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Sentimental/Romanesque
caropoukontli : La première fois
 Publié le 25/06/11  -  12 commentaires  -  11862 caractères  -  218 lectures    Autres textes du même auteur

Une jeune femme désabusée tente d'expliquer son comportement amoureux en remontant le fil de ses souvenirs.


La première fois


La première fois que j’ai vu Titi, il m’avait eu l’air sain d’esprit. C’était exactement ce qu’il me fallait. Mettre fin à dix ans d’errance affective. Renouer avec le monde rationnel des gens bien comme il faut. Sagesse et raison. Dents blanches et regard franc. Cheveux courts, bien rasé. Aftershave au vétiver. Rien qui dépasse. Joli petit sujet. Malgré son nom à croquer, c’était un homme, un vrai, un plus âgé, un qui plairait à ma mammy. Bien sous tous rapports. Déodorant et dentifrice. Un dont on retire lentement les lunettes avant de passer aux choses sérieuses, et que déjà ça, ça le fait rougir. Un qui se lave toujours les mains avant de passer à table. Qui tient la porte du restaurant. Un père pour vos enfants. Un ingénieur, un vrai. Un qui travaille. Weekends à la mer. Et qui fait joli sur la plage. Maillot de bain bleu marine, bronzage ni trop ni trop peu. Qui trouve qu’un chien, c’est sympa. Et qui ne trouve pas ça médiocre de le dire. Moi, j’ai toujours cru que les chiens, ça s’aimait qu’en cachette, quand personne ne vous regarde. Une véritable résolution du jour de l’An. Tu mèneras en fin de compte une vie normale, peuplée de gens cordiaux. Tu aimeras Noël en attendant d’aimer aussi la fête des Mères. Tu ne diras plus jamais à personne que t’aimes mieux la Toussaint.

Et j’ai tenu le coup. Trois ans. Très fière de moi.

J’avais pris cette fois toutes les précautions. Éliminé toutes les tentations. Je fuyais même Gaby, mon meilleur ami, qui boudait d’être destitué de ses fonctions de Gemini Cricket. J’étais grande, 25 ans déjà, jeune diplômée, je tenais mon destin entre mes mains, j’avais toute la vie devant moi. Surtout ne pas regarder en bas. Quel joli couple vous formez ! C’est bientôt Noël, il a neigé : si on faisait de la luge ? C’est joyeux, ça fait Jingle Bells, alors maintenant il est plus question de jouer à « Tu peux crier, je freinerai pas ». Vin chaud, Titi enlève mes moufles, souffle sur mes doigts gelés. Ne réchauffe que mes doigts. Mangeons équilibré, des légumes verts, du riz complet. Interdite, la viande saignante. Et la chair humaine ? Balade dans les bois, pique-nique dans un panier, main dans la main. Et puis resto, ciné, et puis l’amour. Dans un grand lit aux draps bien nets. Prévenant, des roses pour la Saint-Valentin. Des huîtres pour Noël. Un orgasme par semaine. Des croissants le dimanche. Des baisers sur des post-it.

Alors pourquoi ai-je fui ? Overdose de bleu marine ? Parce que je n’aime pas qu’on me demande si ça va pendant qu’on me fait l’amour.


La première fois que j’ai vu Tom, il vomissait après avoir avalé un poisson rouge vivant. Si je l’avais connu avant, j’aurais pu lui apprendre que c’était mieux de le mâcher. Étudiants de première année en biologie, on profitait de notre autonomie toute neuve pour faire des tas de choses. Tout sauf étudier, en fait. Or un jour que l’on revenait en chahutant de nos habituelles escapades en forêt – on avait passé la matinée à briquer le canard. Briquer consiste à lancer des briques : c’est une méthode de chasse qui n’a pas fait ses preuves mais c’est Gaby qui l’avait inventée – les bras chargés de fleurs, les sacs remplis de bocaux d’insectes et de matériel de pêche, le chemin nous ramena à proximité du studio de Tom. Un vacarme inquiétant s’en échappait avec fracas. Tom verdit et sans un mot courut ventre à terre rejoindre ses pénates, refermant brutalement la porte derrière lui. Notre groupe n’était plus qu’une énorme interrogation collective plantée devant le seuil.

Mais moi je savais. Oh pas depuis le début mais tout de même, et j’étais plutôt contente de pouvoir enfin cracher le morceau à Gaby. Tom, il avait une copine. Depuis cinq ans. Il était même carrément fiancé. Il vivait avec elle le weekend. Et couchait avec moi la semaine. D’après les hurlements acérés, on en a déduit qu’elle avait mis la main sur mes sous-vêtements. Je ne les ai jamais revus. Mais Tom finit par la convaincre de quitter les lieux temporairement.

Quand on est entrés, il était assis sur le futon. Il avait le grand sourire crispé de ceux qui savent qu’il n’y a rien à ajouter. Le décor parlait de lui-même. Les rideaux découpés aux ciseaux à ongles, le frigo rempli avec des plantes délestées de leurs pots, la terre mélangée à tout ce qu’on peut trouver de liquide dans une pharmacie. Les vitres repeintes de dentifrice bleu fluo. La pince en métal servant à rassembler en chignon mes si longs cheveux déchirée dans le sens de la longueur ! La bouffe répandue dans les tiroirs de la garde-robe. Du yaourt sur ma brosse à cheveux, de vieux bâtonnets de poissons décongelés dans ma trousse de toilette. Mon shampooing fleur de lys, mon démêlant cheveux soie et mon huile de douche peau de satin : répandus sur les murs à la façon d’une gigantesque éjaculation.

La nappe qui glissait si bien pour nos courses d’escargots et nos spaghettis sur table : déchiquetée. Si la copine de Tom avait eu plus d’imagination, sans doute y aurait-elle carrément mis le feu. Et les oreillers complices : éventrés. Et les draps, ces traîtres, lacérés. Et Tom : cinq doigts rouges sur la joue gauche.

Mais bon. Comme on n’avait pas été gentils à lui rester sur le seuil comme des charognards, on l’a quand même aidé à tout remettre en ordre. Après quoi j’ai estimé qu’il était temps de partir.


La première fois que j’ai vu Bambi, il me dévisageait dans la cour de récré. Comme ça semblait lui faire plaisir, j’ai accepté d’aller me promener main dans la main avec lui. C’était gentiment le printemps autour de nous. Mais moi, j’avais gardé le cœur en hiver, j’avais quelques années plus tôt pêché la carte qui dit : passe un tour, passes-en deux, arrose d’essence et mets-y le feu. J’étais carbonisée et la neige avait recouvert mes gravats. Gaby me disait : regarde ses yeux, ils sont immenses. Alors pour faire plaisir, je regardais ses yeux et mon reflet dedans me fascinait. Ensuite, on m’a dit que c’était l’été. On est allés à la mer et j’y fus un iceberg à la plage. De ceux qui refusent de fondre. Bambi, je me souviens à peine de ce à quoi il ressemblait. Je me souviens juste qu’il me disait : je t’aime. Sans lui sourire, je répondais : je sais.


La première fois que j’ai vu Gaby, tout le monde s’en souvient, sauf moi. L’alcool. Ce sont les autres qui m’apprirent que j’avais un meilleur ami. J’en fus réduite à leur demander « c’est qui ? ». Maintenant que j’ai la réponse à cette question, j’en ris. Notre amitié s’est construite dans un lit, sans contexte sexuel, un lit qui faisait office de divan. De ces lits à faire des cabanes, qui se transforment en drakkar ou en igloo. De ces lits dont on ressort plus fort pour toujours.

Il y eut ensuite la découverte du petit flacon en verre, sur la tablette du lavabo. Elle n’a pas un joli nom, la femme de ta vie, Gaby. Mais toi aussi tu vois tout ce que je veux cacher. C’est que Gaby, il est énervant. Toujours à mettre le doigt là où ça fait mal. C’en est fini du temps où je pouvais me mentir à moi-même. Alors, je lui raconte tout. Ou presque, enfin j’essaye, sauf les mots que je ne peux pas prononcer. J’essaye de le gruger. Et quand je lui dis que je suis amoureuse, ça le fait rire car en plus, il n’a aucun tact. Il m’énerve. Je me fâche. Alors je le jette dehors. Il s’en va sous la pluie et je pleure. Quand je vais voir après lui sous la pluie, il n’y est plus. Quand je le retrouve enfin, il se fout de ma gueule. Le problème avec Gaby, c’est qu’il a raison.

Et puis quand je dis que je suis heureuse, ça le fait plus rire du tout. Il me file en douce des coups de pieds sous la table, arrête de mentir. Il redresse l’air de rien mon pied droit qui se tourne toujours vers l’intérieur. Il va rechercher mes mains rentrées toutes seules dans mes manches. Tortue, qu’il m’appelle.

Puis il y a ces jours où il doit choisir, entre la fête et sa santé, entre la mémoire nécessaire aux études et le risque de l’oubli total que provoquerait une nouvelle crise. Et ces fichus médicaments… Certaines nuits, ayant bu, il était tellement furieux contre eux qu’il les balançait par la fenêtre. Et moi, à quatre pattes dans le jardin, fouillant l’herbe à la recherche du maudit flacon.

C’était bizarre le jour où il a exprimé l’idée qu’il se faisait des mots interdits. C’était un soir de chagrin, on venait encore de lui retirer son permis de conduire. On arpentait à pied la ville endormie. Passant bras dessus bras dessous devant une vitrine, elle nous renvoya notre reflet : mal assortis, mal fagotés, mal... Il me dit : on ferait un beau couple tous les deux, l’épileptique et la violée, au bal du Croque-Monstre Show, tu ne trouves pas ?


La première fois que j’ai vu Vlad, il pleuvait à verse. Un orage de montagne rouge et noir. Lui, il était là, ruisselant, beau comme un chat sauvage. Il essayait de maintenir un feu allumé sous la pluie, coûte que coûte. Il y réussit. Et au jour où j’écris ces mots, je suis sûre que ce feu brûle encore, quelque part. Tout chez lui reflétait la férocité, le dégoût, la colère. C’était un viveur, un flambeur, un beau parleur. J’ai cru d’emblée tout ce qu’il pouvait dire, douter était au-dessus de mes forces. Lui, il avait le regard coupant et le sourire inquiet.

Et il disait souvent : « Sauve-toi par la fenêtre ». Il disait : « Je rigole », mais ses yeux, eux, ne mentaient jamais. Il me répétait : « Tu viendras à mon enterrement ».

Il n’aimait pas les gens mais il aimait la vie. Il voulait tout et il le voulait tout de suite. C’est de cette façon aussi qu’il m’a voulue, moi. On était des gosses de 15 ans, à peine. Corps graciles et peaux dont la douceur était vertigineuse. Et lui, pour moi, c’était Quetzalcóatl.

Cela suffisait à nous liguer contre le reste du monde. On vivait comme à l’intérieur d’un sablier géant, fascinés par la course des astres, terrifiés par le temps qui s’écoule d’heure en heure, mécanique implacable.

L’amour, je ne connaissais pas. Je ne savais pas.


La première fois. C’est émerveillée que j’ai regardé mon corps répondre à l’appel millénaire. J’ai écouté mon cœur battre quand il a déboutonné ma chemise blanche. J’ai été étonnée de sentir l’air du soir rencontrer ma peau. Je me suis crue première femme au monde.

On n’avait pas peur de la mort, ça ne faisait pas assez longtemps qu’on était nés. Lui, il pensait que plaisir rimait avec souffrance et que tout était jeu. Subjuguée, je l’ai suivi dans la célébration qu’il vouait au culte du roi Lézard. Sur nos peaux à peine pubères ont commencé à apparaître de drôles de fleurs violettes. Je l’ai laissé marquer de ses dents tous les angles de mon corps, mes hanches étroites et ma nuque de petit gibier. Lui, il m’exhortait à goûter son sang. C’était capiteux et métallique. Une drogue si douce et si dure à la fois. J’avais toujours été fascinée par les armes blanches.

Quelques mois ont passé, pleinement. Les astres tournaient au ralenti pour nous laisser plus de temps. Les étoiles s’égrenaient une à une du sablier géant avec une infinie lenteur. Et nuit après nuit, il est devenu plus pressant. Il ne prenait plus la peine de dire : « Je rigole ». Pourtant, chaque fois qu’il me laissait seule dans le noir, je l’entendais rire dans ma tête.

Et puis une nuit, le jeu a atteint ses limites. La chambre était très sombre. Aussi, quand je m’en suis rendu compte, il était déjà trop tard. Mais lui, il savait, il avait vu ma main trembler. La lame déraper. Un peu trop profond. Un donné pour un rendu. Il savait et il n’a rien dit. Son drôle de sourire a flotté un instant devant mes yeux agrandis par l’horreur.

Longtemps après, je me suis mise debout et j’ai contemplé l’héritage qu’il m’avait laissé. Un goût trop prononcé pour la torture : invendable ; des souvenirs tactiles ingérables : qui pourra soutenir la comparaison ? Et une promesse, que j’ai tenue : je suis allée à son enterrement.


 
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   Anonyme   
16/6/2011
 a aimé ce texte 
Bien
Une narration assez envoûtante, à reculons, dont j'ai apprécié la maîtrise. La fin archi-dramatique est là pour marquer le traumatisme originel si j'ai bien compris, mais à mon avis c'est trop. Je crois que j'aurais préféré des contrastes moins marqués : pourquoi faudrait-il forcément une tragédie pour donner du relief au récit et à sa narratrice ?

   widjet   
18/6/2011
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Le premier paragraphe trop télégraphique (avec absence de verbes) m’a rebuté. J’ai hésité à poursuivre. Ensuite, je m’y suis fait et au personnage aussi, jeune fille pudique et blindée dans sa carapace de cynisme et de dérision. L’auteur a du répondant, de l’esprit (joli ce « ma nuque de petit gibier »), de l’humour (belle entrée en matière dans le « La première fois que j’ai vu Tom, il vomissait après avoir avalé un poisson rouge vivant ») et quelques phrases font mouche (« douter était au-dessus de mes forces »). Le style écrit-parlé (mais pas excessivement familier) fonctionne même si parfois on ne pige pas bien (« on n’avait pas été gentils à lui rester sur le seuil ») ou quand l’auteur veut faire trop écrit (« les hurlements acérés ») dans son discours.
La fin en revanche, bascule de façon trop soudaine vers quelque chose de plus sordide. Pas très bien amené, je trouve. Un peu plus de rigueur dans l’écriture et ce ne serait pas trop mal.

W

   Anonyme   
19/6/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Pour le coup ce qui se démarque ici, c'est le style. L'auteur écrit en pro de la plume, comme ceux qui écrivent pour le théâtre ou le cinéma. Ici on ne s'embarrasse ni de scénario, ni d'intrigue, on raconte sur le pouce, au coin du bar, entre deux mojitos et ça fonctionne bien. Dommage la chute : j'aurais préféré qu'il ne se passe rien, comme chez Duras ou Robe-Grillet ou Saraute. J'aurais aimé que l'auteur assume n'avoir à raconter que les aventures avec les hommes qui passent ou sont passés, j'aurais trouvé ça franchement culotté et ça m'aurait emballée. Ceci dit, quel panache dans l'écriture !

   antares77   
26/6/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↑
L'écriture est géniale, envoutante, et on sent que c'est sur la fin que l'auteure "se lâche" et se livre, lorsque l'écriture devient une transe et les mots sont spontanés. Bravo, et vous êtes d'autant meilleur que vous êtes, justement, spontanée (à mon humble avis).
seul bémol, le drame final est trop dramatique, justement, pour rester en cohérence avec le reste du texte.

   monlokiana   
26/6/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Très belle nouvelle!
Dans certains textes, l'absence de verbe dans les phrases fait que celui-ci devient incohérent mais ici, c'est tout a fait le contraire, cela donne un bon rythme au texte.
Les différents passages sont magnifiquement bien superposés et à chaque fois que "la première fois" revient, on sent que le texte évolue en émotion et en beauté...
Pour ma part, j'ai trouvé cette nouvelle très...Bien. Aucun mauvais choix sur la fin...
Bravo!
Monlo

   Elw   
26/6/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Une bonne nouvelle.
J’ai beaucoup apprécié. La lecture est agréable. Le style est frais et drôle avec quelques passages à l’aspect enfantin que j’ai bien aimé. On trouve ensuite moins d’humour à la fin du texte qui prend une tournure plus intime et sentimentale. Nous glissons dans l’émotionnel (un peu maso). Puis survient le drame qui attente la légèreté qui précédait. Effectivement, je trouve que cela donne de la force au texte, mais c’est peut-être trop intense par rapport au reste.

   Lunar-K   
28/6/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Historique d'une autodestruction amoureuse... J'ai beaucoup aimé cette narration à rebours que je trouve plutôt originale et intéressante.

Le style est, lui aussi, très intéressant et parfaitement adapté à ce type de narration. Bref, succinct (mais toujours littéraire), un style tout intérieur. Comme si c'était à elle même (et je pense que c'est le cas) que la narratrice se racontait ses propres aventures. Pour s'expliquer, pour se justifier face à cette autodestruction qui nous est présentée dès la première partie.

Ce choix dans la narration ne va pas sans quelques imprécisions, la narratrice n'ayant pas besoin de tout s'expliquer, quelques mots suffisant à éveiller en elle toute une scène alors que pour nous, lecteurs, pouvons avoir un léger sentiment de trop peu. Je pense notamment à "La première fois que j’ai vu Tom, il vomissait après avoir avalé un poisson rouge vivant"... Pas plus d'explication sur cet attitude plutôt étrange, mais cela participe à l'ambiance toute introspective du récit.

Au final, un vraiment bon texte, original quant à la narration et au style bien affirmé. C'est vrai que la fin est un peu trop imprévue, dans la mesure où elle vient un peu là comme ça, sans raison (du moins je n'en vois pas), juste pour clôturer le récit et donner une explication définitive au début du texte. Mais cela ne me gêne pas plus que ça, elle reste plausible même si je trouve qu'il y a moyen de la retravailler et de mieux l'amener, moins brutalement peut-être...

   alifanfaron   
28/6/2011
 a aimé ce texte 
Bien ↓
Un premier paragraphe très difficile à lire. Le procédé lasse et la phrase nominale, normalement sensée donner du punch, devient paradoxalement banal et lourde. Ensuite, ça va mieux. L'auteur trouve un équilibre dans son phrasé et un style émerge. Efficace et brut.

Au niveau de l'histoire, c'est fluide. Pas renversant mais efficace (une fois encore). La narratrice est tangible, j'arrive tout à fait à me la représenter. Après, la construction à reculons mène logiquement à la chute. Pas de surprise mais un récit maîtrisé. Et comme l'ensemble est court, on ne s’ennuie pas.

   beth   
30/6/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Quel style, quelle écriture ! Le texte se lit goulument, d’une traite. Finalement à tel point que l’histoire en deviendrait secondaire…
Et puis non, on revient méthodiquement, dans le détail ,sur l’histoire et on s’attarde sur ce non-effeuillage de marguerites, qui remonte le temps…
titi : sain d’esprit/sagesse raison/elle : errance affective de 10 ans
humour/dérision : joli petit sujet malgré son nom à croquer/et qui fait joli sur la plage/une véritable résolution du jour de l’an/notre groupe n’était plus qu’une énorme interrogation collective plantée devant le seuil(belle trouvaille)
style : sont mélangés, les réflexions intérieures, les descriptions, les réflexions des autres, les dialogues ,dans un melting pot de la pensée. sujet élidé.virgules souvent élidées.
répétition de la « première fois », joli paradoxe, c’est toujours la « première fois »…
les choses sont dites par de menus détails, pudiquement, ou pas,comprenne qui veut ! : souffle sur mes doigts gelés, ne réchauffe que mes doigts/ on ferait un beau couple tous les 2, l’épileptique et la violée
Choix de remonter le temps jusqu’à cette « première fois » qui finalement fut la seule….et qui explique les échecs des "autres premières fois", empreintes de la première histoire.
tom : bigame
Je n’ai pas compris la tournure de cette phrase : Comme on n’avait pas été gentils à lui rester sur le seuil comme des charognards" ?
Bambi : elle pas en état d’aimer/avait gardé le cœur en hiver/ passe un tour, passes-en deux, arrose d'essence et mets-y le feu(belle trouvaille)
Gaby : contexte : alcool/épilepsie
on ferait un beau couple tous les 2, l’épileptique et la violée
vlad : on était des gosses de 15 ans, à peine. Corps graciles et peaux dont la douceur était vertigineuse.(joliement dit)/ Quetzalcoatl ( serpent à plumes de quetzal ) divinité mexicaine. On vivait comme à l’intérieur d’un sablier géant, fascinés par la course des astres, terrifiés par le temps qui s’écoule d’heure en heure, mécanique implacable.(belle comparaison)
L’amour je ne connaissais pas, je ne savais pas.
La première fois : on n’avait pas peur de la mort, ça ne faisait pas assez longtemps qu’on était nés(encore si bien dit)/jeux sado-maso qui finissent par un enterrement
La boucle est bouclée par cette première fois : Longtemps après, je me suis mise debout et j’ai contemplé l’héritage qu’il m’avait laissé. un goût prononcé pour la torture : invendable ; des souvenirs tactiles ingérables : qui pourra soutenir la comparaison ? Et une promesse que j’ai tenue : je suis allée à son enterrement.

Je n’ai pas d’autre analyse à proposer à l’auteure par ma lecture, seulement lui affirmer à quel point j’ai aimé son texte, féminin, mur, pudique/impudique et tellement prometteur d’une plume originale, authentique et décapante (du vernis bienséant habituel).
Merci et à plus de vous lire.

   caropoukontli   
1/7/2011
J'ai ouvert un sujet sur le forum
http://www.oniris.be/forum/a-propos-de-la-premiere-fois-t14069s0.html#forumpost179640
car je me pose pas mal de nouvelles questions.

   Menvussa   
3/7/2011
Commentaire modéré

   Menvussa   
3/7/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Étrange ce récit à rebrousse temps. Étrange ? Peut-être pas tant que cela, tant il est vrai que lorsque rétrospectivement on passe en revue des épisodes peu glorieux de sa vie on a tendance de partir du présent pour s'enfoncer vers le passé cherchant à chaque étape une justification pour la précédente (dans l'ordre du récit donc chronologiquement inverse). Par contre, lorsque l'on se retourne, heureux sur son passé et qu'on l'étale au grand jour il est logique de commencer par le début, donc de prendre les évènements dans un ordre chronologique afin de montrer la progression, l'aboutissement. Bref, ce n'est pas le cas ici présent et l'auteur a été bien avisée de procéder à rebrousse temps.

«Un dont on retire lentement les lunettes » L’esprit chagrin, que je suis parfois, ce pose cette question à savoir s’il est nécessaire d’être affublé dune monture à double ou simple foyer pour représenter l’archétype de l’homme, sinon parfait, acceptable selon le guide du « Bon conjoint ». J’ose espérer qu’il n’en est rien car il me faudrait y remédier prestement.

Non, blague mise à part, l’auteur sait relever les petits détails et s’en servir à bon escient.

« Et j’ai tenu le coup. Trois ans. Très fière de moi. » Beaucoup d’humour dans cette simple phrase qu’il faut lire en ayant bien présent à l’esprit tout ce qui a été écrit juste avant. Sorte de synthèse un brin cynique. Constat d’échec cinglant ! Quoique, trois ans c’est déjà pas mal.

« Et la chair humaine ? » Voilà qui donne à réfléchir, boutade ou introduction à une partie plus gore du récit. Je penche vers une allusion à certains égarements consistant à continuer à fréquenter d’autres partenaires. Je crois que la suite du récit me donne raison sur ce point Mais annoncé ainsi cela fait son petit effet, un bon point pour l’auteur.

« Alors pourquoi ai-je fui ? Overdose de bleu marine ? Parce que je n’aime pas qu’on me demande si ça va pendant qu’on me fait l’amour. » Bien vu, cela clos cette première partie d’une façon nette et sans bavure, c’est sans appel. Comme quoi s’inquiéter de savoir si l’on à bien œuvré ne porte pas toujours les fruits qu’on pourrait en attendre. Mais suis-je bête, on ne demande pas si ça va, on le sent. J’ai franchement adoré cette trouvaille.

« La première fois que j’ai vu Tom, » Là on a eu chaud ! Un peu plus et il s’appelait Gros Minet. D’ailleurs l’allusion continue avec le coup du poisson rouge.

Le coup des briques me donne à penser que Gaby, sorte de « grand frère » n’avait pas que de bonnes idées. Heureusement pour le canard, la méthode semble d’une efficacité douteuse. J’aime le canard laqué, le canard latté… beaucoup moins.

« bocaux d’insectes » J’ai cru un instant qu’on en revenait à Titi, comme quoi, ne jamais s’arrêter au milieu d’une phrase.

Dans l’épisode de Tom on entrevoie l’importance de Gaby qui, plus qu’un « Grand frère » doit ressembler à un amoureux transi. La scène du studio dévasté prête à sourire, tout d’abord parce que la description est hilarante mais aussi parce que nombre de lecteurs doivent se dire qu’ils l’ont échappé belle. Rétrospectivement ça peut faire un peu froid dans le dos d’où le prête à sourire et non prête à rire. Je ne parle pas de ceux à qui cela rappelle des souvenirs beaucoup plus cuisants.

« je t’aime. Sans lui sourire, je répondais : je sais. » Situation tragique, quel cynisme chez la femme, l’homme généralement quand il veut faire de même est le premier à s’en mordre les doigts.

Gaby ! Pauvre Gaby ! Amoureux trop fier ou trop timide pour le déclamer, pour même se l’avouer. Gaby qui n’y croit pas tant il est difficile voire impossible de s’imposer après Dieu.

Vlad le Dieu vivant fait homme qui ne supporte pas sa propre condition et se sacrifie, ou se suicide c’est selon ! Car il connaît, lui, l’issue de ce jeu dangereux, je dirais même qu’il l’attend avec une patience mesurée. D’où peut-être cette référence à la chair humaine.

Une tranche de vie découpée en tranches, servie comme une viande froide à un buffet où se ruent les lecteurs.

Alors oui, j’ai bien aimé. Était-il besoin de tout cela pour le dire ? Qu’importe je me suis bien amusé et c’est tellement bien écrit qu’il était finalement normal que je me troue le cul pour le dire.

   zenobi   
6/7/2011
 a aimé ce texte 
Bien
La première phrase... mais j'y reviendrai...
C'est un texte que j'ai lu d'une traite, regrettant un peu, au final, mais d'autres l'ont dit, un pathos un peu trop explicite. Les amants (?) sont habilement croqués, l'héroïne se découvrant en creux, dans son mal-être et ses refus.
Il me manque un petit quelque chose, que je ne parviens pas à cerner pour être totalement emballé, un peu plus d'empathie, peut-être ?

Deux détails.
Cette première phrase... Comment peut-on en appeler à un plus-que-parfait pour évoquer une action concordante ou postérieure à un passé composé? Je ne vois là qu'une erreur, ou une faute dont la signification m'échapperait complètement.
Je n'ai rien compris non plus (ou à grand peine et de façon incertaine) à la phrase disant comme on n' a pas été gentils sur le seuil.


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