvoir une vision cohérente de la poésie, où les règles s'inscrivent dans un cadre revendiqué consciemment et sans occultation flagrante de la prononciation courante depuis plusieurs siècles, sans l'amalgame qu'on peut qualifier de notoire entre fond et forme, où la prononciation est proprement niée au profit d'un culte des auteurs anciens, et contre la volonté de ceux-ci pour autant qu'ils pouvaient l'envisager.

Avec Sorgel, on sort notamment de l'absurde beauté ou laideur du hiatus et de la diérèse que ne permettent pas les traités du 19ème. Il n'y a pas de règles du "beau", il y a opinions, c'est au delà des questions du juste et du faux.

Contribution du : 28/05/2013 16:10
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
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Citation :

Ludi a écrit :
1- La rime steamer/kmer:

J'utilise le Larousse, Le Robert ou le Littré. Les trois me donnent une phonétique en "eur" pour steamer. Mais si d'autres dictionnaires (belges ou canadiens ) et Oniris l'acceptent, alors ce n'est pas moi qui ferai obstacle, au contraire je ne peux que m'en réjouir.


Je ne peux rien dire pour le Canada francophone (bien que la proximité voire l'entrelacement avec la communauté anglophone me donne une petite idée de la réponse), mais, même en tant que Belge, je ne peux me résoudre à faire rimer steamer avec outre-mer/doux-amer/khmer. Cela dit, je ne représente pas toute la Belgique, et encore moins les Français, qui demeurent pour moi une source de plaisir sans cesse renouvelé lorsque je les entends essayer de prononcer des mots hors hexagone, que ce soit en flamand, en anglais, en portugais ou toute autre langue. Un exemple frappant qui me fait rire depuis toujours : le prénom portugais "Jorge", que les Français férus d'exotisme langagier se plaisent à prononcer "Yorgué", persuadés qu'ils sont de montrer ainsi qu'ils savent prononcer les mots autrement que dans leur système phonétique local, alors qu'en fait, à peu de choses près, ce prénom se prononce comme le prénom français "Georges".
Si vous n'êtes pas Français et que vous souhaitez passer un excellent moment de divertissement, je vous encourage très vivement à suivre un match de football commenté par un commentateur Français. Vous verrez, vous ne le regretterez pas !

J'espère, Adb-el-Qalam, que vous ne m'en voudrez pas d'intervenir sur un forum consacré à un sonnet que je n'ai pas commenté, mais ayant lu votre demande de ce jour aux correcteurs, je ne peux que repenser à ce que j'écrivais voici quelques jours.

Contribution du : 28/05/2013 17:42
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Visiteur 
Désolé David, mais je persiste et je signe.
Dans sa liste des « erreurs à ne pas commettre à l’hémistiche (Sorgel p.42)» il est, pour moi, totalement incohérent qu’il ne retienne pas celle des "deux verbes liés par le sens" comme l’indique la page de mon lien http://jocab.over-blog.com/pages/Alexandrin_Decasyllabe_et_Octosyllabe-3241152.html . Mais chacun est libre de son appréciation.

De toute manière tout ça n’a aucune importance, puisque Oniris prévient : « Toutefois, nous adaptons partiellement certaines de ces règles, en raison de l'évolution de la langue et de la grammaire depuis l'époque où ces règles ont été énoncées. », et donc, si j’ai bien compris, Oniris accepte toutes les métriques pour peu que l’hémistiche soit respecté (en acceptant toutefois le trirème 4/4/4). Donc, on a choisi Sorgel uniquement parce que son traité est facile d’accès sur Internet, en supprimant tout ce qui ne nous convient pas.
Tout ça ne doit pas forcément nous empêcher de souligner les écarts avec la prosodie et la versification classiques. Certains auteurs peuvent être intéressés de savoir quelles ont été les évolutions du classique dans le temps.

Contribution du : 28/05/2013 18:05
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
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Ludi, le traité de Sorgel, à la page 43, reprend chacun des exemples du lien que tu cites, y compris explicitement le cas de la césure "entre deux verbes liés par le sens".

On peut voir dans les formulations de phrases identiques que les deux références en copient-collent une autre. C'est pas Banville ni Boileau je pense, ça doit être un autre traité encore.

C'est la césure de Rimbaud que je devais défendre et pas du tout Sorgel en fait, qui colle tout à fait à ce que dit l'autre lien.

C'est l'usage de son traité sur Oniris qui l'expose au critiques mais on voit bien là qu'en fait, il est peu lu... et même pas assez relu, je te prie de croire que je suis passé un certain nombre de fois sur son traité, et je n'ai pas vérifié ce qui lui été attribué lors de ma précédente réponse.

Edit : les vers qui servent d'exemple sont strictement les mêmes pour ces "erreurs à la césure" chez Sorgel et en suivant le lien. L'ensemble de la question provient donc d'une même source, ça n'est même pas reformulé.

Contribution du : 28/05/2013 18:28
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Visiteur 
David, autant pour moi, la présentation n'était pas tout à fait la même, d'où ma lecture un peu rapide.
Mais bon, ça confirme quand même que j'avais raison de trouver cette absence ridicule. OK, tu m'as expliqué que tu faisais référence à autre chose...
J'arrête de squatter (en même temps, on est quand même dans le sujet de Abd-el-Qalam).

Contribution du : 28/05/2013 18:41
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Re : Remerciements et éclaircissements à propos de "Mon livre préféré"…
Visiteur 
Bienvenue, Stony ! Personne n’est un intrus sur ce fil : il va sans dire que l’avis de tous est apprécié ici comme sous le texte en discussion. Et à tous : squattez tant qu’il vous plaira… on est là pour causer, donc causons ! (Juste une limite : on est prié de ne PAS me raconter la saison III du Trône de fer… sinon, je cafte aux modérateurs) !

Je ne suis certes pas un ayatollah de la règle, on l’a vu dans ces vers. Mon approche est assez bien résumée par une remarque de Ravi Shankar : « Pour enfreindre la règle, il faut la connaître » (« To break the rule, you need to know the rule »).
De façon générale, j’aime cette prosodie ancienne non par fétichisme ou par orthopraxie, mais pour son esthétique. Par exemple, question de goût, les diérèses me manquent quand on choisit la « prononciation courante » en versification moderne.
Mais j’aime aussi introduire des ruptures de rythme dans la versification classique pour jongler entre le vers et l’idée, la pensée et la prosodie.

Comme ici j’ai envie de ciseler de « vrais » vers classiques… eh bien, je cisèle ! Quitte à jouer le jeu à fond — ce qui donne toute leur saveur aux licences d’usage, genre « encor ». Ces licences, d’ailleurs, n’en sont pas tout à fait : elles font encore partie d’un système extrêmement codifié. (Je rejette en tout cas le conseil d’un Banville bannissant sans aucun discernement la licence ou l’inversion.)
Cela dit, pour la modif, on m’informe qu’elle n'est pas possible, sauf à retirer le poème et à le représenter, mais bon, hein… on va pas y passer le mois de juin :) !

Pour steamer, je confirme que les quatre dictionnaires de rimes cités (qui servent aussi à vérifier ce genre de choses) admettent les deux prononciations -eur et -air. Je n’ai pas inventé la prononciation « stimair » par commodité, mais l’ai bien entendue venant de locuteurs hexagonaux natifs, et c’est la seule que je connaissais dans mon enfance (même s’il n’y avait déjà plus guère de navires à vapeur). Je sais que les éditions récentes du Robert et consorts ne proposent plus « stimair » et que cette prononciation est désuète, mais c’est ce qui convient au ton du poème.
(Les Canadiens même francophones prononceraient généralement le mot « à l'anglaise » avec un accent nord-américain, et trouveraient hilarantes nos deux formes.)

Encore merci à tous de partager ici votre expertise : c'est bien ce que je suis venu chercher…

Contribution du : 30/05/2013 20:38
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