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Humour/Détente
CFrancis : Le secret de Maurice
 Publié le 14/07/09  -  12 commentaires  -  6193 caractères  -  60 lectures    Autres textes du même auteur

Maurice est un de ces retraités qui font partie intégrante de la vie villageoise...


Le secret de Maurice


C’est jour de marché. Une dizaine de clients se disputent âprement leur tour devant l’éventaire de Maurice. En fait de stand, c’est juste un étalage de très beaux légumes disposés à même le trottoir. Pas de prix affiché, mais, qualité oblige, personne ne discute au moment de payer. C’est même avec un bel air de satisfaction que chacun s’en va, qui avec des poireaux bien blancs gros comme le poignet, qui avec des pommes de terre comme on en voit rarement. Et les salades ? On a envie d’en manger sur place. Même la femme du maire bataille pour conserver son tour. Son mari raffole de la potée préparée avec des choux de Maurice. Ils ont un goût incomparable. À l’instar des bons vins, les légumes de Maurice ont aussi leurs saveurs. C’est peut-être un peu exagéré, mais quand même… De temps à autre ils ont comme un parfum d’anis, de poire ou encore de pomme, qui reste longtemps en arrière-bouche. Comme dit la Marie, « Mieux vaut en acheter moins, mais que ce soit du bon ». Avec Maurice, c’est du bon, pas de problème.


En réalité si, il y a un problème. Sa production est limitée. Son jardin ne dépasse pas les deux cents mètres carrés. Mais quel jardin, tout le monde en parle. Pourtant bien peu l’ont réellement vu. Il est clôturé d’une épaisse haie d’au moins deux mètres de haut et face à l’entrée une charmille, suffisamment large, empêche toute vue directe sur les cultures. « C’est à cause du vent » répond Maurice à quiconque tente d’en savoir plus. Car tout le bourg est persuadé que Maurice a un secret. C’est d’ailleurs l’équivalent d’une affaire d’état parmi les habitants. Il y a ceux qui pensent savoir, ceux qui voudraient bien savoir et ceux, plus nombreux, qui, tout en restant attentifs à l’actualité locale, se fichent un peu de ce que Maurice pratique dans son jardin. Leur souci principal restant d’arriver au marché avant les autres. Donc, sans être le sujet de toutes les conversations, c’est tout de même un problème récurrent. Pour avoir de si belles récoltes, qu’est-ce que Maurice peut bien mettre dans sa terre ? Invariablement ce dernier coupe court en précisant : « C’est du BIO, madame ; rien que du BIO, monsieur ; je vous le garantis ». Tout le monde, faute de preuve, suppute sur la ou les méthodes de Maurice, mais personne ne trouve.


Au bistro, lorsqu’il ne jardine pas, Maurice « carbure » au pastis ou aux liqueurs. Là, pas de cachotterie, le choix est simple. Si l’instant suit le dernier repas, c’est un digestif : un petit poiré par-ci, un petit calva par là, etc. Sinon c’est l’apéro. Certains jours, la frontière entre digestif et apéro est un peu floue, voire inexistante. Eh bien, même dans ce cas, au grand dam de ceux qui paient la tournée, Maurice n’est pas plus disert sur sa façon de cultiver, qu’un ministre d’État ne l’est sur la véritable origine du « trou de la sécu ».


Germaine, une de ses proches voisines, vieille retraitée de l’administration, a, elle aussi, investi dans une haie autour de ses carrés de légumes. Le moindre que l’on puisse en dire est que le résultat est loin d’être probant. Ses poireaux à elle offrent obstinément une image de manches de balayettes qui seraient peints en vert et coiffés d’une décoration en feuille d’iris du bord du ruisseau. Quant aux salades, tomates et autres choux, pas besoin de les décrire, ils sont on ne peut plus ordinaires ; déprimant.


Donc, dans le jardin de Maurice il y a autre chose, mais quoi ? Diable, à quelque chose près, la terre est pourtant la même que dans tout le reste du canton. Les plus futés ont mené des enquêtes. Chez le marchand d’engrais c’est négatif, Maurice n’achète rien d’autre que des plants et des graines. Peut-être apporte-t-il de la fumure ? Maurice élève bien quelques lapins et des poules, mais par ici, tous ceux qui ont un jardin ont aussi des animaux de basse-cour. Ce n’est donc pas l’apport du fumier de ces bêtes qui peut faire la différence. Alors ? De la terre d’ailleurs ? Apparemment pas. Personne ne lui livre fumier ou terreau, que ce soit en vrac ou en sac. Pas un, en dépit d’une surveillance rapprochée, ne l’a vu introduire autre chose, dans ce territoire secret, que des paquets de graines, des jeunes plants de légumes ou des pommes de terre de semence. Alors… ?


Eh bien c’est le maire, en tournée électorale, accompagné de deux ou trois membres de sa liste, qui, involontairement, découvre le « secret » de Maurice. Trouvant porte close à la maison, la petite troupe se dirige tout naturellement vers l’entrée du jardin. Le portillon est symboliquement cadenassé de l’intérieur. Maurice doit donc être en train de jardiner.


- Monsieur Maurice ? appelle le premier magistrat d’une voix prudente.


Pour toute réponse, un curieux son, tenant plus d’un borborygme pâteux que d’une émanation de cordes vocales, se fait entendre. Interloqué, avec un peu d’appréhension tout de même, car il connaît bien la rumeur qui entoure ce lieu, monsieur le maire se risque à regarder vers les plates bandes. Il écarte des rameaux de la charmille. Là, bouche bée, l’œil figé, le chef de file de la future majorité communale ne pipe mot. Mieux, il rougit comme une écrevisse. Au travers de sa meurtrière végétale, il voit un magnifique postérieur, bien blanc et dodu. C’est celui de Maurice en train de satisfaire à un besoin naturel dans la zone en cours de bêchage, juste à coté des choux non encore récoltés. Il se tient des deux mains au manche d’une bêche plantée devant lui. Ensuite il s’essuie consciencieusement avec un papier recyclé que le voyeur involontaire, maire et candidat au renouvellement de son propre mandat, croit reconnaître. C’est tout bonnement sa dernière profession de foi, distribuée le matin même dans les boîtes aux lettres. Sans se douter une seconde d’être espionné, Maurice, rhabillé, couvre son « œuvre » d’un coup de pelle. Il parfait le travail en émiettant soigneusement la terre, puis, laissant le sillon en attente pour le prochain « épisode », il s’approche tranquillement de la sortie.


Les colistiers de monsieur le maire, restés en arrière, ne voient pas la scène. Ils ne sauront jamais ce qui, dans le jardin de Maurice, a bouleversé « leur tête de liste » à ce point.



 
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   xuanvincent   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Après une lecture rapide, cette nouvelle, où il ne se passe pourtant pas grand-chose, m'a paru assez vivante et m'a fait sourire à la fin de l'histoire.

L'insertion des dialogues dans le récit - cette nouvelle ne contient aucun dialogue direct - m'a paru réussie.

PS : Sur cette longueur, l'humour du texte m'a semblé bien passer, plus long peut-être que le texte m'aurait mieux intéressée.

   Marite   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Lecture très amusante. La vie du village et les relations entre les habitants est bien décrite. J’espère seulement , pour la qualité nutritive de ses légumes, que Maurice se nourrissait de produits « bio » et qu’il n’ingurgitait pas trop de médicaments…

   Anonyme   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Un texte bien écrit et assez drôle ma foi, mais qui repose sur une hérésie...
Il faut savoir que tous les excréments ne constituent pas un engrais, surtout s'ils ne sont pas mélangés à par exemple de la paille... les excréments humains comptent parmi les pires, ils acidifient le sol et leur utilisation aurait un effet contraire.
Alors, oui, sur litière sèche on peut les composter, mais toujours en les mélangeant à d'autres déchets verts...

Dommage cette incohérence...

   Anonyme   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Un texte bien écrit, d'une longueur juste. Le style est très correct, fluide et agréable.

Mais en dépis de celà je n'ai pas adhéré: d'une part parce que la fin est un peu évidente (j'hésitais entre le vomi des apéros et la scatologie), et d'autre part parce que 200 m2 à fumer ça fait quand même beaucoup pour un homme non?

Enfin, je ne sais si ça a été dit, mais les excréments humains ne sont pas du tout un bon engrais, au contraire: bourrés de bactéries, acides etc...

Donc oui pour le style, mais non pour la conclusion.

   florilange   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Bien
Texte amusant & bien écrit, sauf : "le moindre qu'on puisse dire"...
Il me semble qu'on devrait écrire "le moins qu'on puisse dire". Mais ce n'est qu'1 détail, pour mémoire.

Agréable à lire, rapports entre les gens du village bien vus. La fin, possible ou pas, peu importe! C'est 1 clin d'oeil.

À bientôt une nouvelle lecture,
Florilange.

   NICOLE   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Bien
J'ai bien aimé le côté "tempéte dans un verre d'eau" de l'intérêt des villageois pour le secret de Maurice. J'ai trouvé que c'était assez représentatif des rapports que les membres d'une petite communauté pourraient entretenir.
Juste un petit bémol pour la chute, que l'on devine presque tout de suite (d'autant que moi, j'ignorais les propriétés discutables de l'engrais utilisé !).
C'est avec plaisir que je lirai autre chose du même auteur.

   Anonyme   
14/7/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
Oui pour le style... oui pour la forme, court et raconté à la façon d'un reportage LCI pitoyable manquait plus que le couplet sur l'insécurité et la drogue et c'était un best-viewed de chez le père Pernaud... on voit presque les voisins se concerter pour deviner et parier sur l'engrais...

La lecture est agréable, vraiment, c'est fluide, y a du rythme, y a des idées quelques bons mots et un joli tableau des petites villes de campagnes bien de chez nous...

Mais la chute... dommage... on a ici l'exemple type du truc pas trop réfléchi sur la fin, une petite blague carambar et mon copain Deus...
Le souci quand on touche aux sciences, c'est qu'il faut être crédible...
Et manque de pot, là t'as les Is et co qui savent bien comment qu'on plante des choux à la mode de chez nous qui repèrent direct qu'on fait pas caca sur ses légumes si on veut les faire pousser...
Tiens, c'est comme de laisser son chat pisser sur les papyrus... ça les flingue.
Dommage vraiment.
Mais j'extrapole, quelque soit le sujet, la cohérence fait tout...
C'est comme (pardon Mac Guyver si tu nous regardes) de réparer une montgolfière avec un archet... c'est sympa mais ça se fait pas...

   widjet   
15/7/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↓
A lire ce n'est pas trop "chiant", mais j'avoue que j'avais un petit doute quand même. Alors la surprise a été un peu "éventée".

A vue de nez, écriture tout à fait correcte

Widjet

   prisca   
9/8/2009
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour !!
On rentre sans problème dans ce petit village. On a vraiment l'impression d'y être et puis d'un coup ça s'arrête de façon un peu désordonnée et brusque.
Au début, le texte est fluide et bien détaillée mais la fin est précipitée et nous laisse sur notre faim !!
C'est dommage mais bravo à l'auteur.

   leon   
16/9/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
La fin est un peu téléphonée, mais le texte lui-même est très bien écrit : l'atmosphère villageoise est très bien rendue.

Une écriture bien fine pour une fin si scatologique.

Je ne sais pas trop comment conclure, pour ma part : je ne vais pas faire ma bégueule, puisque la merdre jubilatoire du père Ubu m'a bien fait rire en son temps.

Ici, c'est un peu triste et plat. Il manque un petit quelque chose, que l'étronc du père Maurice n'a pas comblé...

   Anonyme   
14/10/2009
J'ai eu la même impression du début à la fin. Et la chute n'a servi qu'à un peu plus m'y conforter.
Ça ressemble à s'y méprendre à un reportage bien gras de l'émission "7 jours au Groland".
Le petit village de campagne, des petits complots du 3ème âge et pour conclure le bon gag aux tendances scatophiles et obscènes de fin.

   Anonyme   
20/4/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Un regret : la chute un peu trop abruptement amenée.
« Mieux vaut en acheter moins, mais que ce soit du bon » : finalement Maurice ne fait que reproduire ce que nos anciens faisaient. C'est pas bio tout ça !


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