Page d'accueil   Lire les nouvelles   Lire les poésies   Lire les romans   La charte   Centre d'Aide   Forums 
  Inscription
     Connexion  
Connexion
Pseudo : 

Mot de passe : 

Conserver la connexion

Menu principal
Les Nouvelles
Les Poésies
Les Listes
Recherche


Horreur/Épouvante
natile : L'enfant oublié
 Publié le 13/06/23  -  9 commentaires  -  3589 caractères  -  84 lectures    Autres textes du même auteur

Quand le silence engendre l'horreur.


L'enfant oublié


Lorsque Charles naquit dans un coin de campagne bretonne, ses frères cadets et ses parents l’ignorèrent. Sa famille n’avait pas à se plaindre de la misère comme celles des fermes environnantes. Charles grandit solitaire mais bien nourri.

On le voyait à peine, effacé par la brillance de ses frères. D’un physique commun, il passait partout mais ne laissait pas de trace dans les mémoires.

À quatorze ans, étant habitué aux longues marches dans les bois, il se permit un soir de ne pas se présenter au dîner. Son absence fut à peine remarquée par sa mère, qui lui laissa un peu de soupe au chaud, juste soucieuse de le nourrir. Il fit la découverte d’un rocher creux qu’il aima occuper pour observer.

En contrebas, une petite étendue d’eau reposait là comme un miroir. Le jour, un petit monde animal venait s’y abreuver. À la nuit tombée, une autre scène l’avait surpris : une jeune femme y rafraîchissait sa peau. Cette image effraya ses sens.

Les jours suivants, il s’alita fiévreux, inquiétant même sa mère. Le bon docteur fut appelé. Les petits rhumes des frères l’avaient souvent sorti de ses soirées au coin du feu. Charles ne l’avait jamais dérangé. Cela valait donc la peine d’aller au chevet d’un malade si peu encombrant.

Il fut déçu de cette simple fièvre à soigner. Finalement, il aurait aimé garder l’énigme de cet enfant intact à toutes les infections de ce bas monde.

Avait-il déjà entendu le son de sa voix ? Charles ne disait pas grand-chose et ne contredisait rien. Au chahut de ses frères, fierté parentale, il répondait par un silence docile et réconfortant.

Il avait dans son lexique quelques formules de politesse, des réponses bien-pensantes qui le classaient dans la rangée des enfants sages et éduqués. Ses parents n’avaient eu aucun mal à le faire. Ses faibles besoins et demandes avaient été satisfaits de peu de choses. Les plus petits avaient dévoré tout cru leurs géniteurs de leur gourmandise à vivre et à consommer de l’énergie. Père et mère applaudissaient à cette rage de posséder, de se gaver de tout et offraient à profusion de quoi les pervertir.

Une fièvre en dix ans n’avait pas réussi à surprendre des parents déjà trop loin de leur premier-né. Le rétablissement passa inaperçu mais Charles avait changé et sans possibilité de retour.

Ses promenades au bois se firent de plus en plus nocturnes. Ses absences au dîner étaient ignorées et le bol de soupe oublié. L’ondine s’aspergeait le corps toujours fidèle à la lune. Charles s’accrochait fortement à son rocher pour ne pas la déranger dans ses caresses.

La fièvre l’avait quitté pour une sensation plus étrange : le désir de posséder, de ravir, d’incorporer cette image qui s’offrait à lui. Il avait acquis chaque nuit la certitude qu’elle était à l’attendre, depuis longtemps, seule à pouvoir lui arracher son silence.

Une petite pierre se détacha de son abri. Elle tinta à peine, juste pour faire lever les yeux de la désirée. Charles allongea son cou, ses épaules, sa figure sans grâce pour suivre le caillou. La belle ne s’enfuit pas encore. Elle ignora un moment cette vision de l’intrus pour accompagner le mouvement de la pierre vers l’eau. Les deux arrivèrent en même temps à ses flancs.

Charles étendit ses doigts pour frôler d’abord et serrer ensuite. La baigneuse se dégagea un peu, juste de quoi survivre. Elle croisa un regard doux, enveloppant, qui l’aida à succomber au feu de l’étreinte.

L’enfant oublié eut enfin de la chaleur au bout des mains. Il garda longtemps le corps contre lui, avalant chaque seconde d’humanité. Il vivait enfin dans les bras d’un semblable.


 
Inscrivez-vous pour commenter cette nouvelle sur Oniris !
Toute copie de ce texte est strictement interdite sans autorisation de l'auteur.
   Asrya   
4/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime beaucoup
L’écriture est agréable. C’est vraiment plaisant à lire ; un petit conte qui ne se prend pas la tête.
Du point de vue l’écriture, presque rien a dire, si ce n’est ce menu détail : la première phrase.
Comment des frères cadets peuvent ignorer la naissance de leur aîné ? Peut être que le seul mot « lorsque » n’est pas adapté, puisque cela sous entend que ses frères sont nés avant lui.
Bon… on comprend l’idée mais cela m’a perturbé au cours de la lecture.

Je n’ai pas bien « compris » la fin, ni vraiment le lien avec l incipit « quand le silence engendre l horreur ». Quelle est l horreur à lire dans votre texte ? Je dois être passé à côté du sens de votre écrit malheureusement. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir relu !
La dévore-t-il ? La viole-t-il ?
J’imagine que ce qu’il lui fait n’est pas vraiment ce que j’ai lu, puisque je n’ai pas lu la moindre horreur.
En espérant être éclairé.

Merci pour le partage, c’est un texte très agréable !
Au plaisir de vous lire à nouveau,
Asrya.

Lu et commenté en espace de lecture.

   jeanphi   
5/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Bonjour,

J'aime beaucoup l'intention et l'écriture de cette nouvelle, je regrette juste l'incertitude qui plane (magistralement, reconnaissons-le) sur le point final. Et votre intention est bien menée.
Vous exprimez par l'épouvante la difficulté d'un enfant extérieurieurement enviable mais en détresse émotionnelle sinon anéanti en son for intérieur. Hypersensibilité ou simple manque d'attention, beaucoup d'enfants ont plusieurs stades de cauchemards assez tardifs. Peu d'entre eux rencontrent réellement des jeunes filles imaginaires.
Je ne parviens pas vraiment à tirer la version de ce petit Charles au clair ...

   Disciplus   
9/5/2023
trouve l'écriture
perfectible
et
n'aime pas
Ni horreur, ni épouvante dans ce récit. Ni réelle histoire.
Le style est scolaire : Charles grandit solitaire mais bien nourri - une petite étendue d’eau reposait là comme un miroir. Cette image effraya ses sens - garder l’énigme de cet enfant intacte à toutes les infections de ce bas-monde -
La syntaxe est malmenée : Ses faibles besoins et demandes avaient été satisfaits de peu de choses-Les plus petits avaient dévoré tout cru leurs géniteurs de leur gourmandise à vivre et à consommer de l’énergie ...
Qu'apporte l'épisode de la fièvre?
Avec un personnage sans envergure, un décor inexistant, aucun dialogue, la lecture ne peut qu'être superficielle.
Suggestion : Persévérance et travail.

   Donaldo75   
14/5/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Je ne suis pas fan du style que je trouve un peu vieillot mais cette histoire est bien racontée. Elle est intrigante. Son déroulé peut surprendre par le découpage - étant donné la catégorie proposée, je m'attendais à plus de rythme, de suspense mais en réalité ce n'est qu'une histoire de tiroirs - pourtant finalement il tient la route, surtout à la lecture de la dernière phrase. Certes, je ne suis pas un afficionado des nouvelles construites sur la seule chute et ici je ne dirais pas que c'est le cas. La chute est réelle, elle m'a surpris et en même temps elle donne tout son sens au reste. J'ai eu envie de relire la nouvelle. Cette relecture a confirmé que l'histoire était bien construite. Dans un format aussi court - n'en déplaise aux ayatollahs du développement, des histoires étayées comme des catalogues de montage de meubles en kit - c'est méritoire et cela donne encore plus d'impact à la lecture, même si ledit impact arrive à vitesse modérée.

   Jemabi   
13/6/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime un peu
Un récit qui n'en dit pas plus que ce qu'il raconte. C'est à la fois reposant, puisqu'on n'a pas à se creuser la tête pour tout comprendre et que le style d'écriture un peu vieillot colle bien au contexte dans lequel se déroule l'histoire, et en même temps on reste sur sa faim. On nous promet de l'horreur, on ne nous offre qu'une scène finale tout en ambiguïté où l'on suppose qu'il y a meurtre, histoire de justifier la catégorie choisie. Pour le reste, le personnage de cet enfant, si discret que sa présence équivaut à son absence, était une idée intéressante. Mon regret est qu'elle n'ait pas été davantage fouillée pour nous faire partager sa solitude, sa vie, ses émotions, avec plus d'intensité. Au final, une lecture agréable mais qui risque de subir le même sort que l'enfant du titre.

   Perle-Hingaud   
14/6/2023
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
J'ai bien aimé cette nouvelle qui tient du conte, en renouvelant cependant certains traits : le héros n'est pas ici le plus jeune de la fratrie, mais l'aîné. Il n'est pas le vaillant sauveur mais celui qui dévie. L'ondine est à peine entrevue mais elle correspond à notre imaginaire. Le style est épuré, assez discret et évocateur pour que nous remplissions les blancs avec nos propres références.
Une réussite !

   Louis   
16/6/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
Un joli récit, bref, et ouvert à plusieurs lectures possibles.
Deux, au moins.
La première est celle du conte.
La deuxième celle d’un drame, et même d’une tragédie.

Le récit commence par ce qui paraît être une maladresse de formulation : « Lorsque Charles naquit… ses frères cadets l’ignorèrent »
Ce qui semble une erreur de logique, puisque l’aîné vient au monde le premier, et les frères cadets ensuite, s’avère une sorte de lapsus : acte manqué de langage qui révèle l’idée sous-jacente selon laquelle les cadets occupent la première place aux yeux des parents ; qu’ils ont une préséance dans la famille, et que la naissance de Charles s’est avérée une évènement tout à fait "secondaire".
Si l’aîné est le premier dans l’ordre des naissances, les cadets sont premiers dans l’ordre des préférences, et des existences.

Sans s’attarder dans les détails, le récit en vient à l’essentiel : les souffrances du jeune Charles.
Elles ne tiennent pas à des conditions matérielles.
L'enfant n’a pas à endurer de manques dans ce domaine, mais souffre d’une autre sorte de misère, fondée sur une carence et détresse affective. Ses besoins sont satisfaits, il ne vit pas dans l’indigence matérielle, mais dans une pauvreté affective très grande. Sans amour, sans tendresse, sans humanité.

Enfant « ignoré », il vit « solitaire » et silencieux.
Il manque de considération, de reconnaissance. Pour les autres, il est comme inexistant ; et par conséquent il l’est aussi pour lui-même, à ses propres yeux ; pas de conscience de soi, en effet, sans reconnaissance de la part d’autrui.
Invisible, « on le voyait à peine » ; transparent, il survit, mais comme « effacé » de l’existence.

Nous existons vraiment par le regard d’autrui, et dans la relation aux autres, mais la famille de l’enfant le néglige, ne le « voit » pas, ne le reconnaît pas, ne lui accorde pas d’existence. Et n’entretient avec lui de rapports que dans le cadre de la stricte nécessité de la survie.

« D’un physique commun, il passait partout mais ne laissait pas de traces »

Le jeune garçon ne souffre pas non plus d’une déficience, d’une malformation physique, de celles qui se ‘remarquent’, de celles que l’on voit, celles qui laissent « des traces » même si le regard est parfois celui du mépris et de la répulsion, du rejet et de l’exclusion.

Il n’est pas non plus un enfant "maltraité", subissant des violences physiques. Pas de coups, pas de sévices corporels. On est étonné d’entendre parfois des enfants maltraités déclarer aimer leurs parents pourtant si violents, mais c’est que l’on "s’occupe" d’eux, et qu’au moins ils se sentent exister, sous un mode douloureux et inacceptable de violence, il est vrai, mais ils existent ; et souvent les parents brutaux prétendent agir ainsi pour le « bien » de l’enfant.
Rien de tel pour Charles.
Enfermé dans le silence.

Introverti par nature ; d’un caractère inné « effacé » ? Non, l’environnement familial produit cet effacement, cet enfermement sur soi.

Charles subit donc la pire des souffrances : celle que provoque l’indifférence.
Il n’est rien pour les autres, et son impression c’est de n’être rien pour lui-même. Insupportable douleur ; épouvantable souffrance.

Dans cette banalité de la vie de l’enfant réside avant tout « l’horreur». L’horreur d’un vide.
Elle ne se situe pas dans un côté "monstrueux’" dans ce que l’on "montre’" mais dans celui de l’invisible ; dans la banalité discrète d’une vie de famille ; dans l’invisibilité douloureuse qui provoque le sentiment d’inexistence.

Ce terrible vécu de l’enfant est grandement rendu dans le code de la nutrition :
Lorsque le jeune garçon sort le soir, « son absence » est « à peine remarquée par sa mère » qui lui laisse pourtant « un peu de soupe au chaud » : ainsi n’est-il rien de plus pour elle qu’une "bouche à nourrir" en vue de la seule survie.
Le rapport à ce qui « se mange » est différent avec les cadets. Les parents ne leur offrent pas seulement de la nourriture, mais s’offrent comme nourriture de vie : « Les plus petits avaient dévoré tout cru leurs géniteurs de leur gourmandise à vivre et à dépenser de l’énergie ». Les désirs donc des cadets, et pas seulement leurs besoins, sont satisfaits par les parents, qui les encouragent, les incitent, excitent même à ce comportement de petits ogres voraces, "alimentent" leurs caprices, exaltent leur appétit de vivre : « Père et mère applaudissaient à cette rage de posséder, de se gaver de tout, et offraient à profusion de quoi les pervertir »
Aucune place n’est laissée à Charles, l’aîné, qui perd tout appétit de vivre. Ses « demandes et besoins » se sont donc montrées « faibles» et « avaient été satisfaits de peu de choses ». Sa famille dévore l’existence, quand lui n’en recueille que des miettes.

C’est en dehors de la famille que le jeune garçon trouve la vie.
Au cours de ses pérégrinations nocturnes, il assiste à une scène qui provoque en lui un grand trouble.
Aux abords d’une « petite étendue d’eau », il observe une jeune femme qui « rafraichissait sa peau ». Une jeune femme donc dénudée.
Une fraîcheur pour la jeune fille, mais une chaleur, une fièvre pour Charles.

La scène de la découverte d’une femme, d’un corps, alors qu’il est un jeune ado éveille ses sens ; elle réveille ses désirs.
Alors qu’il s’est enfermé dans le silencede l'oralité, son corps parle, il dit dans la fièvre l’ardeur nouvelle, le désir renaissant ( ses désirs ne se manifestaient pas jusqu’ici, mais ils ne sont pas morts, les désirs ne meurent jamais) ; il exprime la sensation nouvelle d’un ardent désir de chaleur humaine.
Il "brûle" de vivre.
Alors que ses relations avec son entourage familial restent dans le plus grand "froid". Elles sont même "gelées".

Si le récit est lu comme un conte, la jeune fille tient le rôle d’une fée.
Les fées des contes possèdent des pouvoirs magiques. Elles satisfont les désirs ou les vœux. La jeune fille est une fée qui, par son corps, par son humanité, va permettre la réalisation des désirs profonds du jeune garçon.
Elle apparaît un peu comme la Fée Bleue au clair de lune. Cette Fée qui savait même à un morceau de bois donner vie humaine.

Le conte emprunte bien souvent au mythe.
Et le jeune garçon semble en effet un nouvel Actéon qui découvre Diane aux bains.
Combien d’artistes, de poètes, d’écrivains (à commencer par Ovide dans les Métamorphoses) ou de peintres ( Le Titien, Rembrandt) se sont inspirés de ce mythe. Il inspire aussi ce conte, consciemment ou non.
On s’attend donc à ce que le jeune Charles-Actéon se change en animal ( en cerf dans le mythe) à la vue de la jeune fille, une métamorphose animale comme une régression de l’humain qui ne sait résister aux désirs qui le submergent, ou à ses "instincts".
Or le jeune garçon est déjà un "animal", un "sauvage".
Il erre dans des lieux "sauvages", dans les bois, le soir ( sauvage : étymologiquement du latin "silva" : la forêt), il rôde la nuit parmi les animaux.
"Sauvage" encore en ce qu’il erre solitaire à l’écart de la vie sociale, de la "civilisation".
Mais ici, dans ce conte, une inversion se produit : Charles ne se métamorphose pas en animal, au contraire, il s’humanise.

La jeune fille l’accueille, elle ne le repousse pas.
Solitaire comme lui, silencieuse comme lui.
À son contact, d’ "animal sauvage", il devient humain. Il découvre la chaleur humaine, la chaleur d’une étreinte :
« il garda longtemps le corps contre lui, avalant chaque seconde d’humanité ».
Ainsi se nourrit-il. Mais de tendresse, d’amour, d’humanité.
Ne dit-on pas dans le mythe que Diane renouvelle les jours, c’est-à-dire, qu’elle apporte un renouvellement quotidien ? Diane, par sa faculté à "rénover le monde chaque jour", sous la figure de la jeune fille, possède le pouvoir de rénover le monde du jeune garçon.

Ainsi le conte enseigne que l’on peut trouver, et se trouver, en dehors de la famille.
Non pas que la famille en général soit si peu aimante ( on ne trouve pas vraiment ici un écho au cri d’André Gide : « Famille je vous hais», même si le titre du roman où il se fait entendre, Les nourritures terrestres, résonne étrangement avec certains aspects du conte ), mais cette famille-là, comme on en rencontre parfois manque singulièrement d’humanité.

Un conte en général finit bien. Celui-ci finit dans la promesse d’une vie gagnée, d’une issue possible à la solitude, au silence, à l’inexistence, par la rencontre d’un « semblable », par la "magie" de l’amour ou de la tendresse.


Mais une autre lecture, au moins, est possible.
Dans le réveil de son désir, le jeune garçon se comporterait comme ses frères, avec possessivité.
Actéon s’est transformé alors en animal perdant son peu d’humanité, et son étreinte se fait bestiale. Cette humanité qu’il « avale », c’est la vie de la jeune fille. Il lui prend la vie.
Il devient "inhumain ", un "ogre" comme ses frères, et ne résiste pas à sa libido, que l’on définit parfois comme un "appétit sexuel".
Dans le conte la jeune fille donne la vie ; dans cette deuxième lecture, elle perd la vie.
Un drame alors s’est produit.
« Il vivait enfin dans les bras d’un semblable »
Le semblable, dans la version du conte, désigne l’humain, en opposition aux autres, ses frères, sa famille, tous inhumains.
Un semblable, dans cette autre lecture, désigne un être comme lui, Charles, solitaire et sans vie, mort de l’intérieur.
À l’instant où il croit trouver la vie, il rencontre la mort. Voulant absorber cette vie, il efface celle qui pouvait le sauver.

Une tragédie. Le sort malheureux de Charles, son destin familial, par une sorte de nécessité implacable, l’entraîne dans un drame. Dans la mort même de qui pouvait le sauver.

Le récit donc hésite : un vécu comme celui du jeune Charles peut mener à une fin heureuse, ou bien au pire. A l'horreur du pire.

La version du conte me semble la plus vraisemblable. Et la version préférable.

   Cyrill   
24/6/2023
trouve l'écriture
convenable
et
aime bien
Bonjour Natile,
C’est un texte aux allures de conte dont on devine assez vite la teneur avec l’exergue d’une part et la fin du premier paragraphe : « Charles grandit solitaire mais bien nourri ». Nous savons bien que ce n’est pas suffisant pour qu’un enfant s’épanouisse et la suite nous le confirmera.
La campagne bretonne n’augurait rien de bon, il faut dire, et ajoute du sordide au sordide. Quelques détails comme la visite d’un « bon docteur » à domicile ou le prénom de l’enfant, ou encore le « bol de soupe », laissent penser que l’histoire se passe il y a déjà quelques décennies, peut-être à la lueur de chandelles.
L’ondine aurait pu sauver l’enfant et le faire accéder à l’humanité par la découverte de l’autre, mais vous avez préféré une fin consternante pour ce contexte familial déjà frustre. La chute est bien rédigée, je trouve, puisque vous restez dans le flou et utilisez du double-sens ( succomber ) pour raconter le meurtre, qui me semble n’en être un que par inadvertance ou méconnaissance des conséquences exactes d’un étranglement.
Mais l’ondine est par excellence un personnage de conte, ne comptant pas vraiment en tant qu’humain et destiné seulement à faire avancer le protagoniste dans son initiation ou sa chute.
C’est dommage que vous ayez introduit cet épilogue un peu plus haut par de la théorie psychanalytique trop appuyée et peu digeste, selon moi, dans le contexte du conte : « le désir de posséder, de ravir, d’incorporer cette image qui s’offrait à lui ».
Merci pour le partage.

   KURT   
31/1/2024
trouve l'écriture
aboutie
et
aime bien
Les codes du conte conviennent bien à ce récit plein d'espaces laissés au lecteur. J'y vois la macération du fantasme jusqu'à la jouissance dans sa destruction. Cette ignorance, ce mépris qui poussent à la maladie, à marginalité, puis à la folie... L'excès de discrétion qui contraint au final à l'affirmation de soi dans l'abject. C'est le parcours de nombreux psychopathes. Surveillez-vous ;)
Néanmoins, un peu plus d'emballage, d'images fortes, de décors et de couleurs pourraient favoriser l'immersion.


Oniris Copyright © 2007-2023