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Poésie contemporaine
TristanHiver : Prophylaxie contre un horizon dégueulasse (Partie 2)
 Publié le 16/01/13  -  10 commentaires  -  21676 caractères  -  674 lectures    Autres textes du même auteur

« Tout s’effrite. Nous l’ordonnons à nouveau
et nous tombons nous-mêmes en poussière.
Qui donc nous a retournés de la sorte que,
quoi que nous fassions,
nous avons toujours l’air de celui qui s’en va ?
En haut de la dernière colline, celle qui
Pour une dernière fois lui fait voir toute la vallée,
Il se retourne, s’attarde
– ainsi vivons-nous, faisant sans cesse
des adieux. »
Rainer Maria RILKE


Prophylaxie contre un horizon dégueulasse (Partie 2)



« Je n’ai ni ambitions ni désirs
Être poète n’est pas une ambition que j’aie
C’est ma manière à moi d’être seul. »

« Tel un baume qui ne réconforte que par l’idée que c’est un
baume,
Le soir d’aujourd’hui et de tous les jours, peu à peu,
monotone, tombe.
On a allumé les lumières, la nuit tombe, la vie se
métamorphose,
N’importe comment, il faut continuer à vivre. »
Fernando PESSOA


Partie 2 : Équeuter les jours


I.


Il est tôt
La nuit a toujours
L’épaule appuyée contre le volet
Et bientôt
Elle cédera au jour
La rue
Les maisons
Les rêves épais
Qui coulent encore sur les chaussures
Le givre blanc diapré
Des frondaisons enveloppées dans la froidure

La ville…

Se réveille
D’un souffle labial
La lune baguenaude
Et le vent glacial
D’une chiquenaude
Engourdit mes oreilles

Elle chante
Elle pleure
Chaque jour
Et la lune la regarde
Encore
Indiscrète
Prête à bondir pour recommencer

Hum !
Le remugle des eaux corrompues
Quel délice !
Aux premières inspirations matutinales
Eh merde
Voilà que mes vibrisses halent
Le crasseux résidu de tous les Hommes
Jusque sous mes fenêtres

Je me gave de fraîcheur
C’est ridicule de traîner son squelette
Dans des endroits moches
Ne me parlez pas
J’excuse à peine le ciel d’être laid ce matin

Décidément la ville tire une tronche
J’ai envie de dormir
Vite que je m’émeuve !
Le même air dans mes bronches
Un soupir
N’est pas une idée neuve

Façades des immeubles
Fuligineuses
Que le soleil démaquille
Vent qui pousse les nuages
Sur des roulements à billes

Qu’ils se blottissent
Qu’ils se meuvent
Que l’horizon s’étrécisse
Dégueulasse

Qu’importe

Que ferais-je du ciel
Quand chaque jour
Je me ramasse
Sous le chambranle de la porte
Que j’essuie mes mains sur mes cuisses
Que je frotte mes yeux

Qu’au milieu de la misère nous badaudons
Que la poussière s’est logée
Dans l’ourlet de nos pantalons

Que tout s’ébrèche…

Tenez !
Moi j’ai encore dépiauté mes lèvres sèches

Le ventre creux dans l’air du temps
Je ne suis rien
Assis sur ma pierre d’achoppement
J’ai saisi le réel dans une tranche de pain

Je ne veux plus jamais aimer
J’ai ceint des corps avec mes bras
Et chaque fois les femmes trahissaient leur chair
En s’essuyant sur ma peau
Et chaque fois j’ai laissé des traces de ma moiteur
Jusque dans leurs yeux

Un autre corps que le mien
Mon Dieu quel embarras !

Amour
Sois la pudeur d’un rideau tiré

J’embrasserai alors ton front
Les surfaces osseuses
Tes genoux
Tes coudes
Ton menton
Et le dos de ta main

Je reniflerai ton cuir chevelu
Je baiserai tes lèvres
Dans l’absolu oui dans l’absolu
D’une bise légère
Si légère
Que tu ne sauras pas avoir été baisée

Parce que j’ai mésusé
Parce que nous mésusons
Parce que nous voulons féconder
Tout ce que nous aimons

– Allez ! Embrassez-moi ! Embrassez-moi !
– Embrassez donc mes poings !
– Pourquoi dites-vous cela ?
– Parce que nous sommes solitude !
Parce que nous ne sommes rien !
– Et là ? Ma main sur votre nuque ?
– De l’eau tiédasse !
Caressez plutôt mes souliers en nubuck
Ils sont neufs…
– Et là ? Quand je vous embrasse ?
– Bof ! J’en ai assez de retrousser vos lèvres
À la dernière mode
Laissez-moi fumer
Et gardez vos microbes !
– Et si j’enlève ma robe ?
– Allez au diable !
Nous ne sommes pas des bêtes
Je préfère encore me frotter contre l’arête
D’une table !

Qui ne met son cœur dans la gueule du monstre ?
Qui ne s’écrie au matin que son amour est mort ?
Qui ne pleure ?
Qui ne nourrit tous les drames ?
Qui ne négocie ses sauts d’humeur ?

Qui ne fait le confort de petite bonne femme ?
Qui ne fait les parfums d’intérieurs
La solitude cubique
Le linge délicat
Les stores électriques ?

Qui ne mendie son bonheur ?
Qui ne mendie au ciel ?

Allez quoi !
Dieu ne fait plus le ciel
Regardez ! Il détale du sommet des églises
Moi
J’irai tendre un drap sale
Pour nos jours de mouise

Ah nos cœurs Solitude
Ah nos cœurs Ébauche
Ah vicissitude
Ah les dents se chevauchent

Dans les allées du cimetière
Je respire
Les maris aimants
Les épouses chéries

Il a l’air de tenir debout ton décor
Vieux fou il a l’air
Quand tu t’étires
Au milieu
Des tombes alignées
J’admire
La rigueur de la mort

Vous riez messieurs
Mais vous avez tort
Regardez !
L’amour aussi sait être rigoureux
Allez les putains !
En ligne !
Je les ferai toutes
Rue des orphelines


II.


Eh Dieu eh Dieu
Mon Dieu

Vieux vicelard
J’ai honte d’être un Homme
Mon âme est un peignoir
Cette ligne qui court
Toujours
Sans jamais trouver sa forme

Il y aura toujours de pauvres gars
Traînant les rues
Comme des lacets défaits
Il y aura toujours l’extravasement de nos nerfs
Des gamins qui braillent
Et des parents s’époumonant à les faire taire

L’odeur des poubelles
Dans les cages d’escaliers
Les bruits de vaisselles
À l’heure du déjeuner

Déjà le soleil de midi
Le ciel est beau
Mais les maisons s’en foutent
Ses premiers rayons me lèchent
Le lobe de l’oreille droite

Étrangement
Il n’y a pas d’oiseaux

Toujours les mêmes ribambelles
Les mêmes femmes
Sont-elles belles ?
La main devant la bouche
Pour masquer leurs grimaces
Pour cacher leurs dents
Quand elles mangent
Élégantes

Le même rythme des pas
Les mêmes muscles
Tendus
Distendus
Où que l’on soit
La solitude qui leur sied
Quand on regarde leurs bas

Ne t’en fais pas
Nous irons demain
Supputer les femmes
Notre sexe à la main

Même si même si
Même si cœur lourd
Même si tendre le bec
Même si offre
Même si demande
Même si amour
Même si quémande
Jusqu’au dernier kopeck

Même si je tends la main
Pour dévaster cette ville
La peau égratignée sur le crépi des murs
Faites-moi une place
Là où la pierre est molle

Désossé
Mes côtes brandies vers le ciel
Mon âme invertébrée
Se faufile dans les ruelles

VROUM VRAOUM le moteur des diesels
DING DING le tram tintinnabule
BOUM BAM BADABOUM c’est le jour des poubelles !
Allez roule roule roule
Et enfile la venelle

Irréalité…

Abstraction de la vie

Qu’en sera-t-il de moi ?
Qu’en sera-t-il de moi ?

Serai-je… ?

Monsieur madame aux devantures des magasins
réel –
La cavalcadeles atomes dessoudés
Rayons fruits et légumes réel –

La ventilation mécanique contrôlée
– réel –
Le beau jeune homme
la belle jeune fille et ses dents blanches

Ne faites pas la fine bouche !

La reine des étalages et ses couronnes dentaires
brouhaha
miam miam
périmé d’avant-hier
– réel –
La buée sur les pare-brise
des voitures
en hiver
réel –
La poussière sur les plinthes
et tous les dépôts de l’univers

Ici on fume à la fenêtre
Et là ! Et là ! réel –

Les seins tordus les mains sur les hanches
Les péquenots
les fatigués
pour des clopinettes pour des chèques cadeaux
– réel –
Pour grognerpour épater les minettes

« Y a du monde au balcon ! ah ah ! »

Tous ceux qui sortent de chez eux
pour acheter
du tabac réel –

Les fruits de saison réel –
Et patati et patata

C’est l’amour des chiens où pendent leurs testicules
devant mes yeux mansardés
mon regard défaillant

Un pas après l’autre
réflexe pavlovien
inconsciemment
mes pas me ramènent
vers l’odeur du logis

Lentement

Les fumoirs à chichaqui sucrent mes narines
réel –
Les désœuvrés dans des vêtements trop grands

Les défections canines

– réel –Et tant et tant

Qui parle de bonheur ?
Pffff !Haletant un souffle

dddddddddddddddddddddddddd e étage sans ascenseur
dddddddddddddddddddddddd maaaaaaa _
ddddddddddddddddddddddè
ddddddddddddddddddi ddddaaaaaaiaiaiar
ddddddddddddddu dddddddaiaiiaiaaaaa é
ddddddddddddq dddddddddaaaaaaaaaa e
dddddddddndddddddddddddaaaaaaaaaa l
ddddddidddddddddddddddddddddaaaaaaaaaaa
De c dddddddddddddddddddddaaaaaaa _

Soleil d’or et lune d’argentet garantie fraîcheur

réel –

Allez ! Si tu veux je t’aime

Ah bon sang ! Être tristement soi-même !

Mur de nuit
immense
contre lequel je m’adosse se tenir ?

Toute cette vie
Une tasse qui a perdu son anse

Je me sers un verre d’eau réel –

La voisine qui monte sur un tabouret
pour fermer les volets
réel –

L’insecte qui grimpe aux rideaux
réel –

La vision du monde d’un kiosque à journaux
« Les dernières nouvelles s’il vous plaît ! »
Les chiffres d’une filiale
Un pogrome
Un drame familial
« Ah c’est triste ! »Au comptoir des
bistrots


– Il paraît que le Christ aimait les hommes !
– Les Hommes non ?
– Non les hommes !
– Ah bon !

La poubelle est encore pleine
réel – Je m’ébranle avec le mur
contre lequel je me tiens
je tombe pesamment
comme un arbre couché par le vent
BZZZZzzzzzzzZZZZZZZzzzzzzzzz
Un moustique réel –PAF
Folie folie folie
Les doigts trifouillant
le tableau électrique
« Quelle heure est-il ? »
– réel –
Jambages
Cristaux liquides
Endormissement…


III.


Oui…

Le mieux de vivre c’est d’attendre le soir
Puisqu’on y perd ce qu’on a gagné le matin

Le soleil se couchera
Des hommes se coucheront sur des femmes

50 centimes pour pisser
Combien
Combien mademoiselle
Pour un amour de première qualité ?

Ah écoutez-les
Les joyeux sybarites
Ils copulent
Regardez
Les mites ont fait des trous
Dans mon pull

Et la nuit
Je pouffe dans mes draps
Hi hi hi !
Je ris
Ah ah ah !

Comme elles sont drôles nos solitudes !

Ça s’agite et ça mousse
Ça fait pssschit !
Et ça retombe
C’est la joie des cocktails vitaminés

Yiiiiiiiiihaaaaaaaaaa !

Sentir battre son cœur
Pour de fausses joies
Pour de fausses peurs
Pour de fausses amours
Qui ne sont jamais vraies

Presser nos peaux
Se sortir les yeux de la tête
Et ramasser les lambeaux
Du papier qu’on déchiquette

Et s’enfumer à cœur joie
Amour
Chaleur
Fumée de cigarette
Tout monte au ciel
Et tout se dissipe
Dans l’air dense des nuits d’hiver

Ah les femmes froides !

Enfouir sa main
Son sexe
Entre les colonnes d’un radiateur
Embrasser ses lèvres de fonte
Ah chaleur
Enfin j’ai chaud
Que coule que coule
Un fluide caloporteur
Sous ma peau

Et tout ce qui jouit
Ce soir sans entraves
Gémira demain
Comme un chien
Qu’on enferme à la cave
Vous voyez s’agiter
Vos organes sexuels
Au-dessus de vos têtes de lit
Vous qui avez le ventre plein
Et le visage badigeonné
De crème de nuit

Entendez !
Je vous murmure à l’oreille
Mes remontées gastriques

À quoi je pense quand je vois
Les maisons bleues
De la lueur des télévisions

Allez hop !
Par les fenêtres
La chaleur d’un foyer

Aïe !
Qui enfonce ses dents dans ma peine ?

Allez hop !
Par les fenêtres
L’odeur des cuisines sophistiquées

Eh !
Qui parle la bouche pleine ?

C’est la fin de l’enfance
Et la solitude de mes repas
Dans le fond d’une assiette refroidie

J’ai vu comment vous avez nié mon âme
Pourtant
Hier encore nous rîmes
Autour d’une côte de porc

Mais ce soir
Je ne mange plus
Vous
Vous mangez encore

Alors je regarde autour de moi
Mais je suis seul
Et personne ne peut m’aider

Les portes claquent
Comme des casiers dans un vestiaire
Et CLAC ! Et CLAC ! Et CLAC !
Avec la brosse à dents
Le dentifrice
Et les petites affaires

Et je maudis chaque maison
Où les enfants savent dormir
Et je maudis les choses que je ne peux plus tenir
Parce que mes doigts sont trop grands

J’ai mal de les entendre bondir
Entre la fourchette et le couteau

C’est ma douleur qu’ils mâchent et qu’ils remâchent…

Mon âme punaisée à l’estomac
Ne s’envolera pas plus haut que les chenaux

SPLASH !


IV.


Un ciel érubescent
Ce soir
Le soleil pisse le sang
Et s’essuie dans des nuages de mouchoirs

Et la nuit
Cette hyène
Se lèche les babines
Elle viendra dévorer
Le cadavre encore chaud
De nos corps de jour
Laper la nappe purpurine
Qui se répand à l’horizon
Laper les branches des arbres
La rondeur des collines
Et le contour des maisons

Encore…

Ah petite mort !

Tout me tue !

Mais ce n’est pas un meurtre
C’est une vieille routine
Que le soleil vienne baiser
La gorge des infirmes

J’ai fait de mon mieux aujourd’hui
Le jour
La nuit
Se bousculent
En écarquillant les yeux
J’étire le crépuscule

C’est mon dernier effort

Qu’on me déshabille
Je n’ai même plus la force
De déboutonner ma chemise
Qu’on me mette au lit

Et puis allez-vous-en !

Qu’on ne me regarde pas dormir
Jamais jamais
Qu’on me regarde mourir

Allez dire
Que je n’ai rien siroté à l’ambiance de vos fêtes
Que je n’ai rien touché à l’odeur de vos femmes
Que je n’ai rien vu du bruit de vos amours


Allez dire
Que je n’y ai pas pris part
Que je n’ai pas tenu la porte aux dames
Que nous sommes misérables
Et qu’avant de mourir
J’ai dû débarrasser la table

Oui…

Nous avons fermé chaque soir
La fenêtre qui gémit
Mais nous avons mis
Oui nous avons mis
Des fleurs dans les mouroirs

Nous avons délogé
Le chat de sa cachette
Mais nous avons oublié
Que les bêtes
Oui les bêtes
Cherchent un coin pour crever

Nous avons monté des décors
À la Potemkine
Mais la mort
Oui la mort
Nous attend dans la cuisine

Et tout cela me pèse
Sans jamais me quitter

Pourtant
Tous se défont
De l’angoisse d’être né
Comme d’un vêtement
Nonchalamment posé
Sur le dos d’une chaise

Qu’allons-nous faire de la désillusion ?

Fleuve qui brille et ma peine
On dirait la mer
Mais la lune qui dessille
Et la mer
Aiguisent à peine
L’imagination des petites filles

« Le soleil est assez chaud
Pour faire briller les peaux
La mer est assez haute
Pour lustrer les galets

Par bonheur on glisse sur l’eau
Apesanteur
Densité étrange de l’air
Des odeurs
Des corps en mouvement

Le long des bastingages
Du sable entre les orteils
Poussettes sur la plage
Et ventres chauffés au soleil »

Et cependant
Que des mouettes font la planche
J’époussette des cendres
Sur ma manche

Tout ça pour choper un coup de soleil
Sur le parking d’un supermarché !

Allez
Crachons par terre
Enfin quoi
Soyons caustique
« Nous ne sommes plus des enfants ! »
Que vous dites
Pfffff ! N’écoutons pas
Et restons là
Le nez qui coule
Le cul vissé
Comme une ampoule
À passer encore une fois
La langue sur nos dents

Les jours s’enfilent
Comme des manteaux
Que je sois fort
Que je sois beau
Ou que j’expectore
Dans un lavabo
Jusqu’au dernier
J’équeuterai mes jours
En attendant la fin
La fin des haricots

Parce qu’il faut bien vivre !

« We had a change of the moon
We had a change of the moon… »
Et
Par-delà les toits
L’haleine étoilée
D’une cheminée qui fume

Les arbres font de l’ombre même la nuit
Les trottoirs sont déserts
Je vis je vis je vis
Bleu vert bleu vert bleu vert
La croix de la pharmacie

Et la nuit
Quand vous rêvez de bords de mer
Bien bordés sous vos couettes
La lune en travers de la gorge
Comme une glaire
Mon cerveau débraillé
Fait trempette
Dans une piscine autoportée

Et plouf !


 
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   rosebud   
18/12/2012
 a aimé ce texte 
Passionnément
L'auteur est vraiment infréquentable!
"Un autre corps que le mien
Mon dieu quel embarras!"
Et il le dit si bien qu'il donne envie de l'embrasser - quelle horreur!
Je me demande si le meilleur compliment qu'on puisse lui décerner ne serait pas de lui demander en gage sa paire de souliers neufs en nubuck contre notre promesse de lui foutre la paix, une bonne fois pour toutes. Malheureusement, un talent pareil ça ne laisse pas indifférent, il faudra vous y faire, mon vieux. J'ai beau chercher, pas une faiblesse, pas un petit laisser-aller, pas le moindre petit bout de racolage, rien que du méchamment intelligent.
Evidemment, devant cet océan de rage, on a envie de s'enfuir en courant - ça fait toujours ça les éléments déchaînés. Un peu de courage, que diable!

   pokilm   
16/1/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Quel talent! C'est d'une violence et d'une lucidité telles que l'on est secoué, déchiré, écoeuré, ravi,frémissant, méprisant!
On se regarde dans la glace: "Tu vois, je te l'avais bien dit!"
On regarde les autres et l'on en rit dans ses larmes avec une délectation amère et tant de lucidité!
Hélas! C'était donc réel?
Plouf!

   brabant   
19/1/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour TristanHiver,


Placer le texte sous l'égide de Rainer Maria Rilke qui avait la lune pour amante et pour patrie la nuit sur lit de mort, de désillusions et de souffrances me semble une excellente idée.


Texte sans concession d'un insomniaque de jour qui dérange par une typographie cahoteuse de vers d'inégale longueur entrechoquant les extrêmes à faire crisser des dents - mais la partie 'calligrammatique' ne m'a pas gêné - de scie même non musicale ; pareillement j'ai sursauté à la verdeur de la langue, sa crudité résurgente.

Une prophylaxie si elle est nécessaire n'est jamais agréable. Peut-être ai-je eu une idée ici de ce qu'a dû être l'inconfort des carrosses en dépit de l'apprêt de leur carrosserie...

Le poète Purgon ici baladé m'a prouvé en outre cuidée que l'huile de foie de morue est un substitut efficace à l'huile de coude quand le jus de couilles peine à produire des endorphines.

Aux chiottes les burettes !

Que quelqu'un veuille bien venir me tirer les paupières. J'ai joué ma partition (dixit le quidam).


Bravo à l'auteur de ce texte hors normes !


p s : Vais aller lire la partie 1... mais pas tout de suite hein ! Faut d'abord que je me remette...

lol :)))

   Artexflow   
19/1/2013
Commentaire modéré

   costic   
19/1/2013
Commentaire modéré

   costic   
20/1/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément
Mon commentaire ayant été modéré pour cause de nanisme, je reviens donc sur ce poème en essayant de mieux préciser. Touchée.
Par tous ces mots. Mais pour reprendre Pessoa :
« Il est si difficile de décrire ce que l'on éprouve, lorsque l'on sent qu'on existe réellement et que notre âme est une entité réelle — si difficile que je ne sais avec quels mots humains je pourrais le définir. »
A lire ce poème, à n’en pas douter, on existe, on se retrouve.
Touchée par l’ensemble donc, et encore plus émotionnée par :
J’excuse à peine le ciel d’être laid ce matin

Un soupir
N’est pas une idée neuve

Façades des immeubles
Fuligineuses
Que le soleil démaquille
Vent qui pousse les nuages
Sur des roulements à billes

La solitude cubique
Le linge délicat
Les stores électriques ?

Il y aura toujours de pauvres gars
Traînant les rues
Comme des lacets défaits

La buée sur les pare-brise
des voitures
en hiver
– réel –
La poussière sur les plinthes
L’odeur des poubelles
Dans les cages d’escaliers
Les bruits de vaisselles
À l’heure du déjeuner

Ses premiers rayons me lèchent
Le lobe de l’oreille droite

Une capacité à créer des images justes, précises, sonnantes, tapantes. Une écriture très urbaine, réaliste, simple et grouillante d’humanité. Seule la partie 'calligrammatique' ne m’a pas touchée et apparait pour moi comme un ornement pas nécessaire.

   aldenor   
21/1/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Comme dans la première partie de ces « prophylaxies... », l’inspiration coule. Mais ici, elle est plus maîtrisée, les coups portent. Une alternance de passages musicaux, de cris de folie, de moments de grande beauté... Le plaisir d’écrire, de jouer avec la forme, est manifeste. Trop peut-être, ce ne sont toujours pas les accents d’un « pourfendeur de cranes ». Mais j’aurais tort de m’arrêter à ce procès d’intention, la poésie est là, sans être Nietzsche ou Maïakovski. D’ailleurs ces citations d’intro dans les deux parties m’agacent un peu, aussi belles soient-elles, elles sont trop longues, trop envahissantes : on part dans le poème, prévenu, avec des idées toutes faites.
Les quelques effets de mise en page m’ont embrouillé : Je n’ai pas compris les « réel », qui sur mon écran du moins, partent désagréablement dans tous les sens.
Un choix de mes moments préférés :
« La nuit a toujours
L’épaule appuyée contre le volet »

« La ville…

Se réveille
D’un souffle labial
La lune baguenaude
Et le vent glacial
D’une chiquenaude
Engourdit mes oreilles » Encore que la nécessité des points de suspension m’échappe.

« J’ai saisi le réel dans une tranche de pain »

« Un autre corps que le mien
Mon Dieu quel embarras ! »

« Allez quoi !
Dieu ne fait plus le ciel
Regardez ! Il détale du sommet des églises
Moi
J’irai tendre un drap sale
Pour nos jours de mouise »

« Il a l’air de tenir debout ton décor
Vieux fou il a l’air
Quand tu t’étires
Au milieu
Des tombes alignées
J’admire
La rigueur de la mort »

« Eh Dieu eh Dieu
Mon Dieu

Vieux vicelard
J’ai honte d’être un Homme
Mon âme est un peignoir
Cette ligne qui court
Toujours
Sans jamais trouver sa forme »

La série des « Allez dire »

   Artexflow   
22/1/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
De retour pour commenter plus correctement votre texte.

Voilà un moment que je n'ai pas passé de temps sur Oniris, mais j'ai gardé un souvenir exceptionnel de ce texte.

Rosebud a raison, c'est triste, noir, plein de colère mais, c'est talentueux, c'est fort, ça parle.

J'apprécie votre poème des citations d'introduction à son avant dernier vers. Oui, c'est vrai que j'ai pas trop accroché au "Et plouf !", mais le reste du texte est tellement immense que je suis pas marqué plus que ça par cette fin qui m'a été quelque peu gâchée.

Alors, qu'est-ce qui me plaît ?

Franchement, quasiment tout. Il serait inutile de tout noter, parce qu'irrémédiablement je recopierai quasiment tout votre texte.

Néanmoins, j'imagine qu'il vous plairait tout de même d'avoir une idée ! Alors je vous recopie ce que j'ai RETENU DE MA DERNIÈRE LECTURE, c'est dire !

- "Je me gave de fraîcheur", ou gave ajoute une dimension de violence toute particulière.

- "Décidément la ville tire une tronche
J’ai envie de dormir
Vite que je m’émeuve !"

- "Un autre corps que le mien
Mon Dieu quel embarras !

Amour
Sois la pudeur d’un rideau tiré"

- Le dialogue, dont il serait presque trop difficile que je m'étende à son propos tant vous dites ici des choses qui sont au fond de moi...

- "la solitude cubique"...

Bon c'est entre autre, et l'heure tourne je vais devoir bientôt partir donc je m'arrête là, je recopie tout de même un passage qui, lors de ma lecture, m'a fait reculer de l'écran, souffler un grand coup, avant que je hurle pendant 10 minutes (authentique) : "Oh putain l'enfoiré !! L'enfoiré!!!"

Ce passage est dans la partie de votre poème où vous émulez le réel (avec BRIO au passage, j'ai été plongé dans la (les) scène(s) immédiatement et je ressentais vraiment ces petits bouts de réel, bravo c'est très proche du ressenti profond du réel).

"Les fumoirs à chichaqui sucrent mes narines
– réel –
Les désœuvrés dans des vêtements trop grands

Les défections canines

– réel –Et tant et tant "

D'ailleurs à ce propos, je lis "déjections" mais vous avez écrit "défections", c'est volontaire ? Si oui pourquoi ?

Introduire une partie par "Oui..." c'est dingue.

C'est un texte dingue et je ne reprendrais que le dernier vers. Je m'en souviens encore, et je m'en souviendrai longtemps.
Réflexe moderne, j'ai publié la page du texte Facebook en annotant "Ce poème est un monument", et c'est très sincèrement ce que je pense.

C'est un monument ! Félicitations !
Et un immense merci.

   widjet   
22/1/2013
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Étourdissant est le premier mot qui vient.

Ensuite, une fois, qu'on s'est ressaisi et qu'on a reprit son souffle, on s'interroge.

Ce qui frappe – au-delà des images souvent puissantes – c’est ce parti pris de l’alternance.
Alternance dans la ponctuation – un coup oui, un coup non. Et vice versa.
Alternance dans le vocabulaire – familier puis soutenu et vice versa
Alternance dans l’approche – descriptive ou interpellatrice
Tout ça déroute et en même temps insuffle une énergie folle ; l’auteur ayant sans doute compris que du fait de la longueur du texte, il était impératif de garder le lecteur en alerte.
Beaucoup d’images et de tournures impriment la rétine et séduisent l’esprit, il serait trop long de toutes les noter, alors je prends mon top 5 (selon moi).

Et chaque fois j’ai laissé des traces de ma moiteur Jusque dans leurs yeux
Il y aura toujours de pauvres gars Traînant les rues Comme des lacets défaits
Et le vent glacial D’une chiquenaude Engourdit mes oreilles
Allez dire Que je n’y ai pas pris part Que je n’ai pas tenu la porte aux dames Que nous sommes misérables Et qu’avant de mourir J’ai dû débarrasser la table
Même si même si Même si cœur lourd Même si tendre le bec Même si offre Même si demande
Même si amour Même si quémande Jusqu’au dernier kopeck


D’autres impressionnent par leur simplicité et leur pertinence qui fait que l’écho résonne longtemps dans les tympans.

Un soupir N’est pas une idée neuve

L’humour (désespéré) n’est jamais bien loin

Au milieu Des tombes alignées J’admire La rigueur de la mort

Le souci sur les sonorités (rimes) est bien présent et démontre toute la structure de ce texte. Derrière son caractère désinvolte, il y a du travail et de la rigueur, rien n’est laissé au hasard, c’est souvent assez remarquable.

En revanche, coup de mou dans la seconde moitié qui m’a semblé moins poétique et percutante – mais c’est le risque quand on en met trop et l'auteur en met trop, j'y reviens à la fin – ce qui est presque paradoxale car elle est plus explosive (plus de sonorités, d’exclamations…). Elle prend un tournant aussi de plus en plus au morbide (le début est presque léger comparativement).

Le seul bémol véritable est qu’on se dit qu’il y avait là moyen d’en garder un peu sous le coude afin de nous laisser davantage apprécier les métaphores et l’impact visuel et imaginaire provoquées par celles-ci ; cette abondance, ce trop plein dilue et amoindri (par moment seulement) la portée, le rythme, la force d’un ensemble pourtant de grande qualité. L’auteur a pêché par gourmandise, c’est dommage.

Mais, cela reste assez impressionnant et une seule lecture est bien loin de suffire.

Chapeau bas.

W

   Anonyme   
22/9/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément
Je viens de me tremper dans ce poème comme dans un bain d'acide et j'en ressors squelettique, étrillé , décapé. Il y a là quelque chose qui déborde de la poésie, comme une substance de vie, un sirop d'existence à l'état brut et pur qui donne à l'écriture la puissance d'une arme, comme un sabre qui taillade la chair intérieure et vous lacère la mémoire.

   matcauth   
1/12/2013
 a aimé ce texte 
Passionnément
c'est la valeur des mots que je retiens ici, leur originalité, leur force et leur pertinence. Je ne ressens pas de musique particulière dans ceux-ci, dans leur forme, mais une teneur à chaque fois très juste dans ce qu'ils expriment. Il y a beaucoup de choses, c'est un voyage, c'est très visuel, on rentre vraiment facilement dans l'atmosphère qui est créée. C'est très riche et jamais ennuyant. C'est très original aussi, et très parlant. Bref, beaucoup de choses, toutes très différentes.

un parmi tant d'autres, ce passage

Se réveille
D’un souffle labial
La lune baguenaude
Et le vent glacial
D’une chiquenaude
Engourdit mes oreilles

c'est court, chaque mot compte, la signification est à la fois complexe et accessible.

un super moment.

   Pussicat   
21/12/2014
Quel choc !
J'en ressors toute ébouriffée... je vais être brève : j'aime, tout !
Le fond, les formes, la crudité délicieuse, les inventions périlleuses, et tous ces fils tendus sur lesquels j'ai glissé... wouah ! ouche !
Quel choc ! et quelle découverte.


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