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Poésie contemporaine
Yannblev : Sonnez mes matines !
 Publié le 16/11/22  -  12 commentaires  -  1811 caractères  -  167 lectures    Autres textes du même auteur

« Toute aube est pour quelqu'un la peine capitale
À vivre condamné que le sommeil trompa. » L. Aragon


Sonnez mes matines !



Le jour pose un point blanc au bout de ma nuit noire,
Il me faut me lever mais sans jamais savoir
Pour me changer d’hier ce que je pourrais faire,
Dessouder le voisin ou bien me foutre en l’air,
Juste histoire d’en rire ou bien de prendre date
Et de prendre au colback mon destin d'automate
Mais surtout ne pas prendre ce bus qui m’emporte
Comme un mouton perdu dans l’haleine des autres,
Prendre enfin mon congé par-dessous mes galoches
En jetant funambule un œil grave aux fantoches
De la vie. Retrouver le courage et l’audace
Qu’a perdus tout à l’heure ce faraud dans ma glace
Quand il démaquilla son rêve plein d’espoir.

Le jour pose un point blanc au bout de ma nuit noire,
Me voici tôt matin hébété d’habitudes,
Même plus consterné par tant de solitudes
Accoudées sur le zinc du bar tabac du coin
Où j’avale un café parmi d’autres pékins,
Pas plus vaillants que moi et pas moins philosophes,
Dans un autre costard mais dans la même étoffe,
Là à se demander ce que l’on pourrait faire
Pour sortir de l’orbite et de ce mal de terre,
Si on va prendre aux mots ces putains de journaux
Et s’en aller gerber au premier caniveau,
Se couper les mains pour ne pas prendre les armes
Ni rendre avec du sang la monnaie de nos larmes,
Finir en prenant feu comme un bonze vaincu
Et puis se consumer au milieu de la rue,
Disparaître en fumée en gueulant y en a marre !

Le jour pose un point blanc au bout de la nuit noire
Chaque jour que Dieu fait sauf lorsque c’est dimanche
Et que je prends le temps penché sur mon grimoire
D’aller en bouts rimés au bout de mon histoire
Que j’écris en noir tout le long de mes nuits blanches.


 
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   Mokhtar   
4/11/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Je sens Camus derrière ce personnage. Il a des airs de Meursault, il a le destin de Sisyphe, ce désabusé désenchanté dépressif.

Le taciturne envahit des journées sans relief, à attendre le dimanche...

Je trouve que la versification en rimes plates est parfaitement adaptée au thème, créant l'ambiance routinière.

"Mouton perdu dans l'haleine des autres" "même plus consterné",
"fantoches de la vie","solitudes accoudées sur la zinc","autre costard mais dans la même étoffe"...tant d'expressions qui habillent avec talent cette vie de M... sans espoir, sans joies.

Quoique...Il écrit la nuit...l'écriture : peut être un bout de ciel bleu ?

On sent que cette vie taciturne de banlieusard robotisé n'a pas de sens. Alors : "grande démission" et moutons dans la Creuse? ou bien feu d'artifice avec, pour en finir, un crime ou un suicide ?

Très poignant, très bien écrit, ce texte m'impressionne et fait partie de ce que j'ai lu de mieux ici.

   Ornicar   
6/11/2022
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour,

Poésie contemporaine et urbaine. Spleen d'un "pékin" parmi d'autres qui doit se lever "tôt matin" pour aller au turbin.
Le décor et l'ambiance maussades sont bien rendus avec ce premier vers qui revient comme un leitmotiv : "Le jour pose un point blanc au bout de ma nuit noire,". Déjà, rien qu'avec ces deux couleurs, on se dit que la journée va être bien grise et qu'on va en prendre plein la tronche.
Combien sommes-nous, certains matins, comme le narrateur à vouloir envoyer tout balader ? Chacun d'entre nous peut s'identifier facilement. Me revient un certain slogan : ne pas perdre sa vie à vouloir la gagner. Oui mais... en attendant il faut bien gagner son pain pour remplir le frigo.

J'ai aimé cet ensemble qui se lit aisément parce que le narrateur, et derrière lui l'auteur, a un sens aiguisé de la formule qui claque ou fait mouche. Par exemple :
- "prendre au colback mon destin d'automate" : le "colback" déjà m'amuse. Quant au "destin d'automate", on pense immanquablement au film "Les temps modernes".
- "Comme un mouton perdu dans l’haleine des autres" : on imagine sans peine les rames bondées, les odeurs, la promiscuité. Elle court, elle court la banlieue.
- "Prendre enfin mon congé par dessous mes galoches"
- "hébété d’habitudes" : Bel alliage de sonorités qui évoque bien la "marche au radar"
- "Pas plus vaillants que moi et pas moins philosophes" : Oh que oui ! Personnellement, j'aurais mis "mais pas moins philosophes"
- et juste après vient le superbe "Dans un autre costard mais dans la même étoffe". Comme il est bien croqué, ce sentiment que nous éprouvons parfois, de partager le même dégoût de soi ou de l'existence au delà de nos masques, de nos différences sociales, de classes ou autres.
- "Pour sortir de l’orbite et de ce mal de terre" : belle inventivité. Il fallait y penser. Il n'y a pas que le mal de mer.
- "D’aller en bouts rimés au bout de mon histoire" : Bel effet poétique induit par la répétition.

Le vocabulaire est riche et varié avec certains mots comme réssuscités d'un autre âge ou appartenant à un registre populaire, et que l'on n'entend plus trop de nos jours. Je pense notamment à : colback, galoches, faraud, pékin, costard, putains, gerber, zinc. Entre nous, doit plus y en avoir beaucoup des comptoirs en zinc...

Les alexandrins coulent avec un grand naturel et on a l'impression qu'ils n'ont réclamé aucun effort à leur auteur. Sans doute une conséquence des choix lexicaux mentionnés plus haut.
Enfin, le titre et l'exergue collent parfaitement à la teneur de ce texte.

J'aime globalement ce poème et cette ballade tristement ordinaire qui ne manquent ni d'inventivité, ni de poésie. Peut-être, est-ce un peu long. A moins que votre texte ne souffre d'une présentation trop compacte.
Rien de bien méchant en somme. A propos de somme, je retourne sous ma couette !

Ornicar ( en espace lecture )

   Vincent   
16/11/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Bonjour, c'est un triste mirage que cette putain de vie

C'est la sensation que je partage avec vous, et peut-être Aragon

c'est vrai et contemporain et j'adore tout, tout !!!

   Anonyme   
16/11/2022
Ce que j’ai aimé :
_____________
Le côté billet humeur davantage que poétique qui est tout à fait pour me plaire.


Ce que j’ai moins aimé :
__________________
La longueur par rapport au contenu. J’ai eu le sentiment d’un peu de remplissage par-ci, par-là au fil de la lecture.


Conclusion :
_________
C’est un texte solide sur le désabusement et le quotidien sans saveur de l’homme moderne.

   Pouet   
16/11/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Salut,

un fort joli morceau que j'ai fort apprécié. Cette tranche de vie est narrée avec talent, je ne me suis pas ennuyé un instant. Le propos est lucide et intelligent, il y a un ton aigre-doux, un zeste d'ironie, un ton désabusé mais pas désespéré. Vraiment le genre de poésie "simple"(même si ce ne l'est évidemmebnt pas à écrire) que j'aime lire.

Et puis je trouve ce "Le jour pose un point blanc au bout de ma nuit noire" vraiment bien senti, super bien trouvé.

Très bon texte, bravo.

   Lotier   
17/11/2022
L'autocombustion (vers 27 et suivants), j'aime bien , c'est un thème récurrent des nouvelles fantastiques… ça inclut le poème ?
Blague à part, sur le thème des vanités, c'est difficile de porter le lecteur jusqu'à la fin, du fait même du propos… « La chair est triste, hélas ! et j'ai lu tous les livres » (S.Mallarmé, Brise marine). Le parti pris logorrhéique peut se défendre, comme ces gens qui parlent trop vite de peur qu'on ne leur coupe la parole. Mais il faut reconnaître que l'impuissance est un puissant moteur poétique et peut être cathartique, un peu comme l'ennui finit par être créatif.

   Corto   
17/11/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour Yannblev,

Dès le titre ce poème m'a accroché. "Sonnez Mes matines" prenant le contrepied du "Sonnez les matines" de la rengaine "Frère Jacques", ding dong c'est bien vu.

J'aime bien aussi votre refrain "Le jour pose un point blanc au bout de ma nuit noire" qui introduit chaque strophe.
Puis le ton iconoclaste déroule une succession d'images parlantes et bien choisies:
"Dessouder le voisin ou bien me foutre en l’air,
Juste histoire d’en rire ou bien de prendre date
Et de prendre au colback mon destin d'automate".
ou: "Pour sortir de l’orbite et de ce mal de terre,
Si on va prendre aux mots ces putains de journaux
Et s’en aller gerber au premier caniveau,"

Bref on pourrait tout citer et se régaler.
Je ne trouve pas trop long votre poème, à ce niveau j'en redemande !

Mais vous avez déjà conclu avec cette belle phrase:
"Que j’écris en noir tout le long de mes nuits blanches."

Belle inspiration, beau travail.
Merci.

   inconnu1   
18/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Bonjour,

J'ai beaucoup aimé la force de ce poème, la colère qu'il exprime. Un petit regret, la césure du 7ème vers. Tout le reste est tellement fluide que "Mais surtout ne pas pren...dre ce bus qui m'emporte". Ce n'est pas du niveau du reste.

Bien à vous

   Luz   
19/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai beaucoup aimé ce texte désespéré, avec à la fin, pour seule illusion, pour seule canne de vie, la poésie.
"Sonnez mes matines : le jour pose un point blanc au bout de ma nuit noire."
Il faut souvent bien du courage pour se lever matin.
"Retrouver le courage et l’audace
Qu’a perdus tout à l’heure ce faraud dans ma glace
Quand il démaquilla son rêve plein d’espoir" : quelle désillusion !
Bravo et merci pour cette lecture matinale.

   Kemo   
21/11/2022
 a aimé ce texte 
Passionnément ↑
Bravo !

Ce texte mérite d’être lu, interprété, déclamé, gueulé dans les rues, les bars ou les théâtres !

Beaucoup se reconnaîtront dans ces questionnements, ce désespoir, cette angoisse, cette folie quotidienne !

J’aime autant le fond que la forme et votre voix mérite d’être entendue !

   Donaldo75   
25/11/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour Yannblev,

Déjà, j’adore la citation de Louis Aragon ; je trouve qu’elle pose bien le décor. Pour en revenir au poème lui-même, il est très réussi et cette forme contemporaine le sert à merveille. Je vois d’ailleurs là bien une filiation avec le poète précité – est-il une de tes inspirations en poésie ? – car il compose bien avec la narration, la réflexion et les images poétiques, tout en rimant de manière subtile sans imposer la musique. Le langage utilisé est parfois parlé ce qui l’humanise et le rend encore plus contemporain car le jeu narratif se conjugue au présent et nous parle d’aujourd’hui.

Bravo !

   ACOEUR   
10/12/2022
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Durs les matins de semaine !
jolies sonorités, vers et mots surprenants, images fortes

Très beau texte !


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