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Sentimental/Romanesque
Alienor : Il suffira d'un cygne
 Publié le 16/11/14  -  8 commentaires  -  15069 caractères  -  103 lectures    Autres textes du même auteur

"Sans imagination, l'amour n'a aucune chance."

Romain Gary


Il suffira d'un cygne


– Bonjour. Je viens livrer des fleurs pour mademoiselle Daphné Fuyssard.

– C'est moi... je... merci.

– Elles se garderont plusieurs jours dans un vase sous une lumière modérée. Et... joyeux anniversaire !


Benoît esquissa un sourire timide et présenta le bouquet. La jeune femme le saisit et dégrafa la carte accrochée sur le voile en plastique. Ses yeux butinèrent les mots fleuris. Encore. Et encore. Les cils papillonnaient. Chasser le mascara pour se charger de pollen. Le regard survola les pétales rouges et replongea dans la contemplation du rectangle de bristol. Vingt-quatre ans, vingt-quatre roses, quatre lignes. Benoît risqua un œil sur la signature, un certain Kevin. Un homme au prénom abrupt qui commandait les fleurs en nombre pair.


La jeune secrétaire louvoyait entre le rouge et le blanc, sa peau se colorait à chaque nouveau cap. Le souffle s’accéléra, les narines se dilatèrent. Les lèvres frémirent, susurrant les mots noirs sur fond crème. Il était presque seize heures en ce quatorze février. Le soleil s’attardait encore sur le profil de Daphné, révélant un léger duvet blond au-dessus d'une bouche en suspend. Benoît songea qu’il aimerait bien s’y poser une seconde ou deux. Il s'accrocha à cette idée puis lâcha prise. Dans sa chute, il tomba amoureux. Il sortit du bâtiment d’un pas alerte et se remémora sa dernière fulgurance.


Deux ans auparavant. Natacha. Il l’avait rencontrée à une conférence sur la prolifération des OGM. Sous un petit chapiteau jaune délavé, dressé pour l’occasion, il s’était réfugié dans l’urgence pour échapper à une averse estivale. Sur une estrade, un homme barbu s’agitait devant une cinquantaine de chaises dont quinze étaient occupées. À grand renfort de gestes amples et de mots de quatre syllabes, il tentait de convaincre son maigre auditoire de l’aspect néfaste des OGM. Parmi les auditeurs, huit regrettaient d’avoir oublié leur parapluie, trois buvaient les paroles saccadées, deux lisaient un quotidien et un filmait le monologue avec son téléphone. Au fond, sur une chaise pliante autrefois verte, Natacha mangeait un sandwich salade-bacon.


Alors qu’une pluie lourde martelait la toile du chapiteau, rappelant le roulement de tambour qui annonce le climax d’un numéro de cirque, Benoît s’assit à gauche de la demoiselle, un point à côté d'une majuscule. En quête de chaleur, son choix était tombé comme une évidence.





Ce soir-là, comme chaque mardi, son ami Christian l’attendait au Tonneau de Diogène, bar à vin snob d'un arrondissement à la mode. Après des années difficiles, l'établissement avait vu sa fréquentation exploser. Sa récente performance comme décor dans la dernière comédie rigolarde de Luc Tesson l'avait exposé à la faune philologue du tout-Paris. On y parlait Tesson, bouteilles, Alain Kinder-Grötte et spaghettis. De préférence al dente.


Christian, meilleur ami par défaut de Benoît, patientait, assis derrière une table à échelle réduite, un ballon de bourgogne à la main. Droit sur sa chaise, les jambes à l'équerre, il scrutait la danse du liquide violacé, guidant le pied du verre avec délicatesse.


Le jeune homme était un vestige des années universitaires de Benoît. Rencontré sur les bancs des amphis, côtoyé dans les cafét' et révélé aux soirées médecines, Christian ne vivait que pour sa sainte trinité : les femmes, le verbe et le vin. Il avait assouvit ses deux premières passions à la fac de lettres, lieu sacré où neuf étudiants sur dix étaient des étudiantes. Son physique avenant, couplé à la pénurie masculine, lui avait valu quelques conquêtes enviées ainsi que plusieurs pages dans la collection automne-hiver d’un catalogue de vente par correspondance. Après trois années, sa licence en poche, il quitta l'université. Son seul regret, ne pas avoir étudié l'œuvre de San Antonio, son auteur de cœur. En septembre, une amie de son père lui proposait un poste de vendeur en parfumerie. Il accepta sans hésiter, poursuivant ainsi son étude de la gente féminine. Et pour honorer son cursus, il relirait Suskind le moment venu.


Les deux amis n'étaient pas adeptes des introductions. Les formules de politesses, « Bonjour », « Salut » et autres « Ça va ? » étaient proscrites. Chaque nouvelle rencontre était la suite directe de la précédente. La conversation reprenait avec fluidité là où elle s’était arrêtée.


Benoît s'assit à l’équerre sur une chaise toute en courbes. Les pieds posés à plat sur le carrelage, il se tenait droit comme une objection. Sa posture était une esquisse au fusain, dénuée de fantaisie. Face à lui, sirotant un vin materné en sol argileux, Christian paraissait léviter sur son siège. Son costume rendait les limites de sa silhouette incertaine. Un corps en suspension, une bulle de champagne qui refuse de lâcher prise.


Benoît orienta la conversation sur sa rencontre avec Daphné. Les roses rouges, le chiffre 24, les mots noirs, le prénom vertical. Il s'exprimait par groupes nominaux, assimilait des informations qu'il régurgitait par bribes. Sa pensée procédait par opérations simples, incapable d'extrapoler, d'enjoliver. Étanche à l'analogie, hermétique à la métaphore. Il évoluait au présent, sa personnalité fondée sur un passé fossile. Si austère, qu'il rêvait en noir et blanc.


Christian, d'une voix chauffée par l'éthanol, se lança dans un monologue bavard, destiné à son propre ego. Il pensait son ami incompatible avec le concept de couple, son cœur recouvert de téflon, rien ne pouvant y adhérer. Benoît, lui, prenait ces conseils pour un acte de bienveillance alors qu'il s'agissait de vanité. Christian préférait le vin rouge car le reflet de son visage sur le verre était plus profond. Discourir en se contemplant dans un bourgogne vieilles vignes comptait parmi ses activités sacrées.


Il grappilla quelques mots à l'attention du fleuriste. Dispenser son avis s'accordait bien avec la dégustation. Il l'encouragea à revoir la secrétaire, jouer la carte de l'ingénu et faire l'impasse sur celle du petit ami. Il fallait être explicite mais subtil, direct et délicat. L'œnophile conclut son laïus, des tanins boisés encore frétillants sur la langue, avec une phrase à 12° :


– Tu dois lui envoyer un signe !


Elle portait une jupe abricot sur des jambes croisées, interminables. Un chemisier beige, au boutonnage volage, laissait entrevoir une poitrine d'adolescente. Bravant les courbes épuisées de la chaise, sa silhouette demeurait fière, tendue comme un sprinter sur la ligne de départ. Une sensation d'urgence émanait d'elle. La nécessité de vivre vite pour ne pas s'attacher. Ce corps longiligne n'offrait aucune prise. Les pieds étouffés dans des baskets de toile légère vibraient sur le sol  ; des mains filiformes aux ongles coupés ras s'agitaient sur le sandwich comme sur une clarinette. Ses lèvres, dessinées avec une mine tendre. Enfin, la chevelure flamboyante, explosive, jaillissait du crâne telle une éruption. Aucune photo n'aurait pu figer cette femme.


Le dialogue d'introduction entre Natacha et Benoît tint plus du résumé que du chapitre. Un enchaînement de phrases courtes qui auraient pu figurer dans un manuel de grammaire de second cycle. Le banal tutoyait le temps qu'il fait. Le mièvre, le temps qui passe. Chacun se contentait de la présence de l'autre. Ils ne se demandaient pas si ça allait durer, mais combien de mois avant que...





Le lendemain, Benoît s'agitait entre bouquets de fleurs coupées et compositions florales. Il était seul sous la serre, baigné dans une chaleur ouatée, ses pensées paraissaient plus denses. Ses doigts voltigeaient, de tiges en pétales. À chaque coup de sécateur, un sentiment de légèreté l'envahissait. Après avoir confectionné ses commandes du matin, une douzaine de paniers aux teintes pâles, Benoît fouilla le fond d'un vieux sac de terreau qui dormait dans un coin de la pièce. Il en sortit une vieille boîte en métal émaillée qu'il fourra dans son sac à dos. Il quitta alors la boutique par l'arrière et démarra son Solex sans prendre la peine de s'encasquer. Il chevaucha, les yeux plissés par le vent, jusqu'au boulevard Dessaix. Au numéro 15, il laissa son engin sur béquille et gravit deux par deux les marches jusqu'au troisième. Il frappa à la porte massive et entra sans attendre d'invitation.


L'appartement de tante Odile baignait comme toujours dans une atmosphère épaisse. Les tapisseries, héritières des années soixante-dix, exhibaient leurs motifs psychédéliques aux couleurs poisseuses. L'air était saturé d'odeurs compactes, dominées par la fumée de cannabis et des relents d'eau de parfum bon marché. Benoît se déchaussa et traversa le couloir principal pour déboucher dans le salon. À chaque visite bimensuelle, il s'étonnait des mutations que subissait la pièce. Les plantes vertes tombaient en cascades des meubles et étagères tandis que les piles de livres s'élevaient de façon chaotique, prenant racine sur le lino ou la table basse. Avalée par un sofa élimé, tante Odile finissait un joint en fixant le plafond. La fumée stagnait, s'accrochant aux coussins, trop lourde pour prendre de la hauteur. Ses yeux vitreux ne cillèrent pas quand son neveu déposa un baiser sur son front strié. Il respira, un peu, l'arôme de savon qui s'échappait du crâne et fila dans la cuisine. Il fouilla les entrailles de la bonnetière, vernie à l'huile de cuisson après de longues années de promiscuité avec la gazinière. Il sortit un grand bocal de verre et le déposa sur le plan de travail. Une poignée de feuilles étoilées se recroquevillaient sur le fond. Comme chaque quinzaine, le fleuriste déversa le contenu de sa boîte métallique dans le récipient en verre. Les feuilles frémirent à la venue de nouvelles camarades.


Benoît fouilla ensuite le four. Comme d'habitude, le cake attendait. Brun, des flancs d'aspect lunaire, une croûte volcanique. Il gisait sur un plat rectangulaire au teint laiteux et dégageait une odeur de chocolat trop cuit. Benoît l'enroula dans un papier aluminium, le fourra dans son sac et quitta l'appartement. Tante Odile dormait.


La suite de l'histoire obéissait aux canons de la banalité. Benoît récoltait les instants que "Tacha" lui abandonnait. Elle se divertissait avec lui comme on promène un ballon au gré du vent. Elle s'amusait de sa légèreté, de son inconstance et lui enviait son manque d'attaches. Et surtout, il n'appartenait qu'à elle de rompre le lien qui les unissait. Six mois plus tard, un mardi, Natacha libérait Benoît dans la salle surchauffée d'un restaurant sans terrasse. Il avait postulé au bonheur mais sa candidature n’avait pas été retenue.





À cet endroit du lac, la forêt léchait presque l'écume. Une plage de galets séparait le vert et le bleu. Benoît suivait le ruban minéral, les pierres jouaient sous ses pas, ses chevilles victimes d'un déséquilibre constant. Il éprouvait une sensation de réconfort à chaque craquement. L'apaisement d'une habitude.


La trotteuse n'avait pas couvert un demi-cadran que le fleuriste aperçut enfin l'animal. Il était debout sur la surface grisée. Les ailes gonflées, captant le soleil pour chasser l'humidité. Le cygne snobait le mammifère de toute sa hauteur. La ramure opaline renvoyait aussi bien les couleurs que l'indifférence. L'oiseau, parangon de grâce chez les empileurs de rimes, n'évoquait rien pour Benoît. Il trouvait la morphologie du spécimen déséquilibrée, court sur pattes, un abdomen gonflé à l'hélium, un cou sinueux et une bosse rugueuse en guise de front. Le fruit des amours acrobatiques entre un pigeon et un aspirateur.


Benoît décrocha un morceau de cake et le lança vers les pieds palmés. L'œil du cygne produisit une petite étincelle et le bec plongea pour se saisir de l'offrande. Le cou se tendit et la gravité fit le reste. Benoît devina qu'une infime lueur venait de naître dans le regard gourmand. Il enchaîna les lancés. L'animal gobait sans s'accorder de pause, la lumière dans l'œil enflait.

Après une heure, il ne restait du gâteau qu'une petite moitié. Le cygne oscillait, d'une palme sur l'autre, en quête d'un aplomb fuyant. Benoît attendit l'immobilité. Puis, avec toute la délicatesse d'un fleuriste, il passa un collier pour chat autour du cou soyeux. Il empoigna la longe et exerça une  pression sur les cervicales. Le palmipède chancela et concéda les premiers pas d'une marche improvisée.

L'homme et l'animal suivirent le littoral, sans échange, les galets comme seuls témoins de leur excursion. Au loin, le soleil baillait en plein, son impudeur cachée en partie par un nuage éduqué. Sur la plage gémissante, la résolution du fleuriste tenait en laisse la résignation du volatile. Une chaîne alimentaire en nylon filé. Un lien qui unissait autant qu'il séparait. 





 Les portes de l'ascenseur s'ouvrirent et Benoît s'avança dans la pièce qu'il connaissait bien. Derrière lui, l'oiseau suivait, comme ces jouets pour enfants, serviles jusqu'au bout des roulettes. L'éclairage de tungstène qui baignait les murs ajoutait une teinte cobalt au plumage. Avec sa démarche mécanique et ses pupilles inertes, l'animal évoluait vers une version 2.0. Lorsque Daphné leva les yeux sur l'étrange équipage, elle pâlit à en faire rougir un cygne de honte.


– Tu as fait quoi ?


Christian, les yeux écarquillés, posait sur son ami un regard halluciné que Miro aurait pu peindre. Il savait que Benoît était un marginal, un amputé du second degré. Un homme sans aspérités sur qui les nuances glissaient. Une personnalité binaire, un esprit où les relations se résumaient à des additions, les ruptures à des soustractions et composer des bouquets, le simple produit de couleurs et de parfums. Une fois encore, avec la patience d'une marée, Christian expliqua le monde analogique et sensible. Une fois encore, Benoît se laissa porter. Il n'était pas équipé pour comprendre.


– Mon ami, après ta dernière farce, il va falloir sortir le grand jeu. Fini les nuances, les subtilités, les demi-mesures. C'est quitte ou double ! Il ne te reste qu'une chose à faire...



Benoît, l’œil inquiet, se déplaçait en crabe face au rayon droguerie. Les emballages plastiques rivalisaient de couleurs agressives et de symboles pour fasciner le client. L'éclairage cru rappelait celui d'un bloc opératoire où même les ombres étaient exclues. Une vague odeur de détergent flottait dans la rangée, masquant à grand-peine les émanations de sueur de l'employé, concentré sur son réassortiment. Benoît patienta et le jeune homme à la chemise sérigraphiée quitta enfin son territoire, traînant dans son sillage un transpalette à la peinture vérolée. D'une main hésitante, le fleuriste saisit une bouteille blanche, à la structure cannelée. Sur l'étiquette rouge en écriture capitale : Alcool à brûler.



– ... C'est quitte ou double ! Il ne te reste qu'une chose à faire. Il faut lui montrer la passion qui t'anime, l'embrasement qui te consume. Tu dois l'allumer !


 
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   Asrya   
4/10/2014
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Pfiou...
Le début de votre nouvelle est... ennuyeux au possible !
Certes c'est bien écrit, le style est remarquable mais c'est lent. Lent, long, lent, plat ; une juxtaposition inintéressante d’événements ternes et sans goût !
Et quand je parle du début, je parle de plus des trois-quarts !
Il m'a fallu attendre la poésie bucolique qu'offre l'arrivée de votre cygne pour m'immerger dans votre récit et en dégager l'essence.
A partir de l'apparition de votre volatile, votre histoire prend un nouveau tourment et ce dernier m'a réellement séduit.
Ces mots incompris, mal interprétés ; cette confiance aveugle envers un ami ; c'est plutôt bien amené, inattendu et savoureux.

Mais alors... pourquoi ?
Pourquoi toute cette narration qui précède ? C'est sans importance.
Cette histoire avec "Natacha" ; quel intérêt ? Cela casse le récit et n'apporte rien à la situation.
Tante Odile ? Que diable fait-elle dans cette aventure ?
Agnès ? Pourquoi citer un nom qui n'apparaît qu'une seule fois et qui n'aboutit à rien de plus ?

Bref, beaucoup d'interrogations.
J'ai lutté pour achever votre texte mais ai été réellement surpris par la chute ; enjoué.

Merci pour ce partage,
J'aurais adoré m'immerger plus tôt dans votre texte,
A bientôt.

   Anonyme   
6/10/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Ah, dommage. J'ai vraiment beaucoup aimé votre talent pour les descriptions décalées, genre "Il s'accrocha à cette idée puis lâcha prise. Dans sa chute, il tomba amoureux.", mais ai aussi beaucoup regretté la présence du jeu de mots "signe"/"cygne" : l'histoire m'intriguait, je me demandais quoi et qu'est-ce, et c'est pour cette blague ? Même si la conclusion est excellente, j'ai du mal à faire le grand écart entre la sophistication de Christian, le fait que Benoît ait fait des études à la fac, qu'ils soient amis et que Benoît ne saisisse pas l'expression "envoyer un signe".

Et puis :
– Bonjour. Je viens livrer des fleurs pour mademoiselle Daphné Fuyssard.
(...)
– Tu dois lui envoyer un signe !
(...)
l'animal évoluait vers une version 2.0. Lorsque Agnès leva les yeux sur l'étrange équipage, elle pâlit à en faire rougir un cygne de honte.
Y a pas un problème ? Cette Agnès est-elle la Daphné dont Benoît est tombé amoureux ?

Bref, pour moi le personnage central de Benoît ne tient pas vraiment la route, il est là uniquement pour illustrer la blague ; or, vous vous donnez la peine de vous attarder sur son caractère mais en fin de compte, à mon avis, construisez un patchwork incohérent (par exemple, il ne semble guère affecté par son histoire avec Natacha, que vous traitez sur le mode léger, mais la fin le révèle, je trouve, bien plus abîmé qu'on croirait). Dommage, parce que par ailleurs j'ai apprécié cette écriture sardonique, la manière dont elle déroule l'histoire de manière assurée, presque implacable...


"Les deux amis n'étaient pas adeptes des introductions. Les formules de politesses, « Bonjour », « Salut » et autres « Ça va ? » étaient proscrites. Chaque nouvelle rencontre était la suite directe de la précédente. La conversation reprenait avec fluidité là où elle s’était arrêtée." : voilà typiquement, pour moi, un cas d'occasion ratée d'illustrer par l'exemple cette particularité des deux amis ; au lieu de dire qu'ils ne se saluent pas mais embrayent directement sur la suite de ce qu'ils disaient la dernière fois qu'ils se sont séparés, pourquoi ne pas donner tout de suite les deux ou trois premières lignes d'ouverture abrupte de leur conversation ? Je trouve que c'eût été une manière sympathique de comprendre un aspect de l'interaction des personnages, et l'occasion de quelques propos cocasses...
"Son costume rendait les limites de sa silhouette incertaine. Un corps en suspension, une bulle de champagne qui refuse de lâcher prise." : joli !
"Le fruit des amours acrobatiques entre un pigeon et un aspirateur." ! j'adore !

   David   
11/10/2014
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,

J'ai apprécié plusieurs passages mais il m'est vite devenu difficile d'avoir du recul sur ma lecture, de suivre l'histoire, à cause de trop de richesse dans les descriptions, et sans doute aussi un peu d'hermétisme au thème de ma part. J'ai compris qu'un personnage masculin, un genre de version urbaine d'un "idiot du village", tombait sous le charme d'une cliente de son employeur, fleuriste. je n'ai pas bien saisi les obstacles qu'il aurait eu à affronter pour satisfaire son désir, mais c'est peut-être parce que la liaison qu'il voulait s'est bien réalisée mais s'est rompu trop tôt à son goût, d'où la perspective finale d'une immolation.

Je "nageais" durant la visite chez la tante "cannabisomane", où il prend le gâteau au chocolat qu'il va utiliser pour capturer un cygne. Je n'ai pas compris mais ce n'était pas désagréable à lire, je n'ai pas le courage d'une relecture pour tenter de cerner un peu mieux les étapes.

   caillouq   
22/10/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Texte jubilatoire, j'apprécie beaucoup cet anti-héros qui, sous ses airs d'intello, prend tout au pied de la lettre. Et tante Odile et la chaîne alimentaire en nylon filé. Gros plaisir de lecture. Sauf que je ne comprends pas pourquoi Daphné s'appelle Agnès à la fin, ni pourquoi il connaît bien son appartement, qu'il n'a vu qu'une fois en lui apportant des fleurs. Ou alors, Agnès = Daphné + 1 ? Si c'est le cas, heu, en fait je ne vois pas très bien l'intérêt, mis à part de compliquer le propos - on serait revenu sur Daphné que ça ne m'aurait pas dérangé. Mais peut-être que j'ai raté gros.

   Neojamin   
16/11/2014
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bonjour Alienor,

J'aime bien l'idée du personnage qui prend tout au pied de la lettre. C'est un peu catapulté et sans surprise mais ça vaut le coup d'être étudié. J'aurais aimé lire une chute plus rocambolosesque, plus absurde pour achevé ce récit.
L'idée est bonne donc mais manque de panache vers la fin.

Sur la forme, c'est un peu lourd à mon goût. Il a certes plein de petites gourmandises très agréables le long tu texte... mais elles prennent trop souvent la vedette. J'ai du batailler pour suivre l'histoire sans me laisser distraire par tous ces petits jeux de mots. En terminant le texte, j'ai eu aussi l'impression d'une overdose et je serais incapable de me souvenir d'une de vos trouvailles...alors que je sais que j'en ai trouvé quelques unes excellentes.

Sur le fond, c'est léger, il ne se passe pas grand-chose au final, ce qui accentue l'étouffement provoqué par tous ces jeux de mots.
Je n'ai pas trop compris l'intérêt de l'histoire en croisé avec Natasha, mais bon, c'est un choix.

De manière générale donc, il y a quelque chose, un rythme, une idée qui me plaisent et le texte est divertissant... mais, à mon goût, ça manque de simplicité.
Merci.

   Robot   
16/11/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Cette histoire m'aurait été totalement agréable s'il n'y avait pas eu ce long développement préliminaire avec des digressions qui apportent peu au récit. A plusieurs reprises j'ai été tenté d'arrêter. Je ne regrette pas d'avoir persévérer pour arriver à ce qui fait l'essentiel, c'est à dire la méprise due aux jeux de mots involontaires et ses conséquences. La conclusion est subtile, elle appelle à imaginer ce qui pourrait bien suivre.

   Anonyme   
16/11/2014
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Alienor

J'adore le style ! Tout y est subtile. Parfois trop, ça frise parfois la surenchère et le ton est parfois un poil snobinard, mais ce n'est pas bien grave en comparaison du plaisir que j'ai pris à visualiser vos images.
"auteur de coeur" pas trop aimé la formule.
Il faudra que le narrateur me donne la recette du cake au chocolat de la tante Odile, j'adorerais attraper un cygne et le promener en laisse !
J'avais lu World War F et n'avais vu que l'histoire qui m'avait moyennement intéressée, ici, je n'ai vu que pléthore de photos prises sur le vif - (Benoît s'assit à l'équerre sur une chaise toute en courbes) (la bonnetière vernie à l'huile de cuisson après de longues années de promiscuité avec la gazinière) ( la forêt léchait presque l'écume) et tant d'autres, tant d'autres ! Un vrai festival ! - et j'ai oublié l'histoire, tant les lignes m'ont enthousiasmée.
Je viens de relire votre texte, l'histoire est effectivement sans grand intérêt, elle est même un peu vaine - quoi ? Tout ça pour ça ? - mais tout ce qui la fabrique est de mon point de vue absolument parfait à deux ou trois minuscules détails près que je n'ai pas jugé utile de noter car ils ne concernent que ma partition musicale de lecture.
En résumé, et de mon point de vue, il ne vous reste plus qu'à trouver un sujet qui soit assez costaud pour que vous puissiez le creuser et qui vous permette d'y laisser s'épanouir votre style qui a l'air d'aimer prendre les chemins de traverse.
Bonne chance pour la suite et au plaisir de vous lire.

   Anonyme   
17/11/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'aime "passionnément". N'importe quoi. Que vient faire la passion ici ? Elle rend aveugle alors que nous sommes censés aider l'auteur à y voir clair. Et puis l'adverbe est trop kitch. Il fait très "marguerite". Je le garde pour les commentaires au ras des pâquerettes.

J'ai beaucoup aimé l'histoire de Benoît, ce psychorigide naïf, limite autiste, "Étanche à l'analogie, hermétique à la métaphore", "Si austère, qu'il rêvait en noir et blanc", qui voit le cygne comme "court sur pattes, un abdomen gonflé à l'hélium, un cou sinueux et une bosse rugueuse en guise de front". Et en opposition, l'ami œnophile qui déguste les mots comme les bourgognes. Des amis qui sont également curieux du végétal, Benoît pour les fleurs et le cannabis, Christian pour la vigne. Les deux personnages sont bien dessinés, par leurs pensées, par leurs attitudes.

Des métaphores, il y en a tout au long du texte. C'est une master class en métaphores. Juste une, pour dire que j'ai fait le taf : "il se tenait droit comme une objection".

Je viens de lire World War F aussi. J'ai la flemme l'aller y placer mon commentaire mais c'est plus que sympa ! Alienor, je vous aime... beaucoup. Et pourtant, j'aime le foot et ses supporters. Pas snob, moi.


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