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Poésie néo-classique
Ligs : Ecce Homo
 Publié le 06/07/21  -  8 commentaires  -  727 caractères  -  174 lectures    Autres textes du même auteur

Le 3 janvier 1889, le philosophe allemand Friedrich Nietzsche, installé en Italie et au bord de la folie, malade et rejeté par une grande partie des intellectuels de l'époque, est témoin d'une scène atroce : un cheval épuisé subit le fouet de son cocher, alors qu'il n'arrive plus à avancer. Nietzsche le prend dans ses bras, en larmes, et perd définitivement la raison. Sa philosophie a eu par la suite une importance majeure dans la pensée occidentale, bien après sa mort.


Ecce Homo



Turin. Depuis des mois, tu débats le pavé,
Troublant chaque fontaine avec ton écuelle ;
Tu détruis le vieux monde au coin de la ruelle,
Et dans le ciel latin ton éclair est gravé.

Sur l'encre encore humide ont sans cesse bavé
Les crapauds des journaux ; et leur sempiternelle
Haine flétrit ton cœur et ton inactuelle
Quête du Gai Savoir, qu'ils veulent entraver.

Alors, quand tu le vois, cet animal – ton frère ! –
Saignant sous le fouet, dans un hideux calvaire,
Tu saisis l'encolure et pleures contre lui,

Enlaces pour toujours l'animal en détresse,
Ceignant l'éternité, bouclier de sagesse.
Dans le ciel en ruine, un météore luit…


 
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   ANIMAL   
24/6/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai trouvé ces vers équilibrés et ce poème émouvant. Il auréole Nietzsche d'une nouvelle dimension, malgré son état mental tel que décrit. Car quiconque est capable de compassion envers un animal maltraité a forcément du coeur.

Le poème en lui-même serait assez abscons sans l'incipit mais avec cet éclairage tout est limpide. La descente aux enfers de cet homme, son rejet et sa réaction émotive en contemplant la méchanceté de son prochain sont très bien narrés.

Destruction d'un homme :

"Sur l'encre encore humide ont sans cesse bavé
Les crapauds des journaux"

et destruction d'un animal :

"Alors, quand tu Le vois, cet animal – ton frère ! –
Saignant sous le fouet, dans un hideux calvaire,"

font d'eux des semblables dans la souffrance.

J'adhère à ce concept.

   Cristale   
6/7/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Deux vers ne respectent pas les règles de prosodie concernant les rimes, contrariant la forme classique, mais c'est un sonnet, alors un choix de roi mérite l'excellence.

Le poème décrit la scène avec un joli talent d'observateur, comme s'il en était le témoin direct.
Pauvre Nietzsche, un cerveau comme le sien souffrait des "faiblesses" que les rustres tortionnaires ne pouvaient pas connaître.

Cristale
en E.L.
Edit : revenue pour une correction

   papipoete   
6/7/2021
 a aimé ce texte 
Bien ↑
bonjour Ligs
Pour s'émouvoir devant un animal que l'on martyrise au siècle dernier, sous le regard médusé de touristes dans sa calèche, fallait-il être " cabossé de la tête " ? Et pourtant, ce personnage en quête du " gai savoir " ose s'émouvoir d'un cheval à l'agonie ; ce put être le déclic de la folie, qui sur lui tomba...
NB les deux quatrains me sont un peu hermétiques, ne connaissant guère Ecce Homo ; mais la suite en tercets est bouleversante, car encore d'actualité dans certaines villes, où ces pauvres chevaux tirent ces charêtes de promenade sous un soleil de plomb, sans eau et sans repos jusqu'à l'épuisement !
J'assistai dans le ranch de mon neveu, dernièrement en Provence, à l'euthanasie d'un mustang arrivé au bout de sa vie ; dans le noir de la nuit, la vétérinaire l'entoura de tendresse, caresses mots doux... et avant qu'il ne tombe, le tînt par le cou accompagnant ainsi sa chute au sol. Poignant...
Vos deux tercets ne peuvent ainsi, que me toucher !
N'aimant pas ( quand d'autres au contraire apprécient ) les enjambements, je place ainsi ce bémol.

   hersen   
6/7/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Je ne sais pas trop si ce que je vais dire est pertinent.
Mais j'aime bien ce poème, qui, par un vocabulaire dont je dirais qu'il est "patibulaire, même si on ne dit pas ça, c'est un peu l'idée que ça me donne.
Ce qui me turlupine, c'est cet exergue bien long qui explique "en long en large et en travers", ce que je trouve toujours dommage quand je commence la lecture d'un poème, cela oriente trop ma lecture et je me sens un peu prisonnière. (relativise ici la valeur des mots, évidemment).

j'aurais, en fait, mille fois préféré ressentir sans l'exergue. Peut-être amener le thème d'une manière un peu différente, pour qu'il n'y ait pas à expliquer autant auparavant ?

J'ai apprécié ce poème, comme dit plus haut.

Merci de la lecture !

   Yannblev   
7/7/2021
Bonjour Ligs,

Voilà un poème très intéressant sur un personnage, philosophe et poète lui-même, qui le mérite largement.
L’exergue qui explique quelque part le désir, la motivation et l’inspiration de l’auteur n’est pas inutile. Si on ne connaît pas l’histoire elle contribue largement à expliquer la force d’évocation que l’on mesure au fil de ces 14 vers de facture classique, facture qui ne permet pas si facilement d’ordinaire cette puissance. Et grâce à cette puissance d'évocation, c’est presque ce Nietzsche troublant toujours et troublé tout le temps qui nous apparaît in vivo sous son ciel constellé de ruines.

Merci, un très bon moment en ce qui me concerne.

   Miguel   
9/7/2021
Cette histoire de cheval est-elle vraie ? C'est un lieu commun qu'on trouve en plein d'endroits. On en a un dans "Le Capitaine Fracasse" ; il meurt sur le chemin par une nuit d'hiver et au matin il ne reste que son squelette, les autres bêtes l'ont mangé. Dans "Les Misérables", on a aussi un cheval battu qui s'écroule sous sa charrette, ce qui fait dire à Tolomiès pastichant Malherbe : "Et rosse elle vécu ce que vivent les rosses, L'espace d'un "Mâtin !" (c'est l'exclamation que pousse alors le charretier).
Cette identification du "génie" à la bête ne me séduit ni ne me convainc. La peinture du philosophe en maudit relève du compassionnel. Dès qu'on veut faire plaindre un humain, on l'associe à quelque bestiole. Il y a tant d'humains du sort desquels on peut s'émouvoir ... Au reste l'ami Nietzsche était quand même assez heureux pour voyager ; car Turin, il me semble, n'était pas sa ville d'origine. Encore un bon bourgeois que la légende peint en génie anathématisé. Quant à la raison, je pense qu'il l'avait perdue bien avant l'épisode du cheval.

   Queribus   
11/7/2021
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,

Ce qui me frappe en premier en vous lisant c'est la perfection de l'écriture et la maitrise quasi parfaite de la prosodie néo-classique. Le sujet lui -même me parait assez ardu avec son côté "élitiste" pour lecteur averti. Vous avez choisi, avec beaucoup de courage, le sonnet qui n'admet pas la moindre erreur et vous vous en sortez avec maestria même si cette image d'un philosophe et d'un animal maltraité a quand même un peu un côté "cliché". L'ensemble témoigne d'un longue pratique du vers et d'une très grande habileté à l'utiliser.

En conclusion, un bon moment passé à vous lire.

Bien à vous.

   GiL   
19/7/2021
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je ne commenterai pas le fond de cette anecdote ni sa vraisemblance. Je la prends comme une donnée que l’auteur a jugée suffisamment fascinante pour en faire un poème.

Tout d’abord : quel dommage, cet « entraver » à l’indicatif qui proscrit la classification en Poésie classique. Sinon les rimes des quatrains (à l’exception de « sempiternelle ») sont toutes très riches et celles des tercets suffisantes.

Le parti-pris de t’adresser à la deuxième personne au philosophe est une excellente idée qui implique le lecteur. Le vocabulaire est simple (c’est pour moi une qualité !), les vers sont descriptifs, évocateurs avec, parfois, un élargissement du sens qui fait prendre du recul au discours (v3 et v4 ; v13 et v14).

L’exergue est à mon goût trop explicite, j’aurais préféré un éclairage tamisé à la lumière crue de ce coup de projecteur. Encore deux observations : l’expression « tu débats le pavé » m’a chagriné dès l’abord et le sens du vers 13 me paraît confus. D’autres points me semblent pouvoir être améliorés, mais c’est du détail.

En revanche la chute est géniale.

En résumé, j’ai bien aimé ce sonnet. Merci, Ligs, pour cet agréable moment de lecture.


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