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Policier/Noir/Thriller
rosebud : In sæcula sæculorum
 Publié le 14/01/20  -  23 commentaires  -  4707 caractères  -  185 lectures    Autres textes du même auteur

Cours ! La misère est derrière toi.


In sæcula sæculorum


Pauvreté n’est pas vice. Tu parles !

Je suis née en 1956 dans les bidonvilles de Nanterre. Celle qui a pris un départ dans la vie aussi lamentable que celui-là sait ce que pauvreté veut dire. Mes parents déjà affligés de trois enfants ne m’ont pas pris plus en considération qu’une soupe froide. Mon père abruti par l’alcool et ma mère par l’oisiveté et les coups nous ignoraient à peu près. Nous étions comparables à des petits animaux qui encombraient leur cahute branlante.

J’ai eu une scolarité que l’on pourrait qualifier de subsidiaire, mais j’étais parvenue à lire, écrire et compter, ayant assez de jugeote pour comprendre rapidement que cela me serait sans doute utile dans ce milieu où plus de la moitié des résidents étaient complètement analphabètes. Dès dix ans j’offrais mes services pour déchiffrer un papier administratif, ou jouer à l’expert-comptable, moyennant une pièce que je cachais dans le ballast de la voie de chemin de fer qui jouxtait notre jungle.

Le jour de mes douze ans, mon frère aîné m’a chopée dans un coin de la baraque et a commencé à me peloter. Je lui ai croqué le majeur entre la deuxième et la troisième phalange. Ça l’a comme électrocuté. Il est parti à la renverse et s’est presque assommé contre le touret de câble qui nous servait de table. Il piaulait comme un chiot en serrant sa main sur sa poitrine, la moitié de son doigt pendant comme le moignon du cordon ombilical avant sa chute définitive. Pour faire bonne mesure, je lui ai botté le cul si fort qu’il s’est recogné un bon coup et il s’est évanoui. Le mâle alpha avait changé de statut. Il n’a jamais plus tenté de lever ses sales pattes sur moi.

Je prenais du champ. Je taillais la route de plus en plus souvent. Mon père parvenu au stade de zombie à temps complet, c’est ma mère qui, me voyant sortir, me questionnait avec hargne :


– Où tu vas ?

– Faire la manche.


À ses yeux, c’était un prétexte recevable. Mais, revenant les mains vides, elle me traitait de traînée et de bonne à rien. Si elle s’imaginait que je lui aurais fait profiter de mes talents de tapeuse, elle se mettait le doigt dans l’œil. De toute façon, je ne mendiais pas – j’avais mieux à faire. Je fréquentais une bande de jeunes rupins rive droite qui avaient assez peu de cervelle pour trouver très chics mes fringues Emmaüs que je revisitais à grands coups de strass et de chaînes dorées. J’étais une punkette avant l'heure. Mes petits seins qui jappent à la lune et le brugnon de mon derrière faisaient le reste.

J’ai fait la connaissance de Gaëtan. Si la pauvreté est héréditaire, la richesse ne l’est pas moins. Gaëtan profitait largement de la fortune océanique de son père qu’il aurait pu tenter de dilapider sans succès in sæcula sæculorum.

Gaëtan était beau gosse, pervers comme un ange déchu et con comme un balai. Il se droguait pas mal aussi. Il passait son temps à tenter de me convaincre de goûter à ses saloperies en me faisant miroiter que la qualité de nos rapports s’en trouverait surmultipliée. Mais moi, je ne mangeais pas de ce pain-là. J’étais déraisonnable et méchante, mais j’étais lucide. Après l’amour, il se vautrait à mes pieds en pleurnichant et, laissant de dégoûtantes traces blanches de morve et de cocaïne mêlées, voulait que j’en prenne et qu’on remette ça. J’étais inflexible. Je le repoussais du talon.

Lors d’une de ces soirées incontrôlables qu’il avait organisée dans le vaste appartement de ses parents absents pour une semaine de ski à Gstaad, Gaëtan avait absorbé tout un tas de cochonneries qui l’avaient mis dans un état de surexcitation indescriptible. Les invités avaient fini par s’évaporer, mais Gaëtan poursuivait son nuage délirant.


– Viens, on va s’envoler !

– Envole-toi d’abord, je te rejoins.


Je n’avais pas fini de me déshabiller que j’ai entendu Gaëtan gueuler : « Banzaï ! »

Il avait sauté par-dessus la rambarde du balcon avant de s’émietter sur le béton, cinq étages plus bas. J’ai téléphoné aux flics. Je préférais prendre les devants. J’ai ramassé tout l’argent liquide qui traînait dans l’appartement avant leur arrivée. Ils m’ont interrogée, surpris de ne pas me trouver la moindre trace de stupéfiant dans le sang, à peine quelques milligrammes d’alcool, souvenir de deux tequilas avalées en début de soirée.


– Vous semblez blanche comme neige, mademoiselle ! me souffla l’inspecteur sans parvenir à réprimer un fou rire. Il était content de son bon mot, ce crétin.


Ils ont conclu raisonnablement à un suicide.

J’ai repris contact avec une copine qui rôdaillait avec une bande de branleurs argentés et j’ai intégré cette nouvelle troupe. Je pressentais déjà que la misère n’avait pas fini de me courir après. Qu’elle crève !


 
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   poldutor   
14/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour
"Noir c'est noir, il n'y a plus d'espoir"
Horrible et magnifique nouvelle, la misère à l'état pur, j'espère que l'auteure n'en est que la narratrice...
Le vocabulaire employé est très vrai, les personnages crédibles.
J'ai relevé une phrase qui m'a bien amusé :
"mes petits seins qui jappent à la lune et le brugnon de mon derrière faisaient le reste".
Succulent.(si j'ose dire!)
Bravo.
Cordialement.
poldutor en E.L

   cherbiacuespe   
14/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Tranche de vie. Bien triste cette enfance qui me rappelle également (je suis né en 63) que tout n'était pas rose dans mon quartier. La différence, c'est que nous ne nous sommes jamais rendu compte de notre pauvreté. Alors, on croyait bêtement que les pauvres, c'étaient les autres. Lesquels? Ben, les autres quoi!

C'est raconté comme une confession au cours d'une conversation intime, devant un café. Le ton y est. La colère, le ressentiment aussi, le manque de tout. Et la rage de vivre, d'aller chercher ce qui manque là où on peut le trouver : "chez les bourges". Et cette vie sans avenir visible, sauf la crasse et les cons. On y est, oui. Pas de problème pour moi, C'est écrit avec la colère des souvenirs et l'envie de cogner sur ce destin injuste.

Cherbi Acuspè
en EL

   Sylvaine   
15/12/2019
 a aimé ce texte 
Bien
Tranche de vie plutôt convaincante dans son réalisme sordide. Le style, agressif, avec juste ce qu'il faut de familiarités voulues, accroche efficacement le lecteur. La personnalité de la narratrice aussi, avec son cynisme et son intelligence sans illusion. J'ai noté des images pittoresques et bien venues, comme "mes petits seins qui jappent à la lune ou "le brugnon de mon derrière. " En revanche, "si elle s'imaginait que je lui aurais fait profiter" comporte une faute de langue qui elle, est sans doute involontaire. Il faudrait "si elle s'imaginait que je l'aurais."
La fin m'a un peu déçue. Je l'aurais aimée plus percutante. Le "Qu'elle crève" a un petit goût d'inachevé. On a l'impression que l'auteur n'a pas vraiment su terminer sa nouvelle, qui tourne court.

   Corto   
19/12/2019
 a aimé ce texte 
Bien ↑
C'est court, précis, crédible, très efficace.

Le cadre et l'ambiance des bidonvilles de Nanterre à cette époque sont bien rendus. Rappelons-nous que c'est seulement deux ans plus tôt, en février 1954 que l'Abbé Pierre avait lancé son appel "Mes amis, au secours... Une femme vient de mourir gelée, cette nuit à trois heures, sur le trottoir du boulevard Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel, avant hier, on l'avait expulsée..."

Les relations à l'intérieur de la famille sont dévoilées sans fard et sans excès.
J'ai apprécié l'expression de "mâle alpha" bien conforme à l'époque. De même pour la formule "la fortune océanique de son père qu’il aurait pu tenter de dilapider sans succès in sæcula sæculorum."

Les jeux plus ou moins interdits dans les bandes d'adolescents sont criants de vérité.
On a ici presque une étude historico sociologique tout à fait conforme à ces lieux et à cette époque.

La chute de cette nouvelle est plutôt réduite, mais comme était réduit l'horizon de la jeunesse locale de l'époque.

Un effort de l'auteur pour donner plus d'ampleur à son propos aurait permis d'élever la vision et la réflexion et aider l'imagination à prolonger ce qui est décrit ici.

Merci pour cette lecture.

   plumette   
20/12/2019
 a aimé ce texte 
Bien
Pourquoi ce texte s'arrête-t-il si vite?

Voilà un personnage prometteur qui a du répondant , c'est dommage de ne pas aller au delà de ce début de vie et si j'en crois votre plume vous ne devriez pas manquer d'imagination pour la suite des péripéties.

La chute est assez spectaculaire, mais je suis une lectrice qui reste sur sa faim!

allez, une suite, SVP

Plumette

   Anonyme   
23/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

D'un réalisme cinglant, un style efficace.

La seconde phrase m'a posée problème. "Celle" me semble être Nanterre ? Ou la narratrice ? Qui est celui-là ? Le bidonville ?
Le trait peut paraître forcé dans la description des parents, la suite du récit le justifie, cependant.

J'ai aimé le titre "savant", le style mêlant les mots familiers (connus, entendus depuis l'enfance de la narratrice) aux tournures plus élaborées (reflétant le chemin parcouru par cette même narratrice).
J'ai aimé, tout au long du récit la froideur, le détachement, la force de l'héroïne.
L'humour n'est pas loin, c'est un plus.
La chute de l'histoire est sobre, en harmonie avec le texte et très percutante.
En filigrane, une évocation très réaliste de la ville, de ses habitants selon le côté du fleuve où ils sont nés.

Une réussite, à mes yeux,
Merci du partage.
Éclaircie

   Donaldo75   
24/12/2019
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Bonjour,

Je tente le commentaire au fil de l’eau.

Dès le début, ce texte tape fort. L’exergue prévenait déjà bien le lecteur mais l’auteur en remet une couche avec sa première phrase.

« Pauvreté n’est pas vice. Tu parles ! »

Le style est alerte ; les anecdotes sont bien racontées, presque picaresques et pourtant empreintes d’une réalité sociale désespérante.

« - Où Tu vas ?
- Faire la manche.
A ses yeux, c’était un prétexte recevable. »

C’est juste grandiose dans la description du milieu social. Et la phrase qui suit en rajoute une couche, même si elle tape nettement moins fort au niveau stylistique.

Ce texte est très court mais dense. Certes, des lecteurs risquent de trouver qu’il manque un développement mais pourquoi développer ? Tout est dit, je trouve.

Un grand bravo !

   maria   
14/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour Rosebud,

Un récit terrifiant, d'une adolescente dont la vie a commencé dans le chaos et pour qui l'avenir s'annonce incertain, voire dangereux.
Elle se croit forte, invincible et refuse la misère comme fatalité. Peut-elle connaître pire de ce qu'elle a vécu ?
Mais, elle est si fragile. Sa seule liberté, c'est de choisir la nouvelle bande qu'elle va intégrer !
Je regrette que tu n'aies pas développé avec la même poigne dans les propos et la même justesse d'écriture.
Elle est née en 1956. D'autres ont vécu ou vivent une histoire similaire. La pauvreté et ses conséquences sont indémodables.

Sais tu ce qu'elle est devenue ?

   emju   
14/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Tous les ingrédients sont présents dans cette nouvelle que j"ai pris plaisir à lire ; la pauvreté, l"alcool, l"oisiveté, le sexe. Le récit est court, vif et tranchant. Le titre (pour toujours) n'est pas en adéquation avec la narration ; message que l"auteur(e) veut faire passer dans sa fuite et sa quête d"un autre monde celui des nantis. C"est une grande déception puisque qu"elle y découvre une grande misère et une pauvreté des moeurs. En vous lisant j"ai pensé au film "Affreux, sales et méchants" de Ettore Scola. Merci pour le partage.

   Anonyme   
14/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour

Une nouvelle aussi courte que réaliste comme je les aime.
Ah Nanterre, j'y suis allé 2 ou 3 fois en stage pour le boulot,
c'était déjà quelque chose, il y a une trentaine d'années, ça n'a pas
dû s'améliorer.
Beaucoup d'humour qui fait froid dans le dos mais c'est malheureusement tellement vrai.
J'aime bien le touret de câble comme table de cuisine et ça se prête
bien à cette fonction.

La naissance donne une place au soleil, il n'y a rien de changer
depuis des lustres.

   Anonyme   
14/1/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
Bonjour rosebud,

Il faut cinq minutes à peine pour la lecture, mais alors cinq minutes d'un petit bonheur pas du tout dégueu.

L'écriture est vive et jubilatoire. Ah, que j'aime la scène où la petite miss croque le majeur du frérot ! Elle n'a pas froid aux yeux, et il y a beaucoup de plaisir à la suivre dans sa dégaine de punkette strassée en fringues d'Emmaüs...

On devine qu'elle a tous les atouts en poche pour s'en sortir dans la vie, et ça aussi, j'adore !

Merci infiniment pour le partage.

A vous lire encore...


Cat

   papipoete   
14/1/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
bonjour rosebud
allez, 4700 caractères, ça peut se lire jusqu'à la fin sans oublier le début de l'histoire ! Et franchement, votre récit put en comporter le double, que je l'aurais lu avec plaisir !
Cette nana à la sauce " Groseille ", qui fait la nique à son auguste famille, et sans perdre le nord dans un rail de coke, me plaît beaucoup !
Comme dirait l'autre " elle en a... " et depuis son frère ainé qui croyait profiter d'Elle, jusqu'aux rupins des beaux quartiers qui pensaient l'embringuer, elle gagne sur tous les fronts !
NB c'est écrit dans un vocabulaire " zonant ", mais presque tendre dans la bouche de l'héroïne, et on voudrait retenir ses formules " le mâle alpha avait changé de statut "... " mes petits seins qui jappent à la lune... "
Tout est si vrai, tout est si croquignolesque ; on oublie le sordide de l'histoire, et tel face au méchant bandit, on crie des " bien fait pour toi ! "
le titre latin qui me ramène quelques décennies en arrière, fait passer sous mon nez des volutes d'encens...Je suis sûr que " l'abbé Gilbert " raffolerait de votre texte !

   tatanlongi   
15/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
j'aime le texte. mais je déteste le gout d'inachevé qu'il me laisse. c'est vrai que c'est un truc de nouvelles de laisse parfois le lecteur pantois, mais là je me dis qu'il y avait peut-être matière à nous enfoncer davantage dans le quotidien sordide mais à la fois bêtement humain de cette fille.

   Vincente   
15/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↓
Le ton de cette nouvelle colle vraiment bien avec la gouaille têtue de la narratrice, de même que le rythme déterminé allant droit au but de sa pensée assez brute. Cette bonne adéquation appuie l'impression d'authenticité du récit qui, dans son écriture bien foutue, se lit dans une implication très accueillie. La narration n'hésite pas, le texte est court mais l'essentiel y est, l'auteur ne tourne pas en rond autour de son évocation.

Ainsi l'on comprendra sans gêne que l'origine difficile de "l'anti-héroïne" (excusez le double sens qui s'est imposé à moi), qui choisit de rester "clean" envers et contre tout, la sauvera d'une fin prématurée. La morale déclare par cette fin excellente que la bataille contre la misère matérielle trouvera longtemps encore, " in sæcula sæculorum ", ce genre de personnage iconoclaste plein d'énergie pour tenter de s'en départir.

J'ai aimé ce que propose cette écriture, dont cette façon sans ambages d'aborder sobrement un propos qui pourrait vite pencher vers quelque mélo-démagogie.

   Anonyme   
15/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
Bonjour,

J'ai eu plaisir à lire cette nouvelle, plaisir avant tout procuré par la voix de la narratrice à laquelle vous avez su donner une épaisseur.

Anesthésiant sa souffrance, elle sait se munir de toutes les armes de défense et notamment l'intelligence, le détachement et la distanciation ironique en témoignent les nombreuses comparaisons comico-burlesques.
Se protéger devient une évidence puisqu'il est question ici de survie.

   Louison   
15/1/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup ↑
Le texte est bref et pourtant tout y est. Les détails sont précis, distillés sans manière, votre punkette est tout à fait crédible et même si la chute (c'est le cas de le dire...) est un peu rapide, j'ai aimé ce texte et votre personnage.

Merci pour cette lecture plaisante.

   Pouet   
16/1/2020
 a aimé ce texte 
Bien
slt,

un texte court qui se lit bien, c'est déjà beaucoup.

Je trouve que cela peine un peu à se jouer du manichéisme sans rien enlever à la crédibilié, la réalité étant souvent très manichéeenne.

Ici l'héroine désoeuvrée est rusée, le daron alcolo, le frangin entreprenant, la chère mère "aveugle" si ce n'est complice et les richards qu'elle côtoie cons comme des balais, le flic aussi. cqfd

Bien aimé la "scolarité subsidiaire", le "brugnon du derrière", le "banzai" assez marrant... Entre autre.

Pas trop fan du titre ni de son emploi dans le coeur du texte, ça jure, pas dans le bon sens à mon goût.

Certaines expressions aussi un peu faciles comme par exemple "lever ses sales pattes sur moi", on peut faire mieux, je pense.

Au final, un texte court qui se lit bien, c'est déjà beaucoup.

(Un léger parfum de "my absolute darling".)

   hersen   
16/1/2020
 a aimé ce texte 
Bien ↑
J'aurais préféré que toute l'intelligence disponible pour ce texte ne soit pas concentrée sur un seul personnage. haut en couleurs, je vous l'accorde.
Je comprends bien sûr la démarche "d'isoler" le personnage principal pour lui donner plus de corps.
Mais je n'adhère pas pour autant que sur, mettons dix personnages, un seul ne soit pas débile.
Quelque part, il me manque de la subtilité. On peut s'étonner qu'elle s'en sorte si bien, qu'elle ait sa propre morale et garde-fou. Où a-t-elle été chercher tout ça ?

Pour que l'histoire fonctionne, à mon avis, il manque un répondant. Qui pourrait être issu de son milieu ou du milieu d'en face, chez les riches (à ce propos d'ailleurs, je trouve ce monde décrit très binaire, les grands absents du milieu, y en a pas)
Un répondant, donc, qui pourrait nous faire comprendre, par leurs échanges, pourquoi elle et pas les autres ? pourquoi ses copines de taudis qui se font agresser par leur frère ne leur bouffe pas le doigt ? Pourquoi les mères sont toutes comme la sienne ? Car c'est ce que l'on comprend, qu'elle est l'unique.

Ceci dit, je ne vais pas mentir, j'ai eu du plaisir à lire cette histoire. c'est bien écrit, c'est dynamique.
Finalement, on dirait une BD.

merci pour la lecture !

   Malitorne   
18/1/2020
 a aimé ce texte 
Un peu
Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans cette histoire et la rend irrecevable. C’est le style employé, le vocabulaire, au regard du manque d’éducation souligné au début. On a l’impression que quelqu’un d’autre s’exprime et raconte la vie de cette jeune femme à sa place.
Je cite pêle-mêle « leur cahute branlante, qualifier de subsidiaire, prétexte recevable, fortune océanique, etc. » Il y a tout un tas de mots et d’expressions qui ne peuvent correspondre au milieu social d’où sort le personnage, ses lacune éducatives. Pour remédier à ça vous avez tenté d’introduire de l’argot mais on sent bien que c’est bancal. Il aurait fallu, à mon sens, davantage de rigueur pour garder un niveau d’expression à la hauteur de la misère évoquée. En fait vous n'êtes pas parvenu à vous éclipser totalement derrière votre personnage.

   farigoulette   
18/1/2020
 a aimé ce texte 
Pas
Tous les clichés sur la pauvreté sont ennonces.
Héréditaire la pauvreté ou la richesse? Des exemples prouvent le contraire.
La véritable misère dans cette histoire, je la trouve dans le choix que fait l'héroïne d'intégrer une bande de branleurs argentés. Comme quoi l'accès à l'argent est tout aussi porteur de vices que son absence.
A dix ans, elle joue a l'expert comptable, se montre maligne et debrouilarde, de belles capacites qu'elle aurait pu exploiter pour une vie meilleure.

   thierry   
18/1/2020
 a aimé ce texte 
Un peu
J'ai l'impression d'avoir sous les yeux un bel objet mal construit.
C'est assez paradoxal. Je ne crois pas vraiment à ce personnage fait d'intelligence comme de ruse, de cynisme comme de sens de l'urgence. Il lui manque une véritable histoire. Cette fille me rappelle l'héroïne de ce romancier suédois qui, lui, a mis trois ou quatre livres pour la décrire quand vous la trouvez en vingt lignes.
Voilà ce qui marche : ce sens de la liberté, dans le ton, qui correspond très bien au personnage. Le vocabulaire ne colle pas au milieu social, certes, mais tant pis, la liberté prime. Elle offre de belles images de-ci de-là, j'aime beaucoup la "fortune océanique".
Il y a deux séquences distinctes : chez les pauvres, chez les riches, sans y voir d'unité. Les clichés ne sont pas loin.
En fait, je crois qu'on est sur le début d'un roman plus que sur une nouvelle. Je m'attends à une histoire au long court. Le personnage, l'ambiance, le style, tous les feux sont au vert. DOnc "juste fais le" !

   GillesP   
19/1/2020
 a aimé ce texte 
Passionnément
J'ai adoré! Le style, principalement. Ce détachement dont fait preuve la narratrice vis-à-vis des horreurs qu'elle raconte. Les phrases claquent, sonnent, avec un mélange de mots familiers et de tournures littéraires qui m'ont enchanté. Je pourrais en citer, mais j'ai peur de recopier votre texte in extenso.

Le contenu aussi, j'ai aimé. Parce que c'est volontairement méchant, aux antipodes du politiquement correct qui voudrait qu'on associe forcément, dans la veine hugolienne, la pauvreté et la bonté. Je comprends que certains lecteurs puissent être heurtés par le lien que vous faites entre misère sociale et misère morale. Mais on pourrait aussi dire qu'il n'y a pas de raison de considérer que tous ceux qui souffrent sont forcément des personnes ayant par essence un bon cœur. On peut être riche et mauvais, mais aussi pauvre et mauvais. Je pense au premier livre d'Edouard Louis, En Finir avec Eddy Bellegueule, qui dresse un tableau sans concession du milieu social dans lequel il a grandi.

Bien sûr, on pourrait vous reprocher de ne pas être très réaliste, votre narratrice utilisant un style pour se raconter peu probable. Encore que ce serait encore un autre cliché que de considérer qu'une origine sociale populaire serait rédhibitoire pour bien écrire. J'ai connu des gens au parcours socio-culturel chaotique et qui, pourtant, usaient à l'envi de formules imagées et hautes en couleurs.

Bravo pour ce texte qui, personnellement, malgré la noirceur de son contenu, m'a fait rire par son style et le détachement dont fait preuve la narratrice.

Au plaisir de vous relire.
GillesP

PS: moi aussi, j'ai adoré les microfictions de Jauffret.

   solane   
14/2/2020
 a aimé ce texte 
Beaucoup
"Pauvreté n'est pas vice, "mais c'est bien plus pire" dit la plaisante sagesse lyonnaise.
Ce récit d'une enfance misérable, bien construit et très réaliste nous tient en haleine jusqu'à la fin, ou plutôt jusqu'au bout puisqu'il n'y a pas de fin comme l'indique le titre. Il attise notre mauvaise conscience de gens heureux, et nous fait relativiser nos ennuis.
L'auteure a choisi d'écrire à la première personne, c'est donc un récit autobiographique, mais une personne qui écrit si bien n'est sans doute pas restée toute sa vie dans son bidonville, et un évènement l'a sans doute tirée de là. Voilà pourquoi on reste sur sa faim, et ce texte est en fait le premier chapitre d'un roman dont on aimerait lire la suite. Peut-être l'écrirez-vous, on l'espère car ce début est très prometteur.


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