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Réalisme/Historique
Perle-Hingaud : Souvenir : la branche de l’Ouest
 Publié le 02/01/15  -  29 commentaires  -  3665 caractères  -  221 lectures    Autres textes du même auteur

Nos parents dansaient là-bas, je pouvais presque deviner les rires et la douce ivresse, sentir l’odeur âcre des fumées.


Souvenir : la branche de l’Ouest


Les parents avaient tout quitté pour cette vie, cette maison. J’avais dit adieu à l’appartement douillet du sixième étage, au long boulevard gris, à la bouche de métro qui soufflait un air tiède. Je regrettais l’alignement des rues, les panneaux publicitaires ponctuant mon trajet vers l’école et sa cour protégée de hauts murs. Le bitume était mon univers. En ville, je me sentais bien. Mais je n’avais pas eu voix au chapitre, nous avions fui dans un tourbillon de poussière, de cartons mal ficelés, de sacs-poubelles troués. Nous étions partis pour une nouvelle frontière, loin. Un lieu où les arbres n’étaient pas cerclés de métal, où l’herbe ne se cantonnait pas aux squares. Ici, rien ne me protégeait de la nature, rien ne la domestiquait. Nos parents avaient voulu vivre au plus près de la forêt, la maison était hors du village, imposante comme une aïeule robuste.

Le fleuve coulait derrière nos fenêtres, grondait au printemps, menaçait et, de temps à autre, dévastait. Tim s’en accommodait mieux que moi, je crois. De notre chambre sous les combles, nous nous penchions par la lucarne. Nos regards se noyaient dans le vert, à perte de vue les arbres, la magie sombre, l’inextricable contenu par un rempart farouche, le fleuve, ses roulis et tangages fatals à nos bateaux de papier, à nos coques de noix d’aventuriers.

Devant la maison, la civilisation : le jardinet fleuri, la route vicinale, l’école là-bas sur la place de la mairie. Derrière, la vie sauvage, la nuit et les bêtes qui hurlaient.

Souvent, nos parents sortaient. Ils aimaient les fêtes, les cheveux longs filetés de gris, les guitares et les refrains repris en chœur. Nos parents étaient beaux. Ils se regardaient et nous baissions les yeux, exclus, gênés. Ils se regardaient et nous n’existions plus.

La nuit, je me réveillais dans la maison abandonnée. Je secouais Tim, nous repoussions l’édredon pour guetter par la lucarne. Parfois, deux yeux jaunes brillaient fugitivement. Alors nous ne sortions pas, trop terrorisés par la bête. Parfois, l’air semblait doux et la nuit nous appelait.

Nos pas s’étouffaient dans les pièces obscures, l’escalier ne trahissait rien de nos évasions. L’humidité de l’herbe s’infiltrait à travers nos baskets enfilées sur nos pieds nus. Nous nous donnions la main pour courir vers le grand châtaignier. Tim me faisait la courte échelle, nous grimpions sérieusement, sans un bruit, sans un cri lorsqu’une écharde nous blessait. De là-haut, le monde se révélait. J’aimais m’installer sur la branche de l’Est, celle qui pointait vers la maison. Noire, inquiétante. La nuit effaçait les colifichets qui l’adoucissaient. Disparues les jardinières au balcon, disparue la verrière fragile du perron. La maison n’était qu’une masse obscure, l’antre primitif dont nous nous étions évadés. Au loin, bien plus loin sur la nationale, les lumières de la ferme coopérative scintillaient. Nos parents dansaient là-bas, je pouvais presque deviner les rires et la douce ivresse, sentir l’odeur âcre des fumées.

Tim préférait la branche de l’Ouest. Notre solitude lui importait peu, la forêt l’attirait. Elle bruissait et l’aguichait. Parfois une branche lui cachait la lune, parfois un jappement, une échauffourée lui rappelait que nous étions les seuls immobiles. La vie grouillait sans nous, en bas.

Il arrivait que nos parents nous surprennent au petit matin. Maman était pieds nus et les cheveux en désordre, papa avait les joues écarlates et la voix rauque. Ils nous prenaient dans leurs bras, nous appelaient leurs sauvageons et nous ramenaient dans leur lit. Le lendemain, personne ne se lèverait, nous ferions l’école buissonnière, blottis sous la couette.


 
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   Asrya   
14/12/2014
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
"Je regrettais l’alignement des rues, les panneaux publicitaires ponctuant mon trajet vers l’école et sa cour protégée de hauts murs"
--> l'idée de la phrase est intéressante toutefois en terme de rythme, à l'oreille, quelque chose me perturbe.

C'est le seul "reproche" que je pourrais émettre à la suite de cette lecture. Le reste, j'ai totalement adhéré.
Les phrases sont courtes, concises : impact garanti.
Les mots sont bien choisis, s'enchaînent et dessinent véritablement l'environnement que vous nous décrivez : une petite merveille.
La branche de l'Est, la branche de l'Ouest ; je m'y suis vu. Je m'y suis vu seul, je m'y suis vu avec mon frère, j'ai réellement apprécié.
Ces souvenirs, ces petits bouts de souvenir qui donnent du "piquant" à la vie ; ces ressentis, aussi banals qu'ils puissent être, transcendent l'âme et rappellent à chacun, lorsqu'ils en disposent, que les plus beaux moments dans la vie, sont les plus simples. (comme le disait une certaine publicité pour un fromage.)
Je m'éloigne un peu.
Tout cela pour dire que votre texte m'a parlé, m'a touché : merci.
Votre écriture m'a séduit, vos "souvenirs" aussi,
Merci.

J'ai passé un merveilleux moment à vous lire,
Au plaisir de vous lire à nouveau.

   Anonyme   
16/12/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'ai vraiment aimé cette évocation simple, comme une échappée sur tout un univers. Elle se limite à quelques instants significatifs, propres à poser avec efficacité l'ambiance. C'est comme un trou dans une haie à travers lequel on aperçoit tout un paysage...

Je me dis aussi que ce texte représente un fragment ; il se suffit à lui-même, mais je le verrais bien dans un ensemble de moments pareillements brefs qui, à force, camperaient un tableau plus large. Comme lectrice, je n'aurais pas craché sur plus d'ambition, en fait, dans la volonté de me présenter un monde.

"la maison était hors du village, imposante comme une aïeule robuste" : joli ! Lapidaire et expressif, je trouve.

   caillouq   
18/12/2014
 a aimé ce texte 
Bien ↓
C'est chouette, c'est très bien écrit, c'est prenant, mais c'est BEAUCOUP trop court. On voudrait en savoir beaucoup plus. Espèce d'allumeur, l'auteur.

   Pimpette   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Passionnément
J'aime!
Tout y compris sa brièveté car rien ne peut être ajouté à la précision élégante de ce récit...
TOut est dit: la ville d'avant; l'exil voulu par les parents et subi par les deux enfants...la grande nature devant la grande maison et la vie un peu mondaine et nocturne qui convient au couple...les évasions des enfants...l'attente du retour.
Pas un mot de trop. Pas un adjectif inutile.
Pourtant...on sent un déséquilibre dans cette famille où l'amour ne manque pas....tout est très subtil!
le lecteur doit avoir une part personnelle d'imagination pour compléter le texte comme chez les très grands...Carver...Salinger

Je note très haut pour souligner combien ce style de texte est rare sur Oniris

   Pascal31   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Un joli souvenir, brossé avec soin et élégance. Les mots sont pesés, soupesés, les phrases ciselées pour en dire beaucoup avec une belle économie de mots.
Au rayon des (petits) reproches, pas grand-chose : ce "souvenir" inutile du titre, peut-être ("La branche de l'ouest" faisait un titre plus joli, en économisant un mot supplémentaire) et le changement de temps de la dernière phrase : il crée l'effet escompté mais il passerait mieux et serait encore plus percutant avec un saut à la ligne après "nous ramenaient dans leur lit".
Mais ce ne sont que broutilles : c'est un court récit qui débride l'imagination et élégamment écrit que tu nous proposes là. Bravo !

   Francis   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Les décors de ce petit théâtre sont plantés avec précision du grand châtaigner offrant deux horizons à la maison "aïeule robuste". Les acteurs s'y épanouissent chacun à leur manière mais avec une imperceptible complicité : parents hippies, jeunes et amoureux ; frères qui s'évadent en se tenant par la main. Un texte qui offre une lecture très agréable et dont on voudrait une suite !
Merci.

   Nine   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'aime beaucoup l'atmosphère du texte, on s'y plonge sans difficulté.

   in-flight   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
J'ai souvent besoin d'une intrigue pour m'accrocher à une lecture mais là, je ne sais pas pourquoi, nul besoin. La brièveté du texte joue pour beaucoup mais c'est surtout la qualité de l’écriture et des métaphores qui maintient le lecteur en haleine.
Comme à d'autres, ce récit m'a rappelé les aventure fictives que nous imaginions plus jeunes avec mes cousins: "deux yeux jaunes brillaient fugitivement" Brrrr...

Au passage j'ai élargi mon stock lexical: "vicinal" je ne connaissais pas.

Un texte qui fait du bien.

Juste une remarque, pourquoi avoir choisi comme titre le branche de l'Ouest? C'est la plus mystérieuse certes et elle ne donne pas sur la maison mais celle de l'Est aurait le droit de cité dans le titre également.

   Lulu   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Beaucoup de douceur dans ces mots ; cette nouvelle qui en dit long dans un texte assez court. L'imparfait accentue cette douceur en lui donnant quelque semblant de nostalgie, me semble-t-il.

Les détails sont là pour donner un brin de réalisme : "Tim me faisait la courte échelle, nous grimpions sérieusement, sans un bruit, sans un cri lorsqu’une écharde nous blessait." (J'aime beaucoup l'adverbe "sérieusement" dans la phrase que je viens de relever ; il apporte une touche de complicité avec le lecteur. Jamais, je n'y aurais songé. C'est une belle trouvaille).

Peu de mots, et pourtant, toute une histoire ; des souvenirs sur la ville délaissée, la vie nouvelle gentiment racontée. Vous nous racontez du bonheur, voilà ce qu'il me reste en fin de parcours, un bonheur partagé que les parents ne pouvaient totalement soupçonner. Un bien riche souvenir que cette branche de l'Ouest.

Au plaisir de vous lire à nouveau.

   Pepito   
2/1/2015
Bonjour Perle-Hingaud et bonne année,

Jolie kriture, très sensible.
Pour chipoter, la phrase "Nos regards se noyaient..." exprime deux idées, "la forêt inextricable" et les"coques de noix sur le fleuve" cela fait peut-être un peu beaucoup et méritait d’être découpé.

"Nos parents ... se regardaient et nous n’existions plus." m'a fait marrer. Arriver en age d'avoir des enfants aventuriers et s'aimer encore au point de les oublier, wouah ! ;=)

Juste une idée : "ferme coopérative" "Ouest" et "Est" m'ont fait penser à un pays de l'autre coté du (ex)mur... ?

Il me manque une chute pour passer de "texte" à "nouvelle", d’où l'idée que je viens de lire une partie d'un tout plus long...
En tous cas, la lecture a été agréable, merci.

Pepito

   Anonyme   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour

Ce joli texte empli de nostalgie me remémore mes vacances
d'adolescent dans le Jura, non pas avec mes parents mais chez
mes grands-parents en un lieu que Clavel décrivit dans son roman :
Marie bon pain.
Pas de fleuve mais à l'orée d'une forêt immense que nous pénétrions
pratiquement tous les soirs en faisant "le mur" également.
J'aime bien ce texte simple qui retranscrit finement tous les états
d'âme de ces enfants dans leur changement d'habitation et d'habitudes.
C'eût pu être traumatisant mais à la lecture il semble que ce fût bénéfique.

   Anonyme   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien
C'est fort bien écrit, il n'y a pas à dire. Maintenant je pense qu'il est plus facile de tenir un bon niveau sur une courte distance, si je peux me permettre une analogie avec le sport. Dès qu'on dépasse les dix mille caractères, ça devient plus compliqué de conserver de la qualité. Je ne doute pas que l'auteur en soit capable.
L'histoire est pleine d'une ambiance bucolique et mystérieuse, renforcée par cette vision enfantine. Je trouve qu'il y a de la tragédie dans ces deux enfants négligés par leurs parents, livrés aux secrets de la nuit. Entre parenthèses, je les trouve bien téméraires ces deux petits qui affrontent l'obscurité !
Ce n'est pas clairement exprimé, mais dans tous ces souvenirs je vois comme une accusation d'un égoïsme parental. C'est du moins mon ressenti.

   Anonyme   
2/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Je ne rajoute rien aux commentaires plus que positifs, je partage, oui on pourrait en vouloir plus, on en veut plus, j'en veux plus. J'ai pensé à Steinbeck ou Fante même si cette allusion à une bohème soixante-huitarde n'est pas à la même hauteur (historiquement) mais les souvenirs sont là.

   Anonyme   
3/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Perle,

Elle a raison, Caillouq, c’est beaucoup trop court !
Et en même temps, le genre mini nouvelle convient très bien à la mise en exergue de l’ambiance dans laquelle je suis happée.

Sans vraiment m’en rendre compte, l’histoire m’emporte dans votre tableau où tout est souvenir et respiration.

La branche de l’Ouest, celle de l’Est, m’ont ouvert des horizons vers ma propre maison.

J’ai particulièrement apprécié la note finale et dans les accents de l’école buissonnière, tous blottis sous la couette, j’ai senti le bonheur brut dans le parfum de ses imperfections.

Merci pour le voyage.

   Marite   
3/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Bien apprécié cette plongée dans les souvenirs d'enfance. C'est court effectivement mais très vivant et la fluidité de l'écriture en facilite la lecture. L'image, entre autres, qui m'a séduite c'est "la maison ... , imposante comme une aïeule robuste."
Le titre me laissait supposer une toute autre histoire ... du côté de l'Ouest.

   Robot   
3/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↑
Ce qui m'a enchanté dans ce texte, en dehors de cette belle écriture, c'est la manière dont deux enfants déplacés voient un nouveau domaine, l'observe, en attendant le retour des adultes dispensateur d'une quiète paresse pour le lendemain. On ne sait pas si au final les enfants se seront appropriés les lieux, probablement une autre histoire... un autre jour...

   Acratopege   
4/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Jolie tranche de vie marginale et "buissonnière", superbement écrite: simplicité, élégance, bon goût. La narration qui alterne du "je" au "nous" ajoute une pointe de mystère à ce qui ressemble plus à une description qu'à un récit. J'ai bien aimé l'idée de la nostalgie de l'urbain et de la crainte de la nature, qui va à l'encontre des clichés habituels du "retour à la nature". Cela m'a évoqué le film de J.M. Ribbes, "Musée haut, musée bas", qui décrit le combat de l'Art contre l'invasion du naturel.
Sinon, je rejoins l'avis d'autres commentateurs: votre texte est beaucoup trop court pour son propos, comme si vous proposiez dans notre assiette une tranche de truffe si mince qu'on verrait à travers. Et le choix de l'imparfait n'arrange pas les choses, car il suscite l'attente d'un "après" qui ne vient jamais. A ce propos, il me semble voir un petit problème de concordance des temps dans le premier paragraphe avec la phrase "En ville je me sentais bien"...mais c'est une impression toute subjective.
A partir de votre "matériel" - la famille émigrée à la campagne, les parents fêtards, la complicité du frère et de la sœur (pour moi il ne peut s'agir que d'une narratrice, même si je n'ai trouvé aucun signe objectif pour l'attester...) - il y a de quoi écrire un roman. C'est dire la richesse de ce petit joyau!

   Perle-Hingaud   
5/1/2015

   widjet   
5/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien
Assez d’accord, le texte se suffit à lui-même (comme il pourrait être le début d’un roman).

Les fidèles lecteurs de Perle retrouveront dans ce condensé les thèmes chers à l’auteur, l’aventure, l’évasion…Personnellement, j’ai pensé à ce film de Rob Reiner (tiré d’une nouvelle de Stephen King) « Stand by me », cet ode à l’enfance, à l’amitié (même si ici, il est plutôt question de fraternité) et aux peurs enfantines et ancestrales qui nous parlent à tous (le monstre dans la forêt, ici « les yeux jaunes »).

Cela se lit sans encombre et avec un plaisir certain, le style est agréable même si Perle « virgulise » à mort (mais cela laisse le temps de respirer, j’allais dire de « humer » chaque phrase à l'instar de l'herbe, la nature dont il est fait l'hommage).

On peut aussi voir dans ce récit une seconde lecture (j’ignore si cette dernière est volontaire), plus sociale, plus actuelle aussi avec cette quête d’eldorado, ce rêve que font des millions de gens qui recherchent (et parfois trouvent) leur bonheur dans un ailleurs…

Perle s’était fait attendre (2 ans et demi).
Bien lui en a pris.

Merci

W.

   Lunar-K   
6/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Salut Perle,

J’ai beaucoup aimé ce fragment de souvenir. L’écriture est juste, évocatrice, picturale plutôt que narrative. Et l’image en question me parle, loin des clichés d’une enfance heureuse au grand air des milieux ruraux. La campagne et la forêt apparaissent ici comme une prison dorée pour cet enfant (le narrateur), qui se contente d’observer, captif, la vie qui se poursuit au loin et emporte avec elle ce qu’il lui reste comme repères de son ancien milieu : son père et sa mère qui s’aiment lors d’une fête de village, son frère aussi, pas encore tout à fait mais bientôt sans doute, déjà si attiré par ce qui l’entoure, si familier et sans nostalgie…

Une espèce de mise en scène d’un blocage, d’une incapacité pour cet enfant à se refaire un monde, c’est-à-dire une vie, après s’être vu violemment arraché au monde de ses habitudes : monde de bitume, de murs et de panneaux publicitaires.

Il y a là, je trouve, une grande intelligence, une grande profondeur dans le regard que tu accordes à la situation de cet enfant, à son malaise… Non pas simplement papa-maman qui l’abandonnent, mais bien tout un univers qu’il ne parvient pas ou plus à appréhender avec et en eux, de même qu'un autre qu'il ne parvient pas à fuir alors qu'eux l'ont déjà quitté.

Un très beau texte je trouve. La forme du fragment te convient à merveille.

Au plaisir de lire le prochain !

Lunar-K

   Deorune   
6/1/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Ce texte me rappelle ma maison de campagne quand j'étais jeune enfant. Joliment écris et me rappelle les nuit a chasser les hanneton a l'aide d'une raquette qui volaient tout autour de la maison.

   senglar   
7/1/2015
 a aimé ce texte 
Bien ↓
C'est beau, odorant et tactile ! Peut-être des parents un peu égoïstes ? Suffisamment en tout cas pour que la fillette n'ait pas oublié la ville...
Elle doit être une fan de Bohringer !

Trop ou pas assez d'oiseau(x) de nuit, je n'ai pas ouï le grand-duc. Sans doute la châtaigne de l'arbre ?

Brabant

   Coline-Dé   
18/2/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Voilà du Perle en court ! Une nouveauté ! Quand je pense que tu prétends ne pas savoir faire court... menteuse !
C'est un petit bijou plein d'ellipses qui donnent du "champ" à ce qui est dit et ça j'adore !

   jaimme   
18/3/2015
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Douce chronique. En pointillée la vie: l'arrachement, l'exclusion (même de la part des parents centrés sur leur amour; mais qui les cherchent quand même à s'en arracher la voix _ ils ont dû partir du mauvais côté, non?), l'école oubliée...
Tu as su, Perle, en très peu de mots, me faire voyager, dans l'espace,le temps et dans l'altérité puisque je n'ai pas connu cette expérience.
Ma première lecture (oui, je sais, il y a déjà plusieurs semaines) m'avais laissé le goût-amer de l'émerveillement et de l’insatisfaction (trop court). La relecture, doucement, a pleinement rempli son rôle: chapeau, c'est beau.
Pas grand chose à redire. Juste la ponctuation de cette phrase: "Nos regards se noyaient dans le vert, à perte de vue les arbres, la magie sombre, l’inextricable contenu par un rempart farouche, le fleuve, ses roulis et tangages fatals à nos bateaux de papier, à nos coques de noix d’aventuriers." J'aurais plutôt vu: "Nos regards se noyaient dans le vert. A perte de vue les arbres, la magie sombre. L’inextricable contenu, par un rempart farouche. Le fleuve, ses roulis et tangages fatals à nos bateaux de papier, à nos coques de noix d’aventuriers." Par ailleurs tu sais que je privilégie les phrases courtes, je trouve qu'on en apprécie plus le contenu. Bref, t'en fais ce que tu veux. Comme d'hab'
Super, t'es forte aussi dans le court!

   Anonyme   
27/7/2015
Bonjour !

La mélancolie de l'imparfait transforme les détails en lignes essentielles. Les frontières de l'enfance en restent floues (comme il se doit).

Pour un poème en prose, vous auriez pu éviter la répétition de "gris" et de jardinet/jardinières & que les enfants baissent la tête sans raison semble poser un problème sans résolution.

   Belle-Helene   
24/1/2016
Ce texte nous met dans un univers plutôt serein et reposant; très agréable, on sent le rêve et le souvenir. Pourtant, je trouve le texte trop court par rapport aux événements qu'il raconte; je pense qu'il aurait pu être rallongé par un ou d'autres souvenirs.

   Anonyme   
24/1/2016
Comment dire ? Si le texte peut être perçu comme se suffisant à lui-même, dans ce format-là, ça me semble peu probable. Ici tout est descriptif, presque anecdotique, à l'arrivée on ne retient pas grand chose, sinon que ce déménagement de l'urbain vers le rural est mal vécu, sinon que les parents se démontre un amour très/trop grand. Et ce que l'on retient devrait suffire. Il y a ici trop de souvenirs pour une si petite boîte. Le format très court répond à des règles, qui, certes peuvent être contournées et transgressées, les règles sont faites pour ça, mais là, j'ai l'impression de la boîte à chaussures dans laquelle les photos de souvenirs et de jeunesse sont trop nombreuses et on peut pas refermer le couvercle. Somme toute, on dira que ça fait désordre. J'ai peut-être trop lu les Microfictions de Jauffret ou La première gorgée de bière de Delerm. Pour moi, malgré des qualités rédactionnelles qui peuvent plaire, ça n'a pas fonctionné.

   Anonyme   
2/11/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
j'aime les narrations quand elles vous immergent, ça c'est du voyage ! Et bien mission accomplie. Je pourrais ajouter que les ressentis de l'enfance sont magistralement rendus, il fut un temps les parents étaient des sortes de Dieu plus lointains que proches. Quand au changement il n'y a pas que les enfants qui en ont horreur et pourtant il n'y a de continuité que dans le changement...
Merci pour ce partage qui dit bien des choses.

   Pouet   
2/11/2016
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bjr,

Je profite de "l'exhumation" de cette nouvelle pour la lire et donc la commenter. Elle est très courte, cela me va très bien...

Malgré la concision du texte donc, il y a pas mal de choses ici. Le "déracinement" (peut-être symbolisé par l'arbre sur lequel grimpe les enfants), "l'onirisme" de l'enfance et des parents qui semblent un peu sortir de l'ordinaire, la complicité du narrateur ou narratrice (on ne sait pas, à moins que j'ai loupé quelque chose) avec son frère Tim et cette histoire de "branches", le regard opposé...

J'aime l'écriture, je ne vais pas tout relever mais cette phrase par exemple me semble vraiment bien tenue, beaucoup de choses y sont exprimées avec délicatesse et poésie:

"Nos regards se noyaient dans le vert, à perte de vue les arbres, la magie sombre, l’inextricable contenu par un rempart farouche, le fleuve, ses roulis et tangages fatals à nos bateaux de papier, à nos coques de noix d’aventuriers."

Au final un texte que j'ai pris plaisir à lire.


Oniris Copyright © 2007-2023