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Fantastique/Merveilleux
Carmiquel : La pierre et le ciseau
 Publié le 07/11/13  -  5 commentaires  -  4717 caractères  -  400 lectures    Autres textes du même auteur

Le vide l'est toujours de quelque chose.


La pierre et le ciseau


Un fracas d’ailes affolées… Michelangelo tourna la tête vers la fenêtre : un tout jeune garçon s’était juché sur le rebord à la place des pigeons envolés, et plissait ses paupières pour habituer ses yeux à l’obscurité de l’atelier.


Au début l’enfant gardait ses jambes pendues au-dehors. Le sculpteur arrêtait son geste un instant et tournait la tête vers le garçon et lui souriait.

Alors un matin il s’assit franchement, tourné vers l’intérieur.

Peu après il sauta dans la pièce et s’approcha du Maître.

Il lui dit :


– Comment savais-tu qu’il y avait un cheval à l’intérieur de ce gros morceau de pierre ?


Michelangelo resta sans voix, et le garçon préféra en rester là. Il alla gambader parmi les embarras de la pièce. De temps en temps pourtant, il jetait un œil vers le sculpteur. Il le vit sourire et l’entendit dire :


– Un tel bloc de marbre, si dressé… si farouche…

Sonore comme un muscle…


Il claquait la pierre de coups de paume.


– Approche, vois comme il luit comme d’un suint glacé… J’ai compris simplement les désirs du marbre et je les ai accomplis.



Michelangelo avant de porter le coup qui ferait jaillir l’éclat du matériau frappait plusieurs fois de son maillet le ciseau dont il faisait varier l’angle d’attaque.

L’enfant, un matin, lui posa cette question :


– Pourquoi tu frappes plusieurs fois ton outil sur le marbre ?

– Je les fais sonner ensemble, j’attends le son juste ; c’est alors qu’il faut frapper.


Peu après Michel-Ange s’aperçut que, les paupières fermées, crispées, le garçon battait d’un doigt la mesure des coups et quand il estimait qu’un juste son avait retenti, il abattait, dans le vide, son doigt comme un maillet de justice et, ma foi, c’était souvent que le geste de l’enfant s’accordait au coup du sculpteur qui faisait voler un copeau de marbre.

Une fois l’enfant murmura :


– L’oreille voit…


L’artiste s’approcha de lui.


–Tu comprends étonnamment vite, garçon… À ton âge j’étais loin d’avoir ta science.

– J’ai un bon maître…

– Tu veux devenir sculpteur ?


L’enfant ne répondit pas. Il alla donner quelques coups de pieds dans les chutes du matériau.


Plus tard, dans la soirée, Michelangelo le rejoignit dans un coin et lui dit :


– Retourne-toi. Combien de tas de marbre vois-tu au milieu de l’atelier ?

– Deux, dit le garçon.


Et en effet il y en avait deux, l’ébauche bien avancée d’un cheval et, au sol, un tas d’éclats de marbre, des gravats.


– Eh bien, compléta le Maître, l’un c’est le travail et l’autre c’est l’œuvre.


Un jour que M-A était absent, le garçon monta sur le tabouret, fit tinter le fer sur la pierre plusieurs fois et d’un coup enleva un copeau de marbre. Le son lui parut si aigu et le bruit de l’éclat tombant sur le tas de gravats si terne qu’il réalisa sa faute et n’alla pas plus loin.

Le soir de retour et seul, Michelangelo découvrit aussitôt l’entaille. Il fulmina, s’effondra dans un châlit proche et regarda son œuvre longuement. Passa la main sur la pierre.


– Avec le relief de ce muscle maintenant, je ne peux plus faire du côté droit la jambe levée de mon cheval…


Puis :


– Qui le saura ?


Et il se remit à l’œuvre.


– Ce ne sera peut-être pas plus mal.



Quelque temps plus tard en rentrant dans l’atelier Miquelangelo découvrit l’enfant en train d’empiler des débris de marbre. Il les assemblait et les liait avec une glu à sa façon.


– Aussi bien t’y prendras-tu, même si tu reconstitues le bloc parfaitement, tu n’obtiendras que le vide d’un cheval…


Mais par entêtement, ennui ou esprit de contradiction le garçon poursuivit son projet.

Une semaine plus tard, Michel-Ange lui dit :


– Ne vois tu pas que plus ton travail avance et plus l’idée même du cheval est rendue invisible ?


Bientôt à côté du cheval qui était presque entièrement sorti de sa gangue, se dressa un bloc de marbre, certes un peu ébréché et bancal mais massif et convaincant.

Michel-Ange lui dit :


– Sais-tu pourquoi la sculpture est le plus grand des arts ? On ne peut jamais que retrancher, retirer…


Le garçon comprit la leçon mais parce que ce qu’il avait entrepris faisait sa vie maintenant et lui permettait de vivre tous les instants de celle du maître, il continua. Il posa un nouveau morceau sur la pile bientôt complète.


Le cheval était terminé et la venue du légat du Pape était attendue. Miquelangelo entra. Par un trou qui restait sur l’arête, l’enfant s’époumonait dans le roc.


– Que fais-tu caro ?

– J’entends ma voix résonner dans la pierre !

– Ne scelle pas la pierre que tu tiens sur le trou. Quand la sculpture aura quitté l’atelier pour le Saint-Siège, nous viendrons toi et moi parfois écouter le cheval dans le marbre.



 
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   Anonyme   
18/10/2013
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Une jolie histoire, je trouve, idéalisée bien sûr, mais j'aime bien cette idée de reconstituer le bloc de marbre avec le cheval en creux ! (Mieux vaut ne pas se demander comment c'est possible, bien sûr.)
J'ai bien aimé aussi cette idée de l'oreille qui voit, cette unité des sens ainsi affirmée pour percevoir le monde. Un texte intrigant, au final ; vous avez bien fait de ne pas chercher à le prolonger artificiellement, il dit ce qu'il a à dire.

   costic   
28/10/2013
 a aimé ce texte 
Bien
Belle histoire de relation entre un enfant et son maitre, le plein et le vide. Un questionnement sur des complémentarités, qui donne matière à réflexions.
J’ai suivi avec plaisir la naissance de ce cheval, seule la fin me parait un peu énigmatique… Une légère ombre acoustique pour moi…

   Pepito   
7/11/2013
Forme : une écriture plaisante sans fioriture.

Fond : Mignonne histoire avec un MA plus gentil (et seul) que nature.
Les phrases de l'enfant sont adorables de naturel, une jolie fin aussi.

Pour vérifier, j'ai tenté d'imiter l'enfant au début de l'histoire: assis sur la fenêtre, regardant à l’intérieur, les jambes à l'extérieur... ben j'y suis pas arrivé ;=)

Un bonus pour "Comment savais-tu qu’il y avait un cheval à l’intérieur de ce gros morceau de pierre ?"

Bonne continuation.

Pepito

   Perle-Hingaud   
9/11/2013
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Je trouve que l'idée est jolie (il me semble avoir déjà entendu la première question de l'enfant, mais peu importe), les dialogues poétiques, mais que le traitement manque de rigueur, de relecture peut-être. Par exemple, les différentes façons d'écrire Michel-Ange (parfois même par des initiales), l'absence de respiration dans une phrase comme celle-ci : "Michelangelo avant de porter le coup qui ferait jaillir l’éclat du matériau frappait plusieurs fois de son maillet le ciseau dont il faisait varier l’angle d’attaque."...
Restent de jolies images, et celle de la voix qui résonne dans l'empreinte du cheval me plait particulièrement.

   toc-art   
12/11/2013
Bonjour,

je n'ai vraiment pas été convaincu par ce texte. Autant j'ai aimé l'idée du cheval dans le marbre, autant j'ai trouvé l'écriture terriblement "statique", aussi froide que la pierre justement, sans la moindre musique intérieure ni le moindre charme. C'est assez étrange et pourrait vous sembler un bon (ou mauvais) mot à peu de frais, mais j'ai vraiment eu l'impression de lire une ébauche de texte.

bonne continuation.


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