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Réalisme/Historique
jlm : Pas de photos s'il vous plaît
 Publié le 17/05/09  -  9 commentaires  -  7208 caractères  -  40 lectures    Autres textes du même auteur

Histoire d'une rencontre entre le narrateur et une femme âgée dans une rue de Bayview, un quartier réputé mal famé de San Francisco.


Pas de photos s'il vous plaît


J'ai rencontré La vieille Ida en descendant du côté de Bayview, un samedi matin, alors que le soleil pointait le bout de son nez au fond de sa rue. Pourquoi choisir Bayview comme balade ? À vrai dire je n'avais pas trop réfléchi. Peut-être tout simplement parce que je voulais aller voir, par curiosité. Appelez ça du voyeurisme malsain si vous voulez, en réalité je crois que j'ai juste obéi à une pulsion. Je me suis levé avec l'envie de parler avec quelqu'un là-bas.

Le temps d'avaler un café dans la rue, j'ai pris le premier bus.


J'ai ensuite marché au hasard, à la rencontre de quelqu'un à qui parler et c'est comme ça qu'à l'angle d'une rue dont je ne me souviens pas du nom, j'ai rencontré Ida.

Ida était dehors, sur le trottoir, assise sur une vieille chaise à profiter des premiers rayons de ce début d'été. Elle semblait porter en elle toute la mémoire de ce quartier avec ses cheveux blancs et sa paire de lunettes posée sur son nez. Plus que sa peau parcheminée, c'est la couleur et l'éclat de ses yeux qui m'ont attiré.

Je voulais simplement qu'elle me parle d'elle, de la vie ici. De la vie d'avant, et de celle de maintenant. Mais Ida m'a gentiment demandé de partir.


« Ici, il est inutile de venir se promener, il n’y a rien à voir pour les touristes, rien de typique et surtout pas de photos à prendre. Certains essayent parfois. Ils viennent par le bus, descendent et font quelques pas dans la rue, mais on les repère vite. Avec un peu de chance ils ne se feront pas dépouiller, ils garderont leurs sacs et leurs appareils photo. Vous savez, avec tous les jeunes qui traînent dans la rue, entre eux, ce n’est pas prudent de venir quand on n’est pas du quartier.

On vous repère de loin vous savez. À votre tenue, à votre démarche, cette façon de vous balader et de tout regarder comme si vous étiez au zoo. Oh je ne dis pas que personne ne peut venir, non, il y a le facteur, l’employé du gaz, et pas mal d’autres types, des gens normaux qui viennent ici sans risque, mais pas le touriste, non.


Les jeunes ici, se sentent délaissés, exclus. Ils descendent rarement en ville, ils sentent bien qu’il y a peu de place pour eux ailleurs qu’à Bayview.

San Francisco est une succession de quartiers bourgeois, plein de petits blancs pleins de fric. Des zones de vieux ou d’homosexuels. Oh je sais, vous me direz qu'il y a des noirs là-bas, des jaunes aussi et des latinos et les rues pourries de Tenderloin, mais les noirs de là-bas sont riches, vieux, flics ou homosexuels. Alors quand on est un perdant de naissance et sans avenir y a aucune chance, comme qui dirait. Les flics les surveillent quand ils vont parfois dans les centres commerciaux, on les regarde de travers. Alors ils se lâchent un peu, cassent quelques trucs et disparaissent. Personne ne vient les chercher ici, non. Bayview c’est le ghetto.


Ça pue le pétrole des docks, le plastique brûlé et un peu le souffre. On n’a pas de plage, on n’a pas de Golden Gate, on n’a pas de parc non plus, rien d’exceptionnel, juste la friche industrielle du Monster Park, le port de commerce et ses odeurs. On cuit au soleil et on crève l’hiver.

Les gens d’ici ont des petits boulots. Il y a beaucoup de femmes de ménage ou de simples petits employés qui bossent sur Financial district ou Yerba Buena, d’autres bossent jusqu’à Palo Alto. La route est longue pour aller là-bas, et quand on rentre tard, les gosses sont toujours dehors, à parler business, magouilles ou Basket Ball.


Il y a deux jours des touristes comme vous sont arrivés ici. Ils voulaient faire quelques portraits. Ils se sont fait choper par une bande de gamins. Il y a eu quelques baffes, la fille hurlait, le gars protestait, mais personne n’est sorti pour les aider. C’est comme ça. Finalement ils sont partis, sans leur appareil numérique. Je crois que c’est celui du dessous qui l’a gardé.


L’autre jour il y a eu des coups de feu dans la rue, un gosse est mort, une balle en pleine tête, une histoire de bande, à propos de territoire. C’est bête, vraiment, parce que leur territoire c’est le ghetto. Ils n’ont pas encore compris que ce jeu de territoire c’est simplement le bout de terre sur lequel les autorités veulent bien leur foutre la paix. On ne peut pas conquérir le ghetto dans lequel on se trouve, c'est une illusion. Ils y sont déjà, c’est dommage.


Le gosse, je le connaissais, enfin, je connaissais sa mère, je l’ai eu comme élève, à l’école quand elle était gamine. Elle était brillante, elle aurait pu se tirer d’ici, partir, et épouser un type bien. Finalement elle s’est mariée avec un bon à rien, un beau parleur qui a fini en taule. Elle se retrouve maintenant seule avec son fils dans un cercueil, un enterrement à payer, pas un rond de côté.


C’est ça aussi San Francisco, il faut le dire. Les gens croient que c’est une ville géniale. Mais c’est génial seulement quand on a du fric pour en profiter, sinon c’est la misère. Vous avez vu le nombre de clochards dans les rues là-bas ? Les gens viennent parce qu’ils ont des rêves, parce qu’ils fantasment sur la ville, ils pensent que c’est le paradis, mais moi je vous le dis, avant d’avoir le paradis, on traverse le purgatoire, quand ce n’est pas l’enfer. Il vaut mieux être bien né ici. Bayview c’est leur enfer, c’est notre paradis à nous.

Bien sûr il faut faire le tri dans ce que je vous dis. On ne va pas mourir en descendant du bus, ou tomber dans une embuscade à chaque fois, c’est juste que ça dépend des jours. Il y en a où c’est calme, d’autres moins. Les gosses sont gentils quand on les connaît, moi ils me respectent, vous comprenez, j’ai fait la classe à la plupart de leurs parents. Ça compte pour eux, mais je ne peux pas m’empêcher de les plaindre. La moitié d’entre eux pensent devenir des rapeurs célèbres, les plus grands pensent devenir basketteurs et intégrer une équipe de la NBA, c’est n’importe quoi. Les plus lucides ou les plus malins s’occupent de dope direct. L’argent rentre tout de suite, ce n’est pas du rêve, c’est la réalité de ce quartier ou du moins une des réalités de ce quartier. L’autre réalité c’est la foule de gens honnêtes qui n’ont que des petits boulots, des petites vies et des petits appartements. La vie, même ici, reste très chère. C’est la source de toutes les frustrations. Ne pas pouvoir partir en vacances, juste une escapade vers Tahoe. Vous savez lors du dernier tremblement de terre en quatre-vingt-neuf, nous avons été les derniers sur la liste, pour les secours.


Vous voyez, la vie est comme ça ici, pas meilleure et légèrement pire qu’ailleurs. Ce n’est pas l’enfer que l’on décrit parfois, c’était encore plus dur dans le temps, mais il y aura toujours ceux de la ville et nous, les riches et les pauvres. Alors, quand les pauvres regardent les vitrines de la ville, n’ayez pas peur, respectez-les, c’est tout.

Prenez la ville en photo, mais pas nous, vous voyez ? »


Ida ne m'a pas laissé le temps de parler, elle m'avait tout dit. Je n'avais pas de sac en bandoulière, pas d'appareil photo, rien d'intéressant qu'un petit magnéto. Je l'ai laissée sur sa chaise et je suis reparti en ville par le bus, il était encore tôt, un autre café devait bien m'attendre du côté de North Beach.


 
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   Selenim   
18/5/2009
 a aimé ce texte 
Un peu
Un témoignage sympathique qui manque d'un peu de style pour décoller.

Je ne vois pas l'intérêt d'intégrer le narrateur à l'histoire. Il est là sans savoir pourquoi, il veut juste parler et il trimballe un magnéto pour enregistrer les conversations... étrange.

Le récit de Ida ne nous apprend rien de nouveau sur les ghettos urbains étatsuniens mais est chargé d'un certaine authenticité.

San Francisco est une succession de quartiers bourgeois, plein de petits blancs pleins de fric. Des zones de vieux ou d’homosexuels. Oh je sais, vous me direz qu'il y a des noirs là-bas, des jaunes aussi et des latinos et les rues pourries de Tenderloin, mais les noirs de là-bas sont riches, vieux, flics ou homosexuels. Alors quand on est un perdant de naissance et sans avenir y a aucune chance, comme qui dirait.

Ici, il faut comprendre que pour avoir la chance d'habiter à SF il faut être riche, vieux, flics ou homo...
Amusant que l'homosexualité soit un facteur de réussite et d'ascenseur social.

   nico84   
18/5/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Mêmes remarques que Selenim à la fois sur la pertinence de la présence du narrateur ainsi que l'homsexualité comme ascenseur social.

J'aurais préféré un récit comme le fait Flupke, en sorte de documentaire. Je trouve que tu dis de belles choses mais que l'écriture est trop plate ou trop descriptive. Tu raconte ce que quelqu'un raconte et donc on est assez loin de tout ce récit.

On est beaucoup trop loin de tes personnages principaux qui ne sont ni le narrateur ni la vieille dame (en partie).

Je n'ai donc pas été transporté par la forme. Le fond lui est bien, la misére comme destin, l'illégalité comme avenir meilleur. Tu décris bien tout ça. Et les touristes et la justice, ce sont les points forts de ta nouvelle.

   Anonyme   
18/5/2009
J'ai lu aussi. Bon une "impression sociale" d'un quartier de San Francisco. Cela ne m'a pas passionné, même si le thème est évidemment universel, mais on en reste au constat, et le propos bien que nécessaire fait tout de même un peu ressassé... Je ne sais pas, trop "photographique" justement. Un peu comme un article de journal. Ca se laisse lire toutefois.
Pas forcément très réaliste, la petite vieille atteinte de loghorrée mais bon.

Sinon, (en regard des coms précédents) le fait que dans certains quartiers la communauté homosexuelle soit riche et influente - et donc facteur "d'ascension sociale" - n'a rien de nouveau ni de particulièrement étonnant.

   Cyberalx   
18/5/2009
 a aimé ce texte 
Pas
Un texte documento-journalistique qui peine à soutenir ses protagonistes qui n'ont qu'un rôle de second plan.

ça ne décolle pas vraiment et le plaisir que l'on pourrait prendre à apprendre des choses sur Frisco est entaché par le prisme archétypique au travers duquel l'auteur voudrait nous faire regarder.

Des répétitions trop rapprochées (vieux et homosexuels), des demi vérités qui ne vont pas au bout du raisonnement (les jeunes qui veulent devenir star du basket ou du rap le font-il parce que c'est leur rêve ou parce que c'est un rêve prémaché ? Est ce réellement un facteur de réussite que de devenir une star ? ).

Je pense que l'auteur tient là une ébauche de toile de fond, avec des idées intéressantes bien que non énoncées jusqu'au bout.

Il manque les personnages, leur personnalité, une histoire, bref, ce texte n'est pas une nouvelle, pas encore.

Néanmoins, le tout n'est pas mal écrit, loin s'en faut, de même, quelques phrases comme "on cuit en été, on crève en hiver" font parfois mouche et laissent présager un style intéressant, au plaisir de te relire dans quelque chose de plus achevé, donc.

   widjet   
18/5/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
C’est dommage que l’auteur n’ai pas mis quelques pauses dans cette longue tirade plutôt convaincante (j’en aurais bien pris quelques lignes en rab car c’est très fluide). J’aurai voulu « voir » davantage cette vieille femme, cette « mémoire » vivante qu’elle semble représenter. Cela m’aurait permis de visualiser la scène de façon plus nette. Et d'y percevoir l'humanité de cette ville.

Dommage aussi que l’auteur ne prenne pas le temps de décrire les alentours de la ville, juste avant la rencontre. Il manque un "cachet" à ce texte, à cet hommage.

Un sentiment d’inachevé demeure donc. Quelque chose qui tourne trop court, à l’image de la visite touristique.

Mais le texte a des qualités. Avec plus de profondeur et un peu plus de détails (une vraie personnalité en somme), on tenait là un petit court métrage à la Spike Lee.

Attendons le prochain opus de l’auteur pour se faire une idée plus juste.

W

   Perjoal   
19/5/2009
L'idée est bonne. Mais le développement me parait déstructuré. Est-ce un texte sur le quartier, sur la vie de Ida ou sur le "journaliste" ?

Le problème c'est qu'a force de viser plusieurs cibles, on en touche aucune !

J'aime beaucoup le style.

   calouet   
19/5/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Des choses à dire, pas inintéressantes, mais un peu trop survolées sans doute, et surtout la forme pêche.
Pourquoi avoir fait ce choix narratif? A mon avis, ce serait bien meilleur, intégré à une vraie intrigue (même simpliste), avec un vrai "corps" de texte autour de ce monologue... Intégré dans une histoire plus aboutie, ce serait pas mal je crois, oui...

Là, on frôle le documentaire. Soit tu pars là dessus, et tu écris un "article" voire un "essai" soit tu restes dans la fiction, et là faut donner du volume, de l'épaisseur, faut nous faire entrer à Bayview mieux que ça.

   florilange   
6/7/2009
 a aimé ce texte 
Un peu
Le narrateur voulait parler à quelqu'un de Bayview. Il n'a parlé à personne, seulement écouté. On ne sait rien de la vieille dame, à part qu'elle a fait la classe à presque tous les parents des gamins traînant les rues. Ce n'est pas 1 dialogue mais 1 monologue, pas ce qu'on attendait. Même pas 1 fait divers. Pas de chute. Il ne s'est rien passé. 1 anecdote.

Dommage car le texte est relativement bien écrit. Comme 1 journaliste qui aurait fait 1 bon article sur 1 quartier de LA.
À la prochaine fois, jlm.
Florilange.

   Maëlle   
15/8/2009
 a aimé ce texte 
Pas
Tout dans ce texte respire la carte postale. Du narrateur bien propre sur lui qui boit son café à la vieille institutrice qui prend le soleil et parle comme un article de journal.
C'est une série de clichés, et qui au final ne raconte rien: on ignore à peu prés tout de tout les personnage, il ne s'est rien passé.

Je pense pourtant qu'il ne faudrait pas grand chose que pour ce texte prenne un peu de souffle.


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