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Sentimental/Romanesque
Cortese : Quand il est trop tard
 Publié le 02/02/10  -  19 commentaires  -  9514 caractères  -  154 lectures    Autres textes du même auteur

Un vieil homme qui souffre.


Quand il est trop tard


Le vieux monsieur achève son nœud de cravate devant le miroir. Sous la chemise, son cœur est froid, dur comme une pierre. Il s'est levé avec la tristesse, et se demande maintenant si elle le quittera un jour. La matinée s'est écoulée sans un bruit, avec juste l'assaut régulier des souvenirs. Il a le sentiment d'être poursuivi par les ombres, et se laisse aller à leur ouvrir la porte. Suivant le rythme tranquille du vieil homme qui se prépare, des images traversent son esprit ; il est aspiré vers le passé, et à chaque fois son estomac se noue dans un crissement sec, le même que quand on marche dans la neige gelée. Il revoit la porte du lycée, ressent l'attente et le serrement de sa poitrine quand elle apparaissait, le cherchait du regard puis sautillait vers lui avec son sourire fier et ses grands yeux pleins d'éclats. Des éclats de sa lumière intérieure, de sa folie aussi, et de son désir pour lui. Il perçoit encore la chaleur enivrante de ses lèvres sur sa bouche, se souvient de leurs baisers fous, de leurs étreintes maladroites. Il la voit soudain comme un tableau de Picasso, morceaux de femme mal imbriqués, collés dans n'importe quel sens, mais qui donnent à l'ensemble une certaine justesse. À l'époque déjà rien n'était simple. Beaucoup trop de désirs, trop de gens à découvrir autour d'eux : il leur aurait fallu une île déserte... Réécrire « les Liaisons dangereuses » quand on a 17 ans, ce n'était pas la meilleure façon de bâtir une histoire solide. Sans doute. Mais ils étaient si jeunes, et leur amour n'a pas pu patienter. Et voilà, malgré des vies très éloignées, ils ne se sont jamais vraiment abandonnés. Même durant les années où elle avait quitté le pays. Même durant les années où ils ont été mariés, chacun, à des êtres si différents. Bien sûr, ils ont construit, chacun de leur côté, des vies plutôt bien remplies, authentiques, avec assez d'amour partagé pour accueillir des enfants. Et à chaque fois qu'ils se sont croisés, forçant la main au hasard, ils ont compris qu'ils ne cesseraient jamais vraiment d'être ensemble.


De nouveau il est assailli par les images. Se souvient de leurs premières retrouvailles... Odéon, en pleine nuit. Elle avance d'un pas rapide sur le trottoir. Débouchant d'un porche, il se précipite sur elle, l'enlace, et pendant qu'elle dit dans un souffle « Tu m'as fait peur ! », il se concentre sur la violente émotion que lui procure le fait de sentir son odeur pour la première fois depuis 10 ans.

Puis des nuits passées à se remplir l'un de l'autre, à faire des réserves d'odeurs, de douceur de peau, de regards langoureux. Indispensables provisions de sensualité parce que jamais ils ne savaient quel serait leur prochain rendez-vous, ni même s'il y en aurait un. Et puis la fois suivante, une fois encore, il se noyait dans son regard pur, partageant avec elle tout ce qu'il ne partageait avec personne d'autre.


Mais ce matin, le vieux monsieur est de nouveau plein d'amertume. Le goût des regrets est âcre dans sa bouche, et pèse lourd sur son cœur éreinté. Il a le sentiment d'être passé à côté de l'essentiel, d'avoir raté son passage sur terre. Il sait qu'il est bien trop tard pour revenir en arrière et que même ce désespoir est vain, mais rien à faire : la sensation d'avoir la poitrine dans un étau est bien pire que désagréable. Il cherche une issue à sa solitude toute neuve.


Non, pourtant, il va falloir faire face. Se rendre à ce dernier rendez-vous, inéluctablement manqué.


Il coiffe ses cheveux blancs et s'aperçoit qu'il tremble. Quoi ! Lui, le grand psychanalyste parisien, ne parvient pas à faire face à la douleur ? La seule issue, c'est l'extériorité : son métier, ses patients, les situations dans lesquelles il a pensé réussir, ou simplement exercé son métier de son mieux. Mais voilà qu'il se méprise, aussi, de devoir s'appliquer d'idiotes stratégies de développement personnel parce qu'il est simplement triste. Enfin, peu importe le mépris, peu importe le désespoir et les nœuds à l'estomac ; le voilà qui repasse, comme un chapelet rassurant, la litanie de ses derniers patients : le jeune libraire qui voyait sa jolie compagne transformée en okapi, le quadragénaire perturbé par la lecture d'une lettre mystérieuse découverte dans les affaires de ses parents décédés, la mère de famille séductrice impénitente et les charmantes aventures liées à la libre circulation de ses journaux intimes...


Enfin voilà. Grâce à eux, il aura au moins réussi à sortir de son appartement. La porte se referme derrière lui avec un bruit mat, comme si c'était la dernière fois. Il descend les escaliers d'un pas lourd. Le cœur lourd. Silence de plomb. Ciel de plomb au-dessus du 15e arrondissement. Il monte dans le taxi juste avant les premières gouttes de pluie. Lourdes, plombées, elles aussi. Évidemment.


Le taxi entre dans la commune de Villetaneuse. « Déposez-moi à la porte du cimetière. » Le vieil homme franchit péniblement les grilles, voûté, le teint gris. Il sent son sang glacial couler dans ses veines. S'approche d'un petit groupe de personnes rassemblées autour d'un trou. Un trou dans la terre ! Quelle drôle d'idée de devoir y mettre ceux qu'on aime ! Si la mort n'était pas aussi insupportable, elle serait franchement comique : « T'es là, et hop, t'es plus là ! T'as gagné, rejoins les vers au fond de la terre... »


Autour du trou béant et boueux, il distingue maintenant les visages : plusieurs jeunes garçons d'une douzaine d'années, le teint olivâtre et les yeux brillants. Plusieurs têtes chenues, également. Sans doute les derniers à connaître Marie-Thérèse. Quelques policiers à la mine sombre, qui piétinent dans la terre collante. Un jeune homme noir de peau, sans doute très souriant d'habitude, mais qui regarde le cercueil d'un air abasourdi. Et ce grand garçon dégingandé, dont les mains triturent sa casquette en tremblant, pendant que ses yeux fixent le fond de la tombe.


Cinq ans. Cinq années qu'il était sans nouvelles de sa complice, de sa dulcinée, de son amante éternelle. C'était toujours elle qui prenait l'initiative de leurs retrouvailles. Elle, mouvante et fluctuante, alors qu'il est resté sur place, immobile, à attendre. Cinquante-sept années de sa vie à attendre qu'elle lui fasse signe. Tous les cinq ou dix ans, environ, elle refaisait une apparition sur le devant de sa scène à lui, chaque fois comme le dernier rappel d'un spectacle qui ne veut pas finir, et ils en profitaient tous deux au maximum. Et c'est aujourd'hui qu'il se demande pourquoi il n'a jamais pensé à la rechercher, jamais pris l'initiative de la retrouver, pour l'emporter sur une île, comme un trésor qu'on dissimule aux regards jaloux du reste du monde. Comme si le fait de toujours se rendre disponible quand elle déboulait dans sa vie avait pu la rendre heureuse... Il a honte de se trouver lâche pour la première fois. Honte d'avoir été lâche, ou honte de s'en rendre compte devant la tombe ? Il a mal, aussi. Se tourne vers les autres tombes, couvertes de fleurs et de plaques commémoratives. Il comprend d'un seul coup l'expression « regrets éternels » et réalise qu'il ne risque pas de retrouver le goût du bonheur. Faut-il en finir ?


À l'approche d'un homme de haute taille, les cheveux gris, la peau rose et le regard franc, le vieil homme remonte à la surface.


- Bonjour, vous êtes Gustave, je suppose ?


L'homme lui tend une main ferme qu'il saisit, balbutiant un « oui » gêné. Qui est cet homme ? Quels sont ses rapports avec la femme qu'il aimait ? Que sait-il du psychanalyste ?


- Je ne sais grand-chose de vous, mais Marie-Thérèse nous avait demandé de vous contacter si jamais elle se trouvait souffrante ou mal en point. Alors, quand elle est décédée... on vous a appelé.

- Merci. Merci bien.


Forcément. Ça devait finir comme ça. C'était le risque à prendre pour ne pas s'impliquer davantage dans une histoire qui aurait seulement pu s'épanouir et finir bien. Le prix à payer pour rester passivement à attendre qu'elle reparaisse, insaisissable, plus rapide à disparaître qu'un torrent de montagne. Il est soudain curieux de ce qu'il advient du torrent, en bas de la montagne. Il aimerait savoir par où elle est passée avant d'en arriver là. A-t-elle été heureuse ces dernières années ? A-t-elle souffert ? Quelle relation entretenait-elle avec ces gens ? Avec ce petit garçon qu'il n'avait pas vu tout à l'heure et qui ravale ses sanglots pendant que le cercueil descend au fond du trou ?


Mais non. Il est seul désormais, et ses questions resteront sans réponses. Il est trop tard pour agir. À quoi bon mener l'enquête sur la vie de Marie-Thérèse, maintenant qu'elle est morte ? Alors qu'il n'a pas vraiment cherché à en savoir plus pendant toutes ces années, durant lesquelles il ne la voyait pas mais restait sûr de son amour. Et pourquoi était-il si sûr de leur amour mutuel ? Sous le ciel gris de ce cimetière de banlieue, Gustave perd pied. Réalise que le grand amour qu'il croyait donner sens à sa vie n'était peut-être qu'une chimère. Que la femme qu'il prétendait aimer est morte sans lui, seule ou entourée d'inconnus, qu'elle n'a même pas fait appel à lui, et qu'il ne lui a même pas proposé de vieillir ensemble. Comment n'a-t-il pas vu la mort venir ?


La lumière s'en va, faisant basculer le cimetière entier dans l'ombre. Pendant qu'on jette de la terre sur le cercueil, Gustave fait demi-tour, franchit les grilles d'un pas décidé, rejoint l'avenue quasiment au pas de course, et traverse juste devant un bus qui roule vite.


 
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   Anonyme   
2/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Une valse lente et mélancolique à écouter quand dehors la pluie ruisselle sur les toits.
Une écriture pleine de charme, envoûtante du fait des répétitions lancinantes, choisies, voulues et assumées par le texte.

J'aime beaucoup, ça résonne avec une histoire déjà lue, cette histoire d'amour fou sans autre rendez-vous que le hasard, l'envie subite, le caprice d'une femme.
Joli texte.

Juste ceci :
"Il sent son sang glacial couler dans ses veines." un sang glacial allègerait sans doute.

"s'en rendre compte devant la tombe ? Il a mal, aussi. Se tourne vers les autres tombes..." et là une répétition involontaire.

Ici une interrogation : "que la femme qu'il prétendait aimer est morte sans lui, seule ou entourée d'inconnus", le narrateur vient de se faire une réflexion au sujet du petit garçon, j'ai imaginé que c'était le fils de la femme, et mieux encore, si c'était le leur ?

Le vieux monsieur ne s'interroge pas, mais il n'est pas d'humeur, il a le moral plombé, ça peut se comprendre, cependant c'est une autre piste à explorer et je regrette un peu qu'elle ne le soit pas.

Du fait de la présence de ce petit garçon en larmes, je trouve curieux quand même qu'il puisse ne serait-ce que supposer qu'elle ait "vécu seule ou entourée d'inconnus" ; d'autre part, la femme m'apparaît - avis personnel - disposer d'une personnalité flamboyante, alors imaginer qu'elle ait vécu seule ne vient pas facilement à l'esprit tant ces êtres particuliers aimantent les regards et l'amitié ou l'amour, même lorsqu'ils vieillissent.

J'adore les tous derniers mots, leur délicatesse presqu'enfantine : "un bus qui roule trop vite."
Charmée par le texte et la voix.
Merci à l'auteur

   Anonyme   
19/1/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Hormis la chute qui est assez intérressante, je ne goute pas cette histoire.

Certes elle est bien écrite (hormis le monologue sur la mort), elle se lit bien, mais elle n'a rien de trépidant. De plus les clichés, nombreux, ne soulévent pas l'enthousiasme malheureusement.

Le style a l'avantage d'être fluide, sans heurts, ce qui est une bonne chose.

Mais franchement non je ne suis pas convaincu.

   ANIMAL   
19/1/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Une histoire bien sombre. Une histoire d'amour à épisodes, une passion charnelle vécue mais jamais assumée.

Que reste-t-il de saveur à l'existence lorsqu'on s'aperçoit qu'on a raté le plus important, par négligence ou par orgueil et qu'il est trop tard pour y remédier ? C'est la question que semble poser ce texte.

J'aurais aimé savoir si Gustave a eu une vie privée en dehors de Marie-Thérèse, ce qui est complètement occulté en dehors de l'aspect professionnel.

Le style est aisé à lire et, heureusement, quelques souvenirs heureux viennent mettre une touche de lumière au coeur de ce texte dramatique.

   Anonyme   
20/1/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Quelle vision fataliste, ce n'est pas courant dans le sentimental.

La nouvelle est un peu courte. On s'attendrait à une description plus minutieuse des souvenirs et du ressenti du protagoniste. Avec lui, on demeure dans l'incertitude sur le véritable sens de leur relation ce qui m'a laissé sur ma faim.

L'écriture est quant à elle assez soutenue, mais on décèle un petit manque de pertinence dans les descriptions des lieux et des personnes, trop atténué à mon goût.

Bilan : Le fond est intéressant. La forme est quasiment cohérente bien que je note quelques faiblesses dans l'art d'exprimer les choses.

   Myriam   
22/1/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Texte beau et déchirant.
Écriture fluide et solide, imagée juste ce qu'il faut, qui laisse toute leur place aux sentiments et émotions.
Un moment fort.

(juste une toute petite remarque, la phrase d'accroche, à mon avis trop banale et inutile. Le titre suffirait peut-être.)

Merci de cette belle lecture.

   Anonyme   
22/1/2010
 a aimé ce texte 
Pas ↑
Quelques maladresses dans l'écriture, des phrases dont le sens n'est pas toujours limpide, quelques associations malheureuses, deux trois problèmes de temps.
Cela dit, cela se laisse lire, mais l'émotion qu'on essaye beaucoup trop de m'imposer me gêne. Me braque. J'aime pleurer en lisant mais pas quand on veut m'y contraindre (or, ici c'est ma sensation). De la délicatesse dans l'évocation des tourments intérieurs du vieil homme. De la subtilité dans ses émotions lorsqu'il réalise que l'amour n'était peut-être qu'à sens unique, voire même qu'il n'existait d'aucun côté. Qu'il n'était qu'une illusion, voilà ce que j'aurais aimé lire.
La chute aussi m'embête. Dans ce type de récit, très introspectif, je préfère que les choses soient suggérées et non clairement énoncées. Le suicide est décrit de façon trop brutale à mon goût.

Bon, maintenant, je n'avais pas un minimum apprécié ce récit, je ne l'aurais pas commenté donc...il y a du bon aussi. Vraiment.

Bonne continuation !

   Anonyme   
26/1/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Beau texte, grave et douloureux qui raconte toutes nos vies. Le poids des mots rend sensible celui des ans : amertumes, regrets, se retourner sur soi, faire le point... Le tout servi par une belle écriture qui fait mouche. J'ai beaucoup aimé ce récit très bien construit.

   Marite   
26/1/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Très belle histoire. J'ai retenu la phrase suivante, si juste et qui peut nous traverser parfois:
"Il a le sentiment d'être passé à côté de l'essentiel, d'avoir raté son passage sur terre."

Tableau bien brossé d'une vie, réussie pour l'extérieur et l'entourage, mais qui ne laisse qu'un vide immense parce que cet homme n'a pas su voir l'essentiel et quand il en prend conscience, il est trop tard.
L'ensemble du texte se laisse lire, facilement sans accrocher et on accompagne le personnage dans le cheminement de ses pensées intimes.
La fin est seulement trop brève: deux phrases... j'aurais eu besoin au moins d'un paragraphe supplémentaire pour ne pas rester sur un sentiment d'inachevé.

   Maëlle   
28/1/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Une intrigue qui me rappelle (de loin), un livre de Françoise Dorner. J'aime bien ce portrait d'un personnage hésitant malgré ses airs d'homme arrivé, et la façon dont le texte effleure à peine la vie des autres personnages.

   Pat   
31/1/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Votre texte possède des qualités indéniables, notamment au niveau de l'écriture et en ce qui concerne l'intérêt du thème. Toutefois, il mériterait d'être retravaillé un peu au niveau de la structure narrative : celle-ci paraît assez déséquilibrée, notamment parce qu'elle est trop axée sur les explications au détriment des émotions qui ont jalonné cette relation amoureuse (Il est souvent préférable de montrer ce que vit un personnage et laisser le lecteur interpréter les événements plutôt que d'expliquer.). On est dans quelque chose d'intropectif alors que le point de vue énonciatif est à la troisième personne, ce qui fait aussi qu'on a du mal à s'identifier au personnage. Le rythme est trop rapide : les événements se passent sur de nombreuses années et donnent une impression de résumé. Ce qui, ajouté au manque de précision des sentiments, émotions, sensations, rend la fin peu crédible.
Il est intéressant de montrer que cette histoire n'est peut-être qu'une illusion, que sa vie en a été bouleversée (ou du moins a été un peu conditionnée à ça), mais vous n'avez pas suffisamment laissé le lecteur se prendre aussi à cette illusion (il reste un peu en dehors). Du coup, le dénouement manque de force (se rendre compte qu'on a bâti sa vie sur une illusion ne peut manquer de provoquer chez quelqu'un une réaction violente. Or celle-ci est trop vite traitée. Il se jette littéralement sous le bus (on ne sait pas si c'est volontaire) après une prise de conscience très rationnalisée (peu d'émotion à part : "il perd pied" et essentiellement des questions, ce qui est un peu court). La fin mériterait d'être plus approfondie ou davantage préparée dans le déroulement du récit.
Il est bien entendu assez difficile de retravailler un texte, sans compter qu'il faut que vous soyez convaincue du bien-fondé de mes remarques. Je sens, malgré tout, un certain potentiel chez vous qu'il serait intéressant de développer.

   Anonyme   
2/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↓
j'aime beaucoup le thème. Par contre j'ai de petits bémols sur le traitement. En fait pratiquement dès le début on se trouve placés sous le signe de la tristesse et on n'en sort pas Du coup le cimetière puis le suicide, on s'y attend et c'est dommage. J'aurais préféré par exemple que les flash (en particulier le premier) soient plus emprunts de gaité, parce que quand même c'est une très belle histoire qu'il a vécue là il devrait en être fier et heureux je trouve moi.
Quelques bémols aussi sur l'écriture mais en fait globalement le style me plait c'est pour cela que je me suis accrochée à quelques détails
par exemple
le cœur froid dur comme une pierre (tant qu'à faire si t'as des comparaisons aussi plates autant ne pas les écrire, enfin je dis ça parce que moi c'est le genre de truc que je traque dans mon écriture) et surtout pour les premières phrase d'une nouvelle
Il s'est levé avec la tristesse, et se demande maintenant si elle le quittera un jour. Ici en fait il m'a fallu relire pour piger que le elle représentait la tristesse (oui c'est grammaticalement correct mais elle pour moi c'était une femme)

Des côtés très réussis c'est drôle c'est le vieil homme le héros et pourtant c'est la femme qui est le centre de ce récit. On l'aime on la désire, on ne la comprend pas avec lui. Donc côté ressenti c'est plutôt exact et réussi.

Par contre lui semble avoir souffert de cette relation en pointillé et quelque part ça dérange mon bel arrangement à moi de l'histoire. Et je me demande s'il n'est pas tout simplement en plus d'être passé à côté de la vie, passé à côté de cette femme. On a l'impression qu'il est une victime et c'est dérangeant.
Bref j'aurais préféré que lui aussi ait autant d'épaisseur qu'elle et là je reste sur ma faim.
Au plaisir de te relire à nouveau

Xrys

   jaimme   
2/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Non, pas le dernier élément de la dernière phrase. C'est en trop!

Le reste est une réflexion sur l'amour manqué, sur la culpabilisation lors de la perte d'un être cher qui se révèle... n'être qu'un mirage.
Pourtant, cet homme doit-il regretter tout l'amour passif et lointain qu'il a éprouvé toute sa vie pour cette femme? Cet amour ne l'a-t-il pas porté. Un sens à sa vie lui a été offert...
J'ai, d'une façon générale, un regret. Celui de cette réflexion que je trouve un peu trop poussée dans son expression, trop développée (j'aurais bien vu ce style pour un texte plus long, nettement), que j'aurais préféré plus fulgurante, plus sussurée; et donc en déséquilibre avec le propos.
D'un autre côté j'aurais aimé plus connaître la vie de cette homme. Un peu plus seulement. J'aurais aimé quelques lignes plus fortes sur leurs rencontres pour entrer en empathie avec leur amour.
J'ai compris dès les premières lignes qu'il allait à l'enterrement. C'est un peu dommage.
Des amours manqués, espérés, avortés, vécus mais..., on en connaît tous. J'ai été par moment emporté. C'est vrai. Mais avec un si beau thème, je suis trop souvent resté à espérer avoir la gorge nouée.
Merci Cortèse. Ce texte est prometteur je trouve.

   florilange   
2/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Cette histoire me rappelle 1 pièce de théâtre devenue 1 film, je crois : 1 homme & 1 femme se rencontraient tous les 10 ans.
Voilà pour le fond. Le thème me plaît.
Quant au traitement, il me surprend, car je crois que l'auteur est une femme, c'est que les réactions du vieil homme sont typiquement masculines, càd. bien vues : il s'est surtout occupé de sa carrière, sans jamais se demander ce qu'elle faisait. Il était persuadé de l'aimer, alors que, finalement, à part leurs brèves rencontres, il ne lui a jamais rien donné. Cette façon de vivre lui a apparemment suffi puisqu'il n'a jamais tenté d'y rien changer & ne s'est pas demandé ce que, elle, aurait souhaité. Or c'était elle qui prenait l'initiative de leurs rencontres & il ne savait pas où la joindre. Tout cela révèle 1 fort bel égocentrisme, dont il ne prend conscience que lorsqu'il est trop tard. Fort de café pour monsieur le psy... Le suicide voulu ou pas ne me paraît pas exagéré.
Quant au style, je le trouve très "plombant", le rythme lent, mais ça se comprend puisqu'il est vieux.
Florilange.

   Mistinguette   
2/2/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Peu portée sur les textes tristes que j’ai tendance à zapper au bout de quelques lignes, celui-ci m’a accroché dés le départ et je l’ai aimé jusqu’à la fin. J’adore votre écriture imagée et fluide.
À lire certains autres commentaires il y a quelques maladresses, mais personnellement elles ne m’ont pas interpelé.
C’est donc avec plaisir que je lirai vos prochains écrits…

   widjet   
2/2/2010
 a aimé ce texte 
Pas
Premier texte de Cortese, donc…

Je vais être franc, je n’ai pas trop accroché même si je note la délicatesse don tu fais preuve pour raconter cette lente désespérance.

Je m’explique : ton intention est louable, mais elle est trop souvent parasitée par des choix discutables et souvent maladroits. Je t’en donne quelques uns :
Puis des nuits passées à se remplir l'un de l'autre, à faire des réserves d'odeurs . Pas très heureuse (et même un peu laide « se remplir ») comme image. Itou avec dans un étau est bien pire que désagréable

La pensée « « T'es là, et hop, t'es plus là ! T'as gagné, rejoins les vers au fond de la terre... » est bien trop « enthousiaste », trop cynique dans un ensemble résolument sombre et triste. Je ne trouve que cette interjection détonne. Idem sur le « ils en profitaient tous deux au maximum ». Presque trop moderne, presque familier (le « maximum » j’entends) qui contraste encore avec le ton voulu (un peu suranné, volontairement désuet). Je déplore aussi des lourdeurs comme les « le même que quand on marche » (que lorsqu’on marche eut été plus fluide) ou « et que même ce désespoir est vain « (le « et » est de trop).

Vers la fin, tu abuses des interrogations et surtout, SURTOUT, cette dernière ligne qui gâche considérablement. C’est ton choix, certes, il est ce qu’il est et respectable, mais il ôte la qualité essentielle de ton personnage à savoir sa pudeur, sa dignité.

C’est très dommage.

Ce final, surprenant (dans le mauvais sens du terme) est encore une fois trop brutal, extérieurement beaucoup trop violent dans un texte dont justement la violence est plus suggérée, plus intériorisée (la force, le poids des regrets comme tu l’as écris).

Donc une intention plutôt jolie et sensible, mais la forme pas assez maîtrisée et par moment trop explicative (laisse le lecteur supposer, ne lui mâche pas trop le travail, il doit bosser un peu lui aussi !) nuit trop à l’appréciation générale.

J’attends de lire un prochain texte. Au plaisir, donc…

W

   Napthaline   
4/2/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Un texte comme une pomme sans saveur, pas mauvaise mais pas bonne non plus. Une écriture pourtant pleine de potentiel, on le sent, mais qui gagnerait à être plus incisive, plus dramatique aussi, car le sujet l'est diablement : une vie ratée et pas moyen de la refaire... ce texte aurait dû transpirer de désespérance, et pourtant il me paraît bien fade, bien terne, comme la couleur des yeux du vieil homme, que j'imagine bleu délavé.
Allez, vite, j'ai hâte de lire autre chose de Cortese, je suis sûre qu'il a plus d'une corde à son arc !

   Anonyme   
5/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien
Le thème est intéressant et il me semble difficile à traiter pour avoir le juste ton.
Parfois j'ai accroché. Lorsque le vieux monsieur se remémore le passé :"Il la voit soudain comme un tableau de Picasso, morceaux de femme mal imbriqués, collés dans n'importe quel sens, mais qui donnent à l'ensemble une certaine justesse. "
Parfois je me sens à l'extérieur. Je n'arrive pas à ressentir le désarroi. Je trouve aussi qu'il y a des expressions ou des images un peu dissonnantes comme par exemple "à chaque fois son estomac se noue dans un crissement sec "
Ce que j'apprécie le plus est la prise de conscience du vieux monsieur d'avoir laissé passer sa vie, et filer cette personne si importante pour lui ...le regret de sa passivité ...La brusque décision de se suicider peut être surprenante, en même temps l'expression "il perd pied" est bien vu ...perdre pied n'est pas prendre une décision, c'est perdre le contrôle, donc tout peut arriver...
Bonne continuation

   Bidis   
11/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien
J’ai trouvé le texte bien amené et accrocheur. Cependant, très vite, je me suis demandé ce qui a séparé les personnages. Peut-être des disputes, des points de vue trop divergents, etc… Je trouve que cela aurait dû être dit.
- « Et puis la fois suivante, une fois encore, il se noyait dans son regard pur, partageant avec elle tout ce qu'il ne partageait avec personne d'autre. » : j’aurais aimé que cette seconde fois soit plus développée. Ecrit ainsi, non seulement cela perd de sa force mais cela déforce même la première rencontre qui elle, pourtant, avait été bien racontée.
- « Lui, le grand psychanalyste parisien, ne parvient pas à faire face à la douleur ? » : dit ainsi, des noms de sommités viennent à l’esprit. Ce serait parfait dans un texte parfait et considérable. Mais dans une petite nouvelle d’écrivain amateur, cela fait un peu prétentieux, on n’y croit pas. J’aurais trouvé plus équilibré de dire : « Lui, pourtant psychanalyste de formation, ne parvient pas etc… »

La liste des patients me semble artificielle et caricaturale :
- le jeune libraire qui voyait sa jolie compagne transformée en okapi : même dans un cabinet de psychiatre, je ne crois pas que l’on voie de cas semblables. En tout cas, cela ne se soignerait pas par de la psychanalyse !!!
- le quadragénaire perturbé par la lecture d'une lettre mystérieuse découverte dans les affaires de ses parents décédés : c’est chercher midi à quatorze heures, alors qu’on peut avoir un tout simple et banal « quadragénaire confronté à un œdipe mal résolu »
- la mère de famille séductrice impénitente et les charmantes aventures liées à la libre circulation de ses journaux intimes : ouillouillouille ! Si l’on dit « la jeune mère de famille nymphomane » on voit tout de suite de quoi il s’agit.
- « Grâce à eux, il aura au moins réussi à sortir de son appartement » : ce n’est pas grâce à ses patients, c’est parce qu’on la convié à un enterrement, que le personnage sort de chez lui
- « sa dulcinée » : heu… on n’emploie plus guère ce mot-là de nos jours si ce n’est dans un contexte gentiment humoristique ou ironique. Or, ce n’est pas du tout le contexte.
- « Tous les cinq ou dix ans, environ, elle refaisait une apparition sur le devant de sa scène à lui, chaque fois comme le dernier rappel d'un spectacle qui ne veut pas finir, et ils en profitaient tous deux au maximum » : tout comme j’avais relevé pour les deux rencontres, au début du texte, que la seconde, brièvement énoncée, comme en passant, déforce la première et donc l’histoire, ici, par ces vagues généralités et ce « profitaient au maximum », l’histoire d’amour d’exceptionnelle devient quelque chose d’un peu trivial et commun.
- « … rapide à disparaître qu'un torrent de montagne. Il est soudain curieux de ce qu'il advient du torrent, en bas de la montagne » : répétition de « torrent » et de « montagne »
- « Que la femme qu'il prétendait aimer est morte sans lui, seule ou entourée d'inconnus, qu'elle n'a même pas fait appel à lui… » : elle a fait appel à lui, sinon il ne serait pas à l’enterrement.

La chute est par trop mélodramatique, on l’a dit. J’ajouterais que si je suis la première à comprendre que l’on puisse se tuer par désespoir d’amour ou même de regret, à mon avis de vieille dame, à l’âge du personnage, on est devenu généralement bien trop égoïste et attaché à l’existence. On se tue alors plutôt parce qu’on ne veut pas faire face à la maladie, comme Montherlant qui perdait la vue…

   Anonyme   
20/2/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
L'écriture de Cortese est prometteuse, on sent les possibles. J'ai bien aimé cette nouvelle qui livre un peu de nostalgie, offre une chute, inattendue, donc une nouvelle à la française.

Merci pour ce partage.


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