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Réalisme/Historique
clotilde : Adieu, vieille langue
 Publié le 24/12/10  -  9 commentaires  -  4696 caractères  -  120 lectures    Autres textes du même auteur

Les parents de Clotilde quittent la campagne dans les années cinquante pour s'installer à la ville. La fillette parle son patois...


Adieu, vieille langue


Clotilde frappe à la porte vitrée qui s’ouvre immédiatement. La grande Arlette la fait entrer.

La fillette prend aussitôt place à la table dans la cuisine si étroite que pas plus de trois personnes ne tiendraient en sa largeur, et madame Thévenet s’assied en face d’elle avec le jeu de dames qui attendait son heure au-dessus du buffet de cuisine : cette bonne dame au visage osseux mais très avenant joue avec elle tous les soirs tandis que la soupe cuit doucement sur la cuisinière.

La mère d’Arlette gagne toujours malgré la torture infligée par Clotilde à ses méninges. L’enfant tempête contre sa malchance et son impuissance devant une personne si douée qui ne fait pas le moindre cadeau à sa petite partenaire. Bon, pour une fois qu’on la prend au sérieux, elle ne va pas se plaindre !

Elles font ainsi quelques parties, l’air très absorbé, jusqu’à ce que Guillemette, la benjamine de madame Thévenet qui a trois filles, ait fini ses devoirs sur la table de la salle à manger à côté. Après, les deux gamines joueront à quelque autre jeu de société.


Dès qu’elle entend Guillemette refermer son sac d’école, Clotilde arrête le jeu et la rejoint.

C’est si éclatant de propreté dans la salle à manger qu’elle en est chaque fois émerveillée. Les meubles sont très beaux, ce qui n’est pas étonnant puisque monsieur Thévenet est menuisier.

Au-dessus de la cheminée à tablette de marbre, un chien de faïence se reflète dans le grand miroir encadré de fleurs d’or. Peut-on imaginer chose plus splendide ? Pourtant, chaque fois que Clotilde voit ce chien, un sentiment de honte la submerge.



Elle venait d’arriver à la ville avec ses parents qui, très pris par l’épicerie et le bistrot, avaient demandé à madame Thévenet de s’occuper de leur gamine en soirée.

Quand Clotilde a aperçu le chien de faïence pour la première fois, elle s’est exclamée :


- Mais qui qu’ol’est d'quo chen ?


Des mots catapultés comme des crachats avec un accent interminablement traînant et chantant sur le premier et le dernier mot.

La voisine et ses trois filles sont parties d’un grand éclat de rire, elles riaient, riaient à s’en tenir les côtes, tout en caressant les cheveux de l’enfant qui les regardait à tour de rôle, rouge comme une pivoine.

La petite fille de deux ans et demi a répété, d’un ton hésitant :


- Mais qui qu’ol’est...


Les derniers mots se sont étranglés dans sa gorge devant un nouveau déchaînement d’hilarité générale.


Lentement, dans sa tête, une vérité se faisait jour : ici, en ville, les mots qu’elle utilisait étaient ridicules. Elle prenait conscience du caractère mal dégrossi de son langage et ressentait une blessure cuisante, comme si on s’était moqué devant elle de ses parents et de sa parenté tout entière.



Depuis l’épisode du chien de faïence, Clotilde s’efforce non sans mal de parler comme les gens du quartier, ou plutôt comme sœur Jean qui sait tourner de bien jolies phrases avec des intonations douces comme du miel.

Elle écoute beaucoup les mots autour d’elle, elle les jauge et soupèse leur impact, elle cherche avidement leur sens précis et se montre très attentive à leur musique. Elle a le parler lent et peu fluide, toujours en quête de l’expression la plus juste et la plus belle. Sa nouvelle langue ne lui sera jamais tout à fait naturelle.


Monsieur Poitevin, lui, continue de parler son idiome en l’édulcorant à peine, mais il a naturellement la voix moins rude que la plupart des paysans.

Pour faire enrager sa femme, honteuse de leur extraction rustique, il lui arrive, tout en lorgnant vers sa fille d’un air complice, de défendre ses racines.


- Mon patouais, ol’est du vieux français, ol’est une vraie langue…Y a point de quouai en avouair honte !


En fin de compte, Clotilde ne trouve pas le patois de ses parents plus vilain que le français grossier des ouvriers du quartier : c’est éructé avec bien plus de vigueur, et les sonorités en sont encore plus rugueuses, bien raclées au fond de la gorge, largement articulées et comme venues du fond des entrailles et de la nuit des temps. Et quelle richesse d’expression ! Les vieux mots résonnent aux oreilles de la petite fille avec beaucoup de poids, de justesse, de saveur…Chacun d’entre eux porte.


Madame Poitevin corrige souvent son mari en arborant son air le plus ulcéré :


- Mon pauv’ ami, tu m’fais honte ! T’es à la ville maint’nant !


Sa gamine la reprend en détachant chaque syllabe :


- Mon pauvre ami, tu me fais honte, tu es à la ville maintenant…

- Oui, mon pauvre ami, tu me fais honte, tu es...


Pour bien étudier sa nouvelle langue, Clotilde a depuis longtemps décidé qu’elle serait institutrice comme sœur Jean.


 
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   philippe   
12/12/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
heu.... oui? et?
en quoi est ce soit du réalisme, soit historique?
Je ne comprend pas tout là

pour le reste, c'est interressant, mais très court, pas de mise en situation: le temps qu'on comprenne où on va, c'est déjà fini

   jaimme   
12/12/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Réalisme parce que vécu?
Il me semble que deux ans et demi c'est bien jeune pour avoir conscience de ce genre de chose. Le départ d'un changement inconscient, d'accord. Elle a quel âge maintenant la petite Clothilde lorsqu'elle joue aux dames?
Trop court. Elle devient institutrice?
Des tournures à revoir comme: "dans la cuisine si étroite que pas plus de trois personnes ne tiendraient en sa largeur". Trop lourd.
Sinon le sujet est intéressant, j'ai toujours pensé à ces pauvres gamins dont le langage, celui de leur parent, est remis en cause. C'est difficile, très jeune, d'avoir honte de ses parents.
L'essentiel est est, mais la soupe est un peu claire, dommage.
Bonne continuation.

   Perle-Hingaud   
18/12/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Une belle nouvelle, dans une langue classique, sur un thème passionnant et toujours d’actualité. En effet, la langue familiale peut être du patois, mais aussi une langue étrangère, et les difficultés, la soif d’intégration, la honte de ses parents, de sa culture, (honte qui peut évoluer vers une fierté retrouvée, une revendication de ses origines) sont des thèmes transposables dans notre monde moderne.
Une atmosphère, une ambiance bien rendue, les détails qui font mouche : le chien en faïence ! Tout ceci, j’ai aimé. Les bémols : deux ans et demi : cela me parait trop tôt pour que l’enfant puisse se rendre compte de la situation. Mais surtout, ce texte est extrait de chroniques, je pense, et cela se sent : même si on entre sans problème dans l’histoire, parce que les personnages font partie de notre inconscient collectif, la fin est trop abrupte, presque maladroite dans ce format : quelques lignes de plus pour une chute plus en harmonie avec le rythme du texte auraient permis d’éviter cette impression de fin expédiée, à mon avis.
Merci pour cette lecture.

   Pattie   
21/12/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Le texte, sa forme, son style, son sujet : tout ça, c'est un régal. Dommage que la fin aplatisse tout ça. On dirait le début de quelque chose qu'on nous arrache brusquement des mains. Je resterais bien encore dans ce bain de mots, de cultures, dans cette ambiance bien posée.

   widjet   
24/12/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
On dirait le début d’un roman. L’écriture est plutôt bonne (j’ai noté la répétition « cuit » et « cuisinière » au début et quelques constructions parfois moyennes, mais sinon c’est dans l’ensemble assez soigné. Pour un texte qui fait honneur à la langue, c’est la moindre des choses).

Pas grand-chose à ajouter car le texte est vraiment trop court et les personnages pas encore clairement « assis » pour qu’on puisse s’y intéresser pleinement.

W

   clotilde   
24/12/2010
Commentaire modéré

   alvinabec   
6/1/2011
Il y a un réel travail d'écriture même si qqes maladresses traînent de ci de là (la benjamine des 3 filles...), l'imparfait employé au passage de la prise de csce étire pt-être trop l'idée. La chute est un peu courte. Plus de phrases en patois agrémenteraient le côté vivant du texte qui bénéficierait d'une page de plus au grand plaisir du lecteur. A vous lire...

   marogne   
17/1/2011
 a aimé ce texte 
Pas
Bon je n'ai pas vraiment aimé. D'abord la première phrase, interminable, qu'il m'a fallu relire trois fois. Et puis la mère d'Arlette dont je n'ai pas bien compris l'arrivée.

Et ensuite les digressions sur le patois....

Sans doute, si on remplaçait le patois par une "langue étrangère", alors peut être, mais ici non!


Et ces personnages qui arrivent sans que l'on prenne le temps de les "placer", qui interagissent sans coeur, sans réalité.

Bon, une autre fois sans doute, il est tard, suis fatigué.

   emi   
30/1/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Ce texte m'a accroché; une des raisons est sans doute que dans mon enfance j'ai été bilingue français- patois et que j'ai dû me débarrasser de l'influence de ce dernier. Une autre est la fluidité de l'écriture.
Il y a là un bon sujet mais il est traité trop brièvement. J'aurais aimé suivre plus longtemps la conquête du français correct. J'aurais aimé trouver ces vieux mots qui ont pour la fillette plus de poids, de saveur.
Est-ce un texte autobographique ?

   Anonyme   
24/2/2011
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Je m'excuse, c'est un peu long. Je tiens à préciser que mon but n'est aucunement de casser le texte ni d'être méchante. Mon commentaire n'engage que moi et uniquement moi. Il s'agit d'un avis personnel. D'autres ont et auront des avis différents.

Ma foi, ce texte est fort bref et vite lu. C'est assez fluide à lire malgré quelques tournures qui accrochent l'oeil.
sinon...
A bien y réfléchir, il s'agit d'un extrait d'un texte plus long et non d'une nouvelle à part entière. Il manque quelque chose avant pour placer le décors, les personnages... et quelque chose après car là, à la fin, j'ai un "oui, et alors?" qui me vient à l'esprit.
On commence dans une cuisine, on passe au salon puis on part sur une digression sur le patois et puis voilà le texte s'arrête là. Pourquoi le début avec cette partie de jeu de dame si le thème est de parler de la volonté de Clotilde de changer de langage car elle a honte du patois de son père?...
Sinon, juste une question, le patois, il est d'où? En effet le patois est un mélange de français et de langue régionale, donc il est lié à une région. Un alsacien, un breton, un ch'ti, un maraîchin ou un provençal n'ont pas le même patois.
Le père semble voir conserver ses racines, mais de quelles racines s'agit-il? (soit dit en passant, il n'y a pas que les paysans qui parlent le patois et le patois n'est pas du vieux français...)
Ensuite, quelques questions pêle-mêle:
- Quel âge a Clotilde au début du texte?
- où se passe l'histoire?
- A quelle époque?

Pour finir, quelques remarques au fil du texte:

"La fillette prend aussitôt place"
-Quelle fillette? Clotilde ou la grande Arlette?

« et madame Thévenet s’assied en face d’elle avec le jeu de dames qui attendait son heure au-dessus du buffet de cuisine : cette bonne dame au visage osseux mais très avenant joue avec elle tous les soirs tandis que la soupe cuit doucement sur la cuisinière. »
- Intérêt des ":" ? Surtout que quand ils arrivent pour expliquer qui est cette brave dame Thévenet, mon esprit en était au buffet de la cuisine, ce qui fait que ce dernier c'est soudain transformé en humaine au visage osseux... (mon esprit a pas mal d'imagination et n'est pas à ça prêt, et puis j'ai revu la Belle et la bête" de Disney il n'y a pas très longtemps, ça laisse des traces, et qu'un meuble puisse avoir un visage ne m'a pas plus choqué que ça du coup.)
-Le "buffet de la cuisine", vu que la scène se déroule dans la-dite cuisine c'est logique qu'il fusse de la cuisine ce buffet, non?
- dans "joue avec elle", qui est ce "elle"?
- d'ailleurs le sujet de "joue" est, vu la construction de la phrase, le visage osseux mais avenant. (bon, là, j'ai beau avoir de l'imagination, je tique un peu alors j'ai automatiquement cherché le sujet logique : Mme Thénevet.)

"Après, les deux gamines joueront à quelque autre jeu de société."
- Qui?

"Clotilde arrête le jeu et la rejoint"
- quel jeu? ... ha vi, les dames avec Mme Thévenet... Mais au fait, Clotilde, elle n'a pas de devoir à faire, elle?

« la benjamine de madame Thévenet qui a trois filles, »
- cette tournure m'a accroché l'oeil.

« Elle venait d’arriver à la ville avec ses parents qui, très pris par l’épicerie et le bistrot, avaient demandé à madame Thévenet de s’occuper de leur gamine en soirée.
Quand Clotilde a aperçu le chien de faïence pour la première fois, elle s’est exclamée : »
- changement de temps de la narration. On passe du présent/passé composé à l'imparfait puis retour au présent/passé composé.
- L'épicerie et le bistrot? "le"? L'article défini désigne habituellement quelque chose de connu, sauf qu'ici l'information tombe un peu du ciel vu qu'on ignorait tout de cette histoire d'épicerie/bistrot avant qu'ils soient mentionnés ici.

« La petite fille de deux ans et demi a répété »
- 2 ans et demi? Elle est capable de se souvenir de ce qui s'est passé à cet âge?

«une vérité se faisait jour »
- nouveau changement du temps de la narration.

« Elle prenait conscience du caractère mal dégrossi de son langage et ressentait une blessure cuisante, comme si on s’était moqué devant elle de ses parents et de sa parenté tout entière. »
- La scène est assez improbable avec une enfant de deux ans et demi. Les enfants de 2 ans et demi parlent peu et mal en général, ensuite ils sont encore puissamment autocentrés et ne sont pas encore entrés dans la sociabilisation, peu leur importe l'avis des autres, le leur leur suffit. Dans une telle situation, il va piquer sa crise ou pleurer... En fait la réaction est plus celle d'une enfant de 5 ans, qui est de plein pied dans la sociabilisation et le prise de conscience de sa différence avec une farouche volonté de faire partie du groupe.

"ou plutôt comme sœur Jean "
-C'est qui soeur Jean?

"Monsieur Poitevin"
- Qui? ... Il m'a fallu deux lignes pour comprendre qu'il s'agissait du père de Clotilde.

Voilà, j'espère ne pas avoir été trop blessante. Je répète, je n'exprime ici qu'un avis personnel et d'autres lecteurs auront des avis différents.

Anne


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