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Poésie en prose
Coline-Dé : Chant de marin
 Publié le 13/11/09  -  18 commentaires  -  1415 caractères  -  362 lectures    Autres textes du même auteur

En écoutant Billy Budd...


Chant de marin



Te lire, c'est descendre dans la soute et à l'instant d'aveuglement, regarder le ciel par un interstice, les étoiles en apnée


Quand mes paumes brûlées s'appliquent aux lampadaires, parmi les vapeurs sales

quand la pisse des chiens fauves s'écoule vers la mer, j'ai des démangeaisons, des clous rouillés profonds, le cœur gratté à blanc, toute blessure salée

J'ai pas cherché ça, tu sais.

Ouest.

La houle est longue et tu sourds de moi comme la buée des lessives, du linge des femmes, des longs draps pâles, pendus dans les haubans.

Je voudrais arracher l'aube avec la chemise
coller mes dents sur mon sourire, dégrafer de mes yeux le regard bleu enfant

Nu, dressé droit contre le ciel poli

Chanter sanglant, rire.



Des bars sortirait la marée ; par moment on croirait voir les mouvements internes de courants sous-marins,

mais rien d'autre qu'une velléité,

non, rien d'autre.

J'ai pas voulu ça, tu sais.

Ça sort de moi comme si j'étais ta source.

À coup de trouilles tu me repasses l'âme, tu crames mes faux plis, tu saccages mes airs amidonnés

mais t'es pas là, t'es pas là…

Un arc-en-ciel de pétrole surnage, psychédélique

Mais t'es pas là

Et j'ai les mains si creuses.


 
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   jaimme   
13/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Alors je ne parle pas de la disposition...

Je trouve ce texte d'une force immense, en adéquation avec mon humeur en plus. "j'ai les mains si creuses"...
Le seul moment d'arrêt a été: "par moment on croirait voir"; rien à enlever du reste.
Merci Colinede, de mettre des mots sur ce qui est si dur à vivre.

   Lapsus   
13/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Comme il est désespéré ce chant de marin qui pleure après sa bien-aimée.
Au-delà du travail exténuant et sale, il la porte en lui mêlée aux souvenirs des tâches rassurantes d'une maison bien tenue.

Des expressions qui font mouche :
"Te lire, c'est descendre dans la soute et à l'instant d'aveuglement, regarder le ciel par un interstice, les étoiles en apnée "
Dans son enfer marin, c'est un moment étriqué de lumière.

"Ça sort de moi comme si j'étais ta source. "
L'image projetée, lancinante, prend l'ascendant sur la réalité de la personne fantasmée.

"Mais t'es pas là
Et j'ai les mains si creuses."
Un retour d'image sur les paumes brûlées, mais aussi la constatation évidente du manque et du vide affirmée tout au long du texte.

   Anonyme   
14/11/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'ai trouvé l'ensemble original et percutant, j'ai bien aimé lire.
"arracher l'aube avec la chemise" me semble être une bonne idée, à essayer. De la poésie qui me parle bien. De la "liberté" entre ces lignes.

   Automnale   
15/11/2009
 a aimé ce texte 
Passionnément
Il est tout simplement magnifique ce "Chant de marin". Son couplet oscille entre le vrai, le cru, un monde dur. Son refrain, lui, apporte du rêve, un peu de douceur et de bleu. Au milieu du charivari, nous entendons le cri d'un humain.

C'est un grand moment que celui de descendre dans la soute, de "regarder le ciel par un interstice" et de naviguer sur les mots de Colline fourmillant d'images poétiques : les paumes brûlées, les longs draps pâles dans les haubans, la marée qui sortirait des bars... Et cette jolie trouvaille : "Dégrafer de mes yeux le regard bleu enfant".

L'auteure sait saupoudrer cette "chanson" de mots plus forts en évoquant, en connaisseuse, les vapeurs sales, la pisse des chiens fauves s'écoulant vers la mer, un arc-en-ciel de pétrole.

Et le marin crie, de tout son être... "J'ai pas voulu ça, tu sais... Mais t'es pas là, t'es pas là... Et j'ai les mains si creuses".

Voilà un texte de toute beauté, à lire et à relire, digne des plus grands auteurs. Je pense, par exemple, à l'univers de Blaise Cendrars.

Merci, Colline. J'ai entendu ce chant de marin.

   Chene   
15/11/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour Collinede

Une prose aux mots très forts sur le vide des "mains creuses", sur le vide à la sortie des bars du port.
La lecture est cependant contrariée par la variabilité de la ponctuation. Et si j'ai beaucoup apprécié la portée des mots, ma lecture a été gênée par l"absence ou la présence partielle de cette ponctuation. Le rythme s'en ressent (et d'autant plus pour "un chant de marin").
Mon avis tout à fait personnel : ou bien on s'attache à la ponctuation et on l'adopte sur tout le poème en prose ou alors on fait le choix de n'en pas mettre. D'où mon appréciation mitigée.
Dommage, donc... Peut-être l'auteur complètera son choix de façon plus évidente, je l'espère.
Au plaisir d'une autre lecture.
Chene

   LiliBellule   
21/11/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Le style me plaît beaucoup, excepté la ponctuation, par toujours adéquate ou manquante elle m'a gênée à la lecture.

Sinon, la profondeur du manque est palpable, plus profond encore dans ce désir pour le marin de partager avec l'absent son monde.
Un trop plein à partager avec le vide...

Heureuse de te lire.

   Anonyme   
17/12/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
l'écorché vif, oui, ses blessures intérieures je les ressents et me touchent à travers tes vers. Un poème aux images magnifiques, bruts, écorchés, c'est le genre de texte que j'aime lire, qui me fait vibrer, c'est tout en sensibilité, loin d'être guimauve.
Seul hic "et tu sourds de moi..."je ne comprends pas, je suis resté bloquée sur ces vers, mais ça n'a pas d'importance.
Force et sensibilité se mêlent à merveille ici.
Une réussite.

   Lunastrelle   
13/5/2010
 a aimé ce texte 
Passionnément ↓
Je crois bien que je me suis noyée... Tout bonnement et simplement... Et il en faut beaucoup pour produire un pareil effet sur moi... C'est vraiment une prose magnifique, qui m'a ébranlée du fond du coeur...
Dès les premiers mots cependant, j'ai eu peur de ne pas accrocher. Et cette peur m'a quittée lorsque je suis arrivée à ce passage là:
"Quand mes paumes brûlées s'appliquent aux lampadaires, parmi les vapeurs sales"
Sans vouloir exagérer, ce poème sublime le laid en beauté, et ça c'est tout à fait extraordinaire... Je suis particulièrement friande de ces textes là...
Quant au rythme, quand au reste... Rien ne m'a bloquée, rien ne m'a retenue...
J'ai tenté du mieux que possible d'exprimer ce que j'avais ressenti, mais mes mots sont bien faibles face à ce qu'il s'est réellement passé à la lecture...
Bravo en tout cas!

   chienbrun   
7/7/2010
Tout est la. Tout est dit. C'est brut beau et doux. Comme une plume qui pourrait vous fracasser le crane.
Il ne me reste qu'a garder ces mots en moi aussi longtemps que possible.

   Anonyme   
6/1/2011
 a aimé ce texte 
Passionnément
Après avoir beaucoup aimé 'les rires de l'écho", j'ai eu envie de découvrir d'autres poèmes de cet auteure.

Mais pourquoi, pourquoi n'en existe-t-il que deux ici ??

Si j'ai aimé le précédent, je peux dire que je suis totalement scotchée par celui-ci. Il vibre d'une force, c'est dément, c'est superbe, ça résonne en moi comme un carillon terrible.
J'ai presque eu envie de détourner les yeux tellement le fond m'a touchée, et puis cette façon de dire ces choses :
"la pisse des chiens fauves", "les étoiles en apnée", "le coeur gratté à blanc", "ça sort de moi comme si j'étais ta source", "La houle est longue et tu sourds de moi comme la buée des lessives, du linge des femmes, des longs draps pâles, pendus dans les haubans", et "j'ai les mains si creuses"...

Ca c'est de la poésie, bon sang.

Bravo et merci.

   Rainbow   
29/9/2014
 a aimé ce texte 
Passionnément
J'ai lu votre poème plusieurs fois. Je n'ai rien compris, absolument rien; pourtant, j'ai tout ressenti. Les frissons sur ma peau à chaque fin de vers. Vos mots m'ont parlé de l'absence, de l'amour, de la solitude, de la résignation et de la révolte, mais surtout, votre poème m'a parlé de la beauté.

Merci, encore.

   Francis   
29/9/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Comme un torrent d'images plus fortes les unes que les autres : "arracher l'aube avec la chemise, les étoiles en apnée, draps pâles pendus dans les haubans, le regard bleu enfant..."
Le rythme est donné par cette répétition : " j'ai pas voulu ça tu sais , mais tu n'es pas là " La beauté (les étoiles, le regard bleu enfant) côtoie la laideur ( pisse des chiens fauves, arc-en-ciel de pétrole).
J'aime beaucoup le dernier vers : " et j'ai les mains si creuses ".

   jfmoods   
13/1/2015
Tout le poids du texte semble d'abord reposer sur un mot de cinq lettres : "Ouest". Mot qui se dresse, seul, comme un champ de force irrésistible. Le gouvernail est le seul maître, le maître incontesté de la destinée. Le lieu, c'est l'ailleurs. À cela, il n'est rien à redire. La gradation ("J'ai pas cherché ça, tu sais", "J'ai pas voulu ça, tu sais") ne peut que manifester l'impuissance fondamentale du locuteur à s'opposer au point de fuite qui le taraude. Cependant, parallèlement, porté par l'effet de relance des subordonnées de temps ("Quand..." x 2), par les verbes ("sourds", "ça sort", "saccages", "surnage", "arracher", "coller", "dégrafer"), les gradations ("Je voudrais", "Je veux", "la buée des lessives, du linge des femmes, des longs draps pâles"), les gradations hyperboliques ("des démangeaisons, des clous rouillés profond, un cœur gratté à blanc, toute blessure salée"), l'anaphore ("rien d'autre" x 2), le conditionnel ("sortirait", "croirait") et le marqueur d'intensité ("j'ai les mains si creuses"), un second champ de force s'impose avec violence : celui du désir, impossible à repousser, impossible à assouvir, de l'absente. Le champ lexical de la ménagère revancharde ("repasses", "crames", "faux plis", "airs amidonnés") signale le traitement imposé par le souvenir de la femme aimée à l'homme soudain métamorphosé en linge malmené. Se lève, alors, métaphoriquement, fruit d'un mouvement inconciliable entre le bas et le haut, entre l'eau et le firmament, entre appel du large et point de fixation idéalisé, le déchirement qui traverse le locuteur (antithèse : "descendre dans la soute"/"regarder le ciel", paradoxes : "les étoiles en apnée", "un arc-en-ciel de pétrole").

Merci pour ce partage !

   Anonyme   
16/1/2015
Un "chant de marin" d'une grande intensité où transparaît la rudesse d'une vie de labeur à travers des images "cruelles" d'une extrême beauté ("paumes brûlées", "clous rouillés profonds", "coeur gratté à blanc").

Les éléments se joignent ici pour parfaire le "tableau", jouant sur le corps de ce malheureux marin qui n'a pas d'autre choix que de subir, parcouru de "démangeaisons" (je le prends aussi bien au sens propre qu'au figuré), "toute blessure salée" (le sel étant un irritant qui amène à des démangeaisons incommensurables si on ne se lave pas à l'eau claire pour le faire partir)...

Le fait de ne percevoir les étoiles qu'en "apnée", autrement dit subrepticement, l'espace d'un "instant d'aveuglement", serré dans la soute, les yeux rivés au ciel, rajoute à l'état de promiscuité qui, on l'imagine aisément, se veut le lot quotidien de cet homme qui lutte pour sa survie et celui de sa femme, bravant "la houle" à travers les "haubans". Lesdits "haubans" reflétant bien entendu le "linge", mais pas n'importe lequel, celui des "femmes" qui attendent patiemment le retour de leur cher et tendre, s'occupant des "lessives" et de la propreté de la maison en général, en comparaison à la saleté de la "houle" et de ces fameux "haubans" (voiles) usées par la crasse. Ainsi le marin voit dans chaque partie du navire, dans chaque vague dessinant la mer, dans chaque partie de son corps, la crasse, la "pisse des chiens fauves" et les blessures, tandis qu'au foyer, celui-là même où sa femme l'attend, transie de peur, tout n'est que propreté (buée des lessives, linge des femmes, longs draps pâles).

Le remords aussi de ne pas être là ("j'ai pas cherché ça", "j'ai pas voulu ça, tu sais") comparé au reproche non dévoilé de celle qui attend ("mais t'es pas là, t'es pas là..."), est palpable et poignant.

Le tout, en somme, est une réussite !

   Anonyme   
4/3/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Bonjour,

Chose promise... et j'ai bien fait :)

J'ai beaucoup aimé votre prose, vous avez ici une bien jolie manière de parler de l'absence.

Quelques très intéressantes choses :

Te lire, c'est descendre dans la soute et à l'instant d'aveuglement, regarder le ciel par un interstice, les étoiles en apnée

Je voudrais arracher l'aube avec la chemise

dégrafer de mes yeux le regard bleu enfant

Des bars sortirait la marée ; par moment on croirait voir les mouvements internes de courants sous-marins,

Ça sort de moi comme si j'étais ta source.

Et j'ai les mains si creuses.


Je suis un peu moins fan de l'anaphore (mais je ne suis pas fan des anaphores en général : pas que je ne les aime pas, j'en use aussi et puis elle est tellement bien amenée qu'on peut pas vraiment parler d'anaphore, si? si... ), mais ce n'est en soi, sur le final, pas vraiment dérangeant.

L'ensemble dépeint un tableau triste et râpeux, doux et subtil à la fois, et sur un rythme qu'on sent musicalisé.
La poésie se lit et se déclame avec fluidité, et j'aime votre manière de ponctuer (par les signes mais également par les dispositions), et votre champ lexical adapté en tout points à ce que vous posez.

Et étrangement, c'est le calme qui me reste quand je finis de lire !

Merci pour ce bon moment de lecture, Coline-Dé, au plaisir de vous relire !
Bonne continuation !

   Lulu   
19/3/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Coline-Dé,

je découvre ce texte que j'ai beaucoup aimé lire... C'est un vrai chant. Vous ne nous trompez pas avec votre titre.

Faire cela en prose me semble a priori difficile, mais cela chante, et si bien. On sent l'enthousiasme dès les premiers mots "Te lire, c'est descendre dans la soute..." ; une vraie merveille. Il y a à la fois la connivence avec l'autre "tu" et avec le lecteur.

J'ai par ailleurs beaucoup aimé le dernier vers.

   LJB   
26/6/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'aime cette succession d'images, ces mots qui se glissent dans la page, cette solitude qui nous mord entre pisse et lessive...

C'est étrange, je vois dans votre texte la femme du marin, le coeur vide, le coeur lourd, absent, creux face à la houle, face à la mer attendant comme ce lampadaire...

   embellie   
14/12/2018
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Ce chant de marin c'est le chant de l'absence. De belles images suggérées de manière non convenue, tout ce que j'aime. Merci Coline.


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