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Poésie néo-classique
TITEFEE : Suite de Tango tangue
 Publié le 15/09/07  -  2 commentaires  -  6786 caractères  -  63 lectures    Autres textes du même auteur

Tango tangue et envoûte... Envoûtant corps à corps. Met l'âme et le corps en déroute.


Suite de Tango tangue



Dans la salle enfumée, les lamentations du bandonéon
Mêlent toutes les notes romantiques de la séduction,
À celles des cordes graves et rythmées de la guitare,
Et les couples simulent l’amour, d’une sensualité rare.

Luis confie à sa partenaire qu’il a un autre surnom,
Et qu’il aime chanter et espère être célèbre un jour.
Il lui dit qu’il aimerait l’avoir près de lui toujours,
Et que leur destin lié leur offrirait un universel renom.

Méfiante mais intriguée, Maria le regarde à la dérobée,
Secoue la tête comme pour chasser de folles pensées,
Mais son corps se colle à celui qu’elle appelle Carlos
Et sent à travers la finesse du tissu le désir s’aviver.

La danse les possède et ils sont en harmonie de gestes.
Les pas de danse s’inventent et les figures s’animent.
Tenant à bout de bras la belle, Carlos, d’un élan preste,
La renverse et la caresse et les bravos crépitent, unanimes.

Mais la tequila et la fumée des cigarillos montent à la tête
Et pour un mot égrillard ou une œillade un peu trop appuyée
Les hommes soudain les uns sur les autres se jettent
Et les bouteilles volent, explosent et les femmes sont effrayées.

Crêpage de chignons, bagarres et coups de poings s’échangent
Dans ces bouges hommes et femmes ne sont pas des anges
Et certains viennent là souvent pour qu’éclatent ces batailles
Et repartent avinés mais heureux de leurs langages canailles.

Maria apeurée par toute cette incroyable violence essaie de sortir
Par la porte qui est prise d’assaut par d’autres jeunes femmes
Dans la foule hurlante elle a bien du mal de ses bras à amortir
Les coups aveugles qui pleuvent aussi cuisants que des flammes.

Carlos fendant la foule en esquivant les projectiles divers
Voit la silhouette de Maria emportée comme par la houle
Alpagué par un uruguayen aviné il s’en défait d’un revers
Mais sent éclater sa bouche sous un violent coup de boule.

Le sang coule en sa gorge et ses lèvres gonflent rapidement
Mais il ne sent pas les coups tant il n’a qu’un seul objectif ;
Rejoindre pour protéger celle qu’il aime depuis si longtemps
Et qui dans cette foule peut être en butte à un danger effectif.

Il n’est pas rare que dans ces bagarres des coups de couteaux
Viennent endeuiller des soirées où la danse pourtant est reine
Et les hommes en surnombre près des femmes jouent les héros
Créant des tensions que le moindre geste transforme en haine.

Brutalement porté dehors par la foule et sa violence en cohorte
Il débouche enfin sur le parvis de la place et cherche du regard
Son aimée qu’enfin il découvre dans l’encoignure d’une porte
Retenant sa bretelle arrachée et d’une main s’en fait un rempart.

En quelques enjambées il rejoint Maria et la prend dans ses bras
Et malgré la souffrance l’embrasse d’un baiser attisé par la peur.
Ce baiser a le goût d’une morsure et ignorants de tout le fracas
Elle et lui, oublient tout dans cette étreinte débordante d’ardeur.


                                              ***


La nuit est chaude, le ciel au-dessus de Buenos-Aires est si pur
Des étoiles grelottent dans cette immensité de porcelaine noire
Et sous la clarté de la lune naissent en eux des pensées impures
Car l’emportement de la jeunesse rend les précautions dérisoires.

La sudestada, vent puissant pourtant se lève venant du sud-est
Et l’air brutalement se refroidit et l’air suinte d’humidité ambiante
Maria frissonne et Carlos, prévenant, dépose sur les épaules sa veste
Et tous deux rejoignent Boca, quartier italien à la faune grouillante.

Carlos vit depuis peu dans ce secteur dans une chambre minuscule
Mais qui plonge sa vue sur le port illuminé et vivant jour et nuit
Maria contre lui s’absorbe dans sa chaleur comme dans une bulle
Et sent que sa vie bientôt prendra un autre sens en s’unissant à lui.

Un étroit escalier de bois, peint d’un jaune canari,
Grimpe jusqu’à un palier, orné de plantes vivaces.
La porte est couverte de cartes postales jaunies
Qui s’écornent un peu laissant voir les dédicaces.

Pas de clé, juste un pommeau de cuivre, rond et lisse,
Que Carlos tourne, pour entrouvrir la porte d’entrée.
La pièce est petite, couverte de livres et une pelisse
Recouvre le grand lit trônant au soleil dans la journée.

Maria découvre, derrière un paravent de bois ajouré,
Une table, une cuvette, un broc de faïence blanche.
Empli d’eau fraîche, un gant et une serviette brodée
De C et G rouges et un miroir posé sur une planche.

Carlos s’approche d’elle et en la caressant fait glisser
Sur ses hanches rondes la robe légère roulée en boule.
Il le fait si lentement que Maria en a la chair de poule.
Tous ses sens sont en alerte en accueillant les baisers.

Caressant la peau, Carlos du gant mouillé suit les contours
D’abord du cou penché en avant, puis de la gorge offerte
Effleure un sein, et laisse couler un filet d’eau tout autour.
Et le liquide suit les courbes jusqu’à l’intimité découverte.

Lui-même se déshabille et lave son corps mince, masqué
Derrière les claires-voies à l’odeur de santal du paravent.
Dans le reflet de la vitre, Maria brosse ses cheveux dénoués,
Et son regard se pose sur la mer, balayée par un fort vent.

De moites effluves marins, à l’odeur iodée, les enveloppent
Maria se laisse caresser et accepte les gestes, yeux fermés.
Une boule de cristal fait éclater les éclairs d’un kaléidoscope
Qui s’allument et s’éteignent, sur les deux corps, nus, soudés.

Ils ont tant rêvé de cet instant magique qu’il perd de sa réalité.
Carlos veut reculer le moment où il prendra ce corps vivant.
Il savoure les baisers à cette bouche et tempère sa fébrilité.
Il a tant rêvé de l’amour fait avec elle, qu’il se donne le temps

Elle feule d’une voix devenue rauque et à l’homme quémande
D’autres mots d’amour, des câlineries de plus en plus folles,
Et sur le lit tous deux ils s’effondrent, leur amour en offrande.
L’amour les emporte et dans la nuit ne jaillit plus une parole.


 
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   nico84   
12/11/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai ete surpris que ce poéme ne soit pas commenté tant il est beau et tant il est imagé.

D'abord ce tango où j'ai suivi les pas des deux personnages, et l'ambiance du bar si malsaine et instable, ici, dans tes lignes.

Puis l'amour qui se dévoile et la conscience de changer de vie et l'acte en lui même, décris vraiment avec finesse et poésie, bravo, c'est un poéme merveilleux.

   Filipo   
4/12/2008
 a aimé ce texte 
Bien ↑
étonnante poésie, qui se lit plus comme une nouvelle rimée, je trouve (une sorte de récit épique revisité). C'est frais, fort, et joliment exprimé, cependant...

Merci Titefée !


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