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Aventure/Epopée
Iris : Pile ou face ?
 Publié le 27/04/07  -  9 commentaires  -  6228 caractères  -  46 lectures    Autres textes du même auteur

Que choisiriez-vous ?


Pile ou face ?



La pièce tourne dans les airs, lourde de significations. C’est une pièce de vingt centimes, sale, crasseuse, un peu comme toutes les pièces de petite monnaie, qu’il aurait tant aimé donner à sa boulangère, celle qui a ce si beau sourire, contre un pain chaud, ou un petit croissant à tremper dans son café matinal, qu’elle lui aurait donné avec joie, en lui disant « Bonne journée ! », avec un chaleureux sourire. Mais au lieu de cela, c’est cette pièce qui va décider de son Destin lui-même. Pile : il meurt. Face : il vit. Quitte ou double. Pile ou face. Il a toujours détesté ces choix manichéens, mais aujourd’hui c’est différent. Aujourd’hui n’est pas un jour comme les autres. Car aujourd’hui c’est le jour où Elle est partie. Définitivement.


Elle est partie de sa vie comme elle y est entrée : en ouragan. Un ouragan d’une beauté terrible, magnifiquement intimidant. Après avoir fait sa connaissance, il avait appris qu’Elle avait toujours été comme cela, déchaînée, presque incontrôlable. Mais, bizarrement, ce cyclone capable de concurrencer bien des tempêtes tropicales avait donné l’impression de se calmer, pendant une courte période, comme pour une brève accalmie. Mais ce n’était que le calme avant la tempête, et Elle était repartie, plus forte et plus dangereuse que jamais. Elle est sortie de sa vie, à jamais, sans se douter des dégâts qu’Elle avait pu causer en son cœur, des dégâts irréparables.



* * *



Ils se sont rencontrés… quand se sont-ils rencontrés déjà ? Il peine à le savoir. Sa présence était devenue tellement… « normale » qu’il doutait qu’Elle ait été autrefois étrangère à son monde, et il lui était encore difficile d’imaginer qu’Elle était réellement partie. Ah ! Si ! Il se souvient ! C’était au mois de septembre, un mois triste, froid, et humide entre tous. Et il pleuvait. Des torrents d’eau dégoulinaient du ciel surchargé, comme si les cieux avaient brusquement craqué sous le poids des tonnes d’eau qu’ils contenaient. Et il avait fallu que ce soit le jour où il avait oublié son parapluie, tandis qu’il était dehors.


Alors qu’il tentait vainement de se protéger de la pluie avec son manteau, frêle rempart comparé à la densité de l’averse, il se souvenait parfaitement avoir entendu, sur le trottoir d’en face, un ricanement moqueur, hilare devant le piètre spectacle d’un homme impuissant face à Dame Nature. Il n’avait vu qu’un parapluie bariolé, agité de soubresauts, comme ceux de quelqu’un qui rit à ne plus pouvoir s’arrêter. Il avait bondi aussitôt, s’apprêtant à affronter celui qui osait se moquer ainsi de lui, lui qui avait déjà tant de mal à rester sec. Lorsqu’il arriva, enragé, et prêt à corriger l’ennuyant, il entendit une voix douce murmurer :


- Vous voudriez peut-être vous abriter ?


Dès lors, il oublia entièrement ses idées de vengeance et de tortures machiavéliques afin de laver son honneur, totalement hypnotisé par cette voix. C’était Elle.


Elle qui allait lui faire vivre une passion sans limites, hormis celles imposées par le Temps. Elle qui allait lui apprendre à vivre, ce que sa mère aurait dû faire. Elle qui allait le faire souffrir en lui imposant son caractère farouche. Elle qui allait l’emmener dans les près et dans les champs. Elle. Elle. Elle. Et encore Elle.


Partie



* * *



Et à présent, le voilà aux prises avec ce choix draconien. Pile ou face. Il a déjà choisi, et il a peur du résultat. Car c’est un lâche courage que de s’en remettre au Hasard pour décider de son destin, bien que ce soit de la véritable bravoure que d’accepter ce choix.


Face, c’est la vie, et tous ses plaisirs : lire le journal, apprendre que la guerre a encore fait plus de mille morts parmi des civils innocents, se régaler devant un navet stupide, acheter son pain, faire la grasse matinée quand on le peut, et pester contre ceux qui vous font lever si tôt lorsque vous travaillez, et aussi regarder sans cesse le cadre avec Sa photo. Celle que vous avez prise alors qu’Elle vous aimait encore. Et qui vous tire des larmes à chaque fois que vous la regardez, avec un air de nostalgie et une tristesse stupide.


Car il ne veut plus vivre. Il est las de vivre, de ce fardeau qu’on vous oblige à porter et qui pèse chaque jour un peu plus sur ses épaules… Il aurait vingt fois préféré être un chien, pour pouvoir sans cesse quémander des caresses, que sa maîtresse lui aurait prodigué avec joie. Mais il est un homme, et Elle n’a jamais aimé ces démonstrations puériles d’amour, que lui affectionnait tant…

L’étincelle qui rendait sa vie un peu plus supportable a bel et bien disparu. À jamais.


Pile, c’est la mort, et la fin tragique de sa vie, dont il n’aura pu profiter que de vingt malheureuses années. Pile, c’est accepter de mourir pour quelqu’un qui vous a déjà oublié. Mais pourquoi vivre sans Elle ? Sans sa présence chaude, rassurante, la vie a perdu à ses yeux toute sa valeur, tous ses attraits. Mais une fois passé dans le royaume des morts, il ne pourra plus regretter son choix. Il ne sait pas vraiment s’il aura le courage de reprendre lui-même ce que Dieu lui a donné, dans sa perverse Bonté.


Car il ne sait pas s’il a envie de mourir, c’est un choix trop définitif. Trop sec, trop imparable. Que son père rirait s’il était encore de ce monde : lui qui a toujours couru après les jupons, il ne devrait pas comprendre que l’on puisse vouloir mourir pour une simple fille. Mais si on lui avait dit que son gamin voulait mourir pour une bécane, il aurait compris…

Alors autant vivre, lui prouver qu’il en est capable, et sans Elle.


Car la pièce tourne, insensible à ses débats internes. Elle continue de virevolter, telle une virtuose aérienne, dans un vol terrible, qui décidera de sa vie, ou de sa mort. Pourquoi est-Elle partie ? La vie est si difficile…

Il tend une main, une main tremblante de peur, moite d’anxiété. Dans son dos coule le filet de sueur froide appelé Terreur. La pièce tombe avec un son sourd dans sa paume tendue. Il ferme la main, n’osant regarder. Lentement, il ouvre le poing.

Et il découvre le faciès rieur de la femme emblème de la France…



18/03/07-1/04/07

Pont de l’Arche

Iris



 
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   Ninjavert   
3/5/2007
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
C'est pas mal écrit du tout malgré quelques maladresses. L'idée est classique, mais le choix de la pièce de monnaie est originale et la petite touche d'optimisme qui conclut l'histoire est réconfortante.
Un texte touchant, et agréable à lire en tout cas !

   Pat   
8/5/2007
C'est effectivement plutôt bien écrit. un certain sens de la description, pas trop lourde toutefois. L'histoire aurait pu se prolonger par l'idée que finalement son choix était inutile. Peut-être un rebondissement qui l'aurait sorti de sa plainte, ou qu'il finisse par mourir alors qu'il avait décidé de vivre (mais ça c'est ma subjectivité). En tout cas, certaines choses sont à peine suggérées et on aurait bien aimé en savoir un peu plus (sur sa mère, sur les misères qu'Elle lui a fait subir, par exemple)

   Maëlle   
13/5/2007
L'image de la piéce est trés forte, et impressionne tout le reste du récit.

Je trouve dommage qu'Elle n'ai pas de prénom, ça la rends complement diaphane.

Le style est un peu chargé, mais que la douleur aie besoin d'épure n'engage finalement que moi.

   Anonyme   
4/11/2007
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Histoire très inspirée et bien écrite.

J'avoue que je me suis laissé emporté par cette narration à la fois étonnante et amusante.
Le hasard a fait que j'ai rencontré ce texte.
Il a bien fait.

   nico84   
4/11/2007
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Le hasard a choisi la bonne voie pour le héros car e qui fait la beauté de la vie, c'est qu'elle est imprévisible.

Note finale optimiste d'une nouvelle globalement tragique bien écrit où l'on se laisse emporter ...

   Anonyme   
17/2/2008
Nouvelle très agréable à lire. On évolue dans le non-dit, dans le suggéré et la fin est bien amenée. Mais tant d'amour pour une bécane !
Est-ce bien raisonnable ?

   xuanvincent   
19/7/2008
 a aimé ce texte 
Bien
Beaucoup de commentaires ont déjà faits sur ce texte, que j'ai lu avec intérêt.

Je suis dans l'ensemble d'accord avec ces différents commentaires, notamment avec celui de Maëlle : "L'image de la piéce est trés forte, et impressionne tout le reste du récit."

Jouer sa vie à pile ou face ? Il faut avoir le cran de le faire... Et est-ce la meilleure chose à faire, après une déception amoureuse (je laisse le débat ouvert) ?

Pour la forme, le "Elle", comme Maëlle, a retenu mon attention. Le personnage féminin aurait pu en effet être nommé. Toutefois, il ne m'a pas gênée pour la compréhension du texte.

Je m'attendais au pire pour la fin... Non, la femme, une autre femme, sous forme d'effigie, aura eu le dernier mot !

   Anonyme   
22/12/2009
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Bon,
je sais qu'on doit pas, mais c'est assez vieux quand même et y'a un commentateur qui a cru, réellement, que le type était amoureux d'une bécane ?!
sinon, le thème me parle, forcément, mais la façon de le traiter me gêne, je trouve l'écriture si énergique pour un tel thème, m'a l'air bien trop vivant ce garçon pour avoir envie de mourir, même épisodiquement ! ça donne un caractère presque burlesque à sa douleur.
sinon, j'ai jamais su ce qu'on appelait le côté pile et le côté face, mais à lire les commentaires, je suppose qu'il va continuer à vivre. Du coup, j'aurais bien vu une fin plus vive, en accord avec le style, une mort bête alors qu'il avait finalement accepté de vivre.

   cherbiacuespe   
9/5/2021
 a aimé ce texte 
Bien
Je vois dans cette histoire un antagonisme entre cette pièce qui tourne, emblème du hasard total opposé au libre arbitre chèrement acquit par l'humain. D'ailleurs notre héros y est toujours à deux doigts d'abandonner la folie de cette pièce. Pourtant ce n'est pas sa raison qui l'emporte. Qu'aurait-il fait si la mauvaise face de la pièce était apparue dans sa main ? Quand à la forme, je ne suis pas entré dans cette histoire comme elle l'aurait mérité. A relire sans doute.


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