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Réalisme/Historique
Otus : À fond la caisse
 Publié le 20/09/07  -  5 commentaires  -  18217 caractères  -  71 lectures    Autres textes du même auteur

Quand le capitalisme s'invite dans une petite supérette, tous les coups sont permis pour garder sa place.


À fond la caisse


Jour 1.

Il est 19h. Le magasin ferme.

Après cette rude journée, les deux caissiers font leurs comptes, Claude, le gérant, vient leur annoncer leur total. À eux ensuite de tomber d’accord avec ce total.

René a fini ses comptes le premier. Comme tous les jours depuis presque vingt ans qu’il travaille dans cette supérette, son compte tombe impeccablement juste.

Miguel, le second caissier, est arrivé récemment dans la supérette.


- Plus 4 euros 38, annonce-t-il, fièrement.


Cela veut dire qu’il a trop dans sa caisse, et que selon toute probabilité, il a rendu moins de monnaie qu’il aurait dû le faire.

Claude, le gérant, lève la tête de son ordinateur.


- Tu as 4,38 de plus, Miguel ?

- Yes, sir !

- Alors, mets-les à part.

- Je les garde ?

- Non, tu me les donnes !

- Ok.


Quand le rideau d’acier descend sur la vitrine, ils se lèvent et rejoignent le petit comptoir près de l’entrée, derrière lequel se trouve Claude et son ordinateur qui centralise les informations de la supérette. Les deux caissiers tendent leurs pochettes plastifiées dans lesquelles se trouve leur recette à chacun.


- C’est bien, Miguel, tu travailles bien.


René jette un regard en biais à la jeune recrue de son patron.

Puis il tourne les yeux vers Claude, et intervient :


- Normalement, l’idéal c’est d’avoir un compte qui tombe juste !

- Non, René, ça c’était bon avant. Maintenant, seule la plus-value compte, et aujourd’hui, la plus-value, c’est à Miguel que je la dois.


Jour 2.

Il est 19h. Le magasin ferme.


- Annoncez vos soldes, les gars ! lance Claude, depuis son ordinateur.

- Plus 3, 22 ! clame fièrement Miguel

- Plus 5,47 ! rétorque René.


Le front dégarni de Claude et ses petits yeux apparaissent derrière le comptoir.


- Tu as dit « plus 5,47 », René ?

- Oui, c’est bien ça.

- Alors, on tient notre nouveau champion ! Tu viens de battre le record de plus-value du magasin. Continue comme ça, René.


Jour 3.

Il est 19h. Le magasin ferme.


- Fermez les caisses et donnez vos soldes, les gars !


René entend cette phrase tous les jours. Claude ne se rend pas compte qu’il est devenu aussi automatisé qu’une caisse enregistreuse.

Miguel se remémore cet instant croquignolesque du début d’après-midi, quand il a encaissé la mère Le Crouchard : la vieille est complètement aveugle, elle n’a plus toute sa tête et quand elle doit payer elle tend son porte-monnaie au caissier : pas de chance pour elle, ce jour-là, le caissier, c’était Miguel. Il a discrètement mis un billet de 10 euros en trop dans sa caisse, et c’est passé comme une lettre à la poste. En plus de cela, il a arnaqué un euro par-ci par-là à d’autres clients.


- Plus 13,34 ! annonce-t-il, fier comme un paon.


René, derrière lui, le fusille du regard quand Miguel se retourne vers Claude.


- Wow ! Bravo, Miguel ! Et toi, René ?

- Plus 8,66.

- Tu faiblis, René, tu faiblis !


René ne saisit pas trop où s’arrête la boutade et où commence le reproche dans la remarque de Claude.

Ce soir-là, René rentre chez lui, pas vraiment fatigué, mais amer de devoir subir la concurrence débile de ce petit con de Miguel.


Jour 4.

Il est 19h. Le magasin ferme.

René a un moyen imparable de rester le caissier préféré de Claude. Il sort un billet de 20 de sa poche, et l’ajoute dans la caisse.


- Annoncez vos soldes, les gars !

- Plus 17,89 ! clame Miguel.

- Tu t’es encore défoncé, hein, Miguel ? C’est bien, j’aime cet esprit. Et toi, René ?

- Plus 28,76.


Miguel a les épaules qui tombent comme un château de cartes, et Claude se lève de son siège.


- Putain ! Tu as fait fort, mon René !


René déteste quand Claude l’appelle « Mon René ». Mais il savoure, au fond de lui, cette victoire écrasante sur la connerie humaine.

Les deux caissiers se lèvent, tendent leur enveloppe à Claude.

Claude pose les enveloppes dans son tiroir, se lève à son tour, et s’assoit sur le bord de son bureau. René se dit que ce n’est pas dans ses habitudes : il a donc quelque chose de grave à annoncer.


- Les gars, je ne vais pas y aller par quatre chemins : dans deux semaines, ma nièce arrive en ville, et elle va avoir besoin d’une place. Une place de caissière. Donc, vous avez en gros dix jours pour me démontrer que vous aimez votre boulot, et que vous vous donnez à fond. Vous voyez où je veux en venir ?


Miguel acquiesce tout de suite. René plonge son regard dans celui de son patron. Cela fait presque vingt ans qu’il travaille pour Claude, et il est mis sur un pied d’égalité avec ce petit merdeux qui devait téter les seins de sa mère quand René a fait son premier compte de caisse ici.

Claude laisse flotter un instant de silence et poursuit :


- Donc, à vos marques, et que le meilleur… reste !


Jour 5.

Il est 19h. Le magasin ferme.

Miguel recompte sa caisse très rapidement, annonce « Plus 29,59 ».

René en fait autant. Il annonce, lui aussi, 29,59 d’excédent. C’est rare d’avoir exactement le même écart, mais ça arrive.

Miguel s’approche de Claude.


- Tu veux que je passe la serpillière, Claude ?

- Tiens, oui, c’est une bonne idée ! Comme ça, j’enlève une heure de travail à la femme de ménage qui passe le matin.


Content de son coup, Miguel court vers le local d’entretien.

René reste donc devant le bureau de Claude.


- Il en veut, lui, hein ?

- Oui, tu peux le dire. Et, il faut bien que je l’avoue, il me coûte moins cher que toi, René. Toi, avec l’expérience, l’ancienneté et tutti quanti, tu me coûtes un paquet de fric !

- Mais les clients m’aiment bien, je suis rapide, plus rapide que Miguel !

- C’est vrai. Mais la rapidité, on s’en contrefout, ici ! On est la seule supérette du quartier, si les gens doivent attendre, hé bien ils attendent !


René se penche vers Claude, à une distance qui sent la confidence :


- Alors, je travaille un jour par semaine gratuitement, si tu veux.


Claude a un sourcil qui se lève.


- Tu ferais ça ?

- Pour garder mon boulot, je ferais ça, et bien plus !


Derrière eux, Miguel apparaît, le balai à la main.

Claude s’écarte de René, tourne la tête vers Miguel :


- Tu passes bien partout, hein Miguel ? Et sous les rayons, et dans la réserve aussi, ok ?

- Ok, boss !


Claude fixe René droit dans les yeux :


- Il est bien, ce gosse, il est bien.


Jour 6.

Il est 19h. Le magasin ferme.

Dès que Miguel a annoncé son solde de « Plus 32, 24 », il court chercher la serpillière.

René annonce ses 31,45 excédentaires.


- Hé, attends deux secondes, Miguel ! lui crie Claude.


Les deux caissiers approchent du comptoir de Claude.


- La semaine prochaine, on fait une nocturne, jusqu’à 22 heures, comme Noël approche. Vous en êtes ?

- Et comment ! s’exclame Miguel.


René hoche la tête d’un air résigné mais approbateur.


- La mauvaise nouvelle, par contre, c’est que je ne peux plus vous payer d’heures supplémentaires. C’est pas trop grave ?


René a du mal à encaisser le coup, mais il hoche de nouveau la tête.


- Pas de problème, boss ! s’écrie Miguel. Je peux y aller ?

- Oui, c’est bon, Miguel.


Miguel va chercher la serpillière et commence à frictionner vigoureusement le sol.


- René, tu as une préférence, pour ton jour gratuit ?

- Disons le vendredi. La proximité du week-end me rendra la pilule moins dure à avaler.

- Ne sois pas si négatif, René ! Tu sais, ça pèse sur le moral de tes collègues, quand tu es négatif comme ça. Souris ! Just smile, ok ? Tu as un job, c’est rare et précieux de nos jours. Surtout à ton âge.

- Oui, tu as raison, Claude.


Dans sa poche, René a le poing serré.


Jour 7.

Il est 19h. Le magasin ferme.

Cette fois, René a sorti l’artillerie lourde. Il a dans sa poche un billet de 50 euros.


- Annonce ton solde, Miguel !

- Plus 63,48 !


René tressaille. Ce petit enculé l’a coiffé au poteau !


- Ok ! Et toi, René ?

- Plus…


Rapidement, René sort de son autre poche le billet de 20 avec lequel il s’était prévu un petit dîner suivi d’un cinéma, ce soir-là.


- Plus 73,29.

- Et encore un record pour notre champion ! s’écrie Claude.


Miguel lui jette un regard outré, avant d’aller passer la serpillière.

René retrouve Claude, derrière le comptoir du gérant, et lui tend son enveloppe.


- Merci, René.

- Dis-moi, Claude, ta nièce, elle a déjà été caissière ?

- Non, pourquoi ?

- Parce qu’il va lui falloir quelqu’un d’expérimenté pour la former, rattraper ses erreurs, si tu vois ce que je veux dire.

- T’inquiète pas pour ça, j’ai été caissier, moi aussi.

- Ok.

- Tu fais quoi, ce soir ?

- Heu… Je vais dîner et puis je vais au cinéma.


Mais René ment, il va rentrer chez lui et se faire un plat de pâtes. Il regarde tristement l’enveloppe qui contient l’argent de sa sortie, entre les mains de Claude.


- Bon, alors amuse-toi bien !

- Et toi, tu fais quoi ?

- Je reste ici, avec Miguel, on fait l’inventaire du rayon charcuterie.

- Ah ? Et tu ne m’as pas prévenu ?

- C’est Miguel qui a insisté pour le faire tout seul. Et gratuitement, bien entendu.


René se penche vers Claude.


- Tu devrais faire attention.

- Hein ? Attention à quoi ?

- À ce qu’il ne vole rien. Je l’ai vu piquer du jambon il y a quelques jours.

- Ah ?

- Oui.


Jour 8.

Il est 19h. Le magasin ferme.


- Annoncez vos soldes, les gars !

- Plus 87,44 ! clame Miguel.

- Plus 89,01 ! rétorque René.


Le regard de Miguel ressemble à un coup de fusil.


- Alors, Miguel, ça s’est bien passé, cet inventaire, hier soir ?

- Oui, ça s’est bien passé.

- Tu as l’air fatigué, je me trompe ?

- Oui, je suis un peu fatigué. J’étais tout seul, ça m’a pris jusqu’à 2 heures du matin.

- Aïe ! J’espère que tu ne t’es pas trompé dans ton calcul !

- Non, pas de risque.


Claude récupère les deux enveloppes.

Alors que Miguel s’éloigne, le gérant lui lance :


- Tu me feras aussi la vitrine, Miguel ?

- Ok, boss !

- Alors, vous êtes prêts, les gars ? La nocturne, c’est demain !

- Oui, je suis prêt, soupire René.


Le matin même, il est allé à la pharmacie, investir dans deux petits flacons : l’un contient ces cocktails de vitamines qui réveilleraient un mort, et l’autre est empli d’un léger somnifère sous forme liquide qu’il s’est fait prescrire. Mais il ne prendra que les vitamines. Le somnifère, ce n’est pas pour lui.


Jour 9.

Il est 8 heures, le magasin ouvre.

Comme tous les matins, Miguel commence sa journée avec, derrière sa caisse, un petit gobelet de café.

Pour le moment, il n’y a pas de clients, ceux qui sont vraiment matinaux sont déjà passés, et vers 9 heures, il y a régulièrement un trou qui permet aux caissiers de se relayer.

Lorsque Miguel va aux toilettes, René sort de sa poche le flacon de somnifères, vérifie rapidement que Miguel n’est pas dans les rayons, et dépose une généreuse giclée du produit dans le café de Miguel.

Puis il revient à son poste, alors que la mère Le Crouchard dépose sur le tapis roulant ses quelques achats.

Il lui prend son porte-monnaie quand elle le lui tend, puis il le vide intégralement de son contenu, et met quelques piécettes dedans pour faire bonne mesure.


- Merci, Madame, à bientôt !


Miguel revient à sa caisse, boit une petite gorgée de café.

Quelques instants plus tard, c’est l’aveugle du quartier, Monsieur Ladure, qui arrive à la caisse de Miguel.


- Bonjour, Monsieur !


Depuis sa caisse, René voit clairement que Miguel déleste Ladure de ses plus gros billets, en simulant une quinte de toux pour que l’aveugle n’entende pas le bruissement des billets.

« Quel petit salaud », pense-t-il.

Une vingtaine de minutes passent encore, et Miguel commence à montrer des signes de fatigue.


- Hé, Miguel, c’est nocturne aujourd’hui, mais ça veut pas dire que tu dois dormir pendant la journée ! lui lance Claude en passant.


« Et ça se croit spirituel », se dit encore René.

Miguel se lève de sa chaise ; il titube presque.


- Je… je ne me sens pas très bien, confie-t-il à personne en particulier.

- T’as qu’à demander ta journée, commente René, moqueur.

- Non… non, je ne peux pas.


Miguel se dirige vers le comptoir de Claude.

René n’en croit pas ses yeux : son jeune opposant a laissé son tiroir ouvert !

Mû par un élan de solidarité, René se lève, va jusqu’à la caisse de Miguel, y prend deux billets de 50 euros, et la referme.

Il se retourne : personne ne l’a vu.

Il range soigneusement les billets dans sa propre caisse.

Miguel prend une heure pour se reposer dans la réserve.

Les clients affluent, la journée commence.

Elle sera longue, et dure.

Miguel revient finalement, mais il n’a pas récupéré sur sa fatigue.


22 heures arrivent, et le magasin ferme.


- Ok, les gars ! Annoncez vos soldes !

- Plus 143, 56 euros, clame René.

- René, tu es un roi ! Et toi, Miguel ?


Miguel ne répond pas. Il compte et recompte sa monnaie. Il se tire les cheveux, et puis recommence.


- Ohé du bateau ? Et toi, Miguel, combien de bénéfice ?

- Il… il me manque 47 euros et 12 centimes.

- Quoi ? Qu’est-ce que tu dis ?


Miguel tremble, Miguel a le cœur gros et les larmes aux bords des yeux.


- Je… j’ai… 47,12 euros en moins.

- En moins ? Qu’est-ce que c’est que ce bordel ?


René fait un rapide calcul : Miguel a quand même escroqué sa clientèle de plus de 50 euros, ce qui n’est déjà pas mal.

Claude roule des yeux, ses narines expirent de la vapeur tellement il a l’air furax.


- Recompte !

- J’ai recompté quatre fois !

- Alors recompte encore ! De toute façon, ça sera retiré de ta paie !

- Ecoute, Claude…

- Tu me vouvoies dorénavant, petit con !

- Ecoutez, Claude, je vais me rattraper, promis !

- T’as intérêt !


René, juste derrière, jouit de la scène qui se joue sous ses yeux.

Bonne idée, le somnifère. Il recommencera, s’il en a l’occasion.

Claude disparaît rapidement, et revient avec le balai et la serpillière.


- Allez, tu frottes maintenant, et si je vois la moindre tâche, tu es viré !

- Oui, Monsieur.


Miguel a l’air péteux, et René se demande s’il n’y est pas allé un peu trop fort.

Claude lui fait un signe de la main pour l’inviter à le rejoindre derrière le comptoir.


- Je le retiens, celui-là. Il dort dans la journée, et en plus il perd du fric !

- Ben, je voulais t’en parler justement. Tout à l’heure, quand il est parti, il a laissé son tiroir ouvert. C’est moi qui suis allé le fermer.

- J’en reviens pas !

- Moi non plus, pour tout te dire.


Jour 10.

Il est 19h. Le magasin ferme.

Miguel a des cernes sous les yeux, il pourrait ranger des valises dedans.

Mais il fait ses comptes, et annonce 154,22 euros de bénéfice.

René clôt sa caisse, 168,58 euros excédentaires.


- C’est bien, les gars, c’est bien.


Claude retient Miguel qui se précipitait déjà vers sa serpillière :


- Venez me voir, les gars. Les bénéfices que vous faites, c’est bien. Il faut continuer comme ça. Mais j’attends plus de vous.

- Plus ? geignent en chœur les deux caissiers.

- Oui. Le samedi, j’ai l’équipe de week-end normalement, mais avec les fêtes qui approchent, je vous veux en renfort. Dorénavant, vous allez travailler le samedi en plus.


La mine décomposée, René hoche la tête. Miguel l’imite.

Claude continue :


- Le hic, c’est que je ne peux pas vous payer pour le surcroît de travail. J’espère que vous comprenez ma position.

- Bien sûr, acquiesce Miguel.

- Tout à fait, surenchérit René.

- Toi, Miguel tu feras de la mise en rayon, et toi, mon René, tu tiendras un stand de dégustation de produits du terroir. Je préfère vous prévenir tout de suite, les gars : il va falloir donner tout ce que vous avez. Je ne tolérerai pas qu’un d’entre vous ne rentre PAS sur les rotules le samedi soir, ok ? D’autre part, à partir de demain, c’est nocturne tous les soirs jusqu’à Noël.


Jour 11.

Il est 22h. Le magasin ferme.

René clôture sa caisse. Comme tous les jours, il met de l’argent de sa poche dans la caisse, et espère silencieusement que Miguel en mette moins. Le consensus tacite s’est installé : chacun y va de sa poche pour avoir le meilleur bénéfice. Mais René a une pension alimentaire à payer, malgré sa paie supérieure. Miguel gagne moins, mais il a moins de charges.


Jour 12.

Il est 8h. Le magasin ouvre.

René dépoussière rapidement sa caisse. Il actionne la pédale du tapis roulant, mais celui-ci, au lieu d’avancer docilement râle, grince, fume, et se bloque.


- Merde !


René se lève, et va voir Claude.


- Dis, Claude, mon tapis roulant déconne !

- Quoi ? Tu l’as cassé ?

- Non, j’ai rien fait !

- T’as intérêt !


Une heure plus tard, le réparateur arrive, il ouvre la machine et découvre trois boulons coincés dans le mécanisme d’entraînement.

Miguel lui tourne le dos, mais René voit bien le sourire qu’il a jusqu’aux oreilles.

Claude se tourne vers René :


- Ce sera déduit de ta paie !

- Mais…

- Pas de « mais » !


Jour 13.

Aux environs de 13 heures, Miguel se lève subitement, en criant :


- Hé ! On me vole ma mob !


René aperçoit, du coin de l’œil, le jeune homme qui part sur la mobylette.

Ce jeune homme, c’est son neveu.


Jour 14.

René est nerveux. C’est le cinquième client qui vient parler à Claude, et même s’il ne peut pas entendre ce qui se dit, les clients ont l’air énervé.

Il est 22h. Le magasin ferme.

Claude ne demande même pas les soldes.

Il appelle les deux caissiers, qui le rejoignent à son comptoir.


- Les gars, j’ai reçu aujourd’hui des plaintes. Il paraît que des clients se font escroquer sur la monnaie, et pas qu’un peu ! Une fidèle cliente de notre enseigne me dit qu’on lui a volé plus de 60 euros dans son porte-monnaie, en l’espace d’une semaine.


René s’apprête à ouvrir la bouche, mais d’un doigt péremptoire Claude lui reprend la parole.


- Je ne veux pas savoir qui de vous deux est responsable. De toute façon, ma nièce commence demain. Je vous vire. Tous les deux. Pour faute grave. Sans indemnité. Barrez-vous ou j’appelle les flics.


Quelques jours plus tard, René est passé devant la supérette où il a travaillé presque vingt ans. Il y a deux caissières : la nièce de Claude, qui n’a pas l’air d’avoir inventé la poudre, et une jeune Chinoise qui doit se faire payer une bouchée de pain.

René s’éloigne un peu, trouve un pavé désolidarisé par terre, le ramasse, et le jette dans la vitrine.

Et puis, il part en courant.


 
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   Aliceane   
20/9/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai eu du mal à décoller en lisant les premières lignes.
Ce n'est pas à mon habitude mais je trouvais ça trop simple !
Et puis finalement, j'ai tout lu jusqu'au bout.
J'ai dévoré chaque détail, chaque ouverture de caisse après le travail ! Je me suis identifiée aux deux employés, je n'en ai pas mis un de côté (bon j'ai une petite préférence bien sûr, mais chut !).
Pour moi, c'est très réussi. Bravo.

   Bidis   
20/9/2007
J'admets avoir été prise dans les filets de cette histoire jusqu'au bout quoique me dise par ailleurs mon esprit critique.

Dans le premier paragraphe, on trouve deux fois "tomber juste" à peu de distance l'un de l'autre, en plus d'être du langage parlé assez lourd.
Pour le reste, le style me paraît faible, sans grand relief.
Quant à l'histoire, elle est présentée dans la section réalisme/historique. Je veux bien que la concurrence dans le domaine de l'emploi soit féroce, déjà de mon temps je me suis vue confrontée à de tristes personnages, mais tout de même... ! Voler les clients jusqu'à prendre dans leur porte-monnaie, cela me semble un peu surréaliste... Comme ne me semble pas crédible de sacrifier tant d'argent venant de son propre salaire...
Je ne partage donc pas du tout l'enthousiasme d'Aliceane.

   Anonyme   
21/9/2007
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
A l'instar d'Aliceane j'ai essayé de faire tourner le moteur.
Et bien rien..
Je n'ai pas décollé.
Je suis resté cloué au sol.

Je ne vois pas très bien où l'auteur veut en venir ni ce qu'il raconte vraiment.
Mais j'ai fait l'effort de lire jusqu'au bout malgré l'ennui (désolé).

Certes l'idée du crescendo n'est pas mauvaise et ce subit decrescendo non plus.. Mais bon à part ça rien à signaler.

   Anonyme   
23/9/2007
J'aime bien l'histoire, l'idée même de fabriquer le l'extraodinaire avec le tout venant du quotidien est un exercice qui me plait toujours....Bon, après c'est vrai que c'est pas toujours facile d'être à la hauteur du rythme que l'on s'est soi-même imposé dès le départ de l'histoire...et là pour le coup il y en a vachement du rythme...et moi j'ai été happée par celui-ci....et un peu déçue par la fin.....je m'attendais à un truc qui finirai vraiment mal, qui irait peut-être jusqu'au sordide meurtre dans le stock de la superette !....un thriller de supermaché quoi !!!

   cherbiacuespe   
10/4/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je l'aime bien ce Claude. Il sait profiter de sa position privilégiée pour augmenter ses bénéfices.

Les deux caissiers aussi me plaisent bien à s’aplatir sans se révolter pour satisfaire ce brave Claude. Mieux, même quand ils sont viré ils la ferme! Ah les braves serfs, les mignons vilains!

Et le pavé. Ça soulage peut-être, mais c'est dérisoire, pathétique. Bonne nouvelle sur un sujet "casse-gueule. Peu crédible, mais comme on est dans la satire, ça passe bien. Bien écrit, on progresse petit à petit dans l'ignoble, dialogues simple et suffisant. On sourit... Jaune!


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