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Aventure/Epopée
TITEFEE : J'étais de là-bas aussi - suite 10
 Publié le 02/07/08  -  2 commentaires  -  4399 caractères  -  13 lectures    Autres textes du même auteur

Dures réalités, et doux rêves... confrontation.


J'étais de là-bas aussi - suite 10


La nuit est bien avancée lorsqu’ils ressortent encore tous ébaubis de la maison de la prêtresse. La rue est déserte. Les lampadaires déversent une lumière sale sur les trottoirs mal entretenus. Il fait froid, de ce froid humide et pénétrant de la région parisienne, lorsque le crachin noie tout le paysage. Mais les deux hommes sont encore excités de ce qu’ils viennent de vivre. Cependant les deux poules et la somme de 150 euros qu’a donné le cousin de Wattara, leur semblent bien modestes à l’idée qu’ils vont enfin voir fondre sur eux tous les effets bénéfiques des Ilas de la gloire.


Wattara d’ailleurs ne dissocie pas le nom de son cousin du sien et ils sont certains maintenant que le succès et l’argent vont venir


- Mais si j’ai cet enfant, que la prêtresse m’a annoncé, comment pourrais-je t’accompagner dans tes concerts, mon frère ? Ma femme a du mal à rester seule trop longtemps. Elle ne parle que son dialecte et un peu de swahili mais le français elle a beaucoup de mal à l’apprendre, même aux cours d’alphabétisation de la mairie. Ce sont toujours les enfants tu sais, qui lui lisent les étiquettes dans les magasins, et remplissent les feuilles de sécurité sociale, lorsque je ne suis pas là. Même aux allocations familiales, ils sont obligés d’aller avec elle. Comme je te l’ai dit, Manina ne comprend pas le français suffisamment et elle perd tous ses moyens.

- Crois-moi, mon cousin. Si vraiment j’ai le bonheur de gagner beaucoup d’argent, tu ne seras pas oublié. Ta femme est venue te rejoindre parce qu’au pays c’était bien trop dangereux de vivre. La famille aussi risquait gros en la gardant près d’eux car elle n’est pas de la bonne peuplade. Même nos propres voisins sont devenus des assassins ! Mais dans quelque temps la situation peut s’arranger, tu verras, et elle pourra rejoindre les nôtres qui l’accueilleront les bras ouverts. J’en suis sûr. On aura de l’argent et elle aura une belle case, la plus belle du village, et tu seras honoré comme elle le sera aussi.

- Pauvre Wattara, on voit bien que tu oublies la situation qui règne encore là-bas ! Mamina que j’avais laissée au village auprès de ma mère et mes frères a dû s’enfuir en pleine nuit du village, coupé en deux par les luttes ethniques. Elle a dû rejoindre à pied, un camp de réfugiés dans le sud du pays en portant notre premier enfant encore au sein. Et au jour d’aujourd’hui le pays n’est pas encore stabilisé ! La peur ne quitte pas Mamina quand elle songe aux siens qu’elle a laissés là-bas. Elle n’a pratiquement aucune nouvelle d’eux. Elle m’a raconté que ses cauchemars sont moins terribles que ce qu’elle a vu tout le long de la route, et aussi dans le village, avant qu’elle ne le quitte…

- Tu sais, je suis au courant de tout ça, mon frère, et j’y pense encore moi aussi.

- Elle, elle y repense tout le temps, oui elle me parle encore de l’odeur de chair brûlée qui s’élevait des masures, auxquelles les ennemis avaient mis le feu, avec femmes et enfants encore à l’intérieur. Elle ne pourra jamais oublier non plus, sa plus jeune sœur violée par une horde d’hommes rendus fous. Elle ne pourra jamais oublier qu’elle l’a vue, traînée ensuite par l'un de ses bras par un homme, avant qu’il ne lui fende la tête en deux, sur une pierre. Jamais elle ne pourra l’oublier, jamais. Et si elle a pu me raconter toutes ces horreurs c’est qu’elle a confiance en moi. Mais je ne sais pas si au fond d’elle, ne reste pas un sentiment encore plus fort d’appartenance à son peuple martyr. Peut-être qu’un jour elle m’en voudra, même si je n’ai pas participé à cette folie ! En France tout est tellement plus simple et rassurant pour elle et nos enfants ! Jamais elle ne voudra revenir au pays. Non, jamais !

- Ouatouré, mon frère, laisse faire le temps. Je crois qu’il met une couche tous les jours sur les choses difficiles et à la fin elles seront entièrement recouvertes de la cendre de l’oubli. Et si en plus, je gagne beaucoup d’argent, je te le jure encore sur l’âme de nos ancêtres, tu auras plus que ce que tu peux gagner aujourd’hui. Mamina sera une femme heureuse. Et n’oublie pas qu’un enfant va naître et qu’il sera lui aussi célèbre… alors ne te laisse pas ronger par des images qui vont s’effacer bientôt.


Les deux hommes maintenant silencieux se hâtent vers la bouche de métro la plus proche pour rejoindre la banlieue et le modeste havre de paix où vit la petite famille.


 
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   strega   
2/7/2008
 a aimé ce texte 
Bien
Enfin voilà la suite TITEFEE :)

J'attendais, j'avoue avec impatience, le récit du passé, le pourquoi (même si on le suppose évidemment) de la fuite vers la France. C'est chose faite. Et bien faite, avec pudeur et humilité, sans pathos, sans tragique, sans faire pleurer dans les chaumières.

Le style me plaît toujours, très simple, adapté à ce genre d'histoire de vie il me semble. Il se suffit à lui-même aussi. Il me semble aussi qu'un épisode à part était nécessaire pour raconter le passé de la famille.

Je regrette un peu les dialogues longs de chaque personnages. Ca ne me paraît pas très crédible dans une discussion d'avoir des sortes de tirades comme ça mais bon...

Ne nous fait pas trop attendre pour la suite s'il te plait. (je blague hein)

   Anonyme   
11/3/2009
 a aimé ce texte 
Bien
épisode bien venu pour éclaircir délicatement le passé de la famille.


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