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Brèves littéraires
Cyrill : Vers les ténèbres
 Publié le 03/11/25  -  5 commentaires  -  2550 caractères  -  31 lectures    Autres textes du même auteur

« … nous apportons un peu de lumière dans les vastes et infinies ténèbres de l'existence humaine et de l'univers. »
J.R. Oppenheimer.
« En tout homme résident deux êtres : l'un éveillé dans les ténèbres, l'autre assoupi dans la lumière. »
Khalil Gibran.


Vers les ténèbres


Nous couvrions nos corps de marées montantes. L’écume grelottait, aux récifs de nos os, ses bouillons de dentelle excommuniés des eaux. Nous écoutions sa goualante effleurer la falaise. L’écho nous la rendait en bribes d’aquarelle. Note imbibée d’embruns, ostinato délivrant ses parfums, parenthèses de sel sur les rouleaux, qu’un océan apaise. Nous étions sédiments de strates éternelles. Du monde la sonate, la promesse féconde et l’élément fidèle.


… Un mouvement aux vibratos obèses roulait sa bosse en vacarme importun. D’un galop véloce et d’un éclat brun, le geste féroce, ils ont scindé le chœur palpitant de l’artère où la horde anonyme hurlait à la folie d’un crime nonpareil. Ils ont cautérisé nos chairs aux soleils de l’abîme et sonné l’hallali. Ils ont cintré nos cœurs d’un carcan mercenaire, répandu nos viscères et fouaillé, mordu dans l’intime vermeil. Ils ont foulé la terre au mépris du vivant.


Graines non germées de la malemort, esprits décimés au vouloir de leurs vents, en quelle figure allions-nous renaître ? Vaine architecture en fleur d’astragale, tumeur de métal ou liqueur de l’être… Débris de camées dissous dans le fiel ou ruines d’Angkor… Miel d’enluminure, ors de cathédrale, cancer en pétales ou sels de salpêtre… De quel paysage aurions-nous l’essence ? Mer de porcelaine ou plaine d’ivoire, statue de lichen aux proues des épaves, concrétions de lave… 

Toujours en sursis, nous errions indécis de dédale en lacis de silence.


Du purgatoire obscur où suaient leurs haleines, ils œuvraient au futur en génies timorés.

Vieillards prématurés, bambins de faïence ou glabres messies aux faces plissées de hâves retroussis, ils ont catapulté les digues de l’enfance en palabre expulsé de leurs rances précis. Au sabre d’estoc ils sculptaient un récit, comme un roc scarifie des vélins d’innocence.

En quel discours s’est noyée la mémoire, en quel ethos et quel amphigouri, poivrant l’humanité d’insipide curry ? Postérité contrefaisant l’Histoire par les fac-similés d’un antique grimoire, ils ont voué nos âmes au pilori.


Nos traces abolies dans l’intermezzo de leurs écholalies, nous errâmes en bohèmes. Cent fois nous sillonnâmes les mêmes sentiers d’éternel instant, l’infini bourbier d’un même poème. Frappés d’anathème et toujours traversant les fuseaux d’un temps qui s’achève, divaguant sans trêve au fil de l’infâme.

Fossiles oubliés, rejetés sur la grève, quand l’algue embellissait de plis volatils nos livrées avilies, nous espérions encor en les ailes exaltées de nos drames d’oiseaux.


 
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   Myndie   
19/10/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
On le reçoit de plein fouet, ce texte foisonnant, plein de fougue, de mouvement, de sons et d'images, admirablement porté par ses allitérations en en v (« vibrato », « vacarme », « plis volatils nos livrées avilies ») et en ss, c (« en sursis », « les lacis de silence », les «messies aux faces plissées de hâves retroussis ») et par un vocabulaire riche, lettré, soigneusement choisi (ah ! les raffinés « malemort », « écholalies »!)
J'ai pensé à une sorte de dérive qui ménerait de la naissance, voire l'apparition de l'humanité tout entière (la mer évidemment, son écume, ses marées,ses « bouillons de dentelle ») à un exode sans fin, une divagation, une errance et une condamnation, celle qui vouerait « les âmes au pilori ».
J'ai senti derrière tout cela une véritable souffrance dont jamais ne se libère celui qui sillonne « les mêmes sentiers d’éternel instant, l’infini bourbier d’un même poème »
J'avoue ne pas avoir cherché beaucoup plus loin car j'ai préféré me laisser emporter, secouer par l'écriture impétueuse, effervescente, par le rythme fait à la fois de pulsions et de fluidité.
Car dans ce texte qui se veut chaos, on sent bien la patte du poète qui nous offre métaphores et oxymores («  cancer en pétales ») et cette prose en tenue d'alexandrins («Du purgatoire obscur où suaient leurs haleines, ils œuvraient au futur en génies timorés ») 
Au final, je pense plus à une réflexion intime, puissante et hantée qu'à une condamnation aux enfers des Hommes, « excommuiniés des eaux ».
Cela n'en prend que plus de valeur à mes yeux ;
C'est sombre, désespéré, profondément tragique et tellement lyrique que je suis totalement séduite par cette Brève littéraire.

   EtienneNorvins   
23/10/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime un peu
Un texte doté d'une belle densité poétique, riche en images et en sonorités. Le travail sur la musicalité est net. La langue est à la fois matière et sens, comme une marée verbale.

Le récit (ou plutôt la vision ?) semble suivre une trajectoire de chute et de réminiscence : une humanité originelle (?), fusionnée à l’océan et à la nature, est détruite par une force violente — les « ils » anonymes, symboles d'un pouvoir destructeur des hommes (?).

Car c'est là que pour moi le bât blesse : la prolifération d’images est somptueuse, mais saturante — elle pourrait être allégée et précisée, afin que certaines visions majeures se détachent davantage. Le texte suggère finalement plus qu’il ne dit, ce qui lui donne certes une force symbolique — mais si polysémique qu'on peut y lire tout à la fois la fin d’un monde, un cri écologique, et une lamentation métaphysique.

[EL]

   ANIMAL   
26/10/2025
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
Des mots aboutés, si recherchés soient-ils, ne font pas des phrases ni un texte attirant, en tous cas pas pour moi. Donc malgré de jolies images saupoudrées ça et là, je n'ai pas accroché. Bien trop intimiste et délirant pour moi.
Je ne doute pas que d'autres apprécieront et que d'aucuns crieront au génie.
Sorry.

   Donaldo75   
30/10/2025
trouve l'écriture
très aboutie
et
aime beaucoup
Ah, la catégorie des brèves littéraires ! Elle permet de lire des textes très spéciaux comme celui-ci. Dans le cas présent, c’est une déferlante lexicale qui s’abat sur ma lecture, un truc de fou encore pire que les premières publicités pour Perrier. La musicalité du texte, l’usage du passé simple qui le rend encore plus baroque, la vitesse à laquelle il défile et je ne sais pas pourquoi cette impression de célérité m’a pris, tout concourt à penser – et là, je dois me réfréner car penser c’est justement ce qu’il ne faut pas faire pendant cette lecture – qu’il y a du pas comme les autres, du pas « square » à la mode « je raconte ma vie » ou « je disserte vite fait sur le monde selon ma pomme » mais de l’envolée poétique où l’atterrissage va s’avérer difficile, un peu comme quand la libellule Evinrude tente de faire décoller son embarcation. Je sais, cette dernière image très Disney youp la boum c’est le roi du pain d’épices parait décalée par rapport à ce texte mais justement c’est ce décalage qui convient selon moi le mieux à ce que je viens de lire et que je me dois de commenter parce que l’Espace Lecture c’est quand même bien sympa pour les auteurs.

Bravo !

   papipoete   
3/11/2025
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
bonjour Cyrill
Un voyage, une odyssée plutôt qui nous conduit vers des ténèbres, tantôt d'un abysse sans fond, tantôt vers l'infini de cieux tout là haut.
Un texte qu'il faut lire en ressentant, non point en cherchant sur quelle partition l'auteur, en do mineur, en ré majeur, il le construisit...
en scope ou cinéma scope
de trapèze à un autre, avec ou sans filet ?
éveillé, ou dormant à poings fermés...
NB je me sens entraîné par une musique, à la poésie tantôt douce, tantôt à des croches furieuses ; aller vers les ténèbres pourrait signifier vers la mort, mais des signes me font croire plutôt vers un endormissement, dont le réveil est prévu dans très très longtemps !
Je vois un texte de mots, mais souvent la toile qu'un peintre inspiré manie, remanie à grands coups de pinceaux aux mille couleurs.
Les deux premières strophes me plaisent plus que toutes ses soeurs.


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