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Science-fiction
Hecko : Chronique terrestre
 Publié le 24/09/12  -  9 commentaires  -  6718 caractères  -  84 lectures    Autres textes du même auteur

Situation initiale,
Perturbation,
Péripéties,
Situation finale…
Et que le résumé aille au diable.


Chronique terrestre


Il fut une époque reculée où la Terre, enfantine et insouciante, regardait couler les jours avec paresse. Vêtue d'un lourd pelage arboricole qui défiait le froid cosmique de l'univers, elle paressait, privilégiée, au milieu de ses sœurs nues et fiévreuses. Certaines grelottaient de froid, d'autres bouillonnaient et dégoulinaient d'une sueur magmatique poisseuse, un mal étrange aux symptômes variés dont seule la Terre avait été épargnée. Pour elle, l'existence était linéaire et tranquille, semblable aux innombrables filets d'eau vive qui rafraîchissaient son écorce hâlée par le bronzage solaire.

Dans son monde balbutiant, tout n'était que chuchotis précautionneux. Les végétaux bruissaient dans un silence quasi absolu : les arbres courtisaient le ciel, usant exclusivement de discrets sifflements venteux afin d'exprimer l'amour parcourant leur sève ; quant aux fougères, plus taquines, elles chatouillaient leur nourrice avec gourmandise, et celle-ci, complice, se craquelait d'un plaisir retenu.

Ainsi toute cette société semblait vouer au silence un étrange et inconditionnel culte, qu'on eût pu attribuer tout simplement à un penchant marqué pour le calme. Toutefois, la cause en était tout autre.


Sous l'aisselle droite de la Terre poussait une forêt circulaire différente de toutes les autres, un petit bois plus exactement, de taille modeste tant par sa superficie que par la taille de ses représentants. Victimes d'un étrange phénomène, les arbres contenus dans ce périmètre avaient progressivement rétréci au fil des ans et faisaient aujourd'hui figure de bonsaïs en comparaison avec le reste de la pépinière terrestre.

Toutefois, le plus étonnant restait la multiplicité croissante des espèces qui s'y étaient développées. Alors que partout ailleurs, le modèle de l'arbre unique était de mise, ici les branches huileuses et tombantes côtoyaient des baguettes sèches et dressées portant des feuilles, des fleurs et des fruits aux couleurs, aux formes et aux senteurs variées. Et que dire de la formidable diversité qui tapissait le sol ! Les fougères imposantes, au règne jusqu'ici sans partage, avaient laissé place à des centaines de variétés d'herbes, de pistils, de pétales et de champignons en tout genre. On n'avait jamais vu ça.

La Terre s'était tout de suite alarmée à la vue de son aisselle gangrenée et avait décrété sa mise en quarantaine. Depuis, les alentours avaient été épilés afin d'éviter toute contagion et le petit bois souffrant du « mal de la multitude », comme on l'avait baptisé, évoluait désormais dans l'autarcie la plus totale, sous les regards inquiets des forêts uniformes.

Face à cette situation de crise sans précédent, de nombreuses délégations avaient été envoyées dans la zone sinistrée afin d'identifier l'origine de la maladie. Malheureusement, jamais personne n'en revenait et la peur s'était installée durablement, toujours plus insidieuse, dans les troncs et les tiges. Un jour pourtant, on avait observé, non sans surprise, une fougère traverser le périmètre de sécurité. Cette dernière, épuisée, des accents de folie dans les feuilles, avait alors fait un récit incroyable. Selon elle, l'aisselle de la Terre était hantée par une entité nommée Darwin, un esprit singulier à l'origine du « mal de la multitude » et répondant au titre d'« Architecte de l'évolution ». Celui-ci, avait-elle affirmé, était plongé dans un profond sommeil, ce qui réduisait considérablement la portée de son influence néfaste. Seul le petit bois était assez proche pour en subir les effets. La fougère s'était ensuite mise à émettre des bruissements incohérents, évoquant une voix enjôleuse lui parlant d'un progrès inévitable et l'abreuvant de visions mystiques et visionnaires. La réminiscence de ces souvenirs l'avait alors plongée dans un mutisme définitif et l'instant d'après, elle s'était mise à jaunir et avait fané sur place.

Se promettant que cette mort héroïque ne resterait pas vaine, les forêts uniformes et la Terre avaient, d'un commun accord, pris les mesures qui s'imposaient : si l'esprit était endormi, alors il suffisait pour continuer à vivre paisiblement de ne pas l'éveiller. Il avait donc été décrété que le bruit serait réduit au strict minimum.

C'est ainsi, que, depuis ce jour, tous respectaient avec religiosité ce silence caractéristique et salvateur auquel on s'était accommodé sans difficulté. Depuis plusieurs millions d'années, la vie était à nouveau paisible et agréable, on en oubliait presque le petit bois, laissé en marge, sous l'aisselle droite de la Terre.


Un matin, pourtant, il se rappela au reste du monde sous la forme d'une émission sonore, inhabituelle par sa nature, mais également par sa forme. Oh, ce n'était pas grand-chose, juste un étrange petit couinement, un son si bref, que beaucoup le crurent halluciné. C'est du moins ce que chacun préférait penser. Mais midi approchant, le bruit esseulé se répéta et devint multiple. Les forêts uniformes et la Terre durent bien vite se rendre à l'évidence : il se passait quelque chose dans la chambre boisée où Darwin reposait. Partout, la tension était palpable. Les arbres tremblaient comme des feuilles, tandis que les fougères sentaient leur sève se glacer. Des cris en tout genre naissaient et s'intensifiaient. Bientôt, ils se muèrent en grognements cacophoniques.

Éclairée par le déclin du jour, l'attente se faisait de plus en plus insupportable : tous craignaient que ce tintamarre ne finisse par réveiller l'esprit.

À présent, le petit bois grondait. Entre les troncs dissemblables, on distinguait des formes inquiétantes, mouvantes et furtives, dont les silhouettes sombres entachaient la lumière déclinante d'une géométrie apocalyptique.

Soudain, alors que le soleil achevait son tour du propriétaire quotidien, le brouhaha cessa et laissa place à un lourd silence. Quelques minutes s'écoulèrent, telle une charnière obligée entre deux époques, puis, le sol se mit à trembler. Des pattes griffues ou palmées surmontées de corps velus et emplumés sortirent du petit bois en grouillant et s'engagèrent dans la zone de quarantaine.

Pendant son sommeil, Darwin n'avait pas chômé : il avait rêvé l'animal et l'animal était né, s'assurant à la fois un réveil et une armée. Maintenant que son repos avait pris fin, toute barrière était illusoire. La vague bestiale serait le vecteur de la maladie et répandrait les desseins grandioses de l'architecte aux quatre coins de la Terre. L'uniformité serait massacrée pendant que la multitude, fille de l'évolution, régnerait en maître.

Cachés sous les fourrures et les écailles, les hommes, quant à eux, attendaient l'heure du déferlement, avec l'impatience de la cellule eucaryote rêvant de conquérir le monde.


 
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   placebo   
5/9/2012
 a aimé ce texte 
Un peu
Une genèse intéressante.

Sur la forme, je pense que "le l'univers" est un "de" :) et j'aurais mis la négation à "on avait jamais vu ça". Un poil trop virgulé à mon goût mais ça relève du sentiment personnel. Le texte est bien écrit mais dense et manque un peu de rythme : j'ai trouvé ma lecture plutôt longue pour ces 7000 caractères.

L'idée d'un monde entièrement végétal n'est pas mauvaise, celle de l'uniformité non plus, mais ça pêche un peu dans le raisonnement global je trouve :) la vie est apparue dans les mers en premier par exemple ; tout tient en place mais c'est bancal. Et ils sont passés où les insectes ? ^^

" Alors que partout ailleurs, le modèle de l'arbre unique était de mise, ici les branches huileuses et tombantes côtoyaient" j'ai l'impression que par "arbre unique", vous imaginez plutôt une sorte de stéréotype d'arbre de dessin d'enfant. La formulation me semblait simplement bizarre.

Pour revenir sur le fond, des idées. Il y a du fond scientifique, un peu, de l'absurde, un peu, de l'humour, un peu, mais le mélange ne me plait pas. Pas qu'il soit impossible, mais pas avec ce résultat.

Je pense qu'il y a possibilité de remanier un peu.
Bonne continuation,
placebo

   Anonyme   
10/9/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Darwin comme démiurge, tiens donc ! C'est amusant, parce que le texte tout entier, avec son ambiance spiritualiste, me paraît aller à l'encontre de la théorie matérialiste de Darwin... moi qui n'aime guère les discordances d'ordinaire, je dois dire que je trouve celle-ci plutôt mignonne, apportant une fraîcheur ironique à tout le texte. Très belle phrase de fin, à mon avis.
Ma lecture a été agréable, aussi, grâce au style qui m'a paru naturel, parcouru tout entier d'une pointe d'allégresse plaisante.

"Sous l'aisselle droite de la Terre poussait une forêt" : j'adore !

   AntoineJ   
13/9/2012
 a aimé ce texte 
Un peu
style trop lourd pour être poetique, trop complexe pour être agréable
images intessantes (aisselle / darwin / la terre est elle vivante ?) mais pas assez travailéles (arbres uniformes et silence / fougères voyageuses, je n'arrive pas y adhérer ...)
la chute est assez évidente et on espère autre chose de plus étonnant mais qui ne vient pas
cf. l'avant dernier paragraphe : on sent des idées, du fun, du potentiel mais cela ne tilt pas .. quelle armée ? quelle maladie ? multitude ne s'oppose pas à uniformité mais à unicité ...

Ceci étant, pas mal de passages agréables, des idées ...

   matcauth   
24/9/2012
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Hecko,


j'ai bien aimé l'idée de ce texte, même si la cosmologie du début n'apporte pas grand chose au texte, même si elle est là en guise d'introduction.

On parle de Darwin comme de ces hommes qui ont changé le regard qu'on portait sur le monde. De là à en faire un créateur... pourquoi pas, à condition d'y laisser un message, que cette allégorie ait une signification. Là je ne comprend pas, pourquoi ce concept, pourquoi les hommes attendent-ils le déferlement ?

Je pense qu'il y a un mélange de fantasy et de choses réalistes et je ne comprend pas où vous voulez en venir. De même, je ne comprend pas le mal de la multitude, ici. Ce concept en englobe des tas, il ouvre des tas de portes. Ici, il est juste mentionné, sans qu'on sache vraiment pourquoi.

en clair, ce texte ouvre des voies mais ne nous donne pas la carte pour savoir où elles nous mènent. C'est dommage.

Car pour le reste, et je retiendrai ça en premier, c'est bien écrit et des idées propres à la fantasy sont ici impeccablement évoquées, tandis que la scène est bien campée, donnant latitude à un terrain de jeu tout à fait intéressant. à suivre...

   brabant   
24/9/2012
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Hecko,


Beaucoup de poésie me suis-je extasié en entamant ce texte, jusqu'au moment de l'aisselle ! Qu'est-ce qu'une tumeur que l'on détecte alors qu'elle vient de naître, un cancer qui sommeille, que l'on isole en pensant le contrôler. Est-il possible de cohabiter avec le chancre sans que celui-ci ne veuille par un triste matin prendre toute la place en désorganisant tout, en déconstruisant l'équilibre, en cannibalisant et explosant le milieu où il prolifère.

Décidément cette aisselle était un trou du cul, le trou du cul du monde. Après la peinture des dinosaures Picasso était à naître pour placer une oreille et puis une griffe au creux d'une aisselle qu'allait faire exploser Pollock en gerbes d'hémoglobine.

Banzaï ! Guernica a explosé sur Hiroshima !

Et aujourd'hui où en est-on ?

Il fallait tuer Darwin.


Bientôt les Incas seront gavés de sang !

Je transmets cette chronique à Xipe Totec qui vient de sévir sur ARTE...

Et je m'inscris chez les Verts. Cécile ?

   Palimpseste   
24/9/2012
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
mouais...

Au premier paragraphe, je me suis dis "bon... on part dans un délire fantastico-SF. Accrochons les ceintures!" (j'ai un genre que je n'aime pas forcément beaucoup)... Puis au deuxième paragraphe, j'ai compris qu'on partait dans un texte plus ou moins cosmologique, avec personnification de la Terre... Pourquoi pas? L'idée m'a plu...

Patatras.... Le mot "aisselle" m'a coupé mes effets... la panne... le fiasco... Aucun Viagra de c La Pléïade ne peut rattraper ça...

Le mythe (sourire à Stony) qui se rattache aux aisselles, c'est le Klug, le gâteau de "Le Père Noël est une ordure". Et je n'arrive pas à le dépasser.

Sinon, certaines formules me semble un peu lourdingues comme le "vêtue d'un lourd pelage arboricole (...)" ou "la vague bestiale (...)".

Quelques petits soucis d'imappropriation comme l'énumération 'herbe, pistils, pétales et champignons" où la nature des éléments n'est pas uniforme.

Pour finir sur un point plus positif, une mention super-spéciale la chute et cette magnifique phrase: "(...) l'impatience de la cellule eucaryote rêvant de conquérir le monde."... Excellent !

   Ninjavert   
1/10/2012
 a aimé ce texte 
Pas
Je n'ai pas été convaincu...

On navigue entre la "fable parabolique" et le "pseudo scientifique", un mélange un peu bizarre qui n'a pas fonctionné me concernant.

Le fond, déjà, discutable. On a l'impression que beaucoup de choses se mélangent. L'évolution n'a pas eu besoin de Darwin pour exister... je trouve que la personnaliser sous cette forme est maladroit. J'aurai préféré que le concept en soit amené sans être nommé, au travers d'un procédé un peu plus subtil.

Même chose pour cette notion de multitude, qui s'oppose au reste du monde. Comme l'a dit Placebo, fi des océans, dont le rôle a pourtant été déterminant dans l'apparition de la vie...

Bref, j'ai eu du mal à saisir quel était le but de ce texte. Simple fable sympathique ? Vulgarisation scientifique romancée ? C'est trop approximatif pour avoir une réelle crédibilité scientifique, et pas assez fantastique pour m'avoir fait rêver.

Sur la forme, l'écriture est sympathique, mais pas mal de choses m'ont dérangé. Je n'ai pas non plus trouvé la métaphore de l'aisselle très heureuse. Ni la personnification de la Terre très utile. Eu du mal également avec les fougères mobiles, les végétaux qui parlent... bref. Pourtant j'aime bien ce procédé (les fourmis, par exemple, de Werber), mais là je n'ai pas accroché.
Tout le premier paragraphe m'a semblé un peu trop "lyrique". Ça s'atténue un peu par la suite, mais j'ai trouvé le début trop chargé (adjectifs, etc.)

L'apparition des hommes à la fin, m'a également parue inutile : à ce stade, on a compris où on va.

(Dernier détail, je n'ai pas trop pigé le rapport avec la science-fiction)

Désolé, l'idée est sympathique, l'écriture plutôt agréable, mais la sauce n'a pas prise.

Une prochaine fois peut-être ?

Merci en tout cas :)

   Zalbac   
18/1/2013
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Pour moi, il y a erreur de... classification ! Ce texte relève de la poésie en prose. A lire certains commentaires, B 612, l'astéroïde du Petit Prince aurait pu être critiqué pour "manque de réalisme" à ce compte.
Il faudrait peut-être revoir ce texte sous l'angle de la poésie et changer deux, trois mots pour arriver à "Très bien"
Bravo Hecko ! J'en redemande !

   Anonyme   
25/2/2013
 a aimé ce texte 
Bien
Jolie mise en scène d'un songe, perspective intéressante ignorant le formalisme scientifique.
Au diable le formalisme et les écarts de rhétorique.


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