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Poésie en prose
RaniaBerrada : Demain est le même jour
 Publié le 08/08/15  -  7 commentaires  -  2591 caractères  -  127 lectures    Autres textes du même auteur

Face à ce vertige, je ne suis qu’un miséreux qui cahote au rythme des vagues.


Demain est le même jour



Aujourd’hui, je me réveille au milieu de l’océan. Dans l’immensité de l’océan. À vingt mille lieues de la vie et pourtant en plein milieu. Deux planches fixées sur une barque de fortune me servent de lit. Un matelas marin pour un matelot déchu. Un forçat de la mer qui s’en est allé prendre le large de sa vie. Aujourd’hui, j’existe. Aussi loin que j’étends mon cœur, rien ne perce, rien ne transparaît. Rien. Tout est infini. Tout est liberté. Ici, la vie bat, la vie rugit.

Je vogue sans but. Mon errance est mélodieuse. Des flots indomptables et féroces jouent une symphonie. L’océan est un orchestre dissipé. Il n’en a que faire de l’ordre. Sanguin et rebelle, il dessine à gros traits une étendue insaisissable et tenace. Qu’importe, je me suffis dans l’ersatz d’âme qu’il consent à m’offrir. Il purge la mienne, la redore de son humanisme. Je me perds entier, je ne veux plus m’appartenir.
Quand on convoite l’infini, tous les trésors du monde se muent en ridicules cailloux, les plaisirs exquis valent les peines délétères. Ces choses-là ne sont plus les miennes. L’océan m’en a libéré. Je me fiche de la marche du monde. Je me fiche de la guerre comme je me fiche de la paix. Rien n’a le goût de cette immensité. Rien n’a la couleur de ce vertige. Silence. Tout est dit quand plus rien n’est à dire.

Je vogue sans but. Mon errance est délicieuse. Je règne sur l’étendue marine. Roi et sujet. Maître et esclave. L’océan n’est pas à conquérir. Il n’est ni une bataille qu’on livre ni une guerre qu’on remporte. Dédaigneux et fier, il se révèle à qui sait l’invoquer. Patience. Je vogue, encore et encore. J’observe. Quelle belle unité ! Ce tableau est sans commune délicatesse, sans commune vérité.

Face à ce vertige, je ne suis qu’un miséreux qui cahote au rythme des vagues. Elles viennent s’écraser sur mon navire. Je pense au Pays imaginaire de James Matthew Barrie. Tout devient possible. Imaginer est un exercice aisé quand on ne se soucie de rien. Ici, je suis un enfant. Ni échéance, ni rancœur. L’océan est plein d’une pureté vagabonde que transportent des flots incessants.

Je vogue sans but. Mon errance est fastidieuse. Aujourd’hui, je ne ressens rien mais j’éprouve tout. La grâce et la pureté, la nature et la beauté. L’océan est une quiétude constamment renouvelée. Je suis ivre. Je tangue, encore et encore. Chaque remous m’incline davantage. Équilibre fragile. Révérence forcée. Mes heures sont comptées. Mais qu’importe la fin, qu’importe le début, l’éternel est un instant qui vaut pour tous les autres.


 
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   Vincent   
20/7/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je vogue sans but. Mon errance est fastidieuse. Aujourd’hui, je ne ressens rien mais j’éprouve tout. La grâce et la pureté, la nature et la beauté. L’océan est une quiétude constamment renouvelée. Je suis ivre. Je tangue, encore et encore. Chaque remous m’incline davantage. Équilibre fragile. Révérence forcée. Mes heures sont comptées. Mais qu’importe la fin, qu’importe le début, l’éternel est un instant qui vaut pour tous les autres.

sur ce radeau qui est votre lit

je suis avec vous

et je vous suis dans votre non pensée

dans votre quiétude

dans votre bien-être

vous êtes dans l’extase éternelle

et nos sommes bien

j'ai beaucoup aimé votre texte

   Robot   
8/8/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai apprécié à la fois le récit et une belle écriture. L'introduction donne envie de poursuivre la lecture et je ne l'ai pas regretté.
La fin est un peu mélodramatique peut être mais c'est un bémol que l'ensemble fait accepter.

   Anonyme   
8/8/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Vraiment bien rendue cette " errance mélodieuse " " au milieu de l'océan ", " À vingt mille lieues de la vie ".
Une écriture soignée, précise, sans grandes envolées lyriques, qui fait fort bien ressentir cette impression de liberté totale et coupure d'avec
le monde et son carcan.
Superbe texte.

   Anonyme   
31/8/2015
Bonjour RaniaBerrada

« Se réveiller au milieu de l’océan à vingt mille lieues de la vie et pourtant en plein milieu. »
Le titre invitait à la lecture et c’est superbe du début à la chute. Voguer vers l’éternel pour quitter le néant d’une vie plutôt sombre.

Merci pour ce bon moment, ou cette chimère.

   Anonyme   
8/8/2015
L'océan toujours ce "support" pour parler de l'inconscient, de l'aspiration à l'infini, au rêve, au tout possible.
Quelques "illogismes" -si tant est qu'on peut les nommer ici comme cela- errance fastidieuse - quiétude constamment renouvelée.
Très beau mais je serais resté sur une vague d'expression avec un tout petit peu plus de rigueur > moins d'adjectifs un peu faciles (ridicules cailloux- plaisirs exquis-) : l'éternel est un instant qui change, tout le temps. La vie au large... demain, le même jour ? Pas sûr...


Barrie : voilà l'info
https://en.wikipedia.org/wiki/J._M._Barrie

   Anonyme   
9/8/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une écriture d'une grande élégance pour s'en remettre à/de la mer.
"L'océan est un orchestre dissipé"
Un passage qui mérite une signature.

"Je me fiche de la marche du monde. Je me fiche de la guerre comme je me fiche de la paix. Rien n’a le goût de cette immensité. Rien n’a la couleur de ce vertige. Silence. Tout est dit quand plus rien n’est à dire."
Un autre passage qui me parle énormément.

Un bémol sur ce texte cependant étant l'évocation de ce James Matthew Barrie. Cette référence me parait inutile.

Une bonne lecture ceci dit.

   Anonyme   
9/8/2015
 a aimé ce texte 
Un peu
Bonjour,

bon je n’ai jamais vogué sans but au milieu de l’océan, ni réussi à me détacher du monde (c'est à dire à m'y fondre) sinon une ou deux fois, souvenirs mémorables mais dans des circonstances tellement plus terre-à-terre et anodines, et ce doit être la raison qui me laisse si perplexe devant votre texte.
Je n’arrive pas à saisir la grandeur de cet océan-là : sans commune délicatesse, sans commune vérité. ..pureté vagabonde…et puis une errance fastidieuse débouchant sur : La grâce et la pureté, la nature et la beauté…
Et puis vous partez sur une barque de fortune et vous finissez sur un navire (Elles viennent s’écraser sur mon navire). Le pouvoir de l’éternel peut-être ? Car vous débouchez sur : l’éternel est un instant qui vaut pour tous les autres.
Moi je serai sûrement mort de trouille une ou deux fois avant, et à ce propos je pense à Kierkegaard qui a écrit sur l’angoisse et le saut dans la foi, et qui compare la vie du croyant à une “marche” au-dessus d’un abîme, c’est peut-être un peu ce que vous évoquez (?).
Il me semble que votre texte parle de choses différentes : de l’innocence (référence à l’enfant), de la mort (mes heures sont comptées) de l’infini (Tout est infini.), etc. un peu trop de choses différentes peut-être car rien que sur : Des flots indomptables et féroces jouent une symphonie…il y a de quoi faire...

Votre texte a un petit côté expérience mystique c’est peut-être aussi une des raisons qui font que je ne comprends pas bien, il paraît qu’une expérience de ce type est indicible mais en général ça parle plus d’amour (il me semble, mais je ne suis pas spécialiste du genre) or dans votre texte je ne vois pas d’amour révélé, un peu d'égotisme peut-être, mais pas d'érotisme.

Au final mon sentiment est que vous voulez dire quelque chose, d’assez intéressant, de sage même, mais que vous n’y arrivez pas bien car cette expérience dont vous parlez est plus fantasmée que vécue, en tout cas je n'ai pas réussi à ressentir l'urgence de la parole ou du silence, au choix, d'un survivant.
En outre certaines images me paraissent assez bateau comme : Un matelas marin pour un matelot déchu, ou un forçat de la mer.

Mais tout ce que je viens de dire est bien sûr mon interprétation compte tenu de ma sensibilité et il se peut que je me sois fourvoyé de A à Z.

Cordialement

Corbivan


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