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Sentimental/Romanesque
rouelibre : Le journal du vieux Séraphin
 Publié le 16/12/15  -  6 commentaires  -  3527 caractères  -  59 lectures    Autres textes du même auteur

Texte inspiré du Désespéré de Gustave Courbet.


Le journal du vieux Séraphin


26 octobre

Mario, tu es parti depuis huit jours maintenant et je réalise à quel point ta présence me manque. Pas eu le temps de te dire adieu, j'ai juste trouvé un mot à mon retour. Tu m'expliques que ton dossier pour l'Australie a été accepté in extremis. Départ précipité. Dommage...

J'aurais tant voulu te dire à quel point notre brève connaissance m'a changé, m'a fortifié.

Je me rends compte que je n'ai de toi qu'une seule photo, prise lors du tournage dans mon quartier. Tu avais décroché un rôle dans un film sur la Commune, c'était un peu d'argent de poche...

Notre rencontre... un pur hasard ! Je donnais à manger au compagnon de mes vieux jours, mon canari, quand il s'est envolé sur la place. C'est là que tu l'as recueilli... « Il y a même perdu une plume », m'as-tu dit en me tendant la boule ébouriffée et la plume. J'ai souri et, après le tournage, comme tu passais devant la maison, nous avons bavardé.

Tu as pris l'habitude de me rendre visite, me redonnant le goût de la parole. J’étais face à un jeune chercheur, resté de longs mois sans emploi. Horizon bouché. Aujourd'hui le pays consacre si peu d'argent à la recherche...

Tu as suscité en moi la force de persévérer, d’écrire et de peindre. J'ai donc repris mes pinceaux abandonnés le jour où ma famille a péri dans un accident.

Je tourne et retourne cette photo. Je vais opter pour une facture réaliste : ton attitude est si expressive, tu incarnes la jeunesse désemparée.

Je mobiliserai mon esprit, je ré-apprivoiserai les gestes.

Pour le fond, c'est fait, j'ai choisi un ton de terre légèrement cendré, cette terre qui nous colle aux souliers et à laquelle nous devons retourner.


27 octobre

Ce matin, je me suis remis à l’œuvre. Le canari remplissait l'air de ses chants. J'appréhendais tant pour le visage que j'ai juste laissé un ovale, modelé en ocre clair.

J'ai préféré m'attaquer au pourpoint blanc cassé. Tous ces plis me compliquent la vie. Je butte sur des détails et je sens le découragement me gagner. Je voudrais que le vêtement traduise aussi le tourment de l'esprit.

Ne t'offense pas mais je te trouvais le teint un peu maladif, alors je n'ai pu m’empêcher de le rehausser. Je m'attache à trouver la couleur suggestive.

Tantôt je suis fier de l'effort fourni. Tantôt le doute est là, je crois que j'ai tout à réapprendre.


28 octobre

Je constate que les études sur petit format me font le plus grand bien. L'assurance revient peu à peu. Je prends les choses avec patience.


7 novembre

Je reste interdit devant cette bouche entrouverte, ces narines en alerte, concentré sur la lumière à donner à l’arête du nez. Je m'arrache les cheveux, mes doigts se crispent. Les mains semblent avoir pris leur autonomie : l'une porte en creux comme une marque de sacrifice, l'autre s'agrippe dans les cheveux noirs de jais telle une bête aux pattes monstrueuses. Traduire cette force qui piaffe... Je prête toute mon attention aux yeux écarquillés, fixés dans l'effroi. Un trait contrasté au-dessus des sourcils pour conférer au regard toute son intensité. Je voudrais exprimer la pensée d'un front par le rayonnement d'une note claire sur un fond sombre.

Mais je sens que je délire. J'ai dû trop travailler sur cette toile tous ces jours... Je reprendrai après un tour sur la place.


Voilà... je voulais te faire part de ces victoires arrachées au fil des heures. Je me suis juré d'aller jusqu'au bout. Et, le moment venu, troquer mon pinceau contre la plume de l'oiseau, puis écrire mon nom dans un coin du tableau.


 
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   alvinabec   
26/11/2015
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bonjour,
C'est joli comme tout cette histoire fantasmée d'après l'oeuvre de Gustave.
Il me semble que le texte gagnerait à être plus étiré, plus fouillé sur les émotions du vieil homme suscitées par la rencontre du thésard qui, somme toute, lui a fourni un regain d'énergie.
Développer le 'à quel point...fortifié' est ce qui est attendu par votre lecteur. Comment par la grâce du pinceau le narrateur se réapproprie son avenir fait aussi partie du récit.

   carbona   
26/11/2015
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Bonjour,

Votre nouvelle m'a attirée. J'aime beaucoup le tableau auquel vous faites référence et je trouve que c'est une belle idée d'écrire des textes en rapport à des oeuvres d'art.

Or, je n'y ai pas trouvé mon compte. Déjà, je pense que le rythme est trop rapide. Je ne sais pas combien de temps a mis Courbet pour peindre "Le désespéré" mais là ça va trop vite à mon goût. J'ai visualisé le tableau au fur et à mesure de la création que vous suggérez mais je n'ai pas été emportée.

D'autre part le texte balance entre l'histoire qui se cache derrière le tableau et l'exécution du tableau en lui-même, deux parties trop scindées à mon goût. La partie narrative est trop évasive, pas assez explicite. Et la partie descriptive trop superficielle, trop rapide.

"J'ai donc repris mes pinceaux abandonnés le jour où ma famille a péri dans un accident. " < information mal amenée

Je n'ai pas compris le titre. Séraphin est donc le narrateur j'imagine.

Merci pour la lecture. Je trouve que votre initiative est tout à fait louable.

Carbona

   in-flight   
28/11/2015
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Bonjour,

Court texte qui vaut surtout pour la description que vous faites du tableau (paragraphe du 7 novembre).

Mais je n'ai pas eu beaucoup prise sur cette nouvelle. Ce Mario est un acteur qui semble avoir un effet curateur sur le narrateur mais tout cela semble fait dans l'unique but de parler technique de peinture (27 et 28 octobre).

"Horizon bouché. Aujourd'hui le pays consacre si peu d'argent à la recherche... " --> digression.

Les circonstances de la rencontre ne sont pas très bien amenées ou un peu forcées: "Notre rencontre... un pur hasard ! Je donnais à manger au compagnon de mes vieux jours, mon canari"

Ce récit pourrait être le passage d'une correspondance épistolaire ou d'un journal (comme l'indique le titre) ; mais en l'état, je n'ai pas su saisir vos intentions.

   jaimme   
29/11/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Et quelques jours plus tard...
Beau texte sur les attentats. Fauché en plein vol, en plein espoir de retour à la vie. Mais le tableau est un pressentiment.
Une écriture épistolaire qui fait la part belle à l'humanité.
Un peu court peut-être.
J'ai aimé.

   vendularge   
16/12/2015
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bonjour,

J'aime beaucoup les récits de forme épistolaires surtout quand ils nous racontent l'histoire d'une œuvre ou plus exactement dans ce texte, une histoire inspirée par une peinture de Gourbet. J'ai mis un petit moment à comprendre parce qu'en vous lisant on découvre qu'il peint la photo de Mario, jeune chercheur parti en Australie, rencontré lors du tournage d'un film sur la Commune de Paris.

Comme vous le savez sans doute, il s’agit d’un autoportrait du peintre peint 20 avant la Commune. Il s’agit donc d’une histoire inspirée par le portrait (et vous le dites) sans aucun lien avec la réalité de l’œuvre, ce parti pris est intéressant.

Ceci-dit, c’est trop court et même si j’aime beaucoup le 7 novembre, je crois que vous avez la possibilité de développer…

Merci

   lala   
16/12/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Bonjour rouelibre,

Je trouve l'incipit un peu confusant. Bien sûr la toile de Courbet est décrite, mais on ne sait pas si c'est juste anecdotique ou si vous approchez aussi le contexte du peintre et l'histoire du tableau. Le titre contient la même ambiguïté, pourquoi Séraphin et pas Gustave ?
J'ai vraiment aimé votre récit et ce rapprochement entre le vécu compliqué, le caractère tourmenté par nature du peintre, et la restitution picturale que livre ce « Désespéré ».
Vous auriez pu développer.


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