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Fantastique/Merveilleux
MariCe : L'esprit de Noël [Sélection GL]
 Publié le 06/08/13  -  5 commentaires  -  12207 caractères  -  68 lectures    Autres textes du même auteur

Et si les objets pouvaient parler ! Ils en auraient des choses à nous raconter… surtout à l'approche de Noël.


L'esprit de Noël [Sélection GL]


Avez-vous déjà ressenti à un moment de votre vie cette certitude invraisemblable que vous viviez un moment singulier qui allait bouleverser le cours de votre destinée ? Si vous répondez par l'affirmative, laissez-moi vous raconter mon histoire, car vous seuls saurez l'apprécier à sa juste mesure.


Quand je les ai vus surgir sur le petit chemin, j'ai tout de suite su que notre histoire commune serait marquée d'une pierre blanche.

Ils m'ont d'emblée observée sur toutes les coutures et je me suis volontiers prêtée au jeu, certaine que des rapports sains dès le départ seraient le gage de solides fondations à notre engagement durable.


J'étais déclarée maison de campagne pour mon plus grand bonheur et leurs sourires extasiés en disaient long sur notre union complice.

J'aspirais à ressentir enfin l'air frais du matin, mes fenêtres ouvertes sur la rosée d'une journée printanière. Je me délectais à l'avance de l'odeur du bois qui se consume doucement, mes amis confortablement installés auprès de mon âtre, un livre ou une tasse de thé fumant à la main.


Ah comme je suis heureuse ! Je suis assurée, garantie havre de paix et j'attends l'installation de mes tourtereaux avec impatience.

Enfin les voilà qui arrivent, j'en tremble d'impatience. Ah mais, qu'est-ce que j'entends là ? D'où proviennent ces piaillements ? Coquin de sort, j'aurais dû me douter que j'étais trop grande pour nous trois, et me voilà obligée de supporter les bruits et les cris de trois enfants qui gesticulent et ne tiennent pas en place.

Pauvre de moi ! S'il existe une bonne étoile pour les maisons dans ce beau ciel que je contemple tous les soirs, je l'implore de m'écouter ! Je lui promets d'être compréhensive et bienveillante, pourvu que règnent ici éternellement paix et joie de vivre.


Je ne saurais vous dire si je suis superstitieuse ou si mon âge avancé me donne une furieuse envie de m'accrocher à mes promesses comme à une béquille de secours, toujours est-il que depuis, nous n'avons partagé que de bons moments, tous ensemble réunis.


Nous avons coulé des jours heureux, j'ai été le témoin attendri de cérémonies festives : le baptême de la petite Paule, la communion de Zoé et celle de Sébastien.


J'arborais à chaque fois, grâce à mes compagnons, mes plus beaux atours et je rougissais de plaisir à chaque compliment de leurs invités.

"Vous possédez vraiment une jolie maison. Elle a un charme fou, elle respire le bonheur."

C'est ainsi que j'ai vécu quinze années merveilleuses au fil des saisons. J'étais protégée et calfeutrée en hiver, et abritée des rayons trop chauds du soleil en été.


De mon côté, j'étendais sur mes amis une chape de protection et étirais à l'infini mes ondes bienfaitrices.

La gaieté des enfants élevait mon âme et je vouais à mes étoiles une reconnaissance sans borne.


Pourtant, un jour, sans prévenir, j'ai senti planer sur moi la menace des prémices d'un ciel d'orage. Mon intuition ne m'a jamais fait défaut et, j'en étais sûre, le chat était dans l'horloge. Noir comme le charbon, il annonçait des temps nettement moins idylliques.


J'étais dès lors aux aguets, je plaquais mes oreilles aux murs – en ma qualité de maison de caractère l'exercice ne présente aucune difficulté majeure – et écoutais.


Les adolescents parlaient bas, réunis en conciliabule dans la chambre de l'aîné. Ils semblaient préoccupés mais pas moyen d'en obtenir la moindre information.


Du côté du salon, la vérité m'est apparue avec une fulgurance inouïe et je suis descendue tout à trac du grenier à la cave sans la moindre précaution d'usage. Il était question de déménagement et j'entendais dans la foulée par le journal télévisé que je courais le risque d'être ensevelie sous les eaux dans un avenir proche.


Pauvre de moi !!! Une maison de charme tronquée en torrent de larmes, cela ne se peut ! Pas question de passer à la trappe pour une vague probabilité d'immersion de la région où nous vivions.


Je décidais aussitôt de me fouiller de fond en comble à la recherche d'une solution ; celui qui veut marcher sur mes plates-bandes n'est pas encore né, foi de maison mère.


Alors l'idée m'est venue de leur faire sentir qu'il serait malvenu de me laisser tomber comme une vieille chaussette – d'autant qu'avec l'âge, je me découvre un terrain allergique, la moindre poussière m'insupporte et le plus petit champignon me serait fatal –, j'ai donc mis mon plan en action ; ils verraient bientôt de quel bois je me chauffe.


Baisse de température réglementaire, puisqu'ils ne voulaient plus de moi, plus question que je dépense mon énergie à les garder au chaud. Ils se rendraient vite compte de l'énormité de leur projet. Le cas échéant, un contrôle énergétique aurait vite fait de dissuader le moindre acheteur potentiel.


Au début, j'ai bien ri de les voir grelotter en scrutant désespérément le thermostat d'ambiance et puis ma nature aimable a repris le dessus ; j'avais vraiment hâte que tout redevienne comme avant.


J'ai pensé un temps avoir gagné mes galons de stratège. Ils entassaient tous les plaids qui se trouvaient à portée de main et je voyais avec ravissement de nouvelles couettes arriver dans les chambres.


Hélas, j'ai chanté trop vite victoire. La dernière facture de chauffage fit brûler le torchon au sein du petit couple et je constatais à mes dépens combien est vraie l'histoire de l'arroseur arrosé… Enfin, c'est une façon de parler, parce qu'en ce qui me concerne, ce fut plutôt le contraire : un brasier me consumait et c'est la facture qui avait mis le feu aux poudres ; je suffoquais, je crachais ce qui me restait d'air par le conduit de la cheminée. J'ai bien cru rendre mon dernier soupir quand un pompier m'intuba in extremis.


Sauvée ? Dites-moi que je suis sauvée, sinon pourquoi m'infliger ce nouveau sursis ! Je ressemble maintenant à un condamné qui attend une grâce hypothétique.


J'ai bien tenté une dernière fois la chance en écarquillant les battants de la fenêtre un jour de grand vent. Les feuillets que le notaire leur présentait à signer ont bien failli s'envoler mais ça n'aurait été de toute façon qu'un différé de plus.


Il ne me reste qu'à m'endormir pour ne plus penser, ne plus réfléchir, ne plus souffrir. J'ai eu droit à un nettoyage en règle et je respire l'odeur du propre pour la dernière fois comme le condamné fume sa dernière cigarette.


Je suis emmurée vivante.


On m'a dévêtue de mes beaux rideaux, ôté tout ce qui me restait de coquetterie et de bien-être. On vient de clore mes volets ; j'avoue que je l'ai vécu avec soulagement ; j'aurais eu trop de peine à les regarder partir.


Quinze années balayées et me revoici de nouveau en tête à tête avec le silence qui me pèse comme une chape de plomb. Je me sens vidée, lessivée. Je n'entendrai plus jamais les rires des enfants, je n'écouterai plus jamais leurs confidences, je ne veillerai plus jamais sur les petits convalescents, je n'assisterai plus jamais aux cérémonies. Je ne serai bientôt plus qu'une maison vétuste qui finira sa vie délabrée ou inondée par la mer.


Je vais dormir pour ne plus penser. Les souvenirs me font trop mal. Après tout je ne suis qu'une maison, il était de mon devoir d'essuyer les plâtres.


La nuit est belle et m'apaise de son beau velours sombre. Les étoiles scintillent et me procurent la consolation nécessaire avant de plonger dans un engourdissement salvateur. Cette année n'aura pas été la meilleure pour moi et je ne verrai probablement pas l'an neuf qui se profile dans deux semaines. Je n'en veux pas pour autant à mes compagnons disparus, j'ai connu cette joie indicible d'avoir une belle vie de maison de campagne.


Tiens, quelque chose me démange dans le conduit de la cheminée. C'est fâcheux, je m'étais pourtant bien assoupie. Et voilà que je m'étrangle maintenant. Au secours, je sens l'air me manquer ! J'ai déjà une grosse tache rouge sur le vasistas qui me brouille le regard. Et la voilà qui se rapproche, avec à l'extrémité une grosse main gantée de blanc. C'est le père Noël !!!


Sur un ton goguenard, il s'écrie à mon intention :


— Tu peux m'expliquer pourquoi je n'arrive pas à entrer par la cheminée, jolie maisonnée ?


Alors je soupire, ce qui a pour effet immédiat de faire carillonner toutes les ardoises de ma toiture.


— Ne te fatigue pas père Noël, passe ton chemin, la maison est vide et de toute façon ceux qui l'habitaient ont passé l'âge de croire encore en ta venue.

—Allons donc, tu sais très bien que c'est une nuit très spéciale qui ouvre les cœurs et rapproche ceux qui s'aiment.


Songeur, le père Noël caresse sa longue barbe blanche et se rapproche de la petite lucarne. Il murmure :


— Tu m'as l'air bien triste en cette veille de Noël ; et qu'en penses-tu, toi ? Es-tu encore assez jeune d'esprit pour avoir encore un vœu à formuler avant que je m'en aille déposer mes cadeaux ?


Le peu de sève qui coulait encore dans mes boiseries n'a fait qu'un tour, tandis que je pensais très fort au seul souhait que je pourrais formuler qui serait celui d'effacer ces dernières et horribles semaines, pour que nous puissions vivre de nouveau tous ensemble réunis.


La dernière chose dont je me souvienne avant de plonger dans un long sommeil, c'est le rire tonitruant du vieil homme tout de rouge vêtu, assis dans un traîneau lancé à vive allure dans le halo lunaire.

Je revenais à moi de temps en temps, à chaque saison ; tantôt agacée par le chant trop proche d'un merle moqueur, parfois frigorifiée quand le gel et le verglas me recouvraient. Et puis c'était de nouveau le bruissement des feuilles du bouleau quand une brise tiède étendait un voile de torpeur au-dessus du jardin, avant que ne s'éloigne le soleil et ses chauds rayons, plongeant encore et encore la terre dans sa léthargie hivernale.


Vive le vent,

Vive le vent,

Vive le vent d'hiver,

Boule de neige,

Et jour de l'an,

ddddddddddddddddEt bonne année grand-mère !


Quelle délicieuse musique, comme ces voix enfantines me semblent douces !


Des voix enfantines ???!!! Je sursaute, et mes ardoises carillonnent de concert. Interloquée, n'osant croire à l'impensable.


— Tata Zoé, tu crois qu'elle est contente, la maison ?


La petite fille a tout juste deux ans, de grands yeux noirs qui lui mangent tout le visage. Elle est aussi belle que son papa Sébastien à son âge. Mais, mais, ce n'est pas possible ! J'ai donc dormi tout ce temps ?


Zoé se penche vers la cheminée, enlève le petit bout de papier qui menaçait de me faire tousser, et répond :


— Jamais de papier dans la cheminée, Rose, sinon tu risques de mettre le feu à la maison ! Souviens-toi de l'histoire que Papé et Mamé nous ont tant de fois racontée.


J'en frémis rien qu'à y penser. Zoé reprend :


— Elle est ravie, la maison, avec toutes ces extensions que nous avons faites, elle abrite tout son petit monde maintenant.


Vous savez quoi ? Je suis aux anges !!! Je remercie la terre, le ciel, le paradis et tous ses saints. Mais je garde la conviction que je dois ma chance à l'esprit de Noël qui a soufflé très fort une certaine nuit que je n'oublierai jamais.


J'ai dû tressauter un peu plus fort que de coutume et Rose, qui a l'ouïe fine, m'a observée attentivement.


— Tata Zoé, regarde, elle parle la maison !


Soudain, la porte s'ouvre brutalement, laissant place à mon Sébastien, que j'ai quitté frêle et timide, et que je retrouve grand et fort. Pour l'heure il est hilare, une fiche de salaire à la main.


— Je suis enfin passé cadre, je sens que l'année sera merveilleuse, j'ai une pêche d'enfer et une énergie à toute épreuve ; je sens que je vais casser la baraque !


Ah non alors !!!!!! Une ardoise m'en tombe dans le creux du foyer, soulevant une gerbe d'étincelles enflammées.


Zoé, médusée, me contemple et murmure :


— Je crois que tu as raison Rose, elle parle notre maison. Chut, laissons-la tranquille maintenant. Tu sais, elle n'est plus très jeune, elle mérite bien qu'on la ménage et qu'on lui évite toute contrariété. D'ailleurs, elle n'est pas toute seule, Papé et Mamé lui tiennent compagnie. Regarde, ils somnolent, assis au coin du feu.


 
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   Anonyme   
16/7/2013
 a aimé ce texte 
Un peu
Euh... oui, c'est bien mignon, mais enfin, dans la logique du texte, j'ai du mal à comprendre comment la maison a pu rester assoupie tant d'années pour se retrouver par miracle ré-occupée par la même famille. Et les papiers du notaire alors, la vente ? Même si celle-ci a été miraculeusement annulée (admettons), pourquoi se retrouve-t-on plusieurs années après sans que la maison ait repris conscience entre-temps ?

Je n'ai rien contre le surnaturel, je crois, mais j'aime bien que la logique interne soit respectée. Là, pour moi, si elle l'est elle m'échappe, ce qui est bien sûr tout à fait possible.

Bon, sinon le ton est trop naïf à mon goût (c'est mon goût) ; je trouve l'ensemble du texte... comment dire... trop sucré et trop lourd. La bûche de Noël, ça n'a jamais tellement été mon truc.

   Acratopege   
17/7/2013
 a aimé ce texte 
Bien
Charmante histoire que celle de cette maison qui parle, avec de jolies trouvailles, comme le fait qu'elle "se fouille de fond en combles" ou bien qu'elle évoque "le peu de sève qui coulait encore dans (s)es boiseries". Le scénario m'a paru quand même un peu naïf et pas trop bien ficelé. Je me suis surtout demandé ce qu'était devenu le projet d'inondation de la région, ou bien ce qui avait décidé les humains à rester... OK, l'intervention du père Noël, mais c'est un peu facile.
Mais la lecture de votre nouvelle fait passer un moment agréable. J'ai eu l'impression de me retrouver enfant en train d'écouter l'histoire au moment de m'endormir (celle du Petit Remorqueur par exemple, qui lui aussi pense, sent et parle comme un humain).

   alvinabec   
1/8/2013
 a aimé ce texte 
Bien
Bonjour,
C'est bien troussé, charmant, bien écrit même s'il y a pas mal d'expressions banales qui abaissent le niveau général de bonne tenue du texte.
Cette vieille baraque, on la sent craquer, grincer, respirer...
Le passage sur la vente du bien ne m'a pas paru tout à fait clair, d'autant plus que Seb. revient en fin de parcours...et la maison s'est agrandie.
Joli exercice de style.

   Pepito   
8/8/2013
Bonjour MariCe,

Forme : très agréable à lire, pas d'envolées poétiques mais de belles tournures de phrases.

Fond : ben là, c'est affaire de gout, mais les contes de Noel pour enfants ne sont pas ma tasse de thé. Du coup, la personnification de la maison etc... ouaif...
Quelques couacs : "J'étais... abritée des rayons trop chauds du soleil en été" comment ? sous une tente, un parasol géant, ... ?

Bref, août est une mauvaise date de parution, il eût fallu attendre l'hiver ;=)

Bonne continuation.

Pepito

   brabant   
9/8/2013
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour MariCe,


Beaucoup d'humour dans ce texte féérique (et le sens du confort et de la qualité de vie, du bonheur quoi !), on y vole de trouvaille en trouvaille jusqu'à la fin (sans temps mort). La maison, comme ses habitants, s'attire sans coup férir la sympathie attendrie du lecteur.

Conte de Noël à lire avec l'esprit émerveillé d'un enfant et la connivence de l'adulte qui n'aurait pas mûri.

J'ai positivement adoré le Happy End :)))


Elle est où cette maison ?


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