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Horreur/Épouvante
cherbiacuespe : La porte du un en tout, tout en un
 Publié le 11/12/21  -  11 commentaires  -  14197 caractères  -  82 lectures    Autres textes du même auteur

Quelle que soit la décision à prendre, il est toujours plus indiqué d'en connaître davantage sur les conséquences qui en découleront.


La porte du un en tout, tout en un


Yog-Sothoth est tapi dans ces ténèbres depuis des millions d’années. Comme ses autres lui-même, il est emprisonné dans le chaos extérieur que nul ne peut regarder sans en payer le prix. Ce passé, présent et futur, en Yog-Sothoth, sont tout en un et un en tout. Il est, à cette porte, une extension de sa propre entité, inaltérable et aliénée. Chaque œil de ses milliers de globes scrute la sombre infinité de cette opacité absolue. Tapi dans ces ténèbres, Yog-Sothoth guette.


La réunion du conseil municipal avait été plutôt houleuse. Il n’était pourtant pas question de l’habituelle confrontation majorité/opposition. Cet aménagement destiné aux traitements des eaux, tout le village le désirait, au même titre que les villages voisins qui en bénéficieraient également. L’origine de l’antagonisme était le choix de l’emplacement. Anciens et nouveaux habitants s’affrontaient durement. Les premiers en faveur d’un terrain différent, les autres, dont Jocelyne Altan, madame la maire, était du nombre, pour parapher tel quel l’accord présenté, sans perdre de temps. Les votes se succédaient sans qu’une décision ne parvienne à s’imposer en faveur des uns ou des autres. Madame la maire hésitait à trancher.


— Je veux jeter un coup d’œil sur ce manoir. Je veux voir cet endroit.


Dans le vacarme des altercations, la voix, pourtant toujours empreinte de fermeté dans le salon du conseil, de Jocelyne aurait pu passer inaperçue. Pas pour l’oreille toujours affûtée de son premier adjoint, Arthur Arnézi.


— Pardon, taisez-vous… Taisez-vous tous, nom de Dieu ! Jocelyne, qu’est-ce que vous avez dit ?

— Je veux voir l’endroit. Je ne le connais pas, finalement. Il faut que j’aille sur place.

— Ce n’est pas une bonne idée, Jocelyne.


Le chahut s’était petit à petit étouffé. Tous écoutaient, maintenant.


— Cela vous avancera à quoi ?

— Écoutez, je veux voir de mes yeux la source de notre désaccord, je veux comprendre.


Et le silence se prolongea. Les anciens se regardèrent, puis regardèrent Arthur, le plus sage d’entre eux, leur porte-parole dans cette affaire, finalement. Il prit un long temps de réflexion avant de répondre.


— D’accord, Jocelyne. Je vais vous accompagner. Après on rediscutera de ce qu’il convient de faire.

— Bien, alors on y va maintenant. J’estime qu’on a assez perdu de temps jusqu’ici !

— Quoi ? Maintenant ?

— Oui !

— Heu… Bon… Eh bien allons-y.


Le chemin vers le manoir donnait assez de temps à Arthur. Il en profita donc pleinement.


— Jocelyne, quand êtes-vous arrivée ici ?

— Six ans…

— Six ans. Est-ce que je peux vous raconter deux événements. Deux anecdotes, parmi d’autres, qui ont marqué d’un fer rouge l’histoire de ce village et de ses habitants.


Ne conduisant pas, elle prit son temps pour fixer Arthur avec un sourire moqueur.


— Ne vous gênez pas, Arthur, racontez-moi.

— La première histoire remonte loin. Au Moyen Âge, pour être plus précis. Une jeune paysanne qui raccompagnait un troupeau de vaches trouva sur son chemin une chose horrible : un tas de chair et des membres, bras et jambes, sectionnés. C’était humain, et la maréchaussée ne retrouva jamais la tête plus quelques autres morceaux. Pour rassurer les gens de la région, on brûla six ou sept sorcières après un procès expédié. Vous vous en doutez, cela ne résolvait en rien le mystère, mais la population fut satisfaite. La scène se situait non loin du manoir qui, à l’époque, n’existait pas. À la place, il y avait un gouffre qui doit d’ailleurs toujours être là, quelque part sous le bâtiment.

— Bouh ! Horrible, s’amusa Jocelyne ! La deuxième histoire ?

— La Révolution. Cette histoire-là a été étouffée, mais elle se raconte encore de nos jours, de parents à enfants, comme un secret de famille, si vous voulez. Les paysans, rendus fous par un beau parleur de passage, s’armèrent et se dirigèrent vers le manoir, censé abriter un noble. On lui prêtait l’intention de réunir des crapules pour homicider, c’était le mot utilisé à l’époque, les paysans. Ils étaient une vingtaine ou une trentaine, selon les récits. Ils disparurent ! Volatilisés ! On ne les retrouva jamais, ni leurs corps s’ils avaient été massacrés. On apprit quelques jours plus tard que le manoir était inoccupé depuis des mois, des années peut-être. Une affaire sordide ! Et un mystère qui ne l’est pas moins ! On ne compte pas, d’ailleurs, tous les faits étranges liés à cet endroit. On raconte que c’était aussi un lieu de sacrifices, du temps des Celtes.


Arthur s’interrompit un instant puis reprit sur le ton de la confidence.


— Savez-vous que l’on ne trouve aucun propriétaire de ce domaine ? À aucune époque ? Un truc de fou, non ?

— Si vous vouliez plomber l’ambiance, c’est réussi ! Si vous comptiez me faire peur, c’est raté !


Enfin, ils arrivèrent à quelques kilomètres du manoir. Arthur décida de ne plus rien dire. Il espérait avoir ébranlé les convictions de Jocelyne mais s’était ridiculisé plus qu’autre chose. Il était préférable de se taire.


— C’est bizarre, tout à coup. Ce brouillard soudain alors que le soleil était resplendissant jusque-là ?

— Oui. Inexplicable, répondit Arthur.


Il faisait encore chaud à cette époque de l’année, et, si une levée de brumes était toujours possible dans cette campagne reculée, elle ne se produisait en général que la nuit ou tôt le matin. Arthur ralentit sévèrement, car la visibilité diminuait sensiblement, jusqu’au moment où il ne vit plus grand-chose que le bout du véhicule.


— Il va falloir continuer à pied, Jocelyne. Je connais ce secteur, mais je ne peux aller plus loin. Pas dans ces conditions. Je n’y vois plus rien !

— Si c’est un plan drague, il est mauvais, Arthur ! Mais je suis d’accord, continuons à pied. C’est plus prudent. J’espère que ce n’est plus très loin, maintenant.

— Non. Deux ou trois centaines de mètres, pas plus !


Un pieux mensonge. Arthur ne savait tout simplement pas à quelle distance se trouvait le manoir, ni même s’ils étaient dans la bonne direction. Il aurait dû passer par un carrefour il y a belle lurette, non loin du but, mais ne se souvenait pas l’avoir croisé. Et ce satané brouillard n’en finissait pas de s’épaissir. Il attrapa le poignet de Jocelyne.


— Qu’est-ce que vous faites, Arthur ?

— Je vous tiens, je préfère que l’on ne s’éloigne pas l’un de l’autre. Cette purée ne me dit rien. Avez-vous remarqué ?

— Quoi ?

— Aucune humidité !


Habituellement en effet, ce type de frimas s’accompagnait toujours de fraîcheur et d’humidité. Ce n’était pas le cas à présent. La chaleur était plutôt étouffante. Jocelyne commençait d’ailleurs à sentir perler sur son front de grosses gouttes de sueur. Pas de doute, Arthur transpirait autant qu’elle.


— Arthur ? Ça fait longtemps qu’on marche. On devrait déjà y être, non, d’après ce que vous disiez ?

— C’est vrai. Je ne comprends pas.


Il se retourna puis regarda tout autour. On n’y voyait rien à plus d’un mètre, moins peut-être. Depuis quelques minutes, leurs chaussures foulaient une herbe drue, une terre sèche. Le bitume avait disparu depuis longtemps. Tout à coup, Arthur arrêta Jocelyne.


— Plus un mot. Écoutez !


Jocelyne cessa tout mouvement et se tut. Le silence ! Total, unique, parfait, universel. Et angoissant ! Rien ne venait troubler ce mutisme.


— Au beau milieu de la nature, ce n’est pas banal… Arthur ?

— Pardon. Oui, vous avez raison. En tout cas, c’est plutôt rare, un tel silence, un silence absolu. C’est comme si la vie n’existait plus, ici.

— Où sommes-nous exactement ? Au milieu d’un pré ? Dans un jardin ? Où ?

— Je ne sais pas, Jocelyne, je ne sais plus. Continuons.


Mais il avait complètement perdu le sens de l’orientation et ne savait pas vers quel inconnu il se dirigeait. Adolescent, guidé par cette curiosité de la jeunesse qui vous fait faire tout et n’importe quoi, il lui était arrivé de venir au plus proche du manoir. Il s’était retrouvé, d’une seconde à l’autre, dans une nuit intégrale, une nuit d’encre. Effrayé par cette soudaine obscurité, il s’était mis à hurler et courir, n’importe où pourvu qu’il s’éloigne. La peur panique ou le hasard l’avait en quelque sorte sauvé. C’est en tout cas ce que son intuition lui dictait. Il avait surgi dans la lumière du jour d’un seul coup, se découvrant à plus de dix kilomètres du point de départ de son aventure. Il n’en avait jamais parlé à personne. La honte et l’orgueil. Aujourd’hui, à cet instant, il sentait monter de nouveau en lui cette sourde angoisse. Et Jocelyne semblait dans le même état d’esprit. S’il ne fuyait pas, cette fois, c’était à cause d’elle. « À deux, c’est toujours plus simple », se rassura-t-il.


Ils n’y firent pas attention immédiatement, mais le jour tombait au fur et à mesure de leur progression. Et cela n’avait rien à voir avec l’heure. Ils étaient partis le matin et cela faisait deux heures à peine qu’ils avaient quitté la salle du conseil. Mu par une sorte de réflexe paternaliste, il reprit dans sa main le poignet de Jocelyne, qu’il avait lâché après s’être arrêté. Elle sursauta avec un petit cri de surprise.


— Oh ! Pardon. Vous m’avez surprise, Arthur.

— Pardonnez-moi… Je croyais…

— Tenez-moi la main, plutôt. Il ne faut pas se perdre.


Arthur n’était pas forcément rassuré. Il décela, dans la voix de sa voisine, l’indiscutable confirmation d’une même crainte. Ils marchèrent encore, lui essayant de se convaincre de leur stupidité, elle d’une présence apaisante qui lui tenait la main.


Comme Arthur s’y attendait, une nuit opaque finit par les entourer. C’est pourtant au milieu d’arbres sournoisement tordus qu’ils surgirent. C’était étrange, irréel. Il n’y avait aucune lumière, et pourtant ils pouvaient voir clairement cette soudaine végétation apparaître. Une végétation effrayante de « bras » tordus, d’absence de feuillage et de verdures. L’herbe sur laquelle ils marchaient était désormais entièrement roussie. Et, les accompagnant toujours, ces arbres difformes, torturés. Subitement, des grognements sourds, distinctement audibles, percèrent le silence. Comme si la nature qui les assiégeait les condamnait, les menaçait directement. Parfois, il semblait à Arthur que les branchages noueux, les troncs eux-mêmes, s’ébranlaient, essayaient de les agresser. Jocelyne se souda à lui, cherchant un contact corporel plus manifeste. Elle tremblait. Il enroula son bras autour de ses épaules.


— Arthur… J’en ai assez vu, je crois. Partons, si vous le désirez.


Elle ne le raillait plus. Arthur ne désirait rien d’autre que de s’éloigner de ce cauchemar. Partir, oui, mais par où ? Lui n’en savait absolument rien. La seule fois qu’il avait fui cet endroit, il s’était mis à courir au hasard, dans n’importe quelle direction. Sa conviction était que cette chance ne se renouvellerait pas nécessairement. Le bois le tenait de nouveau, le retenait et maintenant, pas question de le laisser s’en tirer ! Arthur avait peur. Inutile de se le cacher. Et sa partenaire ne l’aiderait pas. En ce sens, ils étaient de tristes vagabonds, perdus au milieu de nulle part. Mais un nulle part qui leur voulait du mal.


C’est à ce moment-là qu’ils entendirent. Distinctement. Jocelyne ne put retenir un nouveau cri, étouffant celui, plus discret, d’Arthur. Un grondement/grognement épouvantable, celui d’une bête à même à tout instant de vous sauter dessus et de déchirer les chairs. L’image de ce – ou de cette – pauvre diable, haché, tranché, broyé, au Moyen Âge, lui revint à l’esprit. Il frissonna. Jocelyne, qui, elle, n’avait jamais compulsé les grimoires de l’ancienne bibliothèque, aussi. Ils s’arrêtèrent, paralysés, ne sachant que faire. Le hurlement se fit encore entendre, plus proche semblait-il. Ils firent quelques pas supplémentaires, dans cette nuit poisseuse.


Ombre parmi les ombres, ils virent la bâtisse devant eux. Une œuvre de ténèbres. Tout était noir, des murs aux toitures, des portes aux fenêtres. Irrésistiblement, elle invitait à entrer, à pénétrer dans son mystère, afin d’y être dévoré, découpé, avalé, digéré. Son austérité chthonienne s’insinuait par le regard et serpentait dans les veines jusqu’aux entrailles. La vision écœurante d’une mare de bouillie humaine égrugée s’incrustait dans l’esprit, fut-il cartésien. La bête vociféra de nouveau, et tout l’univers fut secoué de tremblement. Alors Arthur vit. Saisissant Jocelyne par le bras, ils n’avaient qu’une chose à faire : fuir. Ils coururent à perdre haleine, au hasard, effrayés, apeurés, paniqués. Jocelyne se laissa guider sans un mot, incapable de protester, même lorsque Arthur la jeta littéralement de l’autre côté d’un fossé.


Il faisait jour de nouveau !


Il ne l’avait pas remarqué. Cette nuit malfaisante, surnaturelle, bestiale avait fait place au soleil des premiers jours d’automne. Collée contre lui, Jocelyne soufflait à perdre haleine. Il sentait son cœur battre la chamade.


— A… Arthur ? Vous avez vu ? Vous avez entendu ? Quelle était cette horreur ?


Arthur ne répondit pas tout de suite.


— Oui, j’ai entendu ! Je ne sais pas ce qui hante cette tanière. Et vous ne voulez pas savoir ! Comme nous tous, je crois.

— En effet ! Partons !


Ils s’éloignèrent. Arthur, pourtant, ne pouvait empêcher une image de venir l’obséder. Il avait vu s’extirper de cette maison, maléfique ô combien, un bras annelé, purulent et tentaculaire, muni, à son extrémité, d’une pince aux multiples lames ongulées. Il ne put que laisser la terreur l’habiter, encore un instant.


— Arthur ! Je chercherai un autre emplacement pour le traitement des eaux. C’est bien juré !


Tapi dans l’ombre de sa prison, Yog-Sothoth aux milles yeux, l’un en tout et tout en un, ramena ses extensions sous lui. La salive, sirop épais de poison visqueux, coulait de ses becs multiples. Yog-Sothoth avait encore faim. Il aurait pu l’assouvir dès ce jour. Peu importait. Le messager avait parlé. L’heure approchait rapidement. Très bientôt, les Grands Anciens reviendraient. Ils reprendraient leur place et domineraient ce monde. Yog-Sothoth leur ouvrirait les portes et pourrait enfin assouvir sa propre soif de chair et de sang, laissant à ses frères le loisir de déferler sur cette planète, enfin mûre pour la renaissance de ses anciens maîtres.


 
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   Anonyme   
15/11/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↓
J'ai trouvé la montée de l'horreur assez bien menée, et j'ai apprécié le contraste cocasse entre l'ampleur de la menace (les Grands Anciens, la mythologie lovecraftienne) et les préoccupations terre-à-terre des visiteurs. Bon, finalement on n'installera pas la station d'épuration intercommunale dans la piscine de Yog-Sothoth ; pourtant il pourrait trouver ça sympa, un peu d'animation !

Je ne sais pas si votre but était d'écrire une "vraie" nouvelle située dans l'univers du Maître de Providence ou quelque chose de gentiment parodique, dans le premier cas je me dis que vous arrivez un peu court, j'ai du mal à prendre au sérieux cette histoire aux enjeux tout de même très villageois. J'imagine difficilement une menace dramatique sur l'humanité alors que le monstre à l'affût n'est même pas fichu de glouper deux malheureux égarés presque à sa porte !

Le style m'a paru par moments un peu lourd, j'ai relevé
Arthur ralentit sévèrement, car la visibilité diminuait sensiblement,
Les deux gros adverbes en "ment" proches l'un de l'autre, ça pèse à mon avis.

   Donaldo75   
25/11/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Je trouve cette nouvelle réussie alors que je ne suis pas un spécialiste de Lovecraft ou de la littérature de ce genre; à mon goût, le suspense est bien mené, le découpage tient la route et l'atmosphère colle bien à l'histoire. Les dialogues sont également justes. En fait, c'est un peu comme les films français où Catherine Frot incarne Prudence Beresford dans une forme d'hommage aux romans d'Agatha Christie; le ton est là, l'ambiance aussi, à la manière de mais sans se prendre la tête à recopier exactement le style et la profondeur de ce qui l'a inspiré. Et c'est exactement ce que j'attends de ce type de nouvelle qui trouve ses sources dans des auteurs emblématiques et qui en interprètent l'univers littéraire.

   Lariviere   
25/11/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour

Un texte qui s'appuie en grande partie sur les mécanismes classiques des films et des récits du genre (narration d'une légende inquiétante, apparition du brouillard et de la nuit soudaine), dommage que le climax de l'apparition visuelle du "monstre" soit aussi la fin du récit... je m'attendais à une bataille entre les forces du mal et nos héros municipaux (dont les personnages sont bien campés)... Pour moi la fin arrive trop vite, il manque une partie à ce texte... néanmoins pour l'écriture et pour la "maitrise" du suspens très classique j'ai trouvé convainquante cette nouvelle

   Corto   
11/12/2021
 a aimé ce texte 
Un peu
Autant le dire "je n'ai pas marché" dans cette intrigue, comme "je ne marche" quasiment jamais dans ce style de récit. Ne vous inquiétez pas ce doit être génétique, déjà autrefois je n'avais pas "marché" devant le film Alien, que tout mon entourage applaudissait...
Ici j'ai bien aimé la séance du Conseil Municipal et le courage de Jocelyne qui veut comprendre par elle-même.
Mais l'expédition qui suit me parait un peu enfantine, où les événements censés créer inquiétude et angoisse ne sont pas plus originaux que le loup dans la forêt servant aux multiples contes de cette nature. Il y a même "le petit chaperon rouge"...
Bref, à notre Yog-Sothoth si maléfique et avant-garde d'une invasion devant "déferler sur cette planète, enfin mûre pour la renaissance de ses anciens maîtres", je n'ai qu'une chose à dire: "Même pas peur".

Peut-être aurait-il fallu placer quelques étapes pour faire monter la tension de façon crédible ? Le brouillard et les cris ne m'ont pas suffi.

Je suis ici mauvais public...
Au plaisir dans un autre registre.

   Shepard   
11/12/2021
 a aimé ce texte 
Un peu
Lovecraft et ses émules.
Je pense que c'est un récit définitivement trop court, avec une histoire trop éludée, comme si l'auteur avait juste eu envie de nous parler de cet univers sans trop s'y attarder. Mais on connait déjà Lovecraft, alors je pense qu'il ne faudrait pas hésiter à aller plus loin. Le Manoir ancien et terrible est présenté, puis finalement, on ne dépasse pas les jardins. C'est à mon avis très anti-climatique. La mise en place est là, puis on passe vite à la fin. Le Mal aurait pu être Yog-Sothoth ou n'importe quoi d'autre, au final, quelle importance ? Personne n'y est confronté. Donc ma principale critique de l'histoire touche à sa construction générale.

Niveau forme, je n'ai pas non plus était transporté, malheureusement. Un passage en particulier pour illustrer :

"C’est à ce moment-là qu’ils entendirent. Distinctement. Jocelyne ne put retenir un nouveau cri, étouffant celui, plus discret, d’Arthur. Un grondement/grognement épouvantable, celui d’une bête à même à tout instant de vous sauter dessus et de déchirer les chairs. L’image de ce – ou de cette – pauvre diable, haché, tranché, broyé, au Moyen Âge, lui revint à l’esprit. Il frissonna. Jocelyne, qui, elle, n’avait jamais compulsé les grimoires de l’ancienne bibliothèque, aussi. Ils s’arrêtèrent, paralysés, ne sachant que faire. Le hurlement se fit encore entendre, plus proche semblait-il. Ils firent quelques pas supplémentaires, dans cette nuit poisseuse."

Je ne comprends pas ce Distinctement perdu entre deux points et ce double adverbe séparé par un /. Ensuite, une bête "à même à tout instant" me repousse. Le procédé d'enfiler des synonymes (haché/tranché/broyé) répété deux fois par la suite ne m'emballe pas non plus, avec plus de parcimonie pourquoi pas. Dans l'ensemble il y a des choses que je couperais pour des raisons de clarté au long du texte.

Une remarque scénario aussi, peut-être moins importante, mais tellement cliché de l'horreur. Arthur, en voiture, ne sait pas où il va, il admet - dans sa tête - être totalement perdu car il aurait raté un carrefour, mais sa logique est de sortir pour trainer à pied au milieu de nulle part (dans un endroit qui lui fait peur) ?? C'est quand même très forcé. Je pense que ces types de raccourcis sont évitables.

En conclusion, je crois que ce texte mérite un bien plus grand développement.

   hersen   
11/12/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Entre le pragmatisme d'une décision municipale et l'horrible bête tapie qui attend son heure, j'ai vraiment bien aimé ce récit.
La montée en terreur est assez bonne, et la bête qui ouvre le texte, puis le referme est un excellent moyen de sous-entendre l'idée d'une humanité en constant danger que cette bête se réveille, parvienne à en choper quelques uns histoire de se nourrir, de nourrir le "grand retour".

Sacré Yog Sothoth qui veut faire revenir "les grands Anciens" !

Cherbi, ça me rappellerait presque"" l'actualité actuelle", si je me laissais aller !

Merci pour la lecture !

   Malitorne   
11/12/2021
 a aimé ce texte 
Un peu
Décidément vous affectionnez les manoirs habités d’entités maléfiques du fond des âges, il me semble qu’on retrouvait les mêmes ingrédients dans « Le jésuite ». À croire que vous écrivez une série sur ce thème, pourquoi pas.
En ce qui me concerne, j’ai eu du mal à rentrer dans le texte, la faute à un réalisme défaillant. C’est pour moi très important qu’une assise solide serve le fantastique ou l’ horreur qui s’ensuit. Par exemple : « il y avait un gouffre qui doit d’ailleurs toujours être là, quelque part sous le bâtiment ». Qui aurait pu construire une bâtisse sur un trou ?
Plus loin :« Savez-vous que l’on ne trouve aucun propriétaire de ce domaine ? À aucune époque ? ». C’est possible ça qu’un cadastre ne donne pas d’ informations ? Ou bien vous sous-entendez que ce sont les puissances obscures qui ont édifié et habité ce manoir, de tout temps. Un peu dur à avaler…
Autre chose, cette maire qui en plein conseil municipal décide d’aller se rendre compte de l’emplacement de la future station d’épuration. Franchement, elle ne pouvait pas y penser avant ? Je ne voterai jamais pour une élue aussi imprévoyante...
Ce sont des petits détails, bien sûr, mais qui ne me mettent pas dans de bonnes dispositions pour investir le récit. Ajouté à ceci des maladresses de style et une narration parfois confuse: « pauvre diable, haché, tranché, broyé » (...) « au hasard, effrayés, apeurés, paniqués ».
J’apprécie vos commentaires et je ne voudrais pas vous froisser Cherbiacuespe, mais mon honnêteté intellectuelle m’empêche la complaisance. Je trouve que vous avez rédigé des textes bien meilleurs que celui-ci, dont ce « Trou dans la chaussette » qui m’avait touché. Peut-être êtes vous plus à l’aise pour retranscrire les petites choses du quotidien que le fantastique pur et dur ?

   Robot   
12/12/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Je me suis laissé prendre à l'atmosphère lugubre de cette nouvelle. Je ne dirai pas que ça m'a donné des cauchemars*, mais j'ai été passionné par l'intrigue et le développement graduel du récit vers une montée de l'angoisse des personnages.
Une écriture précise et de de valeur pour un récit bien conduit.
* C'est vrai que le filon de l'horreur a été tellement exploité qu'il est bien difficile de dépasser les images réalistes des films du genre.

   Anonyme   
16/12/2021
Sauf très rare exception, je ne suis pas un bon client de ce genre de récits, peut-être parce qu’il est souvent question d’un prétexte quelconque et guère convaincant pour qu’un type, qui n’a aucune raison d’y aller et en revanche toutes les raisons de ne pas y aller, va tout de même se retrouver dans une situation qu’il ne souhaite pas, qu’il s’agisse d’une rue déserte à minuit, d’une cave ou d’un grenier obscur, ou bien encore d’un endroit brumeux où il se rend en voiture alors qu’il n’y voit pas plus loin que ses pieds, et qu’il s’agit souvent de découvrir en ne la voyant qu’à moitié la raison de sa crainte, une raison plus ou moins ésotérique dont il faudra bien se satisfaire.

Je pense que ce genre est de loin le plus compliqué, parce qu'il fait souvent rire alors qu'il devrait faire peur, et que l’échec y est la norme. Vous avez ici rassemblé tous les clichés du genre et ce scénario n’est pas plus mauvais que bien d’autres qui ont attiré de nombreux spectateurs en salles de cinéma. Il n’y aurait donc pas à en rougir.

La forme, sans être vraiment mauvaise, est parfois curieuse.

Un seul exemple :

« Dans le vacarme des altercations, la voix, pourtant toujours empreinte de fermeté dans le salon du conseil, de Jocelyne aurait pu passer inaperçue. »

Pourquoi ne pas écrire « Dans le vacarme des altercations, la voix de Jocelyne, pourtant toujours empreinte de fermeté dans le salon du conseil, aurait pu passer inaperçue. » ?

Recourir à des syntaxes originales peut être parfois très chatoyant. Ici, c’est juste curieux.

   Anonyme   
17/12/2021
Hello Cherbi,

Heureux possesseur de textes écrits par des Lovecraftiens, j'y ai jeté un petit coup d'oeil avant de venir te commenter. Et du coup, je suis au regret de le dire, faire du HPL-like ne se résume pas à emprunter le nom d'un Grand Ancien. Comme le souligne Robert Bloch dans la préface de L'ombre du maître, pas question de se complaire dans ce qu'il appelle 'l'adjectivité' : ce qui faisait la force de Lovecraft, et qui fait également la force de ses émules, c'est que ces textes jouent sur une "suspension momentanée de l'incrédulité" du lecteur.

Et, comme d'autres commentateurs l'ont fait remarquer, ton histoire présente des 'maladresses' de vraisemblance...

On remet ça sur le tapis avec un prochain texte ?

   cherbiacuespe   
18/12/2021


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