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Poésie contemporaine
Pouet : Grands yeux marron
 Publié le 11/03/17  -  33 commentaires  -  2206 caractères  -  552 lectures    Autres textes du même auteur

Quelques mots pour un pote parti à 20 ans.


Grands yeux marron



Je nous revois enfants, parmi les feuilles mortes,
Sur les sentiers boueux de la complicité.
C'est vrai, les souvenirs qui frappent à ma porte
Ne sont que peu de chose, quelques banalités…

Ce n'est guère par devoir que je vais les écrire,
Ces phrases un peu bancales, ces vers maladroits.
Tu sais comme je suis, je ne peux te mentir,
Les mots que je t'adresse ne parlent que de moi.

Car j'ai toujours été très différent de toi ;
Tu traquais le soleil, je me parais de brume,
Mon cœur était de bure, tes gestes étaient de soie,
Tu n'aimais que les blondes, je préférais les brunes.

Lorsqu'il nous arrivait de parler politique,
Toi le féru d'Histoire aux tendances royalistes,
Les débats ne viraient que rarement au tragique,
Or j'étais soupe au lait ascendant communiste.

Tu invitais la bande à Saint-Mandé Tourelle,
Ta mère nous préparait des tartines au foie gras.
J'habitais un deux-pièces Porte de la Chapelle
Et on bouffait des pâtes quasi tous les repas.

Tes parents t'octroyaient cinq cents francs par semaine,
On claquait tout ensemble en chichon et en bières,
En kebabs, en cinoches et en fêtes foraines…
Au lycée on avait pris l'option éphémère.

Parfaitement bourré tu gardais l'élégance
De ceux qui restent droits et jamais ne débordent.

Et tu croyais en nous en niant l'arrogance.

Pourquoi cette nuit-là
As-tu saisi la corde ?

Tu avais dessiné une grande carte du Monde
Tout en nous affirmant préparer un voyage.

Nous n'avions rien senti,
Pas la moindre seconde…

Pourtant le désespoir était dans ton sillage.

J'y repense aujourd'hui et tout me semble clair
Mais à l'époque je crois que nous étions trop cons,
Coupables de n'avoir vu s'éteindre la lumière
Qui vacillait au fond de tes grands yeux marron.

J'ai longtemps recherché les causes de ton geste,
Des réponses simplistes à des questions enfouies.
Ton éclat et nos rires, c'est tout ce qu'il me reste,

Ma mémoire est au sec même si tombe la pluie.


 
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   GilbertGossyen   
12/2/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément
Ce texte est bouleversant. La poésie amplifie douleur, tristesse, émotion, empathie, la transcende et, d'une histoire personnelle, fait une oeuvre d'art. C'est un bien bel hommage à cet ami disparu.

   Anonyme   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Ce poème me laisse une impression mitigée : il m'apparaît touchant par sa sincérité et en même temps, sans doute pour la même raison de manque d'apprêt, maladroit. Certes c'est assumé dans le texte, mais du coup, à mon avis, à force de frôler le mièvre vous y trébuchez parfois.

Pas souvent, parce qu'il y a aussi une rudesse, une gouaille qui permettent aux vers d'avancer sans s'enliser dans le convenu, par exemple :
les sentiers boueux de la complicité
j'étais soupe au lait ascendant communiste
J'habitais un deux-pièces Porte de la Chapelle
Et on bouffait des pâtes quasi tous les repas.
Au lycée on avait pris l'option éphémère.
Parfaitement bourré tu gardais l'élégance
De ceux qui restent droits et jamais ne débordent.

Mais les quelques vers de distanciation, où le narrateur prend du recul sur l'écrit, me gênent en me donnant l'impression que, malheur ou pas malheur, il se regarde écrire :
les souvenirs qui frappent à ma porte
Ne sont que peu de chose, quelques banalités
Ces phrases un peu bancales, ces vers maladroits.
Tu sais comme je suis, je ne peux te mentir,
Les mots que je t'adresse ne parlent que de moi.
... et, par ailleurs, je trouve que par endroits l'affection déborde et donne aux propos un caractère plus amoureux qu'amical :
Mon cœur était de bure, tes gestes étaient de soie,
la lumière
Qui vacillait au fond de tes grands yeux marron.
Avec ces grands yeux marron, pour moi, on est carrément dans le blason, comme chez Ronsard célébrant une belle. Cette ambiguïté perçue fait que je ne sais trop sur quel pied apprécier le propos.

Alors, sans doute ces vers sont-ils particulièrement "vrais" en ce qu'ils traduisent avec fidélité une relation plus proche de la "bromance" (amitié amoureuse) que de la camaraderie, et sans doute leur gaucherie même les rend-elle tout proches du ressenti pur. Pour ma sensibilité propre de lectrice qui apprécie plutôt l'intellectualité en poésie, c'est tout de même un peu trop. Question de dosage, qui conviendra à tel et pas à tel autre.

   Robot   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un texte d'une nostalgie sans pathos à propos du souvenir d'un évènement tragique. Le contemporain convient bien au thème. Cependant j'ai du mal à ressentir de l'émotion, ce qui n'était peut être pas l'intention. Il y a comme une distance avec l'évènement, un détachement un peu froid. Je ne sais pas si je me fais bien comprendre en disant que cela me paraît un peu trop "raconté".

Il y a des vers qui m'ont plu comme:
"Tu traquais le soleil, je me parais de brume,
Mon cœur était de bure, tes gestes étaient de soie,"
"Parfaitement bourré tu gardais l'élégance
De ceux qui restent droits et jamais ne débordent."

   papipoete   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
bonjour Pouet,
Tout nous différenciait, nous opposait presque et pourtant nous étions les meilleurs amis du monde !
Un jour, tu parlas d'un grand voyage, que tu entrepris ... au bout d'une corde ! Je ne sus et ne saurai jamais pourquoi, tu t'en allas ?
NB les meilleurs amis ne sont-ils pas toujours ceux que rien ne rapproche ? L'auteur nous en donne une preuve et cette histoire qui prend tragiquement fin, est simplement racontée par delà les souvenirs d'enfance et ceux de " grand ".
L'auteur s'adresse à celui qui n'est plus, lui parle ; je suis sur que vivant, par timidité il n'aurait osé lui dire tout cela, les yeux dans les yeux ; voilà pourquoi ce monologue est si touchant .
L'avant dernière strophe " j'y repense aujourd'hui ... " est si forte !

   JeanMarc   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,
Oui, ce texte est bouleversant.
On retrouve des moments de notre vie, pas complétement les mêmes bien entendu mais on s'y retrouve un pue ou beaucoup selon les personnes...
Il y a de l'émotion, de la mélancolie, la folie de la jeunesse, les choses qu'on ne ferait plus aujourd'hui mais c’était tout de même bien
Encore un grand bravo

   Anonyme   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Pouet,

Comme souvent, je suis très partagé sur ton texte.
Bon, une fois installé dans le désordre de la versification, j’ai pu trouver un slip propre et des chaussettes à ma taille. J’ai relu le texte trois fois, et pas seulement pour la nécessité du commentaire. Il y a du presque charnel, à mon goût, comme « Mon cœur était de bure, tes gestes étaient de soie ». Si j’avais lu ce vers dans les stances d’Aragon à sa copine Elsa, je n’y aurais vu que du feu. Faux, Aragon n’aurait jamais disloqué la césure « bure, tes ».

Et puis certaines correspondances rejoignent l’essence de l’esprit poétique. Quelle excellente idée d’avoir raccourci ces vers en même temps que la corde :
« Pourquoi cette nuit-là
As-tu saisi la corde ? »

Malheureusement, on dirait que le professeur s’est vite trouvé satisfait et a ensuite abandonné son poème à ses élèves, genre « je suis épuisé par mon génie, laissons travailler les gamins ». Normal, ils s’en sont donné à cœur joie :
« C'est vrai, les souvenirs qui frappent à ma porte »
« Tu sais comme je suis, je ne peux te mentir, »
« Car j'ai toujours été très différent de toi ; »
« Lorsqu'il nous arrivait de parler politique, »

Etc… Etc… Pour moi c’est définitivement NON. Je ne peux plus me résoudre à lire un style cursif en poésie. Chaque vers devrait contenir un mot ou une idée bohèmes, surtout quand on a fait le choix des alexandrins, qui par leur amplitude ont tendance à gonfler le banal comme une voile au vent.

« Tu n'aimais que les blondes, je préférais les brunes. » Tiens c’est marrant, vu l’humour qu’on pratique sur le site, j’aurais cru qu’on fréquentait tous des blondes (avec les réclamations, on va enfin savoir qui est blonde).

Le reproche que je fais aux réminiscences biographiques, c’est qu’elles sont souvent un catalogue superficiel de la mémoire. A vouloir tout honorer dans le souvenir, on en brise l’émerveillement.

Ludi
qui aime bien les gens qui n’oublient pas leurs potes.

   Cristale   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Pouet,

Ce quatrain est mon préféré :
« Tu invitais la bande à Saint-Mandé Tourelle,
Ta mère nous préparait des tartines au foie gras.
J'habitais un deux-pièces Porte de la Chapelle
Et on bouffait des pâtes quasi tous les repas. »

Un semblant de distance entre la narration de celui qui retient ses émotions et les conséquences induites par ce drame. Fluide au début, comme un souvenir qui se raconte, le récit se fait plus chaotique, il devient compliqué d'évoquer l’incompréhensible, mais également la colère contre soi-même de n'avoir su empêcher ce geste.
Les vers isolés encadrant les distiques expriment parfaitement le désarroi et la souffrance du narrateur.
Si la mort peut se concevoir c'est le geste conduisant à elle qui laisse l'entourage dans ce grand désarroi. Comment est-il possible de n'avoir rien compris, rien pressenti, rien vu de ce que souffrait et envisageait ce garçon, copain, ami de longue date? Mais voilà, c'est possible.

...et traîner toute sa vie le boulet du « pourquoi ? »....

Bien sur, la technique me chiffonne un peu avec les finale en « e » qui ici ne se prononcent pas, comme souvent dans le langage courant. Je swingue sur 12 et 13 syllabes puisque je prononce ces « e » "es", en faisant mentalement une gymnastique rythmique pour suivre votre tempo. Mais on s'y fait, et puis je me soigne pour mieux appréhender le « contemporain » dont je finis par oublier...facilement (même pas vrai!)... ces petites choses que dame prosodie réprouverait.

J'aurais terminé sur le dernier tercet de ce poème absolument touchant, en rectifiant le dernier vers :

« J'ai longtemps recherché les causes de ton geste,
Des réponses simplistes à des questions enfouies.
Nos grands éclats de rires, c'est tout ce qu'il me reste. »

Mais comme l'on dit, c'est vous l'auteur.

Beau poème tout en pudeur, de cette pudeur masculine qui retient ses larmes.

Le contexte de votre poème me touche particulièrement.
Je rehausse ma note.
Merci Pouet.

   Proseuse   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Pouet,

Pour moi, ici, c' est la forme qui peut-être ne me va pas, j' ai la sensation, que la prose libre aurait mieux convenu et laissé plus de place, ou du moins, moins de distance au narrateur sur ses émotions et ses sentiments , le texte , en fait ressemble à une lettre adressée à l' "ami" et là encore, la prose m' aurait semblé, pour le narrateur, plus libératrice . non pas que je n' ai pas eu plaisir à te lire, ton texte est très touchant et très bien écrit, mais, je sens les émotions, dans cette forme, un peu étriquées , en même temps, je me dis que si tu as choisi cette forme, c' est peut-être justement pour mettre dans ce souvenir, un peu de discrétion et de pudeur ... juste effleurer le souvenir , auquel cas , tu as eu raison de choisir le poésie libre !
c' est là tout la difficulté de l' équilibre entre le narrateur et le lecteur ... l' un prend un peu de distance quand l' autre voudrait se rapprocher plus ! :-)
Merci en tout les cas pour ce beau partage

   funambule   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un texte touchant, prenant même, et les quelques maladresses qu'il me semble y déceler (n'ayant guère accès aux arcanes de la poésie) me semblent participer aussi à la réussite de l'ensemble. Je goûte à ce poison doux qui coule pour toujours dans nos veines, à ces petites et ces terribles choses qui nous construisent et semblent nous rendre uniques; ce texte, à raison, démontre le contraire. Très touché.

   Zorino   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Pouet,
C'est drôle car si je n'avais pas vu votre pseudo, j'aurais attribué ce poème à Widjet. Je trouve qu'il y a une certaine similitude dans vos styles.
On ne peut être que touché face à un texte qui exhume ainsi les souvenirs lointains d'un ami parti trop tôt et de façon tragique.
J'ai beaucoup été touché par ce vers : "Sur les sentiers boueux de la complicité" qui se trouve au début de votre poème. A ce moment, j'ai pensé que ça allait être poétique tout le long de votre texte, et bien non, ce n'est pas le cas. Bien souvent c'est écrit sous forme de proésie (prose écrite en vers). Ce qui ne retire en rien au charme de votre poésie. Je ne sais pas pourquoi mais en vous lisant, je voyais Grand Corps Malade le chanter à sa manière.
Merci pour ce partage

   Brume   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Pouet

Poème touchant dont je ressens une belle sincérité.
J'aime bien quand le narrateur évoque les souvenirs d'une complicité amicale, car vous nous faites partager les bons moments, les rires, et les bêtises. Et vient l'incompréhension. Il y a un grand brassage de vie, un paradoxe vu le sujet.
C'est exprimé de façon si naturelle. Il y a de la distance ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas de chagrin, juste que les larmes ont séché depuis.

   Anonyme   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Le poème est écrit en deux parties et, à partir de "Pourquoi cette nuit-là As-tu saisi la corde ?" celui-ci prend une tournure vraiment bouleversante. D'ailleurs, je ne m'attendais pas à ça et la surprise a été totale !

L'avant-dernière strophe est selon moi la plus émouvante, raison pour laquelle je la remets ici :

"J'y repense aujourd'hui et tout me semble clair
Mais à l'époque je crois que nous étions trop cons,
Coupables de n'avoir vu s'éteindre la lumière
Qui vacillait au fond de tes grands yeux marron."

   Anonyme   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Pouet,
Hormis vos commentaires c'est la première fois que je vous lis et je suis bouleversée, en larmes. Votre style est aérien, extrêmement musical et chaleureux. Votre texte est profond. J'aime la royauté-communiste et les yeux marrons.
C'est très beau, terriblement beau.
Merci.

   widjet   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
On peut être très talentueux et quand il faut raconter le très (trop), près, trop vivace, le proche, les proches, on devient souvent moins à l'aise.
Pouet est brillant, je le sais, et dans ce texte intimement sincère, lui-même conscient du péril d'un tel exercice a beau se montrer préventif ("Ces phrases un peu bancales, ces vers maladroits"), bah à la fin, je me dis et me rappelle combien c'est effectivement compliqué comme travail. La sincérité parasite trop souvent et à fortiori lorsqu'on évoque un membre de la famille, un ami, bref quelque chose de vécu, il est complexe de s'en défaire totalement.

D'un point de vue de la forme, l'autre difficulté (et la tentation) est de ne pas sublimer son style sous peine de le rendre artificiel ou surjoué (ce qui est un comble lorsqu'on évoque un cher cher disparu) et d'enjoliver le souvenir (des moment, voire de l'être lui-même), mais d'un autre côté, on ne veut pas tomber dans trop de platitude, on veut être élégant. Ecrire c'est aussi embellir.

Alors, en définitive; à trop jouer les funambules entre le familier (parfaitement bourré, on bouffait des pâtes) et les associations poétiques plus (l'option éphémère) ou beaucoup moins heureuses ("sentiers boueux de la complicité"...), ça donne un texte bancal, empêtré, embarrassé mais éminemment vrai. Humain, en somme.
Oui, y a des adverbes, du verbeux (lorsqu'il nous arrivait...), du participe présent et beaucoup de choses milles fois lues (le désespoir était dans ton sillage),mais je sens bien l'effort malgré tout de faire un peu autrement dans le style l'éclat de rire se scinde pour être un éclat de rire...des autres. J'aime tout particulièrement "la mémoire au sec" qui pour le coup est vraiment bien vu. Pas fan du questionnement, mais si l'information donnée ajoute de la tragédie (suicide) au drame.

En fait, je pense que j'ai été touché par les tentatives louables et méritoires de l'auteur de sortir du mièvre (qui est présent, mais dont l'auteur assume en faisant un bras d'honneur - à raison, je trouve car au bout d'un moment, fuck le "bien écrire" et vive l'authenticité) qui lui tendait les yeux sans perdre la vérité émotionnelle de sa déclaration d'amitié...plus que le contenu lui-même.

Bref, je le redis : c'est franchement pas simple comme exercice.
(même si le terme exercice n'est approprié lorsqu'il s'agit d'un hommage)

Merci

W

   Anonyme   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Je trouve le texte fort émouvant, on sent la souffrance d'avoir perdu un ami cher.
Très beau vers final :
"Ma mémoire est au sec même si tombe la pluie"

J'estime cependant que cela reste un peu prosaïque, un peu maladroit dans l'expression, même si c'est l'effet recherché.

Merci pour ce partage sincère et touchant.

   Michel64   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Le fond nous raconte une amitié de jeunesse qui a fini par un drame et c'est très bien mené avec cette coupure bien venue tout d'un coup :

"Pourquoi cette nuit-là
As-tu saisi la corde ?"

qui nous laisse voir la soudaineté et l'horreur de la chose.
Puis les lignes séparées qui suivent, qui ajoutent à l'émotion.

Je n'ai pas bien compris :
"Et tu croyais en nous en niant l'arrogance."

Pour la forme, je trouve toujours dommage, même en poésie contemporaine, de ne pas plus soigner les alexandrins et de laisser passer des treize pieds qui accrochent à la lecture.

Par exemple si je lis mon quatrain préféré :

"Car j'ai toujours été très différent de toi ;
Tu traquais le soleil, je me parais de brume,
Mon cœur était de bure, tes gestes étaient de soie,
Tu n'aimais que les blondes, je préférais les brunes. "

en plus d'être très beau il coule en bouche lorsqu'on lit à haute voix.

Mais par exemple :
"Toi le féru d'Histoire aux tendances royalistes,"

Il suffirait de changer un mot, :

"Toi le féru d'Histoire aux penchants royalistes,".

Il faudrait toujours, je crois, même après avoir écrit en laissant parler son coeur, en laissant courir sa plume, de laisser reposer un peu, puis de relire pour changer ces petites choses qui ne changent pas le sens, et alors là ça devient super.
La musique des vers comme la musique tout court, sont un peu mon dada, c'est vrai, et j'y accorde sûrement trop d'importance.

Au plaisir de vous relire
Michel

   David   
11/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Pouet,

J'ai trouvé le poème touchant avec son narrateur parlant du suicide d'un ami, comme il le dit lui-même : "Les mots que je t'adresse ne parlent que de moi." et c'est le sens plus profond que je trouve au poème, pas du tout l’égoïsme affiché mais l'indifférenciation de la quête de soi et de l’appropriation du monde - ça fait trop de tion... - on se découvre à travers autrui, c'est plus simplement dit. de là à dire qu'entendre parler d'un suicide, c'est un signe que l'on ne va pas bien...

Je regrette un peu le jeu des contrastes, l'ami riche du prolo, l'un préfère les blondes et l'autre les brunes... mais je crois y reconnaitre la sincérité plus profonde de la fiction sur celle plus naïve du témoignage, où plutôt la part de l'une sur celle de l'autre, c'est pas manichéen.

   Anonyme   
11/3/2017
Salut mon Pouet, je peux pas te noter, parce que je me sens comme devant une version Pouet de mes Abysses (surtout les derniers vers) parues il y a peu, mais avec plus de mots, moins de pudeur... je ne lis pas de la poésie à ce niveau, je rentre dans quelque chose qui me parle trop clairement. Je perds cette notion de poétique que je recherche dans ce genre de sujets. Pour me retrouver impuissante devant des faits, et leurs conséquences, cruellement, trop évidemment.
Je ne sais pas si tu vas saisir correctement ce que j'essaie là, avec tout mon manque de délicatesse ananaesque, de t'expliquer, mais ...
Autant tout ces mots me touchent, autant ils me touchent parce qu'ils viennent de toi. Et pas parce que ta poésie m'a laissée sur la touche... ou m'a transportée.

Je trouve le sujet très triste, et j'ai l'impression que tu m'en as parlé en confidence, autour d'un café ou d'un sirop d'orgeat. Pas d'avoir lu une poésie...

Et ça me fait chier, je te jure.

Je retenterai plus tard, peut-être mon état d'esprit n'y est pas étranger...

A pluche !

   emilia   
12/3/2017
Un poème très émouvant qui illustre le décès tragique d’un ami différent de soi, mais qui connaît si bien l’autre que l’on ne peut lui mentir, à la fois admiré pour « ses gestes de soie », son élégance, sa culture, sa droiture et un peu envié aussi pour son aisance financière qu’il partageait largement avec ses amis complices… ; rien ne laissait présager le drame de sa résolution au suicide révélateur de sa détresse ignorée quand l’insouciance et l’arrogance de l’âge voilent la réalité… ; il faut aussi rendre hommage à la sincérité et à la lucidité de l’introspection face à ce geste désespéré et le sentiment de culpabilité éprouvé en retour par le narrateur qui avoue les tourments de la recherche des causes et son impuissance à répondre aux « questions enfouies » ne pouvant engendrer que des « réponses simplistes »…, avec la reconnaissance touchante d’un récit centré sur le moi mais dans le respect du souvenir au risque de banaliser la narration et sans rechercher à tout prix la sublimation poétique… ; merci à vous pour ce partage…

   Raoul   
12/3/2017
… Difficile de commenter.
Tout ce que je peux dire, c'est que ça me parait pudique, sensible et vrai.
Un texte - que je sais très complexe à écrire, a équilibrer… - dont j'apprécie la justesse et la délicatesse.

   Tadiou   
12/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Deux destins parallèles, et en opposition totale, et qui divergent.
Les mots simples disent l'amitié, les bonheurs ("nos rires") et surtout l'incompréhension finale ("nous n'avions rien senti").

J'apprécie les mots ordinaires du quotidien :feuilles mortes, sentiers boueux, le soleil, la brume, les blondes, les brunes, tartines, pâtes...

Et la lucidité mais trop tardive : n'avoir rien vu venir.

C'est dit de façon directe, sans complaisance. C'est assumé.

J'aime beaucoup : " s'éteindre la lumière
Qui vacillait au fond de tes grands yeux marron."

Tadiou

   Anonyme   
13/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
''Au lycée on avait pris l'option éphémère''
''Pourtant le désespoir était dans ton sillage''

C'est pour cela que j'aime te lire. Des vers qui viennent de nulle part, et dégagent une charge émotionnelle, qui à chaque fois m'émeut.
C'est tranquille, ça paye pas de mine, on lit ça comme on boirait du petit lait, et quand on a terminé de lire, il se passe un truc en soi, où on sent que quelque chose vous a traversé de part en part, et que l'on sait ce que c'est, sans pour autant pouvoir l'expliquer.
Tu promènes le lecteur gentiment, sur un parcours sinueux et agréable, jusqu'à cette fichue corde, où là on change de registre, et j'ai aimé la pudeur qui se dégage de tes derniers vers.
On sent la plume qui a tremblé, sous l'effet de l'émotion, provoquée par l'incompréhension.

   Sodapop   
13/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour Pouet,
Voici un thème très personnel que celui de la perte d'un être cher. Ici, je trouve que le contexte sert bien le style de la poésie contemporaine. Ceci aurait également pu être écrit en prose, pour peut être donner plus de liberté dans la versification sur un thème aussi intime.
Je note du coup, une plume très émouvante, très touchante, mais un peu plus sur la retenue du coup. On est toujours moins à l'aise quand il s'agit d'écrire sur un tel drame touchant quelqu'un de très proche.
En fait, il ne s'agit même peut pas d'aisance, mais du fait que l'on te sens beaucoup plus précautionneux sur l'utilisation des termes je trouve. Ceci est à ton avantage mais peut également être un inconvénient. Un avantage dans l'émotion, mais du coup un inconvénient dans la spontanéité de ta plume.
En tout cas, comme à ton habitude, tu nous livres là un très beau travail et un très bel hommage que j'ai apprécié de lire. Merci.

   Queribus   
13/3/2017
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour Pouet,

Tout d'abord, en ce qui concerne la forme: vous avez choisi la rime et l'alexandrin; j’ai malheureusement compté un nombre incalculable de vers de 13 syllabes (en particulier les -es à la césure (cho-seu, banca-leu,...) ainsi que certains vers vers de 14 syllabes:
-Ta mère nous préparait....
D'où une impression de poème ni classique ni libéré; peut-être aurait-il mieux valu choisir carrément le vers libre.

Sur le fonds, de très belles formules:
-Sur les sentiers boueux de la complicité,
-Tu traquais le soleil, je me parais de brume,
côtoient souvent les clichés:
-les mots que je t'adresse ne parlent que de moi,
-Et on bouffait des pâtes, etc.

Globalement, je crois qu'avec quelques corrections, le poème gagnerait facilement aussi bien sur la forme que sur le fonds mais il vrai que le sujet, malgré les apparences, n'est pas très facile à traiter.

Bien à vous.

   Bartik   
13/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien
Style très propre sur un sujet grave: émouvant! Bel hommage!
J'aurais rajouté un "s" à marron à moins que quelque chose m'ait échappé. Sur le fond le suicide d'un proche est toujours perturbant justement à cause de cette proximité: on culpabilise alors qu'on est responsable de rien.

   vendularge   
14/3/2017
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonsoir Pouet,

Ce qui est dit ne prime t il pas la forme imparfaite (paraît-il, je suis profane)?

Alors oui, quelques fois ce qui est dit prime et c'est heureux.

Merci de partager avec nous.

vendularge

   Anonyme   
15/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Émouvant et pudique !

L’émotion c’est aussi le fait de la poésie, je crois. Et la pudeur c’est de la tendresse, de l’amour, et de la tristesse qui se devinent.
Une belle évocation d’un ami perdu, reste les questions qui resteront des questions, car à ce genre de tragédie que peut-on répondre ? Je n’en sais rien !

Je vais évaluer le poème même si ça n’a pas tant de sens que cela. On a tous des histoires du même ordre en mémoire, mais seul un poète peut en parler si justement, du cœur je veux dire.

Un dernier mot : à mon avis les petites choses racontées comme de petites anecdotes ajoutent à l’authenticité de ton témoignage, ou de ce dialogue à une voix.

Corbivan

   Noran   
16/3/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément
J'ai simplement trouvé cela superbe.

Un hommage à ces sensations qu'un disparu nous laissent.
Je trouve la fin de votre texte particulièrement paisible, compte tenu de son propos, c'est ce qui m'a finalement le plus séduit.

Merci pour ce partage.

   Francis   
16/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Pudeur, sincérité engendrent l'émotion. Les souvenirs évoqués rappellent l'adolescence de deux garçons différents par leur origine sociale, leurs idées politiques, leurs goûts...mais devenus complices et amis. Pourtant, les "yeux marrons" ont décidé de partir, de quitter la bande de copains. Alors, dans la mémoire de ceux qui ont poursuivi leur chemin dans ce monde, il restera ce pourquoi n'avions nous rien senti ?

   Anonyme   
17/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour, Pouet,

Comment ne pas être touchée par ce texte émouvant, même si à être trop dans le vif du sujet, c'est la réalité plus que la poésie qui y gagne ses larmes de sang.

Cultiver le souvenir garde ceux qu'on aime vivants. C'est une belle façon de faire la nique à la mort !

Et puis je trouve superbe votre sensibilité, très... féminine. Surtout ne vous en offusquez pas, c'est beau de voir la pudeur frôler le noir entre les étoiles.

Je prends votre poème comme une porte que vous auriez écrit sur l'infranchissable.

Merci


Cat

   Lylah   
19/3/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Au début, je l'avoue, j'ai été un peu sceptique ...
Je ne retrouvais pas vraiment ce que j'aime tant lire dans vos écrits.

C'est à partir de la quatrième strophe que j'ai réellement été happée par la montée en puissance et en émotion qui s'y amorce pour ne plus se relâcher jusqu'à ce magnifique, et si simple, aveu final.

Un très beau poème, donc, qui me parle comme le plus souvent avec vos textes, directement au plexus...

   Recanatese   
2/4/2017
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Pouet.
Votre poésie m'a beaucoup ému, et la surprise a été d'autant plus grande que j'avais omis de lire le chapeau.
J'ai donc abordé ce texte, dans un premier temps, comme le récit touchant de souvenirs partagés avec votre ami... "Pourquoi cette nuit-là/As-tu saisi la corde ?"... le couperet est tombé et m'a coupé la chique comme il a coupé votre vers en deux. J'ai eu la gorge serrée pendant le reste de ma lecture, sans déceler pour autant la moindre trace d'un pathos excessif, écueil auquel se heurtent bien des artistes (je pense aussi à certains cinéastes...) lorsqu'il s'agit de traiter un sujet aussi sensible.
Merci pour ce beau moment de lecture.
Recanatese

   LaurenceSolouar   
27/5/2017
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Ben merde!
Je suis scotchée! C'est de la poésie à la Brassens:-)

Tu invitais la bande à Saint-Mandé Tourelle,
Ta mère nous préparait des tartines au foie gras.
J'habitais un deux-pièces Porte de la Chapelle
Et on bouffait des pâtes quasi tous les repas.


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