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Poésie néo-classique
Ercel : Pantoum sidérurgique
 Publié le 20/03/24  -  8 commentaires  -  859 caractères  -  154 lectures    Autres textes du même auteur

Faux pantoum… Le titre se suffit à lui-même pour appréhender le thème dominant de ce texte.


Pantoum sidérurgique



La musique a cessé dans la grande vallée :
Les vents ne joueront plus la valse des copeaux ;
Reste le souvenir de la flamme envolée
Sur les montants rouillés d’églises en lambeaux.

Les vents ne joueront plus la valse des copeaux :
Les danseurs éconduits ont quitté les estrades.
Sur les montants rouillés d’églises en lambeaux,
Des croix en vieil acier chantent des airs maussades.

Les danseurs éconduits ont quitté les estrades,
Laissant désespérés les cuivrés instruments.
Des croix en vieil acier chantent des airs maussades :
La religion du fer périt dans les tourments.

Laissant désespérés les cuivrés instruments,
Maillets et percussions ont trahi les chorales.
La religion du fer périt dans les tourments,
Car gémissent toujours les tristes cathédrales.


 
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   Gemini   
2/3/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
J'ai pensé aussitôt à Verhaeren, un des rares poètes (sinon le seul ?) qui écrivit sur les grandes villes, et les fa(u)meuses "Usines".

Il faut un certain courage, je trouve, pour placer ce mot "sidérurgique" dans le titre d'un poème. Je ne sais pas si je l'aurais fait. En tout cas c'est accrocheur.
C'est peut-être la seule remarque que j'ai à faire, puisque j'ai trouvé excellent le texte.

Les besoins en acier ayant fondu drastiquement, toute la valse de vie ("valse des copeaux") qui entourait les hauts fourneaux s'est évaporée ("les danseurs éconduits") en laissant les carcasses des anciens laminoirs ("églises en lambeaux").
La métaphore filée d'un chant funéraire dans la nef d'une église, et le champ lexical lugubre ("envolée", "rouillés", "éconduits", "croix" –symbole du supplice - "vieil", "maussades", "désespérés", "périt", "tourments", "trahi", "gémissent", "tristes"..), se marient à merveille dans la forme du semi-pantoum où le redoublement des vers rajoute à la morosité.
Sensation personnelle sans doute, mais je trouve rare de voir fond et forme aussi bien accouplés.
Enfin, comme chez Verhaeren, sous la misère des lieux, rôde la misère sociale engendrée par cette extinction de masse (c’est le cas de le dire !) .
Un seul détail dans la composition a heurté ma lecture : cette fâcheuse inversion sur les "cuivrés instruments".

Pas de quoi changer d’un iota tout le bien que je pense de ce texte.

   Ornicar   
12/3/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
Vallée de la Fensch ? Lorraine Coeur d'Acier ? Au nord, étaient les corons, à l'est les acieries. Je n'ai pas tout de suite saisi la signification des nombreuses images et métaphores de ce sombre chant choral, à la fois hymne et requiem.
Le fer, l'acier est omniprésent, l'ensemble respire la limaille ("valse de copeaux"), l'abandon, la souffrance et la désespérance ("églises en lambeaux" - "tristes cathédrales"). Les vers n'ont plus qu'à étirer leur longue plainte lugubre. Ici, sous la plume de l'auteur, les "églises en lambeaux" désignent les hauts fourneaux, les "danseurs éconduits" les ouvriers rendus à leur inutilité, les "instruments" les machines rendues à leur silence, les "maillets et percussions" les presses et leur boucan d'enfer.
C'est un texte magnifique de densité, irrigué par une double métaphore musicale et religieuse (strophe 4). Car c'est vrai que pour des régions entières, le fer était une "religion". Et c'est vrai que ce fut une "trahison" (strophe 4 encore : "Maillets et percussions ont trahi les chorales"), la résultante de choix politiques et économiques au nom de la "nécessaire concurrence libre et non faussée".

Je suis moins convaincu par la forme "pantoum" qui a parasité ma perception de ce poème à la première lecture, empêchant les métaphores de se déployer en m'obligeant à me focaliser sur la forme. De mon point de vue, la puissance des images pouvait largement se passer de ce qui me semble un peu un artifice. Mais c'est le choix de l'auteur. Et ce n'est que mon ressenti. Il n'en reste pas moins que c'est un très beau texte.

   David   
20/3/2024
trouve l'écriture
perfectible
et
aime bien
Bonjour Ercel,

Comme ça peut se ressentir parfois, devant une fanfare populaire, jouant au milieu de son public, j'ai ressenti quelques couacs. Il y a "la grand-euh vallée", le E muet à contre temps, comme un accent marseillais ("la vals-euh des copeaux", ça tombe mieux). Il y a aussi, mais c'est un peu à part, le "d'églize-z'en lambeaux", le double zézaiement, qui dénote. C'est pas forcément un défaut, ça, ça peut illustrer par son son ce qui est décrit (mais la fanfare est plutôt de cuivres, pas de violons à l'horizon, néanmoins, la sidérurgie ça peut énormément double ou triple zézayer !). Il y a enfin les "croix en vieil acier", le hiatus qui a peut-être coûté l'autre catégorie pour le poème, mais au-delà de ça, c'est tout simplement moins fluide, on entend presque le mot "croyant" prononcé avec une rage de dent, ou la bouche pleine. L'image des "croix en vieil acier" évoque le deuil, c'est pas du tout le moment de faire sourire ou grimacer.

Il a quand même un certain cachet à lire, ce poème : Je pense qu'il parle d'une fanfare d'usine, peut-être, qui jouait pour les fêtes, et qui ont tout deux disparu, avec les emplois. Un triple deuil, ou comme quand on subit une grosse perte et qu'on cristallise sa tristesse sur un petit objet. Il me parle un peu de ça, ce poème, avec beaucoup de pudeur. Il est triste et il commence avec "la musique" pour finir avec "cathédrales", au pluriel même ! C'est aussi une forme de pudeur de faire diversion avec des grands bruits et des grands gestes...

Bon, la "musique a cessé" et les "cathédrales", elles "gémissent", je ne voudrais pas tirer la ficelle trop loin, je veux souligner ce charme-là quand même.

   Corto   
20/3/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Poème audacieux mais la forme Pantoum apporte-t-elle un supplément d'âme ??
L'aventure douloureuse du secteur sidérurgique est bien présente mais on y voit peu les humains si ce n'est ce beau vers "Les danseurs éconduits ont quitté les estrades ".
"La religion du fer périt dans les tourments" est bien évocateur mais je trouve que le thème garde trop de distance avec ceux qui l'ont vécu de près, dans leur chair, dans leur engagement, dans leurs projets.

J'ai tout de même gardé en bouche cette sensation de métal chaud dont des milliers de salariés ont été répudiés. Merci.

   Miguel   
21/3/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
La métaphore filée du bal terminé est une bonne façon d'exprimer la tristesse et le sentiment de vide qui suivent les fêtes. Les images sont émouvantes (danseurs éconduits par exemple) et le retour lancinant des vers apporte une dimension élégiaque très marquée, ce qui justifie la forme choisie par l'auteur. Les vers sont beaux, et cette espèce de mode mineur semble contenir, retenir en soi-même, une douleur qui n'en est que plus puissamment exprimée.
Je ne comprends pas bien ce que l'adjectif "grande" présenterait d'incorrect ; son "e" est à peine perceptible, du fait de la longueur de la voyelle nasalisée qui le précède. C'est un "e" placé entre deux consonnes et qui a parfaitement sa place dans la scansion. Il est tout à fait euphonique.
Un très beau travail.

   Cox   
26/3/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime bien
Un très beau poème plein d’une grave beauté industrielle moribonde.
Je ne suis pas toujours convaincu par les formes fixes basées sur des vers répétés, mais ici je trouve que ça se met très bien au service du fond. Il y a un aspect lancinant, obsédant et le paysage ouvrier parait d’autant plus vide et morne que le poème semble tourner en rond au lieu d'aller de l'avant. Ce bégaiement revient comme un refrain pour soutenir la métaphore orchestrale avec un côté no future ; la forme vient donc soutenir le symbolisme de manière élégante.

L’évocation de la vie et de l’activité qui fourmillait comme un bal ininterrompu donne tout le tragique du poème : plus que le silence, c’est l’abandon qui ressort grâce aux contrastes que le texte crée et à la négation constante de toutes les images de mouvement et de musique. On ressent bien le sentiment de défaite des ouvriers licenciés, ces « danseurs éconduits ».
J’ai parfois regretté cependant que l’évocation du morne calme de ce tableau ne se fasse que par la négation des images musicales. J’aurais bien aimé voir le silence apparaître explicitement puisqu’il est finalement le personnage principal du poème, et qu’il est le seul, aujourd’hui, à jouer en sourdine de ces grands cuivres.
Quelques images, d’ailleurs, s’attachent trop à filer la métaphore à mon goût et nuisent un peu au contraste entre hier et aujourd’hui, comme « Des croix en vieil acier chantent des airs maussades » : je trouve ça dommage qu’il y ait encore des chants (même maussades), plutôt qu’un silence de mort. Et puis, des croix qui chantent, quoi…

L’écriture est dans l’ensemble très belle, pleines de poésie urbaine un peu gothique. Les seuls bémols c’est quelques images que je ne comprends pas tout à fait comme les croix qui chantent dont on parlait ou les « églises en lambeaux » (très joli ! Mais je ne comprends pas à quoi ça fait référence. La forme très découpée des toits de l'usine?). Et puis « les cuivrés instruments », je dois le dire, c’est vraiment très moche... Mais en dehors de ça, l’écriture est remarquablement imagée et élégante.

Merci pour ce partage !

[EDIT: finalement, je change mon appréciation de l'écriture pour un "très aboutie". En dehors des cuivrés instruments qui me chiffonnent beacoup c'est vraiment très beau]

   Chlo   
26/3/2024
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Une petite pépite de construction qui déploie de plus un univers poétique d'une grande sensorialité. Du vent à la musique et du copeau à la ferraille, tout semble palpable dans ce pantoum, jusqu'à cette nostalgie mélancolique qui redonne une vigueur puissante aux vestiges voués à la ruine. C'est un exercice d'équilibriste, que je trouve ici formidablement réussi, de parvenir à faire ressurgir sans pathos le chagrin des pierres mortes et de leurs ornements ferreux. Merci, et bravo pour ce pantoum.

   Meaban   
3/4/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
voila un champ lexical qui me parle particulièrement, et cette structure de pantoum lui va a ravir
j'apprécie beaucoup l'âpreté de cet écrit dont je connais l'univers

merci


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