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Poésie en prose
troupi : Naître bois de résonance
 Publié le 18/01/14  -  11 commentaires  -  1728 caractères  -  141 lectures    Autres textes du même auteur

Les arbres représentent une forme de vie complexe.
Quand j'en regarde un, je ne peux m'empêcher de songer qu'il est issu d'une lignée qui a vu se lever le matin du monde il y a plus de quatre cents millions d'années.
En voici un qui vous raconte son histoire.


Naître bois de résonance



Je suis né au printemps, quand l'hiver se replie dans un profond sommeil.
La neige étendue adorant le soleil fut ma première image dans ces monts désolés.
Avant de la crever j'ai lancé mes racines à l'assaut du sous-sol, étranglé chaque roche trouvée et épuisé la terre ; généreuse à mes membres affamés.
Fort de ces mille ancrages je pouvais m'élancer ; mon socle ferait front à la montagne folle quand ses vents noirs hurlants cascadant des sommets se jetteraient sur moi.

L'altitude et le gel ont fait battre mon cœur beaucoup plus lentement que mes frères des plaines.
Du sépulcral silence, de la lenteur de vivre, j'ai appris la patience et la force des pierres.

Avec le temps je suis devenu cet autel minéral où songent les Dryades. S'enroulant à mes branches, jouant dans mes ramées, triturant mon écorce pour s'infiltrer partout, leur magie s'est coulée dans mes fleuves secrets. Combien d'années à vibrer d'énergies prodigieuses tapies dans mes tréfonds !

Aujourd'hui assagies elles espèrent l'heure de ma transmutation.
De mon corps jaillira un cœur de résonances : fruit d'une vie passée à forger des fibrilles d'acier.

J'ai donc aimé cent ans grandir dans un seul but : attendre la cognée ! Pour mourir et renaître... en tables d'harmonies, éclisses, chevalets... fins barrages sculpteurs d'intenses vibrations.
Dans ma seconde vie, voyageur aux quatre coins du monde, j'envahirai le temps de mes sonorités !

Sous des doigts magiciens vibrer à l'infini et noyer les parterres d'océans d'émotions !

Tout en bas, je les vois, des hommes m'évaluent... m'envisagent en quartiers.
Parmi eux un luthier.


 
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   Anonyme   
30/12/2013
 a aimé ce texte 
Pas
L'anthropocentrisme me gêne toujours.

Alors comme ça, un descendant d'une lignée qui, selon le chapeau, "a vu se lever le matin du monde il y a plus de quatre cent millions d'années", n'aurait pour seule ambition que de tomber sous la cognée d'une espèce encore dans ses langes pour lui caresser les oreilles ? Ben non, pour moi ça ne colle pas.
Je peux admettre, puisqu'on donne la parole à un arbre, qu'il évoque la roche en sous-sol où il accroche ses racines, l'altitude et le gel. Tout ça, c'est son univers. Mais comment aurait-il connaissance d'éléments de mythologie humaine (les Dryades), comment pourrait-il reconnaître à distance un luthier ? Comment saurait-il même que ça existe, un luthier ? Et dès le début, comment sait-il poser un nom sur les saisons, printemps, hiver ?

Le poème ne parvient pas à "suspendre mon incrédulité", à m'entraîner dans son univers, parce que son anthropocentrisme est à mon avis présenté de manière trop brutale, les perceptions de l'arbre n'ont rien de végétal, elles sont très intellectualisées et abstraites d'emblée (les roches "étranglées", par exemple, c'est déjà une image). En ce qui me concerne, le poème rate complètement son but si celui-ci, comme j'ai cru comprendre, était de faire ressentir la vie d'un arbre "de l'intérieur".

   Lunar-K   
8/1/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour,

J'aime beaucoup l'intention qui guide ce poème. Quelque chose de très rimbaldien là-dedans (volontaire ou non), jusqu'à ce final avec l'arbre qui s'éveille violon sous la main du luthier (ça doit se trouver dans la première lettre du voyant, si je me souviens bien...). C'est en tout cas ainsi que je comprends votre poème. Cette arbre qui se fait voyant, se gonflant de toutes ses expériences, y compris de la magie des Dryades, dans l'unique perspective de "naître bois de résonance", de sa seconde vie, et ainsi produire sa plus belle oeuvre. Toute une progression assez bien rendue ici, et le gros point fort du texte je trouve.

Sur l'écriture par contre, je coince un peu plus... Un petit souci de ponctuation déjà, notamment ici :
- "triturant mon écorce pour s'infiltrer partout leur magie s'est coulée" : Demanderait à être séparé en deux segments distincts.
- "J'ai donc aimé cent ans grandir dans un seul but" : Idem

Pas convaincu non plus par le point de vue choisi. Outre les dangers inévitables lorsqu'on donne la parole à un arbre (l'anthropocentrisme en premier lieu), je ne suis pas du tout certain que le subjectif soit le mieux à même pour rendre ce que vous voulez rendre. Un regard étranger, pourquoi pas celui-là même du luthier qui le scrute, me semble bien plus adéquat pour exprimer toute cette activité profonde et mystérieuse de la nature en vue de sa prochaine métamorphose. C'est que l'étranger, précisément, restant extérieur à ce dont il parle, est plus susceptible d'en saisir l'étrangeté et la magie que celui qui les vit réellement. Du coup son point de vue me serait plus intéressant dans ce cas-ci, puisque tel est, me semble-t-il, votre objectif avec ce poème.

Mais sinon, je le répète, il y a vraiment du bon dans tout ça. Je regrette juste qu'il ne soit pas toujours exploité au mieux...

Bonne continuation !

   Anonyme   
18/1/2014
Bonjour Troupi

Dans la vraie vie, un arbre ça ne cause pas, ça ne réfléchit pas, ça ne rêve pas de devenir caisse de résonance.

Mais nous ne sommes pas ici dans la vraie vie, nous sommes dans le monde enchanté des poètes où tous les rêves sont permis. Même, et surtout, ceux qui échappent au rationalisme. Comme le Bateau ivre d'un certain Arthur R.

Votre bel arbre ne descend pas les fleuves impassibles. Il est solidement ancré à sa montagne, insoucieux du gel.

Il lui faut, pour rompre les amarres, tomber d'abord sous la cognée. Alors, seulement alors, il deviendra ce pourquoi il à la conviction d'être né :

"Sous des doigts magiciens vibrer à l'infini et noyer les parterres d'océans d'émotions !"

Merci Troupi pour ce beau voyage dans votre univers poétique.

   leni   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
bonjour Troupi
C'est dans ta lignée Tu donnes une âme au sable du désert aux arbres Et ils se mettent à penser Moi tu m'embarques à chaque écrit
C'est sobre concis Et cet arbre peut penser à un ancêtre à lui qui est devenu un Stradivarius Et toi tu pourrais être un compagnon du Moyen-Age comme au Musée de Tours et lui tracer son devenir Je te reçois cinq sur cinq Objets inanimés oui vous avez une âme! Merci Ami Troupi Leni

   senglar   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour troupi,


Du carbonifère au luthier, voilà un raccourci audacieux mais généreux ; d'autres - plus sombres - fussent allés au bourreau.

j'aime que l'on préfère le luth au billot tandis que l'arbre ligneux adoucit les moeurs tout en bout de lignée.

Merci à vous Troupi :)

Brabant

   Anonyme   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour troupi... Le parcours d'un centenaire que j'aurais bien vu traiter en vers plutôt qu'en prose d'autant que l'ébauche du premier vers est présente en début de texte...
Je suis né au printemps, quand l'hiver se replie...

C'est une bonne entame... Faire parler un arbre, pourquoi pas ?
Je me souviens pour ma part avoir fait parler un... tourne-disques !
La prosopopée a été utilisée par de grands noms de la poésie, pourquoi pas par vous... et moi ?
Ce texte m'a ramené aux quelques vers qui suivent et qui ont bercé mon enfance :

"Le grand arbre frémit au souffle meurtrier ;
Et sa Dryade en lui va saigner goutte à goutte.

Les bucherons, liant le fagot et l’écorce,
Vont dépecer hélas ! ta stature et ta force ;
Ton ombre a marqué l’heure à ta chute ; mais sache

Au soir de quelque automne orgueilleux de ta mort,
Parmi l’effondrement de ta parure d’or,
Tomber au moins hautain et grave, sous la hache !

Henri de Régnier"

Ce que j'aime en particulier dans votre poème, c'est la chute avec l'espoir du luthier pour une nouvelle vie en quelque sorte.
Pas souvent fan de la poésie en prose, j'ai pourtant aimé ce texte...
Merci !

   Anonyme   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Etant un adepte de l'anthropomorphisme je ne peux qu'approuver cette façon de traiter une idée.
L'arbre qui raconte son avènement et son cheminement, ça me convient.
Par contre " attendre la cognée " brise un peu l'ambiance poétique de ce qui précède.
J'aurais mieux apprécié : " J'ai donc aimé cent ans grandir dans un seul but : renaître... en tables d'harmonies, éclisses, chevalets." Ce n'est, bien sûr, qu'un sentiment personnel.

   Miguel   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Bien
"Renaître bois de résonance"n'aurait-il pas été un titre plus conforme au texte ?
Je suis moi aussi de ceux qui n'adhèrent pas bien à l'anthropomorphisme. Partant de cet a priori, j'ai du mal à entrer dans le texte, dans ce "je" végétal. Mais je reconnais à cette écriture quelques belles qualités, et j'aime bien cette perspective d'utilité posthume, qui donne une sorte de sens à la mort.

   Lhirondelle   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonsoir Troupi

"Journal intime d'un arbre" mais ce titre est déjà pris et le vôtre "Naître bois de résonnance" est fort bien et a piqué ma curiosité.
J'ai apprécié cette façon singulière de faire parler cet arbre de sa vie. Peut-être un Erable ? fort recherché des luthiers.
Quelques phrases auraient gagné à être mieux ponctuées assurément.
Je trouve un peu maladroit dans la formulation : "J'ai donc aimé cent ans grandir dans un seul but". J'ai du mal à imaginer qu'il ait eu ce but, même si ce dernier apprécie de servir l'oeuvre d'un luthier.
A part ça, je trouve ce poème touchant, de belles images l'animent telle celles-ci, par ex "Du sépulcral silence, de la lenteur de vivre, j'ai appris la patience et la force des pierres" "Sous des doigts magiciens vibrer à l'infini et noyer les parterres d'océans d'émotions !"

Merci pour votre arbre et de ce qu'il nous livre sur sa vie passée et à venir.

Vous qui appréciez tant les arbres, Troupi, êtes-vous allez voir "Il était une forêt" film de Luc Jacquet ?

   Chene   
18/1/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonsoir Troupi

Erables ondés, Epicéas de Straiture, avez-vous donc une âme ?

Troupi nous le dit et je le vois cet arbre dont l'âge, le froid, les racines encastrées dans la roche créent ce particularisme de la nature que l'on nomme "résonnance". Car je l'entends également quand le luthier vient le choisir en forêt avec son maillet à la main dont il frappe le tronc pour écouter les répercutions du son dans les fibres torses ou extrêmement serrées de l'arbre. Il sonne différemment des autres... C'est sûr !

Et donc cette "âme" c'est celle que décrit cette prose de sympathique manière avec " j'ai appris la patience et la force des pierres", "triturant mon écorce pour s'infiltrer partout", "tables d'harmonies, éclisses, chevalets", etc... Et l'âme est là, glissée dans la caisse de résonnance du violon, du violoncelle par le luthier, pour que l'arbre vive encore des siècles et transmette les émotions et les vibrations.

Merci, Troupi, je me suis retrouvé, comme il y a 35 ans, auscultant, entendant le marteau forestier résonner sur le tronc de ces arbres si rares.

Cordialement
Chene

   melancolique   
26/1/2014
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour Troupi,

Le titre et bien trouvé, et il y a de jolies images dans ce texte, dont je cite:

"L'altitude et le gel ont fait battre mon cœur beaucoup plus lentement que mes frères des plaines."
"leur magie s'est coulée dans mes fleuves secrets"
"Pour mourir et renaître... en tables d'harmonies, éclisses, chevalets"

Un arbre qui rêve d'une deuxième vie où il pourrait:
"Sous des doigts magiciens vibrer à l'infini et noyer les parterres d'océans d'émotions ! "

La fin est une promesse que le rêve pourra se réaliser.

Merci pour cette agréable lecture, et au plaisir de vous relire.


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