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Récit poétique
Donaldo75 : Les fantômes du passé
 Publié le 25/03/23  -  5 commentaires  -  4671 caractères  -  57 lectures    Autres textes du même auteur

Je sais enfin pourquoi Paris ressemble à New York.


Les fantômes du passé



Je regarde par la fenêtre. La ville s’affiche désormais vide sans Marnie. Je ne vois nulle part où aller. Mes fantômes me poursuivront toujours, ici, à Londres, à Berlin ou dans n’importe quelle autre ville du monde. La nuit habille le spectacle de magie. Les lumières, les fenêtres éclairées et les phares des voitures brillent en autant de touches d’une vie intense et variée. J’aime toujours énormément Paris. Dès le coucher du soleil, la crasse, la vulgarité et l’insolence laissent place au romantisme et à l’éternité de cet immense musée habité par des millions d’aveugles. Ma fiancée l’avait bien compris. Les monuments historiques, le passé prestigieux et les grandes avenues à perte de vue l’attiraient irrémédiablement. Je lui racontais la mort de ce poète, les amours de cette chanteuse ou les intrigues royales dans ce décor de sculptures et de parcs. « Paris ressemble à une église », m’avait alors dit mon égérie un soir d’été avant de m’entraîner avec elle dans une allée fleurie.

Quand je pense à ces troupeaux de fidèles parcourant les travées d’une ville millénaire, d’une époque lointaine désormais figée dans la pierre, je me dis la même chose. Sans exactement savoir pourquoi, ces centaines d’yeux affamés regardent des vitraux, des ornements religieux, des objets sacrés et des marques d’un autre temps, quand la France adulait son roi et laissait fouetter ses indigents. « Tu es un de leurs curés », avait continué Marnie cette nuit-là. Pour elle, je célébrais avec déférence un office permanent pour un mythe enterré. Je défendais au mieux mon rôle dans le tableau en invoquant la grandeur pourtant révolue de mon pays, ses artistes, les mécènes venus du reste du monde magnifier le beau et le savant. Nous avions encore beaucoup de leçons à tirer de nos ancêtres. Marnie adorait m’écouter raconter cette histoire. Chez elle, dans la fière et puissante Amérique, des millions de bouches grandes ouvertes vénéraient le dieu Réussite, la déesse Richesse et leur cour parée d’artifices. « Je suis venue à Paris pour vivre autrement », m’avait-elle avoué avant de m’embrasser tendrement sous le regard bienveillant d’un lampadaire en fer forgé.

Je trouvais Marnie différente. Elle n’essayait pas de me caser dans un rôle défini à l’avance ou de changer mes manières. J’adorais l’entendre me raconter son ancienne vie américaine où les riches contemplaient sans vergogne le fossé entre eux et les anonymes, où tous avaient le droit d’acheter une arme mortelle pour quelques petits billets verts, où un président tentait de juguler une nation jeune et dissipée, la Bible sur le cœur. Son pays restait une autre planète à mes yeux, avec beaucoup de satellites, des petits et des grands gravitant autour de ce monde géant. Ses habitants vivaient écrasés par la perpétuelle pression de slogans déguisés en dogme, d’une vision binaire érigée sur le temple de Wall Street. Ils se croyaient placés au centre de l’Univers, investis d’une mission divine. « Sommes-nous si différents de vous ? » me demandait-elle ensuite en me prenant la main avant d’entamer une petite ronde sous la Lune.

Je la revois jouant à l’Américaine un peu folle mais éprise d’un Français cérébral. Je me souviens des jardins de pierre de ses pères fondateurs, des Européens partis de leur continent déchiré par les guerres, dans le but de vivre autre chose, de ne pas laisser sa progéniture répéter les mêmes erreurs. Je l’entends encore me parler de nos futurs enfants et de leur œil neuf sur le monde. Selon elle, ils sauraient trier par eux-mêmes dans mes récits fabuleux, parmi mes légendes romantiques habillées en vérités historiques et gravées dans le marbre de mes bonnes intentions. Ces épopées me ressemblent avec leurs couleurs chatoyantes et leurs jolis sentiments. « N’est-il pas bon de rêver ? » me dis-je dans un souvenir de la moue de Marnie ce soir-là, avant qu’elle ne reparte dans le Nouveau Monde. Avec moi, elle ne vivait pas dans une publicité géante où des gentils enfants blonds vivaient de chips et de soda sous un ciel merveilleux et un soleil généreux.

La Lune brille dans le ciel. Un symbole éternel. L'astre illumine les gratte-ciel de La Défense et la Grande Arche. Ces blocs de béton me rappellent Marnie dans son linceul de ciment. La nuit noircit mon humeur. Les ombres des bâtiments, projetées sur le macadam par la lumière lunaire, transforment la vue panoramique en un cimetière gothique. Je sais enfin pourquoi Paris ressemble à New York. Au coucher du soleil, les fantômes du passé percutent les tours jumelles, engloutissant mon amour dans un déluge de poutres, de plâtras et de fils électriques.


 
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   Robot   
12/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Un beau texte ou la poésie rejoint la réflexion. Il ne nous raconte pas une histoire mais un vécu. Des images parlantes qui philosophent sur la destinée, qui interrogent aussi le passé pour tenter de déceler l'avenir.
Ce texte m'a passionné au point de le lire une deuxième et une troisième fois.
Robot en espace lecture.

   papipoete   
25/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
bonjour Donaldo
Je la revois Marnie, loin de son Amérique de tours, gratte-ciel où les maîtres de l'or, offrent une arme à un enfant, pour Noël ou autre anniversaire ! Découvrant Paris et son passé, sa Grande Dame à la fière flèche, et moi tel " un de ses curés " qu'elle prenait par la main, à la découverte d'un autre monde, ses ruelles, ses quartiers pittoresques. Puis un jour, sa main lâcha ma main...
NB je ne suis pas certain ( une fois encore ) mais je crois que la Belle Américaine dort désormais au-dessus des States, de la France, et d'ailleurs... au-dessus de là où l'on vit.
Le héros si triste, regardant son Paris, croit voir s'effondrer les Tours Jumelles, comme Notre Dame, dans lesquelles le béton a la même couleur, la même poussière...comme ce futur que des enfants purent égayer mais...
Je pense que Marnie se serait faite à Paris, même pourquoi pas à Lutèce...
Notre auteur a plusieurs plumes à son arc, et nous le démontre encore ici avec ce texte mélancolique.

   Jemabi   
25/3/2023
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Un long et riche poème, très bien construit, récit poétique ou courte nouvelle qui aurait pu trouver sa place dans la rubrique "Réflexions/Dissertations". Le souvenir de Marnie l'américaine est amené à partir du paysage urbain parisien, toute l'histoire qu'il recèle et qui en fait sa valeur, puis l'opposition avec l'Amérique dont le passé est encore récent et qui ne peut donc avoir qu'une mémoire restreinte. Tout cela est vu à travers le prisme d'une histoire d'amour entre deux amants qui n'habitent pas sur le même continent, que tout éloigne mais rapproche aussi, comme se rapproche insensiblement le paysage urbain américain dans un Paris dont le mode de vie est désormais très américanisé.

   Geigei   
25/3/2023
trouve l'écriture
très perfectible
et
n'aime pas
Le fantôme de Marnie, une américaine jouant l'écervelée, hante un français, érudit autoproclamé et démonstratif.
Ce poème, si ce texte en est un, ne m'a procuré aucune émotion, aucune surprise.
Les sens y sont absents et les sentiments aussi.
Sauf si l'admiration pour un fat qui se considère comme le seul "voyant" de la Ville Lumière est un sentiment. Les autres étant "aveugles".
J'ai appris que la loi sur la vente d'armes est permissive aux États-Unis.

"Avec moi, elle ne vivait pas dans une publicité géante où des gentils enfants blonds vivaient de chips et de soda sous un ciel merveilleux et un soleil généreux."

Pourquoi l'a-t-elle quitté ?

L'ennui ? L'impression de vivre avec Stéphane Bern et Lorànt Deutsch en même temps ?

   Edgard   
25/3/2023
trouve l'écriture
convenable
et
n'aime pas
Je n'arrive pas à entrer dans ce texte, que je trouve plein de clichés et de sentences à la louche.
" Les lumières, les fenêtres éclairées et les phares des voitures brillent en autant de touches d’une vie intense et variée." Je trouve cela un peu banal.
"Dès le coucher du soleil, la crasse, la vulgarité et l’insolence laissent place au romantisme et à l’éternité de cet immense musée habité par des millions d’aveugles."
Je trouve le jugement quelque peu péremptoire et hâtif. Le portrait et les pensées de le jeune femme américaine me semblent bien caricaturaux:
"des millions de bouches grandes ouvertes vénéraient le dieu Réussite, la déesse Richesse et leur cour parée d’artifices."
Enfin il me semble voir des contradictions des les propos:
« Tu es un de leurs curés »,
"Marnie adorait m’écouter raconter cette histoire"
"Avec moi, elle ne vivait pas dans une publicité géante où des gentils enfants blonds vivaient de chips et de soda sous un ciel merveilleux et un soleil généreux." Je n'arrive pas à savoir si cette jeune femme découvre avec plaisir Paris ou si elle met en avant la vie américaine...les deux étant caricaturées, à mon sens.
Que de clichés...
Pardon, mais je ne trouve pas grand chose de poétique, attachant ou même instructif.


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