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Sentimental/Romanesque
Robby-one : Un dernier hiver ? [concours]
 Publié le 26/01/22  -  12 commentaires  -  14012 caractères  -  75 lectures    Autres textes du même auteur

Janvier 1980, les fêtes sont passées, Paul traîne sa déprime dans la grande cité industrielle.
À 19 ans, il a déjà des années de galère derrière lui.
Cela va-t-il le mener vers l'abîme ?


Un dernier hiver ? [concours]


Ce texte est une participation au concours n°31 : Elle, lui, eux et... l'hiver !

(informations sur ce concours).



Qui dit que l’hiver…

c’est la joie dans les chaumières ?


Premiers jours de janvier 1980, le Nord-Est de la France est sous la neige, tout est blanc, pur, immaculé. Les villes, les campagnes, les forêts, les routes même ont disparu sous le grand manteau d’hermine.

Pourtant de grosses taches sombres sont restées.

Les grandes cités industrielles, les aciéries, les mines, s’accrochent à leur grisaille, comme si elles refusaient la blancheur de l’hiver.

Les hauts-fourneaux carburent à plein régime. Dans quelques années ils s’arrêteront les uns après les autres, les ouvriers iront pointer au chômage, ça ajoutera encore un peu plus de grisaille et de crasse au décor, un peu plus de désespoir.

Paul a 19 ans depuis six mois. Son anniversaire, il ne l’a pas fêté. Il a bien quelques copains au foyer de jeunes travailleurs, des paumés comme lui qu’il retrouve le soir après le boulot, avec qui il boit des bières, avec qui il joue aux cartes, il traîne son ennui.


Tandis que, grelottant dans son blouson fourré, il marche le long de l’immense palissade de l’usine, palissade en plaques de béton préfabriquées tellement piquées de poussières de métal que le béton en a rouillé, un graffiti l’interpelle : deux mots peints sur deux mètres de haut et cinq de long : NO FUTURE, l’œuvre éphémère d’un punk ou d’un rêveur probablement encore plus perdu que lui.

Il est resté longtemps, piétinant dans la gadoue sous le ciel gris, à méditer devant ces deux mots : NO FUTURE, pas de futur. S’il reste ici, s’il ne réagit pas, lui non plus n’aura pas de futur.

Car il est perdu Petit Paul. Il est dans ce bassin industriel depuis un an. C’était pour lui sa planche de salut. À 18 ans et demi, son unique chance avait été le centre sidérurgique.

Ça peut paraître idiot mais c’est comme ça.


Il est venu d’un petit village à 150 km de là, un joli petit coin au pied des montagnes avec des maisons aujourd’hui décorées, illuminées de guirlandes électriques et couvertes de neige, un village de maisons du Père Noël où les jeunes de son âge semblent s’épanouir dans leurs vies d’adolescents ou de jeunes adultes. Le chômage n’a pas encore fait son effet sur les familles.

Les jeunes de son village vivent, étudient, travaillent, s’aiment. Ils viennent pour la plupart de passer les fêtes en famille auprès du sapin dans la quiétude de leurs foyers avant de terminer l’année au grand bal du Nouvel An.


Pour Paul par contre, ça a été plus difficile. Au début des années 60, quand il est né, sa famille était aisée, plus aisée que la moyenne. Le sapin dans la salle à manger pliait sous les décorations scintillantes et les cadeaux.

Et puis en l’espace de quelques années, tout est parti en vrille. Son vieux s‘est mis à déprimer, à picoler, à ne plus rien faire que traîner ses grosses bottes de paysan dans les bistrots de la région, à se faire des relations avec les pires poivrots du coin, les pires abrutis.

Les fêtes de fin d’années sont devenues un calvaire pour Petit Paul, le moment où son vieux rentrait bourré après une journée plus avinée que les autres et qui dégénérait en engueulade entre parents.

Il aura fallu les Trente Glorieuses pour que sa famille se clochardise tandis que le monde progressait, alors dès qu’il a pu il est parti.


Petit Paul, c’était le surnom que lui donnaient les gens du village, enfin pas tous, ceux qui ne picolaient pas, les gens sérieux, normaux, qui s’inquiétaient pour ce gamin aux épaules trop étroites pour supporter le poids de l’alcoolisme paternel.

Mais Petit Paul, c’est un pléonasme, ce prénom avait été choisi par la grand-mère, rapport à saint Paul qui s’était choisi lui-même ce prénom (on se demande comment d’ailleurs) du latin paulus : petit, modeste car, pour saint Paul comme pour la grand-mère il fallait rester modeste, humble, conforme à la religion.

Pour le coup son avenir était tracé : paysan avec douze vaches, un vieux tracteur, une vieille baraque, des parents qui s'engueulent à longueur de journée et en prime un père qui picole. Question modestie et petitesse, c’était difficile de faire mieux alors il a décidé de quitter cette famille, ce village.


Il a trouvé du boulot dans la sidérurgie. Il a rejoint l’aristocratie ouvrière mais il sait bien que s’il reste ici il va y laisser sa santé, sa jeunesse, ses rêves, sa beauté aussi car Paul est ce que l’on peut appeler un beau gosse : brun aux grands yeux bruns, un visage fin, un regard reflétant l’intelligence, une grande sensibilité.

S’il reste dans cette usine, il va devenir petit à petit un ouvrier, un vrai, un prolo avec la casquette, le bleu de chauffe, le mégot au coin de la bouche, et plus tard, il aura une femme pas des plus belles, des gosses, un appartement de HLM.

Alors, d’un seul coup, le NO FUTURE de la palissade lui inspire un grand spleen. Il espérait autre chose, il avait des rêves plus grands. Mais comment y arriver quand on est seul dans un monde inhumain, dans les machineries du Metropolis de Fritz Lang ?


Le soir après le boulot, Il retrouve les autres jeunes au foyer, des paumés comme lui venus d’un peu partout s’échouer dans la région. Il y a quelques filles aussi, la plupart encore plus perdues, sauf quelques-unes, Nikki et Corinne, des erreurs de casting.


Nikki est sublime, grande aux cheveux blonds et aux yeux noisette, un maintien de reine. On la dirait scandinave, comme son prénom le laisse penser. Que fait-elle ici ? Il paraît que son mec l’a larguée. Le connard, comment a-t-il pu laisser une aussi belle fille dans un tel no man’s land.

Depuis six mois elle reste là dans cet endroit sinistre, cette région sinistre, grise, ce monde de ferraille et de ferrailleurs en bleus de chauffe. Qu’attend-elle ? Filer le grand amour avec un garde chiourme, un contremaître, un chefaillon. Elle n’a rien d’autre à espérer dans ce pays de crasse et de hauts-fourneaux.

Paul voudrait bien lui parler, l’aider, la prendre avec lui mais il n’est rien, il n’a rien, alors il voudrait lui dire de ne pas rester là, de rentrer chez elle, dans sa famille, retrouver ses amis, une vie normale mais ça non plus il ne peut pas, il est au bout du rouleau, il ne se sent plus capable d’aborder une belle fille.


Il vient de passer la journée à traîner sa solitude, sa déprime dans les rues de la vieille ville, celle qui était là avant la sidérurgie.

Ses pas ont suivi un sentier détrempé, longeant les vitrines décorées de guirlandes, de pères Noël peints, de bonhommes de neige et de paquets cadeaux.

Déjà des sapins sont échoués près des poubelles, parfois avec leurs boules et leurs guirlandes, parmi les cartons vides des jouets et cadeaux qui eux aussi risquent de bientôt finir dans les mêmes poubelles.

Petit Paul lui n’a pas eu de cadeaux, il n’en a pas non plus demandé.


Noël, pour lui, c'est plutôt une soirée à passer avec quelques copains, à boire des bières et jouer aux cartes dans un endroit tranquille avec quelques guirlandes, histoire d’enjoliver le décor. De toute façon, c’est toujours mieux que de passer la soirée à la ferme avec la famille.


Il est allé au cinéma, le film ne l’a pas accroché, il voyait les images sans chercher à comprendre, comme on regarde un aquarium ou un feu de bois. Son esprit était ailleurs, loin, très loin.

Après le film, son spleen l’a conduit au bord de l’eau, le long des quais enneigés, de béton délabré, défoncés depuis des années par les bateaux et les péniches de minerai et de houille, usés par la pluie et le froid.

Assis sur une grosse pierre échouée d’un bâtiment en ruine, il est resté longtemps à regarder la rivière aux bords gelés avec ses déchets qui descendent le courant pour rejoindre un avenir meilleur en bord de mer.


C’est là que l’idée a germé dans son esprit, elle lui est venue comme ça presque par hasard, toute petite au début comme une petite étoile dans sa conscience et puis elle a grandi de plus en plus, au rythme des morceaux de glace et des graviers lancés contre les vaisseaux de boîtes de bière et de coca qui descendaient le courant.

Vers la fin de l'après-midi, elle s’est imposée comme une évidence.


– Ce soir à minuit !


En paix avec lui-même à présent, Paul a passé le reste de la journée à se promener dans la ville triste, il se sentait maintenant comme spectateur. Détaché de la réalité, il profita de l’ambiance de Noël, de la féerie hivernale avant de terminer la soirée dans un restaurant. Ce n’était pas un grand restaurant, plutôt une brasserie mais il en apprécia le menu, entrée, plat, dessert avant de rentrer au foyer.


Minuit,

la nuit est belle, une nuée d’étoiles scintillent dans le ciel, elles semblent appeler.

La lune est au rendez-vous elle aussi, ronde et brillante. Elle regarde Paul de son regard bienveillant comme elle le faisait déjà lorsqu’il était enfant et qu’il jouait le soir dans la cour de la ferme familiale.

Pas un souffle de vent, tout est calme, le froid est sec, le garçon, emmitouflé dans son blouson fourré, se sent bien.

Assis sur le parapet de béton, il se laisse envahir par l’immensité sidérale, la magie de l’infiniment grand.

À ses pieds, tout semble dormir, enfin pas tout à fait, la région ne dort jamais complètement.

En bas, c’est la cité ouvrière, la grande cité-dortoir, au loin, le centre industriel, gigantesque, tentaculaire avec ses rues, ses voies ferrées, ses fonderies qui n’arrêtent jamais et que l’on entend ronronner tout doucement à cette heure de la nuit.

Il est minuit, assis sur le toit-terrasse de l’une des tours de dix étages du foyer de jeunes travailleurs, tout au bord, les pieds posés sur le vide, Petit Paul regarde la cité endormie.

Il est là-haut depuis presque une heure.

Le froid ne semble pas l’atteindre, il est comme connecté aux milliers d’étoiles qui scintillent au-dessus de lui.

Il n’est qu’une poussière sur cette terre qui n’est elle-même qu’une poussière dans l'infini.

Tout à l’heure, il compte se laisser glisser du bord du toit-terrasse mais, en attendant, des pensées l’envahissent, il revoit sa vie, ses moments de galère, de détresse, à quoi bon continuer ? dans quel but ? quel futur ?

D’autres pensées prennent le pas. Et s’il se mettait à regretter durant la descente ? N’y a-t-il donc rien qui vaille la peine d’être vécu ?


Puis enfin comme une petite étoile de Noël, une phrase lui revient à l’esprit, une citation qu’il avait lue dans une revue. Ça l’avait interpellé, alors après l’avoir lue et relue il avait déchiré la page pour la glisser dans son portefeuille.


« Tu dois devenir l’homme que tu es. Fais ce que toi seul peux faire. Deviens sans cesse celui que tu es, sois le maître et le sculpteur de toi-même. »


L’article était consacré à un philosophe du 19e siècle du nom de Friedrich Nietzsche.


Paul, toujours assis entre l’immensité astrale et l'abîme de dix étages, a ressorti la feuille de papier froissée de son portefeuille de cuir pour méditer une dernière fois la formule.

À la suite, un deuxième texte n’avait pas retenu son attention auparavant.


« Tu es maintenant devant ton dernier sommet et devant ce qui t’a été épargné le plus longtemps ! Il faut que tu suives ton chemin le plus dur ! Tu as commencé ton plus solitaire voyage !


Mais celui qui est de ton espèce n’échappe pas à une pareille heure, l’heure qui lui dit :

Maintenant seulement tu suis ton chemin de la grandeur ! Le sommet et l’abîme – maintenant ils se sont confondus !


Tu suis ton chemin de la grandeur : maintenant ce qui était jusqu’à présent ton dernier danger est devenu ton dernier asile !


Tu suis ton chemin de la grandeur : il faut maintenant que ceci soit ton meilleur courage qu’il n’existe plus de chemins derrière toi !


Tu suis ton chemin de la grandeur : ici personne ne doit se glisser à ta suite ! Tes pas eux-mêmes ont effacé ton chemin derrière toi.

Et si dorénavant toutes les échelles te manquent, il faudra que tu saches grimper sur ta propre tête : comment voudrais-tu autrement monter plus haut ?


Sur ta propre tête et au-delà, par-dessus ton propre cœur ! Maintenant ta chose la plus douce va devenir la plus dure.


Celui qui s’est toujours beaucoup ménagé, son excès de ménagement finit par le rendre maladif. Béni soit ce qui rend dur !

Je ne vante pas le pays où coulent le beurre et le miel ! »


Ainsi parlait Zarathoustra.


Nietzsche n’est pas connu pour la limpidité de son œuvre. Pourtant Paul est touché par ce texte.


On a traité ce philosophe de tout et son contraire : fasciste, anarchiste, communiste, bourgeois tant ses écrits étaient énigmatiques.

Paul vient d’y voir un signe, une révélation. Il s’apprête à sauter dans le vide. Que peut-il lui arriver de pire ?

Il vient de comprendre que s’il n’a plus rien à perdre, alors il a tout à gagner, il peut prendre tous les risques, suivre son chemin de la grandeur, prendre un nouveau départ.


Il ne peut rien lui arriver de pire que de s’écraser au sol alors tout est à sa portée.

Béni soit ce qui rend dur.


C’est décidé, demain il ira parler à Nikki.

Demain, il reprendra ses études. Pour cela il ira voir les RH des aciéries et si ça ne marche pas, il s’inscrira aux cours par correspondance, aux cours du soir.

Demain, il ira au dojo dont un ami lui a parlé, là où l’on pratique le karaté du maître Yoshinao Nanbu, la voie du corps et de l’esprit, la voie du guerrier.

Il lui suffira de se lever et de mettre un pied devant l’autre pour avancer.


Paul va suivre son chemin de la grandeur.


Il lève les bras au ciel, remercie les étoiles et, après encore un long moment à méditer, redescend l’échelle de secours pour regagner sa chambre quelques étages plus bas avec maintenant des étoiles dans la tête.


Demain sera un nouveau jour.

C’est peut-être cela aussi la magie de l’hiver…



 
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   plumette   
6/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
il y a une atmosphère prenante dans ce texte: le mariage d'un paysage triste, délavé par l'hiver et l'état intérieur de ce jeune homme dont la solitude écrasante fait venir de très sombres pensées.

Et il y a de quoi sans doute: la lente déchéance de sa famille, l'alcoolisme du père, l'avenir barré avec ce NO FUTURE qui trouve un écho en lui.

je me suis attachée à petit Paul, je m'attendais à son cheminement et j'ai été soulagé qu'il trouve la force d'écarter ses pensées suicidaires.

Mais je pense que le texte en dit trop, qu'il raconte trop au lieu de montrer.

Quant à la fin, si j'en ai bien accepté le principe, j'ai trouvé que les citations de Nietzsche prennent trop de place, qu'ils n'étaient pas indispensable de tout reproduire! j'ai ressenti que c'est l'auteur qui se faisait plaisir sans que cela ne serve vraiment le propos.

Un texte attachant mais qui me semble perfectible.

   cherbiacuespe   
10/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Philosophe, philosophe... Friedrich était plutôt un anti-philosophe, non ?

En tout cas, dans cette petite nouvelle pleine d'espoir, ces mots sont au service de l'optimisme. Tant décrié par le passé, cette nouvelle fait un sort à une vieille injustice envers le philosophe Allemand. Un récit intelligent qui peut s'adresser à beaucoup de monde et à diverses situations. A lire et à méditer.

Bien pensé, composée simplement, facile à lire et à comprendre, parfois très sombre, et finalement d'un optimisme éclatant ( Nikki est-elle aussi inaccessible qu'il y paraît ou ne suffirait-il pas d'un cœur joyeux pour l'aborder et la séduire ? ).

Une belle écriture.

Cherbi Acuéspè
En EL

   Donaldo75   
15/1/2022
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Le début de cette nouvelle ressemble à une biographie figée, plus littéraire certes qu'un CV mais pas franchement racontée. C'est dommage, ça sent l'exercice pour répondre à la contrainte concernant l'explication de qui est le personnage principal. Ensuite, l'histoire démarre réellement, avec un personnage qui s'anime pour de bon. Je ne suis pas fan du pitch et encore moins du texte de Nietzsche utilisé comme déclencheur mais ça passe en l'état. Et puis, personnellement je n'aurais pas aimé voir Paul sauter du toit. Oui, il a raison d'aller parler à Nikki, on ne vit pas bien quand on a des regrets en pagaille.

   Luz   
26/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour,

L'idée est bonne, mais je trouve que le texte est bien trop long. Une nouvelle plus courte aurait été beaucoup plus percutante.
Par exemple, il est dit à trois reprises que Paul voit ses copains, le soir :
- "des paumés comme lui qu’il retrouve le soir après le boulot, avec qui il boit des bières, avec qui il joue aux cartes..."
- "Le soir après le boulot, il retrouve les autres jeunes au foyer, des paumés comme lui venus d’un peu partout s’échouer dans la région..."
- " Noël, pour lui, c'est plutôt une soirée à passer avec quelques copains, à boire des bières et jouer aux cartes..."

Mais c'est une belle écriture et un texte optimiste, alors ça me va.
Merci.

Luz

   Pepito   
26/1/2022
Un futur « prolo à casquette, bleu de chauffe, mégot au coin de la bouche, femme pas des plus belles, des gosses, un appartement de HLM. » qui trébuche sur un décorticage de Nietzsche … fallait oser. Que l’ex-futur-prolo en question garde un extrait de Ainsi parlait Zarathoustra dans son portefeuille, là, on est proche de la blague. S’ensuit de longs extraits, trop savants pour moi.

J’aurai préféré une démonstration, genre : Paul saute, tout en récitant « Ce qui ne tue pas rend plus fort !» et ensuite il voit si cela fonctionne. C’est juste une idée, hein. Elle a réussi à Mike Brant, en son temps. Vous me direz que c’est une référence farfelue, je le concède, mais pas beaucoup plus que Yoshinao Nanbu. Qui lui a sauté le pas en 2020, il me semble, et nous arrive ici comme un cheveu sur la soupe. Krikituuuu !

Reste la dernière phrase « C’est peut-être cela aussi la magie de l’hiver… » histoire de nous rappeler le thème du concours, que l’on avait complètement oublié. ^^

Bonne chance.
Pour le moment, à mon humble avis, vous êtes le meilleur.

Pepito

   Myo   
26/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Un texte plein de bonnes intentions mais qui manque à mes yeux de finesse, de subtilité.
Le début plante le décor de cette cité industrielle peu de temps avant qu'elle ne s'effondre. L'ambiance est au rendez-vous mais le caractère me parait forcé et enfonce des portes ouvertes.

Malgré ce "trop", le personnage reste attachant.
Par contre, sa réflexion finale quitte la réalité pour devenir bien tortueuse.
Je pense que votre texte aurait gagné en crédibilité par plus de simplicité.

Merci du partage.

   Lulu   
30/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

J'ai bien aimé le début de cette nouvelle qui donne un cadre clair sur les lieux où se trouve le personnage.

Ce que j'ai trouvé assez vite dommage, c'est qu'on n'a peu ou pas vraiment d'explications sur le fait que Paul soit paumé. Son père est devenu alcoolique, il a donc fui. Bon, pourquoi pas... Mais j'ai eu l'impression que de là à ce que la vie de Paul soit vécue péniblement au point de vouloir mettre fin à ses jours était trop succinctement raconté. Peut-être manque-t-il quelque chose de sa vie d'ouvrier ? Il y a les filles... etc, mais peut-être que la vie ouvrière manque dans ce récit à ma lecture... Je ne sais.

Je n'ai pas compris ce que pouvait être "un prolo avec la casquette". Serait-ce un cliché qu'a Paul ? Et quel cliché ? Je ne l'ai jamais lu, ni entendu...

J'ai adoré trouver cette phrase courte qui marque le début d'un suspense : "- Ce soir à minuit !" Je ne pensais nullement alors à la perspective d'un suicide... Pas du tout... Au contraire, j'avais lu cette phrase comme un tournant qui allait rompre le côté morose de la solitude du personnage, à défaut de connaître un peu plus sa vie, pour aller vers quelque chose de peut-être plus réjouissant.

Néanmoins, j'ai trouvé beau l'idée de retrouver Paul sur le toit d'un grand immeuble.

J'ai eu l'impression de lire autre chose, ensuite, car le style est totalement différent, mais aussi puisé dans les citations... Peut-être aussi ai-je trouvé cela moins crédible du fait que l'on n'a pas vraiment d'éléments sur le personnage avant son entrée à l'usine, ou sur sa vie quotidienne... Des éléments qui auraient pu annoncer le fait qu'il pouvait avoir, par exemple, des mots qu'il affectionnait dans son portefeuille.

C'est cependant un bel essai... Tous mes encouragements !

   aldenor   
31/1/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un souci soutenu de créer une ambiance déprimante. Pour déboucher en fin de compte sur une lueur de révolte. Le texte est bien construit.
Le choix de « Petit Paul », avec sa référence a Saint Paul, n’est pas gratuit. Pour Nietzsche il représente en effet la soumission et la faiblesse, l’ennemi a combattre.
Le procédé du passage du philosophe conservé dans sa poche est cependant un peu artificiel. Mieux vaudrait, me semble-t-il, une réflexion personnelle du personnage pour atteindre les mêmes sortes de conclusions.

   hersen   
3/2/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Une ambiance assez bien retranscrite, entre la ferme et le père alcolo et cette cité d'aciérie.
Alors, mais peut-être est-ce un présupposé de ma part, on ne comprend pas bien comment paul peut avoir dans sa poche ce texte de Nietzche. Car finalement, et c'est là que le bât se fait le plus lourd, rien ne nous y prépare, donc on n'y croit pas trop (que Paul le traîne dans sa poche).
je pense que tant qu'à inviter Nietzche, il aurait fallu évoquer plus tôt ce "détail", pour que l'accointance ne soit pas si saugrenue.
Enfin, ça l'a sauvé, c'est déjà ça !
pour moi dans la pose d'une ambiance, le texte est bon, mais dans sa finalité, je suis moins convaincue.
Sans Nietzche, avec à la place disons quelque chose de plus à la portée, quitte à ce que ça introduise éventuellement à cet auteur, j'aurais marché davantage. Mais ici, cela semble trop manichéen.

les deux dernières phrases sont pas mal, mais par contre, j'ai mis un petit temps avant d'en saisir le sens réel, à savoir qu'au plus froid de soi, il peut y avoir un demain.
Ceci dit, c'est bien aussi quand ce n'est pas prémâché, ça oblige le lecteur à voir un peu plus loin.

Merci pour la lecture !

   GillesP   
4/2/2022
 a aimé ce texte 
Un peu
L'atmosphère morne est plutôt pas mal rendue, je trouve. En tout cas, ça a fonctionné sur moi.
En revanche, j'ai été gêné dans ma lecture par la temporalité: au début, on est au début du mois de janvier et Paul est au bord d'une usine; il marche le long d'une palissade. Ensuite, le narrateur revient en arrière pour raconter comment il s'est retrouvé dans le Nord-Est. Jusque-là, tout va bien. Mais ensuite, je suis un peu perdu: on nous
dit que "ses pas ont suivi un sentier détrempé, longeant les vitrines décorées de guirlandes, de pères Noël peints, de bonhommes de neige et de paquets cadeaux". On est donc au moment de Noël, fin décembre. Cela semble se confirmer puisque le narrateur évoque ensuite le soir de Noël, que Paul passe avec des copains. On enchaîne avec le fait qu'il est allé au cinéma, puis qu'une idée a germé en lui, qu'elle s'est imposé en fin d'après-midi. Est-on revenu, à ce moment-là, au moment du début, en janvier, lorsqu'il longe la palissade où est écrit "no future"? À quel moment, au final, voit-il ce qui est écrit sur la palissade? Après que l'idée a germé, avant? Bref, la temporalité m'a semblé un peu confuse.
Autre détail: quel est l'intérêt de la jeune femme nommée Corinne, dont on parle une fois pour ne plus jamais l'évoquer ensuite?
A mon sens, le texte pourrait donc encore être peaufiné. J'ai eu l'impression de me trouver non face à un premier jet (l'écriture est plutôt agréable, on voit qu'elle a été polie), mais face à une version intermédiaire.
Bonne chance pour le concours.
GillesP

   Anonyme   
5/2/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Une histoire attachante, mais on s'y ennuie un peu et je la trouve bancale. J'ai du mal à croire qu'un Petit Paul de dix-neuf ans à peine soit aussi désabusé sur la vie. Certes, les conditions familiales se sont dégradées, le père boit et à la maison les engueulades entre parents pleuvent, mais rien ne dit qu'il soit mal traité. En plus, il vit dans "un joli petit coin au pied des montagnes'', et l'avenir de paysan qui lui est promis avec ses douze vaches, semble tout de même plus heureux que celui de cette ville sidérurgique où il traîne son spleen. En plus ils ont l'air de bien l'aimer dans son village, et rien ne l'empêche de poursuivre des études pour se sortir plus décemment de ce milieu. Enfin, je n'ai rien lu qui l'en empêche...

Je crois que c'est cette ambiance de misérabilisme parodiant Zola, qui me paraît too much pour que j'adhère pleinement.

Et puis la narration entre trop dans les petits détails et se perd souvent dans ses dédales. C'est gentillet, mais peu propice pour emballer les foules. Sans compter Nietzsche qui s'invite pile poil comme un cheveu dans le potage avant que l'irrémédiable ne se produise, et auquel on a du mal à croire.

Pour résumer mon impression, je dirais qu'il y a un bon scénario à exploiter, mais à condition de réajuster et rééquilibrer les éléments.

Merci pour le partage.


Cat

   Corto   
11/2/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Le début de cette nouvelle est excellent de descriptions, oserai-je dire de connaissance sur l'environnement du bassin sidérurgique et de ce qu'on y vivait encore dans les années 1980. Le NO FUTURE n'est pas spécifique à cette situation mais il a sûrement existé ici comme ailleurs.
Le tracé du cheminement de vie du jeune homme et de son milieu d'origine est aussi très réaliste avec cette phrase cruelle "Il aura fallu les Trente Glorieuses pour que sa famille se clochardise".
La vie au "foyer" est aussi bien vue, lieu où chaque jeune cherche sans chercher ni trouver sa voie. Mais un éclair avec une Nikki est si vite arrivé...
Avec " Ce soir à minuit !" on s'attend à progresser vers un final dramatique, sans retour. Mais par un retournement à base philosophique improbable on retourne au raisonnable. La nouvelle aurait pourtant pu se développer à partir de ce jeune écrasé sur le trottoir, le choc ressenti par les copains, les ouvriers révoltés, une prise de conscience collective, un élan socio-économique. Cela aurait été d'ailleurs plus conforme à l'Histoire réelle.
Mais...le texte aurait-il pu alors être accepté par Oniris?

La philosophie a ainsi sauvé notre jeune personnage et la morale est conforme aux bonnes mœurs.
Sur une base de "Noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir" on revient donc dans une progression vers la joie de vivre.

Ce texte se lit avec plaisir, sans que le lecteur ne soit dupe du virage en épingle à cheveux final. "Paul va suivre son chemin de la grandeur" et j'attendrais presque "ils eurent de beaux enfants".

Merci du partage.


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