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Poésie en prose
Lariviere : Minuit
 Publié le 01/02/22  -  15 commentaires  -  2489 caractères  -  233 lectures    Autres textes du même auteur


Minuit



Minuit à l'étang asséché, à la langue maudite. Minuit aux heures nouées et aux souvenirs vains. Minuit mouillé de ses cendres, séchant aux soleils poisseux des possibles. Minuit trempé sur la vie démonté vermoulu de supplices aux âmes des caillots suffocants, minuit asphyxie, minuit malaisé, minuit de glaise de marbre de boue et de déchirures, minuit de froideur meurtrie aux vagues de cercles gris que rien ne désaltère… Minuit de nacre et de calcaire, ancré sur les sémaphores des impostures qui barrent le chemin des alvéoles démoralisées. Minuit de feutre larmoyant, souillure du diaphane. Minuit éclaté, parcouru par le sang, moelles d'étoiles, minéraux et globules dilatés, rate et thymus contrariés, minuit qui gémit sur les soupirs de la voie lactée et de son bras tenu en écharpe…

Minuit de plume, minuit de flamme, minuit enfin réconcilié sur la roue bleue des rémouleurs où passent les lames de la mémoire oubliée, peaux mortes et cloaque vert déposés sur le tranchant de la nuit et ses lueurs délétères que le désespoir des douze coups affûtés récuse à nouveau d'un seul bloc. Minuit de soie, aux toiles des veuves noires, aux danses torrides des tarentules… Sur les carotides de nos pensées, aucune clairvoyance réconciliable à minuit ne rejaillit. Minuit tapis d'étoiles, bouche sèche du puisatier. Minuit aiguillage libre de mots engloutis. Minuit des eaux fortes et des terres plombées. Minuit des ocres folles et des encres noircies.


Minuit, terre des charrues et des barques échouées… Minuit en rade des éclaircies et des symphonies désaccordées où s'égrènent les songes de granit aux sourcils du firmament, aux coutures veloutées de la nuit. Minuit table du monde, sur l'écorce vert tendre découpée en quartier. Minuit aux lacs et glacis d'acier, métallurgie de la mappemonde frappée sur l'enclume fragile de l'horizon… Minuit des époques déchues et des paupières closes, des à-côtés scintillants, des respirations invincibles, phénix aux mille serres, ciselé de constellations. Minuit aux fuseaux du monde, illuminé par les éclairs des orages lointains, terre et ciel à l'aster des dimensions…

Minuit démaquillé de la vie et de ses fards, avides de digitale, hanté de rires ternes et de visions posthumes…

Minuit enfin, où tout se disperse…

Et où les grillons égrènent leur sablier d'Hypnos dilué dans la salive des champs, chapelets humides de diadèmes tissés en perspective sur le tissu du jour…


 
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   Anonyme   
17/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Je n'apprécie guère les anaphores en général et, si je reconnais une vraie force à votre poème en prose, je pense sincèrement que la figure de style y est trop présente. Il me semble d'ailleurs que le texte est un petit peu trop long, que sa force de litanie se retrouve un poil diluée.

Cela dit, je trouve à l'ensemble un vrai souffle, porteur d'images frappantes comme
Minuit de nacre et de calcaire
ou
Minuit aux lacs et glacis d'acier, métallurgie de la mappemonde

À la lecture, la présence de relatives a eu tendance à me faire trébucher car elles manifestent une construction intellectuelle qui m'éloigne de la perception immédiate ; or, ce sont ces instants où l'image est directement exprimée, frappante, qui me semblent à privilégier ici.
Par ailleurs, j'ai eu parfois le sentiment diffus en avançant dans le texte d'un début plus spontané, plus "inspiré", comme si vous vous étiez quelque peu battu les flancs pour continuer, prolonger le plaisir. Impression toute subjective.

Un beau texte au final, qui, selon moi, mériterait encore du polissage pour affiner son impact.

   Eskisse   
22/1/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un "portrait" très original de Minuit qui fonctionne sur une série de caractérisations évocatrices et sur un travail sur les sonorités.

J'ai aimé le tohubohu d'images qui relèvent pêle-mêle du cosmos, de la nature, des matières (" minuit de plume", "minuit de soie" ), des métiers simples de la campagne ou de la physiologie et qui illustrent la dispersion de Minuit :
"Minuit enfin, où tout se disperse..."

J'ai aimé le maelström de mots qui fait penser que l'auteur donne son attention à chacun d'eux et les agence à sa guise en toute liberté ce qui me plaît en poésie.

   papipoete   
1/2/2022
bonjour Larivière
Chez ONIRIS, nous avons du socque, du Cyrill, du Cristale ; tous ces styles que l'on reconnait dès les premiers vers !
Et nous avons du Larivière qui surprend, et du Larivière ordinaire comme dans ce poème, où comme l'instituteur aurait précisé " je veux une dissertation autour du mot MINUIT ; vous avez deux heures ! "
NB nul doute que pour les férus du genre, ce challenge est tenu et des Oh, des Ah viendront à leur esprit !
Je n'aime ni ne déteste, aussi ne donnerai-je pas d'appréciation...

   Pouet   
1/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Slt,

il pourrait y avoir un pendant mijour brillant d'optimisme et de félicité... Mais quel ennui! :)
Ce minuit-là est bien prenant, bien sombre, perclus d'images fortes et cahotantes.
Le Temps coupé en deux, du sang séché sur la lame.

Allez parmi mes préférés:

"Minuit mouillé de ses cendres, séchant aux soleils poisseux des possibles."

"Minuit tapis d'étoiles, bouche sèche du puisatier."

"Minuit aux lacs et glacis d'acier, métallurgie de la mappemonde frappée sur l'enclume fragile de l'horizon…"

Quelques réminiscences de l'écriture des "Fragments du crépuscule" ma foi fort agréables.
Un traitement très imagé et non-dénué de profondeur, que dis-je, de gouffre...
C'est sans conteste dans ce registre-là que, pour ma part, je préfère l'auteur.

Au plaisir.

   Anonyme   
1/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Larivière,

Minuit, à plusieurs reprises, l'auteur insiste sur ce mot, et c'est ce qui aurait pu me rebuter.
Mais non ! J'aime cette insistance du mot, j'aime les images proposées, ce côté sombre, anxiogène de cette prose.
En fait, je ne saurai vous dire pourquoi, c'est l'ambiance générale qui me plait.
On a l'impression que le monde cesse un instant de tourner.
J'aime en particulier la seconde strophe.
Je ne sais toujours pas pourquoi, mais je ressens des sous-entendus, qui pour l'heure m'échappent.
Peut-être un monde d'aujourd'hui perturbé, fou, plus anxiogène et nourri de violence, d'égoïsme que ce qu'il fut il y a de nombreuses décennies.
Ça m'intrigue, et j'espère en savoir un peu plus, le moment opportun.

J'ai vraiment aimé ma lecture .

   Anonyme   
1/2/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
C'est une vraie ambiance qui se dégage de cette prose...

Minuit m'entraîne dans les profondeurs de cet abîme où parfois je m'abîme aussi un peu.

Ne faut-il que cela pour que cette litanie, angoissante et vibrante, m'éblouisse ?

Il en faut sans doute bien davantage, par exemple la force des images sculptées ici par des mots orfèvres qui tressent des angoisses burinées sous la peau, des mariages de mots qui explosent et jouent à colin-maillard dans les méandres de la mort, qui extirpent au plus sombre de la nuit ses éclats percutants et portent au cœur des cris, la désolation, mais aussi l'espoir, vieux compagnons de route depuis que le monde est notre monde...

« Minuit asphyxie... »
« Minuit de plume... »
« Minuit démaquillé... »
« Minuit enfin, où tout se disperse... »

Merci Lari, pour cette belle envolée sous les flots sombres de ces nuits en dérive vers le néant.


Cat

   Lulu   
1/2/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Lariviere,

J'ai adoré lire ce poème qui a vraiment du souffle et qui m'a fait tout simplement penser à la beauté de la poésie... Un vrai charme dans ce Minuit inspiré et inspirant.

J'ai bien sûr aimé les images, et ce regard porté sur l'infiniment petit et l'infiniment grand. Cette échelle - celle du regard - me plait toujours en ce qu'elle livre et porte ce qui nous amène tant au relativisme.

La beauté réside tant dans le souffle "Minuit des ocres folles et des encres noircies" que dans cette aspiration à l'écriture qui semble comme nécessaire.

Ce qui est beau, aussi, c'est que ce poème ne déborde jamais dans le déséquilibre. Le rythme y est superbe. Je l'ai lu silencieusement, mais avec cette tonalité qu'on ressent largement avec cette anaphore simple et qui peut entrer en écho avec nous - nous les lecteurs - qui peuvent saisir ce juste poème. Le piège aurait été de tomber dans un excès, un trop plein, mais non... et au plus grand plaisir du lecteur... de la lectrice.

J'ai aussi aimé cette heure, Minuit, pour ce temps de départ bien annoncé dès les premiers mots "Minuit à l'étang asséché, à la langue maudite." J'ai ressenti ces premiers mots, en seconde lecture, comme une transition, et donc comme une avancée vers tout ce dicible poétique qui peut laisser la voie libre à l'expression.

Merci, et au plaisir de te relire.

   Cyrill   
2/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Salut Lari,

Dès le début de ma lecture j’ai eu une sensation de suffocation et d’angoisse. C’est une immersion dans un flot d’images, et le malaise s’installe.

Mon goût aurait ôté quelques minuit au texte, même s’ils font aussi sa force. J’ai eu aussi cette impression d’un presque trop plein de métaphores, je me suis senti balloté de l’une à l’autre sans que j’aie toujours le temps de m’en imprégner. Ça parle parfois à l’inconscient, d’autres fois c’est comme des œufs clairs, y’a pas moyen.

Je ne suis certainement pas initié à tous ses codes mais je salue cet imaginaire foisonnant, ces tonalités qui oscillent entre le sépulcral et la douce mélancolie.

   Myndie   
2/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Larivière

Minuit : un seul mot et tout un microcosme.
Construit sur une anaphore dont on sait tous les effets, votre texte est une féérie poétique qui joue de ses images et de ses sons pour nous envoûter.
Les images, justement, il me faudrait sans doute les relever toutes pour en pointer la richesse ; certaines sont un choc esthétique tellement bienvenu, d’autres se suivent avec une sorte de précipitation, comme une logorrhée, en des phrases si longues qu’on en perdrait la respiration Mais peut-être témoignent-elles d’une urgence à dire…
L’imaginaire nocturne s’est toujours focalisé sur des angoisses qui prennent de multiples formes et nous rendent vulnérables ; la nuit est cependant pourvoyeuse de rêves et propice à la création artistique. C’est tout cela que je retrouve ici exprimé, dans un tourbillon de mots qui nous entrainent irrésistiblement.

J’ai beaucoup aimé votre Minuit, d’une originalité et d’une impétuosité folles.

myndie, insomniaque

   Ascar   
2/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Variations autour de Minuit un peu dans le "jardin du Bien et du Mal". Beaucoup d'images qui sèment une certaine confusion dans l'esprit d'où germe finalement une ambiance particulière rendue par la poésie absolue de cette prose.

Une lecture singulière façonnée par un verbe fascinant.

   wancyrs   
5/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Salut Lari,

Le début du poème donne le ton et on s'imagine qu'on va plonger dans une psyché tourmentée : la suite ne dément pas. Le texte est un cocktail d'images, je dirais plus un feu d'artifice où l'explosion de la peine fait jaillir tout le paysage intérieur d'un être obsédé par un instant de la nuit : minuit. L'expression "Phénix aux mille serres", pour moi, montre bien ce tourment qui renaît incessamment de ses cendres ; c'est du chaos qu'il s'agit ici, un si beau chaos car il me rappelle cette citation d'un auteur dont je ne me rappelle plus le nom : "Il faut d'abord qu'en moi le chaos se fasse pour que j'accouche d'une étoile qui danse"
Ce n'est pas une seule étoile qui danse de par ce chaos, mais ce sont des constellations. Mon passage préféré est :
" Minuit éclaté, parcouru par le sang, moelles d'étoiles, minéraux et globules dilatés, rate et thymus contrariés, minuit qui gémit sur les soupirs de la voie lactée et de son bras tenu en écharpe…"

Merci pour le partage !

Wan

   Donaldo75   
19/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Salut Lari,

J’arrive après la bataille, comme disait ma grand-mère, et grâce à l’ami wancyrs j’ai pu retrouver ce poème que j’avais pourtant lu en Espace Lecture et qui m’avait plu ; allez, j’arrête de me justifier, ça fait Louis XVI pris la main dans le pot de confiture.

Je trouve que le mot « minuit » est autoporteur en littérature ; je ne sais pas pourquoi cette impression mais ma lecture l’a confirmé et vu que c’est le titre de ton poème et que tu l’utilises comme un sémaphore poétique tout au long de cette poésie en prose, je préfère le dire tout de go. Et la déclinaison de ce « minuit » est franchement réussie, imagée, allégorique parfois et surtout elle n’est pas à la recherche d’un tout argumenté par des éléments qui rebouclent à la fin dans le but de satisfaire mon cerveau gauche et de me dire que je n’ai pas compté pour rien le nombre de fois que ce terme est utilisé. Bon, j’avoue ne pas l’avoir fait parce que ça me saoule rien que d’y penser et que le poème m’a transporté dans un autre monde, pas un multivers comme le disent les journalistes de « Science & Vie » mais dans le nôtre, le réel exposé de ses effets de style qui rendent la poésie unique et j’en ai tellement la conviction que je vais me relire de ce pas ton poème.

Bref, ce n’est pas un secret désormais, je me confesse, je l’avoue, j’ai beaucoup aimé ce poème et plus je le lis plus c’est fort.

Bravo

Don

   Queribus   
22/2/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

Votre texte frôle (je dirais même atteint) la perfection par son souffle et ses belles images poétiques qui se succèdent sans cesse. D'aucun pourrait crier "À l'élitisme". Quoi qu'il en soit, on peut le lire et le relire cent fois rien que pour la beauté du style (rare) même s ile thème de minuit a souvent été traité en poésie. Un art magistral que le votre.

Bien à vous.

   Miguel   
6/3/2022
J'ai beau faire, chercher, analyser, je ne trouve jamais aucun rapport entre le sens du mot "minuit" et les termes qui lui sont associés ici. Evidemment ça sonne bien, c'est mieux que "Minuit au carton-pâte, minuit à la clé à molette, minuit qui mange une pomme sur les plumes d'un mouton", mais sous le rapport du sens, à mes yeux du moins, c'est pareil. Eluard n'aurait pas fait mieux. Je me garderai de porter une appréciation sur un poème auquel des lecteurs plus avisés ont trouvé des mérites. Ma non-réceptivité ne l'empêche certainement pas d'être bon, mais je ne suis pas en mesure d'en juger.

   Anonyme   
29/8/2022
Modéré : Commentaire hors-charte (se référer au paragraphe 6 de la charte) ; faisant partie d'une série de six très négatifs, sur des textes anciens et nouveaux, dont le caractère vengeur nous apparaît caractérisé.


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