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Réalisme/Historique
Flupke : Londres – Bruxelles via New Delhi
 Publié le 04/04/09  -  20 commentaires  -  5439 caractères  -  55 lectures    Autres textes du même auteur

Une histoire vraie. La nôtre.


Londres – Bruxelles via New Delhi



Trop d’heures supplémentaires, trop d’économies que je n'ai pas le temps de dépenser. Mais où sont mes rêves d’antan ?

Méditation. Décision. Action.

Avril 1995. Je démissionne de l'Opéra de Londres. J'achète un VTT que je baptise Milou, car avec mes pinces à vélo, je ressemble à Tintin. L'idée est de « tâter » la route indienne. Sacoches à l'arrière et à l'avant, équipement de camping, traveler’s chèques. Je dérouille mes muscles en Europe. Je traverse le Kent, la France, l'Italie. Je butine à droite, à gauche. Tourisme. Musées. Bises à la famille. Retrouvailles avec les amis. Deux mois plus tard, j'arrive tout frétillant à Venise, taille fine et mollets bien galbés. Mon rêve d’aurores orientales se précise.

Balkans agités. Le bateau pour la Turquie s’impose. Un problème majeur pendant ces cinq semaines en Asie mineure : les autobus m'ignorent. Ils me dépassent en me frôlant, parfois de quelques centimètres seulement. Violents déplacements d’air. Dérapages sur les graviers du bas-côté. Grincements de freins de plus en plus fréquents. À contrecœur, je décide de renoncer à la roulette turque. En car et en ferry, j'effectue un repli stratégique jusqu'à Athènes, d'où je m'envole pour l’Inde.

Septembre 1995. Je me retrouve enfin à New Delhi, d’où je compte rayonner. Francophonie aidant, je fais la connaissance de Vincent, un Belge. Nous sortons du restaurant et nous entamons ensemble une marche digestive. La nuit tombe.

Soudain, un élancement dans mon pied droit me fige sur place. Tout se passe en deux ou trois secondes. Mon regard s'abaisse et distingue un animal dans la lumière blafarde. Mes neurones établissent la connexion entre la douleur et la créature. Mon cerveau évalue rapidement la situation. « The Rough Guide to India », un pavé de 1200 pages dans ma main. Mon corps s'incline et mon bras, galvanisé par la forte poussée d'adrénaline, s’abat sur la bête à une vitesse foudroyante. Le dos du livre broché, très plat et dur comme du bois, impacte la boîte crânienne de mon agresseur avec un bruit mat. Ce dernier lâche mon pied droit ainsi qu’un « kaï kaï » retentissant, suggestif de la sincérité de son repentir. Un chien. Pendant ces quelques secondes, j'ai eu l'étrange impression d'être spectateur de mes réflexes conditionnés, plutôt qu'acteur.

Je me ressaisis et profère une bordée d'injures à l’intention du canidé et de son intellect limité. Je boitille vers le bord du trottoir pour m'y asseoir. Vincent s'approche afin d’examiner les dégâts. Des deux côtés du talon droit, ma chaussure de sport semble perforée. Je l'ôte et constate que ma chaussette est également transpercée de part et d'autre. Autour de l'un des trous, j'aperçois une grosse tache rouge sur fond blanc, comme au cinéma. Un Indien qui a assisté à la scène suggère que le chien est probablement enragé. Il me conseille de recevoir une injection antirabique.

Vincent hèle un rickshaw. Nous nous connaissons à peine et je suis rassuré de voir qu'il s’y engouffre avec moi. Il me sert de béquille humaine. Nous avançons maintenant dans le hall immense d'un bâtiment. Certainement un hôpital puisqu'on nous y a déposés. Pourtant, pas la moindre blouse blanche. Sur les côtés, quelques patients et leur famille. Au centre, un vieux bureau en bois. Une femme en sari multicolore y trône. Bref conciliabule. D'accord, elle veut bien me planter sa banderille, mais avant il faut que j'aille désinfecter moi-même la plaie. Elle pointe son doigt en direction des latrines.

J'actionne le robinet, je me cramponne tant bien que mal au lavabo. En équilibre sur le pied gauche, je rince le droit. J'éloigne les microbes d'une main sceptique. Arrive la piqûre de toutes les piqûres. J’ai l'impression que l'aiguille touche l'os. Je gémis. Puis, Vincent me raccompagne vers mes quartiers.

Le lendemain, je me sens mal en point. Sans doute la réaction au sérum. Je retrouve Vincent sur la terrasse de son hôtel. Je lui annonce mon intention de me mettre au vert dans un monastère à Rishikesh, un centre de pèlerinage au pied de l’Himalaya. Dans mon état, je dois me résigner à caser Milou dans la soute d'un bus et à patienter jusqu'à la guérison complète de ma blessure, avant de pouvoir goûter à la route indienne. Vincent aimerait lui aussi visiter la ville sainte. Pas de problème, je lui faxerai mes coordonnées dès que j'aurai trouvé l'endroit idéal pour ma convalescence. Nous échangeons nos adresses européennes et philosophons sur la vie.


L'année suivante, de retour à Londres, j’envoie une lettre à Vincent. Il n’avait pu donner suite à mon fax : gravement malade, son rapatriement en Belgique s’était imposé.

En 1998, de passage à Paris, l'idée d'un crochet par Bruxelles me tente. Ce week-end-là, Vincent et sa compagne donnent une fête. Pendaison de crémaillère. Mon ami me présente à une Namuroise, grande pourfendeuse de frontières, elle aussi. Coup de foudre décalé. J'invite la belle à me rendre visite à Londres afin de lui montrer mes monuments et musées favoris. Invitation qu'elle honore... deux ans et demi plus tard (l'escargot symbolise Namur : les Namurois sont réputés lents). En 2002, un « oui » valide la justesse de mon émoi initial.

Quant à Milou, il s'est merveilleusement entendu avec la bicyclette de ma femme sur les routes belges. Et au fil du chemin, deux petits vélos les ont rejoints.


 
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   Anonyme   
4/4/2009
Bonjour Flupke
J'ai aimé ta nouvelle mais à cause du titre et de la photo, je m'attendais à autre chose. J'attendais une page d'un carnet de voyage d'un mec un peu fada qui décide de prendre son vélo pour accomplir un grand périple.

Tout va trop vite, j'ai pas vu les paysages, je n'ai pas senti ton admiration devant eux, j'ai pas senti ta fatigue, j'ai pas assisté à tes moments de découragements, tes crevaisons multiples, j'ai pas vu tes nuits passées... où ? J'ai pas senti ta solitude, tes angoisses, j'ai rien vu.
Je suis un peu déçue, je m'attendais à autre chose.

Une image oui, ces cars qui te rasent de quelques millimètres, à lire tout ce que j'ai lu sur ce pays que j'adore mais que je ne connais pas, tous les auteurs sont d'accord pour dire qu'ils conduisent comme des fous furieux.

J'ai aimé l'humour et la légèreté du récit mais justement parce que le ton est trop léger, on dirait que ce voyage n'est plus qu'une anecdote alors que forcément une telle aventure a dû compter beaucoup pour toi, et pour de multiples raisons.

Il manque le contact avec les gens, des gens qui t'ont peut-être vu en difficulté et qui t'ont aidé ou qui ont ri de te voir passer avec ton vélo en sachant d'où tu venais (ou déduisant d'où tu venais à la couleur de ta peau) et où tu comptais aller.

Bien sûr il reste l'écriture, toujours soignée et ton humour ainsi que la façon de ménager le suspens (j'ai pensé à une araignée, un serpent, certainement pas à ça) et j'ai souri aussi à la façon locale de désinfecter les plaies.
C'est du vécu mais... il manque beaucoup de choses ou alors c'est de ma faute, j'attendais de lire cette nouvelle avec une trop grande impatience.
Au plaisir toujours renouvelé de te lire et bonne continuation.

   marimay   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Flupke,
J'aime les phrases courtes qui collent bien à ce récit condensé d'une partie de votre vie : vous nous amenez à découvrir comment vous avez rencontré celle qui devint votre femme, rencontre qui se fit par un enchaînement de décisions et de hasards. Ce sont eux que vous avez choisis pour construire votre nouvelle (ce que ne laisse pas présager le titre il est vrai).
Bien aussi, le clin d'œil entre la photo qui ouvre l'histoire et la phrase qui la termine :
"Quant à Milou, il s'est merveilleusement entendu avec la bicyclette de ma femme sur les routes belges. Et au fil du chemin, deux petits vélos les ont rejoints."

   Menvussa   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une tranche de vie qui a failli se terminer par une tranche de steak pour canidé pas très câlin. L'inde et ses mystères.

Un texte très bien écrit avec humour. Rythme soutenu.

J'ai particulièrement apprécié le descriptif du réflexe conditionné usant de ce "guide du routard" comme d'une arme efficace, comme quoi, la lecture peut mener à tout.

"Et au fil du chemin, deux petits vélos les ont rejoints." Mignon tout plein.

   jensairien   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Super Flupke! Faut-il que tu aies vu en ce chien rageur la main du destin qui, te guidant du canidé à l'ami belge t'a mis sur la route de la tendre Namuroise ?
Possible puisque le récit va très vite jusqu'à la morsure, et qu'ensuite le rythme se ralentit.
Mettre autant d'informations dans un récit si court tout en restant limpide, c'est très fort.
J'aime bien tout le début (jusqu'au chien) qui est écrit comme une série de photographies : Musées, Balkans agités, violents déplacement d'air, dérapages sur les graviers, etc.
Fin très touchante. Tiens, et puis ce Milou qui fait des petits, encore un chien...
Belle plume, belle plume...

   widjet   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
La titre m’a un peu dupé puisqu’en fait de ce voyage on en saura pas grand-chose (la moitié du récit relate l’incident canin). C’est vrai que c’est un peu vite expédié mais de par la légèreté de l’écriture, je me suis senti à l’aise comme si j’étais seul avec l’auteur dans son salon. En fait, j’ai pris ce texte comme une confidence, comme si l’auteur me racontait son histoire oralement, comme une anecdote.

Et ça m'a plu.

Widjet

   Anonyme   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très touchant récit. Alerte, bien mené, vivant quoi !
Merci pour ce moment de lecture extrêmement sympathique.
J'aime aussi la photo !

   solidane   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Assez étonnant parce qu'efficace, très bien écrit. Ce texte se suffit à lui-même. En même temps je ne m'y trouve pas d'intérêt de lecteur. Alors que dire, bravo, ça fonctionnera (et c'est aussi le but) pour ceux qui s'identifieront, voyageront, feront que sais-je encore.

   Anonyme   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Passionnément
"Rachid", du même auteur, fut ma toute première émotion littéraire lorsqu'un beau soir d'octobre, je découvris Oniris.
Depuis, je consulte régulièrement la liste des nouvelles en attente afin de voir s'il ne s'y prépare pas la sortie d'un nouveau Flupke. Je suis rarement déçu tant le bonhomme est prolifique.
Ce dernier opus me parait encore meilleur que les autres. Et ce n'est pas peu dire.
Le style est impeccable. Phrases courtes, raffinées, parfois lapidaires. Je cite:
"Arrive la piqûre de toutes les piqûres. J’ai l'impression que l'aiguille touche l'os. Je gémis."
L'auteur a eu l'excellente idée de classer ce texte en catégorie "Réalisme/historique". L'effet de surprise est en effet un précieux ingrédient de l'humour.
La photo est tout à fait dans le ton de ce carnet de route tout à fait jubilatoire.

Bravo et Merci, Flupke, tu es un détonant voyageur!

   Selenim   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Un peu
Ben non.

La première partie du texte sonne comme une quatrième de couverture d'un roman - carnet de voyages.

La partie avec le toutou vorace est certes, bien retranscrite, mais a t-elle un intérêt particulier. Pourquoi avoir préféré cette tranche à une autre?
Entre Londres et l'Inde j'éspère qu'il y a des évenements plus mémorables pour un voyageur à vélo qu'une banale morsure de chien.

A part ça, l'écriture est fluide, un brin télégraphique parfois.

Les quelques pincées d'humour sont bien saupoudrées et j'ai beaucoup aimé la dernière phrase qui prend des airs de poème.

Un récit qui sonne comme l'extrait d'un roman dont on veut faire la promotion.

Selenim.

   Anonyme   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Les voyages et leurs désagréments. On en rigole toujours après.
J'ai vraiment aimé ce (trop) court carnet de voyage. Et oui, moi aussi j'aurais bien aimé voir défiler plus de paysages jusqu'à l'Inde. Il y avait forcément matière.
Peu importe, j'ai apprécié l'idée, le style et l'humour.

En fin de compte, on part souvent très loin chercher ce qui très souvent se porte à portée de main.

   kullab   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très sympathique, ce petit texte, j'ai bien aimé.
C'est vraiment bien écrit, chaque phrase est un petit clin d'oeil joliment amené.
"J'ai l'impression que l'aiguille touche l'os" m'a fait grincer des dents !
Ourmph...

   Anonyme   
4/4/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Salut Flipke ! J'aime bien cette tranche de vie qui se termine pour le mieux ! Mes amitiés "grand-paternelles" aux deux petits vélos... et à leur maman ! Caresses à Milou...

   Bidis   
5/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je suis pleinement d'accord avec le commentaire de Coquillette.
J'ajouterais qu'une énumération de choses dont on devine que chacune doit être palpitante, depuis la préparation du voyage jusqu'au retour, rend le texte pesant et seule, l'écriture incite à continuer la lecture. Mais bien heureusement !!!
Car à partir du moment où Vincent paraît, le texte s'envole et devient un cadeau.
Donc moyen pour la première partie, exceptionnel pour la deuxième, cela doit donner quelque chose comme très bien.

   Anonyme   
6/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Flupke, ton récit est un régal. Un régal de dépaysement. Un régal d'humour (parce que tu sais rendre presque drôle cette sinistre visite à l'hôpital). Un régal de tendresse pour finir.
Je t'envie, Flupke.
Fais-nous part de tes carnets de voyages. Tu dois en avoir, des aventures à raconter!

   Anonyme   
6/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un "ouille" pour un "oui"... Jolie histoire.
J'apprécie les pointes d'humour, et je ne suis pas anti "main
sceptique", bien au contraire.
Du tout bon flupke.

   nico84   
8/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'ai aimé ta nouvelle car j'aime ta capacité à décrire, informer et plaisanter en même temps, dans une même phrase.

J'aime vraiment ce côté reporter, aventurier, comme pris dans le feu d'une action qui semble proche et pourtant qu'on sait distante.

Le fond n'est pas exceptionnel d'où un plus grand besoin de maitriser l'écriture. Mais j'adore ta maniére de voir les choses.
C'est en ce sens que tes nouvelles me ravissent à chaque fois, pour l'instant !

   marogne   
8/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je m'attendais, mais par une lecture trop rapide du titre, à une nouvelle sur l'INDE.... Mais non, il s'agit d'une tranche de vie, ramassée, trop rapidemment brossée peut être mais combien touchante.

On peut voir dans cette hâte l'émotion encore présente, le grand merci au metteur en scène qui a choisi le chien enragé pour donner naissance à deux futurs globe trotter.

Oui beaucoup d'émotions dans cette nouvelle, d'amour et d'humour, une sincérité qui rafraichit.

Et puis une évocation amusée de l'INDE ça me change de ce que moi j'en ai retiré... et me pousserait presque à céder à ma famille qui voudrait que le prochain grand voyage soit de ce côté là du monde.... Mais il faudra que j'oublie encore un peu les rues de Bombay!

Merci pour ce bon moement de lecture, et longue et heureuse vie à la famille, dans ce monde ci!

   victhis0   
8/4/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
c'est sympatochounet, ça se lit comme un bonne bière, ça fait du bien par ou ça passe, puis c'est assez digeste. On est content de sa petite chope littéraire, on hésite à en demander davantage car on a encore un peu faim (ou soif). Puis, on contemple le truc, on se dit que, finalement, on a eu son saoul. On reprendra une autre Flupke un autre soir, volontiers, merci.
Mais il y a des Flupke Premium élaborées avec plus de patience et de savoir-faire que celle-ci, un peu fadasse quand même.

   Azurelle   
9/4/2009
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Bonjour Flupke,
Ta nouvelle est réalisée autour de pensées vives, c'est bien pensé au tout début j'ai trouvé cela surprenant. Ensuite tout se dénoue se calme doucement comme un rêve qui vient de commencer. Merci pour ta nouvelle j'ai passé un bon moment, c'était tout de même intrigant ce début de nouvelle intrigant mais.... intéressant oui j'ai bien aimé.

   Faolan   
11/4/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Une anecdote qui doit être chère à l'auteur au vu de la fin...
C'est bien écrit, avec comme toujours la petite touche d'humour "Flupkéenne".
Cela fait penser à une partie de roman. Idée à creuser ?
Bien mais j'ai lu mieux de ta part.
Ah que l'on devient exigeant !


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