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Poésie libre
Raoul : Le prix d'un bras
 Publié le 16/10/22  -  17 commentaires  -  848 caractères  -  299 lectures    Autres textes du même auteur


Le prix d'un bras



Ils ont ouvert les portes
alors on est sorties
dans un froid d'aube
ou d'entre chiens et loups
des camions lanternaient le long d'un talus
givrés dans un amas d'attente

— Les fatiguées, les blessées, les malades, montez dans les camions ! aboyait un porte-voix

[… Jeannine, Sylvie, Julienne, Solange, Eugénie, Jessica et Annette – sa mère –, Louise, Simone, Gabrielle – tenancière –, Sonia, Antoinette, Déborah, Myriam, Andrée, Ruth, Odette, Albertine, Judith, Paule, Pierrette, Aimée, Louisette – la Parisienne –, Denise, Yvonne, Suzanne, Colette, Lucienne – au doigt coupé –, Yolande, Jeanne – une grande blonde –, Lucette, Marthe, Solange, Madeleine, Andréa, Paulette, Liliane…]

Arlette a pris mon bras — N'y va pas !

À quoi ça tient
un bras
une vie
un souffle


 
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   Anonyme   
2/10/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Je trouve réussie cette manière allusive de dire : toute une histoire, tout un contexte génocidaire dans ces quelques mots. Personnellement j'eusse apprécié une liste de prénoms un peu plus courte et surtout plus diverse, dans l'espace comme dans le temps, pour aller vers l'allégorie, universaliser le propos. Mais tel est votre choix souverain d'auteur ou d'autrice d'ancrer ledit propos, j'ai l'impression, dans la France, peut-être celle de la Deuxième Guerre mondiale.

En tout cas, à mes yeux la brièveté de votre poème renforce son impact.

   Anonyme   
17/10/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
C'est beaucoup trop court pour apprécier la quintessence de ce récit où il faut beaucoup gratter pour tenter de trouver de la poésie ! Une ou deux listes de prénoms, même entrecoupées de détails qui donnent un souffle intéressant, ne suffit pas à faire de la poésie !

A la lecture l'imagination part dans tous les sens et fatalement se perd en conjonctures plus ou moins embrouillées. Ce n'est pas plaisant de ne pas arriver à saisir le fil qui semble jouer au chat et à la souris.

Le dernier paragraphe n'est pas dénué intérêt. Il pourrait servir de base à un développement plus agréable de ce texte.


Zoé en E.L.

ÉDITION : à la lumière de ce jour nouveau je m'aperçois que je n'étais pas assez ouverte à la poésie lorsque j'ai lu et commenté votre poème. Ayant retrouvé mon chemin vers elle entre vos lignes, je revois mon appréciation !

   Anonyme   
16/10/2022
 a aimé ce texte 
Pas
Bonjour,

Je ne vais pas être sympa avec votre prose. Parce que je n'ai pas saisi le contexte du récit. On peut penser à des réfugiés, à des prisonniers de guerre, même aux convois de la mort, mais rien ne ressort dans mon esprit pour que je puisse m'y accrocher. De plus, je trouve l'énumération de prénoms féminins pénible, inutile, et la fin bien trop rapide. Je reste donc insensible et hermétique à ce poème.

Merci pour la lecture gratuite

Anna en EL

   Lotier   
16/10/2022
Peut-être que ce texte est parti de l'expression « ça m'a coûté un bras », j'imagine à peine si ça avait été « ça m'a coûté les yeux de la tête »…
On peut découper la scène en trois plans séquences : les camions, les femmes et le gros plan sur les bras. Si on s'abstient de toute tentative de contextualisation (mais est-ce humain ?) on est ému par la scène.
Une bande annonce accrocheuse…

   hersen   
16/10/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Voilà un poème qui reflète vraiment l'idée que j'ai de la poésie : non pas un "sujet", mais l'effleurement d'un sujet, une retenue qui crie plus fort qu'une réalité assénée.
Ce prix d'un bras, cette valeur immense d'être en mesure de l'exprimer. On peut deviner où et quand on est dans ce poème, mais j'irais jusqu'à dire que c'est secondaire car tout ça, on le perpétue sans fin. Ce qui compte, c'est un bras que l'on tient. C'est cela qu'il faut perpétuer;

merci de cette lecture, dont le prix n'en a pas.

   senglar   
16/10/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Raoul,


Un convoi de la mort programmé au petit matin froid qui commence par une sensation de liberté quand les portes se déverrouillent pour un autre asile aux fausses lanternes où le pire est permis. L'amas des corps déjà se profile que singe l'amas des camions. L'impensable se pointe entre chiens et loups (l'heure des Waffen S S et de leurs sbires) où les camions attendent dans le calme de la mort et où le haut-parleur se mimétise en sauveur mais se trahit en aboyant.
Tous ces prénoms qui se succèdent renvoient par cet effet de foule à un anonymat. C'est qu'on tuera aveuglément. Mais on ne peut pas assassiner sans qu'il subsiste des repères, une mère, une tenancière, la Parisienne, Lucienne au doigt coupé, une grande blonde, sans laisser de traces, aux pires crimes de sang il y a toujours des traces.
Quand on fusille en nombre il a y souvent un survivant sous l'amoncellement des corps. Il y a aussi des témoins. Il y a ceux qui ont compris le piège et qui retiennent la future victime, prendre le bras revient ici à donner la vie. Arlette ne prend pas le bras mais le donne. C'est admirable !

Quelle leçon !

Et quel talent pour la donner !

Un poème que n'eut pas renié Desnos.

   JohanSchneider   
16/10/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bien que le côté allusif, voire elliptique du texte soit voulu, il n'y a pas, me semble-t-il, une infinité de grilles de lecture possibles.

Mais la singularité de cette poésie réside aussi dans la latitude laissée au lecteur de se faire sa propre idée du contexte.

Cette liste de prénoms peut paraître excessivement longue mais elle contient des indices placés là pour éclairer le lecteur, ou l'égarer ?

C'est très fort, à tous les sens du terme.

   Mokhtar   
16/10/2022
La sortie d'un biopic dans les salles ces jours-ci, confronte ce texte à l'actualité médiatique.
Face aux promotions et exégèses dont nous allons être abreuvés, un peu de brièveté ne nuit pas.
Surtout quand les mots ont le don de faire vivre la scène...comme au cinéma.
Je ne peux pas noter un tel texte.
Mais je tiens à le saluer.

   papipoete   
16/10/2022
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
bonjour Raoul
la mise en scène est sans équivoque, ces femmes ne partent pas au " club med " et par tous les conflits passés, et présents où l'on voit pratiquement en " temps réel ", on sait de quoi il retourne d'entendre aboyer... des S.S., des barbus, les " Wagner " de Poutine...
NB mais le final se complique, quand il faut comprendre la subtilité du " à quoi ça tient un bras " ? pour songer " ah oui ! "
Personnellement, je ne saisis pas...
Si Arlette avait pris l'héroïne par le bras, pour la sauver, lui donner une chance de s'enfuir, mais le lecteur se doit d'imaginer un sens à ce rebus...
désolé !

   Angieblue   
16/10/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Oui, à quoi ça tient quand l'être humain est déshumanisé, considéré comme du bétail, quand la violence est banalisée lors de déportations en masse.
ça fait son effet. ça retourne et prend aux tripes.
L'introduction pose le décor subtilement, pas à pas, c'est très visuel, glaçant, lancinant et sonore avec l'allitération en "d".
Peu de mots, des phrases courtes, une énumération de prénoms, mais ça en dit tellement en projetant en nous les images et les souvenirs de cette période historique noire et insoutenable.
Bravo ! Belle maîtrise de la force de l'implicite en poésie !

   pieralun   
17/10/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bjr Raoul,

Terrifiante évocation !!

Un décor planté sans démonstration d’horreur, ce n’est qu’après le dernier mot qu’il prend toute sa dimension: la sensation de froid, le double sens « d’entre chien et loup » , les portes des camions ouvertes sur ce que l’homme a fait de pire…..

Le porte voix: idem, ce n’est qu’après que le son métallique nous arrive aux oreilles.

L’énumération: que l’on imagine après sur une liste de deportés.

Arlette, le bras, le DOUTE…….

Quatre petits mots: la clé puis le travelling.

La poésie d’un sujet tant de fois abordé, mais là, juste effleuré: ce qui en fait toute sa force.

Bravo

   Anonyme   
17/10/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,

J'ai lu les prénoms d'Yvonne, Simone, Madeleine et Denise, qui permettent de situer l'époque, le moment.
Il se trouve, coïncidence, qu'ils sont ceux d'Yvonne Jacob et de ses trois filles, dont Simone qui sera Veil avant d'être célèbre.

La forme m'a touché par son originalité. Un moment, un instantané. Un appel, un geste et c'est tout.
Un peu dérangé, mais c'est très personnel, par :
"dans un froid d'aube
ou d'entre chiens et loups"

Tout me va. Mais c'est justement le tout qui m'a arrêté. La volonté de l'auteur de donner, dans un même temps, sur la même photo, le sordide mordant du petit matin froid, et les mots de chiens et de loups (le soir) pour la morsure, la prédation. Un écueil qui n'a pas pu être contourné.

Touché.

   jfmoods   
17/10/2022
Le cadre spatio-temporel ("le long d'un talus / givrés", "un froid d'aube") ainsi que les éléments de suspens ("des camions lanternaient", "dans un amas d'attente") confèrent à l'entame de ce récit - construit en narration interne - un caractère passablement inquiétant. Le thème de l'animalité ("chiens", "loups", "aboyait") suggère la grande brutalité, la sauvagerie propre au totalitarisme. Les bourreaux font preuve d'un abominable cynisme. L'espoir de survivre précipite un groupe de femmes (probablement victimes d'une rafle) vers une mort certaine. La longue litanie des prénoms pourrait se perdre dans l'indifférenciation et l'oubli si elle n'était ponctuée de quelques notations individuelles. Le recours aux crochets dans cette partie du texte laisse-t-il entendre que ces femmes sont d'ores et déjà retranchées du monde des vivants ? Les deux formes impératives se font écho : à la violence répond la résilience et la force de conviction d'Arlette. En ne montant pas dans le camion, la locutrice se donne la mince perspective de survivre à la barbarie. La gradation qui clôt le poème accrédite cette traversée de l'enfer.

Merci pour ce partage !

   David   
20/10/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonsoir Raoul,

Le titre me fait rire, par rapport à l'expression : "ça coute un bras !" et ça va faire contraste avec le texte, très funeste. J'ai aussitôt pensé à la Shoah : Le "ils ouvert les portes" ressemblera de plus en plus à un contresens, le "entre chiens et loups" m'évoquera "nuit et brouillard", "lanternaient" même, me fait penser aux gestes du chef de quai pour annoncer le départ d'un train, à cette époque peu électrifiée. La première phrase est en accord avec les tris effectués dans les camps de la mort, maintes fois témoignés.

La liste est magnifique ! C'est peut-être étrange de la qualifier ainsi mais elle n'est pas "à la Prévert", pas vraiment comme dans la bible pour ses nombreuses généalogies non plus. C'est aussi une époque, de "faire la liste", celle-là même. Aujourd'hui, on fait des tableaux, des Power Point en dessin, on ne fait plus de liste linéaire comme cela, dure à lire, comme dans le temps. Mais elle n'est pas si rêche cette liste, il y a l'encart de "– sa mère –" (et les autres, quelles filiations se dira-t'on ? Je pense que l'important n'est pas la réponse mais justement de se poser la question, comme si les questions en suspend était la clé à ne pas oublier, une certaine idée de la liberté : On ne saura pas, mais on aura demander !) et de même avec le second encart de "– tenancière –" puis le troisième "– la Parisienne –", puis le quatrième "– au doigt coupé –", puis le cinquième "– une grande blonde –". Tous ces prénoms étaient en vogue au milieu du siècle dernier, on en croise encore quelques unes aujourd'hui. Aucune n'est dite "- juive--" et pourtant à ma lecture et à travers ces points, je trouve que ça crie.

Comme dans cette seconde phrase du poème, ce "— N'y va pas !"

C'est pourquoi je la trouve magnifique, cette liste au milieu de ce poème, et je ne pense pas qu'on pourrait y lire de la même façon l'esclavage ou le goulag. En omettant les mots-clés de la Shoah, ça révèle, ça percute. Les personnes qui ont vécu cette époque et ces drames n'avaient pas les mots-clés non plus, ils pouvaient juste, comme nous, se poser des questions, même si les réponses ne risquaient pas de tomber.

   MartinHer   
22/10/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Définitivement j'aime les poèmes courts. Réussir à créer une image en si peu de lignes n'est pas évident. Serait-ce le pouvoir des prénoms ? Car même si je rejoins Zoe sur la faiblesse poétique d'une telle liste, je me demande si elle ne contient pas finalement un pouvoir - caché - de réminiscence, qui joue en faveur du reste de votre texte.
Merci pour la lecture.

   Pouet   
3/12/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Slt,

un moment d'Histoire exposé avec pudeur, mais surtout avec une très grande force d'évoquation poétique.

Les prénoms donnent bien évidemment Vie au texte, le rendant à la fois intime et universel.

Le bras. Le bras désigne ceux qui iront vers la mort. Le bras. Le bras retient, cherche à retenir, à défaut d'enlacer. Le bras. Ce bras qui portera la marque de l'infamie.

Un texte vraiment puissant dans une forme de minimaliste litanie touchant au macrocosme d'une humanité désarticulée. Une certaine façon d'effleurer ces étoiles qui marquèrent autant le ciel que le cœur.

   Eskisse   
3/12/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Raoul,

" givrés dans un amas d'attente"
La mort n'est pas nommée mais le lecteur devine que ces camions y conduisent. C'est là toute la force de suggestion du poème.

La liste des prénoms me paraît essentielle quand on sait que le régime totalitaire imposait de nouveaux prénoms aux futurs déportés, prénoms devant les différencier du reste de la population, leur volant ainsi leur identité, quand on sait que l'entreprise d'extermination s'effectuait sur la base scrupuleuse de listes de noms.

La liste du poème prend le contre-pied de ces listes en mettant l'accent sur les prénoms, en donnant une humanité à ceux qui en avaient été privés et en endossant une fonction testimoniale.

Ce qui est bien rendu aussi par le poème, c'est l'ignorance de ce qui reste impensable, inimaginable.


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