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Vue sur la Méditerranée
marogne : Vue sur la Méditerranée  -  Vence
 Publié le 18/08/09  -  7 commentaires  -  10590 caractères  -  63 lectures    Autres publications du même auteur

Arnaud avait assez vite redouté le pire et convaincu Sophie de s’éloigner de Paris. Il avait de la famille à Vence, et c’est là qu’elle alla à la fin de l’année mille neuf cent quarante et un.

La vie sur la Côte d’Azur n’avait pas encore subi le contrecoup de la défaite et de l’occupation.

Des réfugiés fortunés de la partie nord de la France avaient choisi d’attendre au soleil la fin des temps troublés, et une sorte de vie mondaine s’était développée sous les palmiers de la Croisette ou de la Promenade des Anglais.

Sophie avait à sa disposition un appartement au centre du village, et passa les premières semaines de son exil dans un tourbillon de découvertes. C’était la première fois qu’elle venait dans le sud, et tout était une nouveauté. Elle avait pu, dans son milieu parisien de peintres, admirer les reproductions colorées de paysages, le bleu de la mer, les montagnes qui venaient jusque sur la plage, mais rien ne l’avait préparée au soleil et au ciel bleu de la Provence. Bien entendu Paris n’était pas toujours sous les nuages ou la pluie, mais ici, tous les matins, la première chose qu’elle voyait à travers les volets, c’était le bleu du ciel, comme si rien ne pouvait l’empêcher de s’étendre et de revenir sans cesse.


---

Vence, le 13 mars 1942,


Arnaud,


Je ne te remercierai jamais assez de m’avoir permis de découvrir cette magnifique région. Tout est coloré, chaleureux, et la vie semble beaucoup plus légère que dans la capitale. Si je ne savais pas que tu connaissais cette région encore mieux que moi, je te décrirais ces montagnes ensoleillées qui plongent dans la mer, ces palaces majestueux surplombant la mer, les senteurs délicates de la nature, l’amabilité de la population.

J’ai pu m’installer très confortablement dans la maison de Vence, ton oncle et ta tante m’ont laissé un appartement entier, bien trop grand pour moi. Je pense souvent à toi, particulièrement dans cette grande chambre le soir, je voudrais tant que nous soyons ensemble, dans les bras l’un de l’autre, et nous réveiller le matin ensemble au chaud soleil. Quand pourras-tu venir ?

Les nouvelles que nous recevons ici sont assez rassurantes, et les gens sont beaucoup moins préoccupés qu’à Paris. J’espère que tout cela va se calmer rapidement, et que nous pourrons reprendre une vie normale, ensemble.

Je t’aime.


Sophie


---

Paris, le 21 avril 1942,


Ma Chère Sophie,


Le printemps est arrivé à Paris, mais je ne peux pas dire que j’y retrouve l’insouciance et le bonheur qui caractérisaient cette saison. On dirait que les jeunes filles ont oublié qu’elles pouvaient être belles dans leurs jupes légères. Tout est gris, tout est triste. Tu me manques. Tu me manques atrocement.

On ne peut pas dire que la vie soit très difficile. On peut sortir, on peut boire, il y a suffisamment à manger, mais tout est triste, et surtout, les gens ont peur. On ne sait pas vraiment de quoi, mais c’est une peur diffuse qui pollue toutes les conversations.

Je n’ai rien peint depuis que tu es partie. Notre petite communauté continue à se réunir comme par le passé, on parle peinture, on parle art et on parle politique. Mais dans toutes ces discussions, ce n’est qu’à toi que je pense, ce n’est qu’avec toi que j’ai envie d’argumenter. Tu es au-dessus de ce petit monde, nous observant, ton rire prêt à fuser.

Tiens, tu te rappelles du petit Maxime qui nous avait été présenté par Albert ? Il m‘a demandé de tes nouvelles. Il est de la région de Nice lui aussi. Tu lui as fait une sacrée impression, pour un peu je serais jaloux… En tout cas, il m’a dit de te conseiller d’aller au casino Jetée-Promenade, il paraît que l’on y donne de grandes fêtes, ça pourrait t’aider à te distraire. Il y a aussi le casino de la place Masséna, sans doute un peu plus sélect. N’hésite pas à sortir, à te distraire, il faut que tu profites de ton séjour.

Je vois rarement Albert, il reste tapi dans sa maison d’Issy-les-Moulineaux. Il semblerait qu’il se soit enfin mis à peindre, mais je n’ai encore pas eu l’occasion de voir ce qu’il fait. Il va falloir que j’aille là-bas.

Je vais te laisser, et aller poster ma lettre au bas de la rue, je t’embrasse ma chérie, et je meurs d’être si loin de toi, mais je crois que c’est bien mieux ainsi pour le moment.

À très bientôt.


Arnaud


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Petit à petit, Sophie s’était acclimatée à sa nouvelle vie. Si les premiers mois avaient été consacrés au tourisme, elle avait décidé de profiter de toutes les distractions que pouvait lui offrir la vie nocturne de la côte. Par l’intermédiaire de l’oncle d’Arnaud, elle avait rencontré un couple qui, comme elle, avait fui la tristesse nordique et qui logeait à l’hôtel Westminster sur la promenade. La richesse d’Éric et d’Anna leur permettait de mener grand train, et c’est en leur compagnie qu’elle devint une des habituées du casino de Monte-Carlo. Ce n’est pas qu’elle jouât beaucoup, mais sa compagnie était appréciée, autant pour sa beauté que pour ses traits d’esprit. Malgré l’éloignement, il fallait que tout ce petit monde exorcise dans le luxe et les frivolités les nuages noirs qui semblaient progresser sur la France.

C’est lors d’une de ces soirées qu’elle rencontra Jonathan. Il jouait à la roulette dans la grande salle, jeune, beau, riche apparemment, et il gagnait tellement qu’un cercle s’était constitué autour de sa table. Sophie s’était assise en face de lui, et chaque fois qu’il jouait, il la regardait comme s’il y cherchait l’inspiration qui devait lui donner le bon numéro. Au début elle n’osait répondre, mais rapidement elle fut incapable de résister à son regard, et c’est en plaisantant à chaque coup qu’ils jouèrent jusqu’à fort tard dans la nuit. Jonathan avait perdu tout ce qu’il avait gagné, mais sa bonne humeur était intacte. Il l’invita à finir la soirée en partageant une coupe de champagne.

À partir de cette soirée, c’est souvent qu’on les vit ensemble écumer les bals et les fêtes de la Riviera. Elle n’avait pas su résister à son charme, et Arnaud était loin.


---


Vence, le 15 juin 1942,


Mon amour,


J’aimerais tant que tu sois là à mes côtés. La vie est ici toujours aussi insouciante. J’ai suivi tes conseils, et il faut reconnaître que bien que la vie intellectuelle soit moins riche qu’à Paris, il y a nombre de lieux où on peut s’amuser le soir.

J’ai fait la connaissance d’un jeune homme, un italien originaire de Rome, avec qui j’ai vraiment sympathisé, et qui me fait découvrir les secrets de la vie nocturne de la côte comme tu l’avais fait toi pour la vie parisienne. La seule chose qui manque vraiment, c’est toi, je suis sûre que tu l’apprécierais, et que nous formerions un fameux trio…

J’espère que tu as pu recommencer à peindre, et surtout que tu pourras bientôt venir me rejoindre.

Je t’embrasse, mon amour,

Viens vite.


Sophie


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Paris, le 2 juillet 1942,


Mon amour,


Ta lettre m’a bien fait plaisir, et je suis très heureux que tu ais recommencé à vivre. Ici, les choses ne s’arrangent pas, et les bruits les plus effroyables courent sur ce qui se passe en Allemagne. Je pense vraiment que je vais quitter Paris, j’ai l’impression d’être surveillé constamment. Je pense pouvoir te rejoindre dans le mois qui vient.

Comme je te l’avais annoncé, je suis allé voir Albert. Il a profité de cette période où ne rien ne se passe pour peindre comme un fou. C’est incroyable le nombre de toiles qu’il a pu faire, et elles sont de qualité. Il a développé un vrai talent, et ses couleurs, passées à grands coups de brosse, épousent dans leurs épaisseurs les sentiments qui nous étreignent. Il peint la plupart du temps la Côte d’Azur, sur la base des croquis qu’il avait faits avec Maxime. Toujours aussi amoureux, je crois bien, et même s’il essaye de me le cacher. Il ne peut se passer une semaine sans, que d’une façon ou d’une autre, il ne t’évoque dans la conversation… et cela me rapproche de toi. Il va falloir que tu voies ses œuvres, c’est un artiste qui est né. Il va venir chez nous pendant quelques semaines, pour se reposer dit-il. Chez lui, à Issy-les-Moulineaux, il ne peut s’arrêter de peindre. J’attendrais sans doute début août pour descendre dans le midi.

En attendant de te serrer contre moi, sache que je rêve toutes les nuits de toi, mon amour.

Je t’embrasse, à bientôt.


Arnaud


---


Vence, le 31 août 1942,


Arnaud, je n’ai pas eu de tes nouvelles depuis près de deux mois, et je suis inquiète. Tu m’avais écrit dans ta dernière lettre que tu comptais venir ce mois-ci, et toujours rien. J’espère que tout va bien pour toi malgré les bruits qui nous viennent de la capitale. Que se passe-t-il là-haut ?

Ici, la vie est toujours aussi douce malgré la chaleur de l’été à laquelle je n’étais pas vraiment habituée. J’ai essayé les bains de mer, mais le cœur n’y est pas, tu me manques.

Je t’avais parlé de Jonathan, cet Italien rencontré à Monte-Carlo, il est rentré chez lui, convoqué m’a-t-il dit. J’ai l’impression que la situation se tend au contraire de s’améliorer.

J’attends de tes nouvelles avec impatience.

Je t’aime.


Sophie.


---


Vence le 22 décembre 1942,


Mon amour,


Je ne sais pas pourquoi je continue à t’écrire malgré les six mois de silence que tu m’as infligés. Aucune réponse à mes nombreuses lettres, que se passe-t-il ?

Mais c’est bientôt Noël, et l’idée de passer un deuxième Noël sans toi à mes côtés, même si cette date est surtout une occasion pour faire la fête, m’est insupportable. Mais je continue à espérer, et je t’imagine, un jour, sur le palier de la porte, me tendant les bras, où alors arrivant au bout de la rue, souriant, je t’imagine avec moi dans cette grande chambre, ton corps contre le mien.

Mais baste, je t’attends, rejoins-moi, mon amour.

Je t’aime, et je t’attends,


Ta Sophie.


Ps : Il faut que je te dise que j’ai rencontré Maxime sur la promenade des Anglais. Ils ont détruit le Casino Jetée-Promenade, je n’aurais pas eu l’occasion de le visiter et de voir le travail d’Albert. Il était là, devant les ruines encore fumantes. Il était bouleversé, ses parents avaient travaillé dans cet établissement pendant plus de trente ans, c’est toute sa jeunesse qui disparaissait avec les dernières poutrelles. Je l’ai d’ailleurs trouvé beaucoup plus mûr que ce qu’il était à Paris, et même physiquement vieilli. J’ai compris qu’il avait emménagé dans une villa à Nice. Il m’a fait une drôle d’impression, mais il n’a pas changé, il me dévorait des yeux.


 
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   xuanvincent   
18/8/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↓
(Après une rapide lecture, voici quelques impressions.)

Après Paris, l'action se déplace sur la Côte d'Azur, sur une période de deux ans, durant laquelle le couple se voit séparé par la guerre.

L'importance de l'écriture épistolaire dans cet épisode a retenu mon attention.
Peut-être qu'une narration aurait pu être ajoutée entre les lettres ?

Le fait que le jeune homme puisse ainsi laisser aussi longtemps seule sa compagne, sans paraître vraiment s'en émouvoir, alors qu'elle lui parle de jeunes hommes qui manifestement ne la laisse pas indifférente, m'a un peu étonnée.

Détail :
. 'l"occupation" : j'écrirais plutôt "l'Occupation"
. "dans le sud" : j'écrirais de même "Sud" avec une majuscule
. "un italien" : pareillement, j'écrirais "Italien" avec la majuscule

   jaimme   
19/8/2009
Toujours cet aspect mondain, et donc trop froid qui me dérange. J'ai du mal à entrer dans l'histoire, pour l'instant.
une remarque:
Comment, dans le chapitre précédent, Sophie a-t-elle pu reconnaître l'accent de Nice si elle n'est jamais venue dans le Sud?

   Anonyme   
20/8/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Je rentre de mieux en mieux dans l'ambiance. Je commence à cerner les personnages, Sophie terriblement mondaine quoiqu'il se passe mais tout de même très attachée à Arnaud, Albert réfugié dans la folie de peindre et Maxime, je ne sais pas trop, je suppose que la suite m'éclairera…
Je m'attache un petit peu, c'est bon signe, j'avais du mal avant avec les romans sur Oniris.
J'ai relevé quelques maladresses dans les lettres, des répétitions notamment, mais je suppose que c'est volontaire, puisque ce sont les personnages qui parlent.

   Anonyme   
20/8/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Bonjour Marogne. Et bien, malheureusement, j'ai toujours du mal à rentrer dans ce récit qui n'arrive pas à me captiver. J'en suis désolée. Il y a pas mal de répétitions, un peu trop peut-être, mais l'auteur l'a peut-être voulu ainsi ?
- "Plongent dans la mer," "surplombant la mer" "Nous réveiller le matin ensemble" "reprendre une vie normale, ensemble", normale simplement peut-être... et d'autres.On peut sortir, on peut boire : peut-être : on peut sortir, boire..."ça pourrait t'aider à te distraire" : peut-être : ça pourrait te distraire..."Ses traits d'esprit" ? Bonne continuation.

   Anonyme   
21/8/2009
 a aimé ce texte 
Bien
bonjour marogne
Alors oui, pas mal de répétitions dans les lettres.
Quelques majuscules manquantes : dans le Sud, dans le Midi, la Côte
Je regrette que l'effondrement du casino sur la Promenade soit ainsi survolé. Il y avait matière à dire et décrire. Peut-être dans le prochain chapitre ?

"On dirait que les jeunes filles ont oublié qu’elles pouvaient être belles dans leurs jupes légères" : un peu gênée par cette phrase d'Arnaud, bien que je ne connaisse pas encore grand chose du couple, mais bon, ils s'aiment, ils sont séparés, alors je pense que Arnaud aurait pu trouver autre chose pour exprimer ce sentiment de tristesse et de tensions que "belles dans leurs jupes légères" (A la place de Sophie, ça me donnerait envie de rentrer dare-dare...)

Un petit doute : que tu ai(e)s recommencé à vivre

Entre la lettre du 31 août et du 22 décembre, l'inquiétude de Sophie, à mon sens, devrait être un peu plus marquée... il me manque ici quelque chose, d'autant qu'elle commence la lettre du 22 décembre par un "je me demande bien pourquoi je continue à t’écrire malgré les six mois de silence..." Le "je me demande bien pourquoi" est un peu trop décontracté, presqu'indifférent, ou juste amical.
La question que je me pose après cette lecture c'est : ils s'aiment vraiment ces deux là ? Et comme j'ai Maxime en arrière plan, je me demande... enfin voilà, c'est surtout du ressenti, ne connaissant pas la suite de l'histoire.
J'aime toujours l'ambiance, un peu frivole, très contrastée entre l'Histoire et l'histoire.

   NICOLE   
29/8/2009
Pour une femme sans nouvelles de l'homme qu'elle aime depuis deux mois, je la trouve assez stoique cette Sophie. Bien sùr, c'est une femme légére, mais de là à rester à Vence alors que son amour à manifestement disparu....en plus en se félicitant d'avoir rencontré un bel italien, et revue une vieille connaissance qui "la dévore toujours des yeux"! Franchement là, j'ai du mal à y croire.
Par contre, j'aime bien la description qui est faite de l'arriére pays niçois, et je vais continuer à lire.

   Anonyme   
23/9/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Bonjour Marogne
Je suis très partagée à la lecture de ce chapitre.

Les lettres ne suffisent pas pour me faire une idée de ce qui se passe. j'aurais bien aimé avoir quelques pistes.
Je vois bien Sophie en femme futile fatale et oublieuse mais ses lettres sont quand même un peu courtes (celle d'Arnaud aussi d'ailleurs).
" Il peint la plupart du temps la Côte d’Azur, sur la base des croquis qu’il avait faits avec Maxime. Toujours aussi amoureux, je crois bien, et même s’il essaye de me le cacher. Il ne peut se passer une semaine sans, que d’une façon ou d’une autre, il ne t’évoque dans la conversation… "
Dans cette phrase là je n'ai pas compris si c'était Maxime ou Albert qui était amoureux...

Sinon entre les deux dernières lettre, là vraiment il manque toutes les interrogations et toutes les démarches que Sophie ne devrait pas manquer d'avoir faites. A moins qu'elle ne se soucie plus d'Arnaud mais dans ce cas pourquoi la dernière lettre.

Au final. J'aime bien l'atmosphère superficielle qui est développée mais j'aurais préféré un chapitre plus développé. Là j'ai l'impression de rater des épisodes.

Merci

Xrys


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