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Policier/Noir/Thriller
Nestah : La garde
 Publié le 06/12/10  -  9 commentaires  -  6406 caractères  -  122 lectures    Autres textes du même auteur

Une infirmière d'unité psychiatrique recherche une patiente durant une matinée relativement trouble.


La garde


6 h 45

Un arbre a poussé dans mon sommeil paradoxal et mon réveil l’abat à coups de hache musicale. Une fois bien déracinée, je m’entête à trouver l’introuvable. Mon paquet de cigarettes devient la pierre philosophale et la médiévale quête à travers le royaume de ma chambre de fonction fait passer les minutes à grande vitesse. Je suis en retard.

Dans le bâtiment féminin de l’UMD, il faut se lever trente minutes avant les patientes. On agit par anticipation en encadrant toute action quotidienne, du petit déjeuner jusqu’au coucher. Calculer d’avance le temps que va prendre une action pour l’emboîter dans son emploi du temps imaginaire ne m’a jamais posé de soucis. Je prédis donc que ces demoiselles Binson et Gocherie vont se démerder sans moi pour les douches et j’en tire grande satisfaction. Entre nous, on ne peut apprécier tout le monde, et c’est d’autant plus difficile avec des collègues qui ne veulent pas l’être. Et puis j’ai vraiment envie de fumer, ce matin.


7 h 11

Salutations réciproques et appréciable don de Camel lorsque je croise Triton dans le couloir. Je me dis qu’il aurait dû passer son BAFA et partir avec une colonie. Il n’a pas le profil d’un surveillant en psychiatrie. Les patientes ne sont pas des enfants. Un enfant est rarement malade et dangereux.

Nous nous trouvons dans la section dite difficile. La section difficile de l’Unité des Malades Dangereux, autant vous dire que nos règles de sécurité tiennent dans des livres pouvant devenir des armes par leur poids. Donc pas de livre de règles de sécurité en usage libre. Il s’agit d’une petite aile du bâtiment, avec trois chambres d’internées et neuf chambres de garde d’infirmiers, une salle de bain commune aux trois femmes et une porte d’accès au hall central. Pas de superflu.

Un petit mensonge lancé à Samuel lorsqu’il me demande si l’heure de la douche s’est bien passée.


- Plutôt ce soir, j’ai dû chercher les cigarettes de Magalie pour éviter une crise.


Je passe d’ailleurs devant sa chambre, elle dort encore.


7 h 38

Dans le hall, je prends un café-croissant avec Triton, Liliane, Amina et Charlène. Ce sont des malades particulièrement calmes à l’exception de Liliane et de ses changements d’état surprenants qui lui valent d’être résidente attitrée au bâtiment difficile. Lors de son dernier délire, elle a griffé et mordu au visage Enora Binson, qui tentait de la contenir tandis qu’elle grattait le sol pour creuser un nid sous son lit.

Amina Hasser est érotomaniaque. Était érotomaniaque. Elle était persuadée d’être passionnément aimée par un homme qui ne la percevait que comme sa patiente. Sa psychose s’est éteinte en même temps que la vie de son kinésithérapeute.

Le docteur Faussoin a jugé Charlène apte à sortir. Son départ est prévu d’ici une semaine, après un traitement de huit ans sur son sentiment d’extrême persécution. Elle m’a fait oublier son passé petit à petit, à coups de discussions sensées et d’une volonté de guérison qui l’ont sauvée.


- Ils en recherchent une. Les surveillants du bâtiment des hommes fouillent les chambres et la cour, m’annonce-t-elle, mâchant sa viennoiserie.


Je deviens infirmière-bergère dans la seconde qui suit, et j’inspecte les croix de la feuille de soins accrochée sur le mur d’entrée. La case d’Anaïs Jussin n’a pas été cochée, celle de son soignant de garde non plus. Ce qui est normal dans la mesure où je ne me souviens pas l’avoir fait, et que je suis effectivement mademoiselle Haudebert, son infirmière de garde.


7 h 51

Dans la joyeuse file des malades, je repense au caractère apparemment normal de la veille. Seule entrave au règlement, j’ai mis à laver toutes mes affaires de fonction dans la machine du salon des infirmiers. En temps normal, il faut au moins garder une blouse propre pour la journée, mais j’ai mis le tout en séchage rapide pour ce matin. Peine perdue à cause de ces foutues clopes disparues. C’est l’heure des traitements, je dois récupérer les neuroleptiques d’Anaïs car elle n’a pas le droit de sortir à cette heure-ci. Derrière moi, Dieu prend la parole à travers le corps d’Angkpour, 5083 ans. Yolande a de sévères poussées psychotiques et schizophréniques.


8 h 02

La porte de la chambre d’Anaïs est entrouverte. Je constate bientôt, le gobelet et les pilules à la main, que celle-ci est vide. Anaïs a disparu, et par conséquent, je suis dans un beau merdier. Il n’y a pas de mobilier dans les chambres « difficiles ». Une table et un lit accrochés au mur, sans ressorts, ni lattes, ni draps. Juste un matelas. Anaïs n’a pas profité de sa ration de cigarettes car celles-ci gisent sur la table. Les patientes ont l’avantage d’en bénéficier gratuitement, un « calmant toxique » non limité. Au moins, à défaut d’être guéries et réadaptables, les pensionnaires meurent d’un cancer. J’en tire doucement une du paquet, en maigre compensation des problèmes qu’elle va très certainement me poser. Des cachets multicolores tombent. Anaïs ne les prend plus, il y en a au moins une dizaine, soigneusement cachés au fond de l’emballage cartonné. Dans mon dos, la voix de Samuel me demande de le suivre.


8 h 08

Le premier fait grave est qu’Anaïs n’est plus dans l’hôpital, ou du moins pas dans les chambres ni la cour. Le deuxième, c’est que le soignant de garde désigné pour l’une des internées est considéré comme le responsable légal de celle-ci. Son dossier psychiatrique lourd m’indique qu’il y a une chance sur deux pour qu’elle se soit blessée. L’autre possibilité est qu’elle ait blessé quelqu’un. Quoiqu’il arrive, mathématiquement, il y a une raison logique pour que je sois assise dans la salle d’attente du directeur. La présence de trois policiers enfonce le pronostic, et je commence à avoir une boule dans la gorge.


8 h 11

- Avez-vous remarqué quelque chose de particulier durant les heures de garde des infirmiers ?


Non, je n’avais rien remarqué de particulier. Les malades s’étaient bien comportés, mise à part une crise de Magalie rapidement maîtrisée. J’explique au docteur Faussoin mon problème de blouse lorsque celui-ci prend très calmement un grand sachet transparent à ses pieds et le pose sur le bureau. On y distingue du linge, blanc et rougeâtre.


- Pour ce qui est de ces blouses, on sait tout ce qu’il y a à savoir. Maintenant, parlez-nous un peu de ce qu’est devenue mademoiselle Haudebert, Anaïs.


 
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   doianM   
21/11/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
La fin me met dans le cirage, je reprend la lecture pour comprendre et remettre le casting en bon ordre.
Donc, si je ne me trompe pas, Anaïs a pris la fonction de Mlle Haudebert dont le sort me donne des frissons.
Et j'ai écouté tranquillement la malade me raconter en spécialiste la
matinée de la clinique et les diagnostics des pensionaires...

Belle petite histoire.

Merci et bonne continuation

   Anonyme   
28/11/2010
 a aimé ce texte 
Un peu ↑
Je passe rapidement sur l'exactitude des symptômes des patients et le mode de fonctionnement d'un service de psychiatrie de crise, pour savoir comment cela fonctionne il me semble simplement que la réalité est plus banalement glaçante que l'ambiance volontairement excessive qui est dépeinte ici. J'ai un peu l'impression que l'auteur force le trait pour donner une atmosphère particulière à sa nouvelle. Il me semble que ce n'est pas vraiment nécessaire.
A cause de cela, la chute ne surprend pas. Dès les premières lignes, confuses, on sait. Et toute l'histoire perd de son sel.
L'écriture a, par contre, tout ce qu'il faut de déconcertant. Je ne suis pas certaine d'aimer mais le style est personnel et ça ça compte quand même!

Merci pour cette lecture.

   Anonyme   
29/11/2010
 a aimé ce texte 
Un peu
Début original, et décalé par rapport à la suite, pourquoi pas ...
Rythme des heures qui cadencent le texte. Trop de personnages à mon goût pour un texte très court. On arrive à la fin, et on ne comprends pas bien ce qui se passe.
La garde aurait-elle tuée Anaîs ? Ses vêtements blancs et rougeatres ? du sang ? La garde parmi les fous serait devenues folle ? Mais pas d'indices de cette folie qui auraient pu nous mettre un peu sur la voie.
De l'humour qui allège l'ambiance comme :
"Donc pas de livre de règles de sécurité en usage libre."
"Je deviens infirmière-bergère dans la seconde qui suit,"

Bonne continuation

   Flupke   
1/12/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bonjour,

J'ai aimé la chute, néanmoins j'ai trébuché sur la dernière phrase.
Je pense qu'elle serait plus claire si l'on procédait à une inversion:
"Maintenant Anaïs, parlez-nous un peu de ce qu’est devenu Mademoiselle Haudebert".

Le prénom peu courant d'Anaïs est bien choisi (facile à mémoriser, vu le grand nombre de personnages pour un texte aussi court) vu qu'au moment où le rideau tombe on comprend tout.

"et la médiévale quête" cette inversion me semble un peu lourde.

Une histoire bien structurée. Bravo !

   Anonyme   
7/12/2010
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'aime beaucoup le tout début : "Un arbre a poussé dans mon sommeil paradoxal et mon réveil l'abat à coups de hache musicale"
Belles sonorités, belles métaphores, bel imaginaire.
C'est une des meilleures premières phrases que j'ai lues sur Oniris, peut-être la meilleure.

Beaucoup de personnages en peu d'espace, mais je ne m'y suis pas vraiment perdu. Pourtant, je vous assure que je m'y perds souvent très vite. Encore un bon point.

Donc, si je comprends bien, un cas de schizophrénie dont la deuxième personnalité serait portée sur quelqu'un d'existant, puisque Anaïs, se prenant pour Mademoiselle Haudebert, a l'air d'être une narratrice sincère. Ou alors, j'ai rien pigé :-)

En seconde lecture, je cherchais aussi des indices ignorés en première lecture, qui m'auraient permis de savoir s'il y avait changement de narrateur, s'il y avait des situations impossibles dans un cas (Haudebert) comme dans l'autre (Anaïs), mais je n'ai rien trouvé de probant. Vous avez donc fondu les deux personnages en un seul narrateur de manière assez convaincante (du moins pour moi).

Une nouvelle vraiment encourageante d'un(e) nouvel(le) onirien(ne) que je suis curieux de découvrir dans un exercice plus long.

   widjet   
27/12/2010
 a aimé ce texte 
Pas
Je ne vais parler que de la forme car l’histoire, j’avoue qu’elle ne pas intéressé le moins du monde. Rarement la folie ne m’avait semblé si soporifique. J’imagine que pour ne pas déflorer son final, l’auteur s’est attaché à normaliser le plus possible (à part le début gentiment barré) les propos du malade. Néanmoins, je pense qu’il y avait moyen de distiller un peu de mystère sans mettre le lecteur sur la voie.

De plus, le fond n’est guère aidé par la forme d’une rare lourdeur. « Entre nous, on ne peut apprécier tout le monde, et c’est d’autant plus difficile avec des collègues qui ne veulent pas l’être » . Pas l’être quoi ? Comme tout le monde ? Pas clair pour moi.

Les tentatives d’humour et d’esprit tombent à plat à cause d’une construction de phrase bancale (exemple « autant vous dire que nos règles de sécurité tiennent dans des livres pouvant devenir des armes par leur poids »). Conseil : lire et relire à voix haute ce genre de phrase (pour s’assurer de leur impact et de leur fluidité) surtout lorsqu’elles sont sensées atteindre un objectif précis (ici, faire sourire).

J’ai un souci avec « Lors de son dernier délire, elle a griffé et mordu au visage Enora Binson, qui tentait de la contenir tandis qu’elle grattait le sol pour creuser un nid sous son lit » . Qui grattait le sol pour creuser un nid ? Pas clair (bis). Humour à nouveau raté (pour moi) avec le « Sa psychose s’est éteinte en même temps que la vie de son kinésithérapeute » .

L’exemple type de la phrase sensée claquer et pourtant…

« La porte de la chambre d’Anaïs est entrouverte. Je constate bientôt, le gobelet et les pilules à la main, que celle-ci est vide » . Celle-ci ? La chambre ? Pourquoi ne pas écrire « la pièce est vide », ainsi pas d’ambigüité.

« La présence de trois policiers enfonce le pronostic » .
Pas très heureux comme formulation, non ?

Bref, un texte qui semble vouloir ne reposer que sur sa fin (d’ailleurs totalement parachutée car la préparation en amont n’est à mon sens pas assez élaborée).

W

   caillouq   
30/12/2010
 a aimé ce texte 
Beaucoup
J'avais commencé à lire ce texte en EL, et pas eu le temps d'y revenir depuis.
Enfin, j'ai pu aller jusqu'au bout de cette nouvelle, et je ne le regrette pas.

Une fois passées les trois premières phrases un peu trop métaphoriques pour mon goût et pour le ton du reste, le rythme de la nouvelle est très prenant. On ressent bien le souci d'efficacité de cette infirmière, la perpétuelle course contre le temps. La vivacité du récit fait sourire, comme ces vieux films chahutés des débuts du cinéma, puis on sourit de moins en moins parce que le rythme s'emballe de manière anormale, jusqu'à la chute, pas si surprenante que ça parce qu'elle vient répondre aux alarmes générées par l'écriture de plus en plus affolée. On sent la folie avant qu'elle soit clairement annoncée. Et c'est ça que je trouve très réussi.

   marogne   
19/2/2011
 a aimé ce texte 
Un peu
A la relecture il y a bien quelques indices de la fin, mais cela aurait pu être quelques figures de styles ou traits d’humour du personnage principal parlant à la première personne. Mais rien qui ne puisse justifier la fin qui arrive un peu comme un cheveu sur la soupe et ne conclut pas vraiment la nouvelle, ni apporte un point d’orgue tellement elle semble plaquée et artificielle. L’ensemble est ainsi un peu boiteux, un début prometteur – on est intrigué, forcement, et on s’attend à quelque chose de fort – qui dure un peu trop, et cette fin….

L’écriture est plaisante néanmoins, et donne envie de lire, du même auteur, une histoire.

   Enzoloren   
16/8/2011
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un texte bien structuré qui de par sa chute,nous offre l'option d'un grand frisson dans le dos.
Une histoire qui reste jusqu'à la fin,fidèle à son thème
avec parfois quelques traits d'humour bien choisis.
Je ne me suis pas ennuyé une seule seconde à ma lecture
Bravo
mes amitiés


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