Loire aux flots indomptés, fleuve aux mille visages,
Au lit irrégulier, aux ensablés rivages,
Tes eaux ont la couleur et du fer et de l’or,
Lorsque tu coules hautaine, en façonnant tes bords,

Puis, quand tombe le soir, tu te mêles à la nuit,
Et la lune en tes ondes fait un bain de minuit.
Puis lorsque tôt matin, aigrettes et cormorans
Te frôlent de leurs ailes, ignorant le courant,
La nature apaisante offre alors le tableau
D’un monde sans les hommes, inlassablement beau.

Pour réguler ton cours, ceux-ci ont démoli
Tes digues naturelles, impérieuse folie,
En modifiant ton cours, ils ont bravé ton ire,
Et tes crues répétées sont là pour les punir.
L’Impertinent humain, en déplaçant tes pierres,
S’est pensé, pauvre fou, de cet acte fort fier,
Aussi Dame nature irritée par l’affront,
D’interdire tes eaux à la navigation.

Les gabares et les toues, dès lors, ne passent plus,
Les fiers bateaux-lavoirs ont aussi disparu,
Sur ces embarcations tout au long de tes eaux,
On découvrait alors de splendides châteaux,
Dont les rois amoureux ont voulu te doter,
Pour mieux faire éclater ton absolue beauté.

Même les nobles dames de tes seigneurs régnants
Furent envieuses de toi, de tes reflets changeants.
Les condamnés d’Amboise ont voulu se mirer,
Et admirer tes rives, avant que d’expirer.

Ma Loire que j’admire à jamais éternelle,
Aussi loin que je sois, je pense toujours à elle.