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Poésie contemporaine
inconnu1 : Le bonheur est insipide
 Publié le 27/11/20  -  7 commentaires  -  3415 caractères  -  127 lectures    Autres textes du même auteur

Petit retour sur mes 20 ans quand je pensais que la vie de famille était bien monotone.


Le bonheur est insipide



Satan m'a convoqué un soir de scolopendre
Pour savoir d'où venait cette envie de me pendre.
Il m'a offert du pain et de la chicorée.
« À vingt ans, me dit-il, quelle idée saugrenue
De vouloir à tout prix intégrer le menu
Du prochain restaurant où je vais tortorer.

N'as-tu rien à penser de plus intéressant ?
La vie est merveilleuse. En un mot comme en cent,
Écoute les raisons que tu as de l'aimer.
Dans cinq ou bien dix ans, tu deviendras Docteur,
Métier fort appréciable et rémunérateur
Tu seras honoré et ton nom acclamé.

Comme tu n'es pas sot et bien de ta personne,
Tu trouveras l'épouse aimante et bien mignonne
Qui saura te donner de merveilleux enfants.
Vous pourrez voyager sur tous les hémisphères,
Monter en astronef, descendre en bathysphère,
Visiter des musées et chasser l'éléphant.

Tu passeras l'été à Deauville ou La Baule
Dans ta maison donnant sur l'avenue de Gaulle,
Auprès du casino avec vue sur la mer.
Tes enfants seront bien polis et studieux
Du genre intelligent et vérécondieux
Laissant, dans le métro, leur fauteuil aux grand-mères.

Chaque soir tu vivras ce bonheur partagé.
Près du feu crépitant, tu deviendras âgé.
Nous reprendrons alors cette conversation. »
« J'entends vos arguments, répondis-je à Satan.
J'avoue que ce projet a des côtés tentants.
Alors, j’aurai richesse, amour, réputation.

Quand vous parlez d'Amour, vous me parlez je pense
De cet Autre apaisant, qui de par sa présence
Diffuse un climat doux de calme et de chaleur.
Ce lien qui se renforce, en crescendo sublime,
Quand le corps se flétrit et la beauté s’abîme
Mais qu’il reste sa main pour calmer la douleur.

Quand vous parlez d’Amour, vous me parlez bien sûr
De ce déchirement, l’éphémère cassure
Lorsqu’on est séparé, le temps d’une nuitée.
Mais qu’on oublie bien vite, en sachant que demain
On pourra, de nouveau, la couvrir de ses mains
Pour lui faire un abri contre l’adversité.

L’idée est acceptable. Une ultime question !
Connaîtrais-je toujours ce qu’on nomme passion ?
Ce sentiment superbe, à nul autre pareil
Qui mêle habilement extase et désespoir
Quand n’est plus grand bonheur que de l’apercevoir
Et plus grand désarroi que de l’attendre en vain.

Quand un geste anodin enflamme l’espérance
Que telle est la douleur qu’elle use la conscience
Et qu’on doit se résoudre à tout imaginer.
On l’invente idéale, aimante et désirable,
Prête à se condamner pour vous être agréable.
Mais la chute est brutale au retour du matin.

Avant toute autre chose, un point fondamental
La passion survit-elle au bonheur qui s’installe ? »
Satan, l’air étonné, me répondit bien vite.
« La passion, mon ami, c’est l’espoir du bonheur,
Quand l’espoir est comblé, c’est la passion qui meurt.
Mais c’est bien le bonheur, que tu dois espérer. »

« J’entends vos arguments, répondis-je à Satan.
Si pour me rendre heureux, vous m’ôtez la passion
S’il faut pour le bonheur, cette compromission
La vie n’est plus souhaitable au-delà de trente ans.
Donnez-moi donc l’adresse de votre restaurant,
Allez donc tortorer. Je vous rejoins bientôt. »


 
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   Gemini   
18/11/2020
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Il m'a paru qu'il s'agissait plus d'une démonstration que d'un poème. Les définitions du narrateur/auteur (exergue) sont sans doute personnelles mais guère originales. Elles semblent, de plus, appartenir à quelqu'un de bien plus âgé que les 20 ans promis dans ce même exergue.

La bienveillance de Satan m'a paru aussi incongrue. Dans ce dialogue Faustien, il a presque le rôle de bonne conscience (à part l'idée de la chasse à l'éléphant, où on le reconnaît mieux).

J'ai trouvé enfin bien long, ce qui aurait pu être évoqué plus poétiquement en quelques strophes, et j'avoue que le mélange Amour, passion, bonheur m'a donné un peu le tournis, entre ce narrateur qui définit si bien l’amour (pour son âge), qui l’exige, puérilement, passionnel, mais qui ne comprend pas que le diable lui parle de bonheur.
Les 66 vers en sizains sont-ils à rapprocher avec le 666 chiffre de la Bête ?

Pour la forme, on découvre qu'à partir de la septième strophe les vers 3 et 6 ne riment plus.

J'ai bien aimé la proximité de "tortorer" avec torturer, et j'ai découvert l'existence du qualificatif "vérécondieux".

   Anonyme   
21/11/2020
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
J'ai une relation ambivalente avec les postures absolutistes : un ahurissement genre ça n'a aucun sens, une fascination style ouah, quand même faut le faire ! Là je suis en plein dedans, je ne peux pas comprendre comment le narrateur choisit la mort par refus d'un manque d'intensité dans sa vie (alors que la mort ce peut être le néant, peu réputé pour sa force émotionnelle) mais d'un autre côté je m'incline devant une pareille obstination.

Par ailleurs, je trouve le poème fort paradoxal ; c'est la première fois, me semble-t-il, que je croise Satan en chantre des valeurs bourgeoises du bon père de famille ! Je suppose qu'il retrouve là son rôle de tentateur façon tourmenteur du Christ dans le désert...

Quoi qu'il en soit, je trouve le propos trop dilué. À mon avis, votre poème pourrait avoir plus d'impact en étant sérieusement resserré. Et puis je trouve dommage que le narrateur rebelle s'exprime avec la même sagesse policée que Satan, en dodécasyllabes parlés mais dûment rimés (scolopendre/pendre, pas mal pour moi). L'ensemble m'apparaît trop long et trop sage pour un hymne à la passion.

   Miguel   
21/11/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un cynisme tout satanique exprimé en vers souvent superbes. Il y a de la classe dans ce dialogue, une belle maîtrise de l'alexandrin. De la belle rhétorique (chez moi le mot n'est pas négatif), une aisance et une grâce qui n'en traitent pas moins d'un sujet grave, et qui ont un petit air du 18e siècle, quand l'art de la conversation à la Voltaire était à son plus haut point. J'hésitais à me lancer dans cette lecture car je trouvais le texte un peu long, mais pris au piège du premier vers je n'ai plus été maître de m'arrêter. Méfiez-vous de Satan.

   Corto   
27/11/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Cette joute engagée avec Satan est plaisante.
Il est d'ailleurs cocasse de voir celui-ci se faire d'entrée avocat de la vie et détourner le narrateur de "cette envie de me pendre".

J'attendais une sorte de marchandage avec le démon à la manière de Faust, mais non Satan semble presque de bon conseil !

J'ai particulièrement aimé les strophes 6 et 7 "Quand vous parlez d’Amour...etc." dont les mots sont si bien choisis.
L'interrogation fondamentale qui vient ensuite "La passion survit-elle au bonheur qui s’installe ?" est aussi bien formulée et la réponse tout autant: elle aboutit d'ailleurs à ce qui semble être le dessein caché de Satan, à savoir confirmer au narrateur que "La vie n’est plus souhaitable au-delà de trente ans". Argumentation diabolique s'il en est !

Ce poème philosophique me parait fort bien construit. La lecture en est aisée et j'ai pris plaisir à revenir sur tel ou tel passage pour le savourer.

Bravo !

   Donaldo75   
28/11/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai trouvé ce poème bien tourné, marrant surtout quand je relis l'exergue. Il y a de la verve dans ces vers aux rimes astucieuses, à la composition qui ne s'embarrasse pas des habits de la prosodie classique et garde du coup un esprit contemporain. Au-delà de la forme, le fond émet une critique sociale au goût de saynète à la Molière, ce qui va bien avec le thème et la forme.

Bref, que du bonheur, je me suis régalé comme disait le célèbre philosophe Laurent P. avant de rejoindre Canal Plus.

   ferrandeix   
2/12/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
L'argument du poème me paraît excellent et très compréhensible. La chute est très bien amenée. C'est une réflexion sur la passion et le bonheur, leur antinomie et le paradoxe: la passion meurt quand le bonheur est atteint. Tout cela traduit par une conversation avec le Diable. Donc, poème d'une grande originalité. Et le poète choisit magnifiquement la passion. En revanche, j'aurais préféré des traits d'esprit plus affirmés dans le déroulement de la conversation. Les premiers paragraphes s'étirent dans un contenu parfois un peu anodin. Sur le plan euphonique, rien ne choque. Au final, c'est tout de même un très bon poème.

   papipoete   
10/1/2021
 a aimé ce texte 
Passionnément
bonjour inconnu1
Plus rien ne va pour moi ; le soleil est désespérément gris, et tout ce que je devrais contempler, prendre en sympathie, savourer comme un exotique fruit, na plus de saveur ! Seule cette corde au noeud coulant, qui me fait de l'oeil, me dit " viens, prends-moi ! je te transporterai dans ce monde où tout n'est plus que douceur, chasse au loin tourments et malheurs ! "
- Qui es-tu, toi qui me parles, sembles de bon conseil ?
- Satan l'on me nomme, et condamné aux flammes de l'enfer, ne sais pourquoi ! Tu dois vivre, et connaitras le bonheur !
- N'es-tu pas un ange déguisé...
NB ce dialogue à une voix plus celle de l'au-delà, est pour le moins originale, avec le Diable qui prodigue baume et encouragements ; incite à vivre pour goûter la félicité, le bonheur d'une famille aux enfants du genre " polis, studieux et vérécondieux " !
le côté " réussite sociale " est peut-être l'accent insidieux de celui qui conseille !
Satan que l'on dit infâme, bras du mal, langue de fiel et autre porteur d'infamie, fait se poser la question :
Quand à toi au Ciel, divin conseiller je me confie, demande de l'aide, es-tu angélique ou plutôt du Yéti le sosie ?
Un poème très long, mais si aisé à lire ; l'on se croit dans un confessionnal en compagnie d'un bon ami, qui ne nous condamnera pas à pénitence, mais nous accordera toute son attention, et sa main que l'on ne voit pas...velue et crochue, est sans doute plus douce que soie...
de très beaux vers dans cette conversation surréaliste, mais qui peut se concevoir... à tel point que le héros qui voulait en finir, en vient à dire : Tout me semble juste et radieux à vous écouter ; je vais y réfléchir !
personnellement, la prochaine fois que je me confierai à un invisible personnage, je lui demanderai " qui êtes-vous ? )
techniquement, vous avez opté pour la lecture en diérèse ( stu/di/eux ) mais plus loin " ré/pu/ta/si/on " se lit ici en synérèse...


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